COUR D'APPEL DE REIMS CHAMBRE CIVILE - 1 º SECTION ARRET DU 08 JANVIER 2007 APPELANTE :. d'un jugement rendu le 07 Janvier 2000 par le Tribunal de Grande Instance de CHARLEVILLE-MEZIERES, Madame Yvette A...... 08000 CHARLEVILLE-MEZIERES COMPARANT, concluant par la SCP THOMA-LE RUNIGO-DELAVEAU-GAUDEAUX avoués à la Cour, et ayant pour conseil la SCP MANIL-MANIL, avocats au barreau dé CHARLEVILLE MEZIERES, INTIMES : Monsieur Yves Y... M... 08000 CHARLEVILLE-MEZIERES Société d'Assurances RHODIA ASSURANCES-prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés de droit au siège social-129, rue Servient 69431 LYON CEDEX 03 COMPARANT, concluant par la SCP GENET-BRAIBANT, avoués à la Cour, et ayant pour conseil la SCP DELGENES VAUCOIS JUSTINE DELGENES, avocats au barreau de CHARLEVILLE MEZIERES. Mutuelle Santé des Indépendants-M. S. I.- venant aux droits de la M. A. T. I.- prise en la personne de son représentant légal domicilié de droit au siège social-1, place Jean de Mauroy 10070 TROYES N'AYANT PAS CONSTITUE AVOUE, bien que régulièrement assingée COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DEBATS ET DU DELIBERE : Madame BRETON, Conseiller Monsieur CIRET, Conseiller Madame MATHIEU, Conseiller GREFFIER : Madame Maryline THOMAS, Greffier lors des débats et du prononcé, DEBATS : A l'audience publique du 06 Novembre 2006, oÿ l'affaire a été mise en délibéré au 08 Janvier 2007, ARRET : Prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Nouveau Code de Procédure Civile, signé par Madame MATHIEU, Conseiller, et Madame THOMAS, Greffier, auquel la minute de la décision lui a été remise par le magistrat signataire ARRET N º du 08 janvier 2007 R. G : 05 / 01493 A... c / Y... Société d'Assurances RHODIA ASSURANCES M. S. I.
EXPOSE DU LITIGE Madame Yvette A... a, le 20 juin 1991, été blessée dans un accident de la circulation survenu à CHARLEVILLES MEZIERES dont Monsieur Yves Y..., ayant heurté à l'arrière le véhicule dont elle était la passagère, a été déclaré entièrement responsable des blessures subies par celle-ci (traumatisme cervical par brusque mouvement de flexion extension et une contusion lombaire, sans lésion osseuse ou discale), suivant jugement du Tribunal de Grande Instance de CHARLEVILLE-MEZIERES du 16 février 1996. Par jugement du 7 janvier 2000, le Tribunal de Grande Instance de CHARLEVILLE-MEZIERES a :- vu le rapport du docteur Z... du 18 juin 1996, fixé à la somme de 152. 000 francs le préjudice résiduel de Madame A..., déduction faite des indemnités provisionnelles versées à hauteur de 68. 000 francs,- ordonné l'exécution provisoire, débouté Madame A... en ses autres demandes, déclaré le jugement opposable à la MATI,- condamné Monsieur Y... et la SA RHODIA ASSURANCES, assureur de ce dernier, aux dépens. Dans ce jugement, le Tribunal susvisé a fixé :- la date de consolidation au 31 décembre 1992,- les frais restés à charges à la somme de 10. 000 francs,- l'ITT à 100. 000 francs,- I'IPP à 80. 000 francs,- le pretium doloris à 25. 000 francs,- le préjudice d'agrément à 5. 000 francs. Madame A... a interjeté appel de ce jugement le 4 février 2000. Par arrêt du 31 mai 2001, réputé contradictoire, avant dire droit, au fond, auquel il convient de se reporter pour l'exposé des faits, de la procédure, des prétentions et moyens des parties, la Cour de céans, a :- ordonné une nouvelle expertise médicale confiée au docteur Alain B..., désigné Monsieur Serge C... en qualité d'expert-comptable,- sursis à statuer sur l'ensemble des demandes,- enjoint à Madame A... d'appeler le Groupe des Mutuelles Accord (GMA) en déclaration de jugement commun,- déclaré le présent arrêt commun à la Mutuelle Santé des Indépendants (MSI), venant aux droits de la MATI. Le docteur B... a rédigé son rapport le 13 décembre 2001 et Monsieur C... le 8 avril 2003.
Aux termes de son rapport, le docteur B... conclut : L'ACCIDENT dont a été victime le 21 juin 1991 Madame Yvette A... a eu conséquences suivantes 1 7- LES BLESSURES ont consisté en un traumatisme cervical par brusque mouvement de flexion-extension et une contusion lombaire, sans lésion osseuse ou discale. L'évolution a été marquée par l'apparition de manifestations sciatalgiques et de névralgies cervico-brachiales gauches, sans signe objectif d'atteinte neurologique tant dans le territoire des nerfs sciatiques qu'au membre supérieur gauche. 2 7- Le délai normal d'arrêt total d'activités compte-tenu des lésions initiales ne saurait normalement excéder deux mois mais compte-tenu de l'activité professionnelle exercée, on peut considérer comme acceptables les arrêts de travail observés du 20 juin 1991 au 22 juin 1992, à savoir 216 jours d'INCAPACITÉ TEMPORAIRE TOTALE et 109 jours d'INCAPACITÉ TEMPORAIRE PARTIELLE à 50 %. 3 7- LA DATE DE CONSOLIDATION peut être fixée au 23 juin 1992. 4 0 /- Il persiste une INCAPACITÉ PERMANENTE PARTIELLE que l'on peut chiffrer à un taux maximal de 8 % (HUIT POUR CENT), les séquelles alléguées ne comportant en fait aucune anomalie objective véritablement significative et témoignant en fait d'une surcharge fonctionnelle majeure en rapport avec un terrain névrotique indépendant de l'accident. 5 7- Les séquelles ne sauraient empêcher la blessée de poursuivre son ACTIVITÉ PROFESSIONNELLE et notamment l'enseignement de la conduite de véhicules automobiles, ce qu'elle fait d'ailleurs. Elles ne justifient ni RECONVERSION, ni assistance d'une TIERCE PERSONNE. Elles ne sauraient empêcher réellement la blessée de se livrer à ses ACTIVITÉS SPORTIVES OU D'AGRÉMENT antérieures à l'accident. 67- L'état de la patiente ne paraît guère susceptible d'amélioration compte-tenu de l'évolution des manifestations fonctionnelles depuis plus de 10 ans, ce qui est en faveur d'une névrose " fixée ". 7 %- LES SOUFFRANCES endurées peuvent être cotées 3 / 7. 80 / Il n'y a pas lieu de retenir de SEQUELLES ESTHETIQUE.
Aux termes de ses dernières écritures déposées le 17 mai 2005, Madame A... demande à la Cour de fixer ses postes de préjudice subis comme suit : préjudice soumis à recours : 333. 171, 12 euros, préjudice personnel : 9. 909, 19 euros,- de condamner solidairement Monsieur Y... et la SA RHODIA ASSURANCES, ci-après désignée SA RHODIA, à l'indemniser de son entier préjudice en deniers ou quittance, avec intérêts au taux légal et à lui payer la somme de 6. 000 euros sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de Procédure Civile. Aux termes de leurs dernières écritures déposées le 23 novembre 2005, Monsieur Y... et la SA RHODIA concluent à l'infirmation du jugement entrepris sauf en ce qui concerne ses dispositions relatives à l'indemnisation du pretium doloris de Madame A..., au débouté de Madame A... et statuant à nouveau, demandent à la Cour de :- fixer à la date du 23 juin 1992 la date de consolidation de l'état de Madame A..., leur donner acte de ce qu'ils offrent d'indemniser le préjudice soumis à recours, selon les modalités suivantes : § frais restés à la charge de la victime 1. 070, 19 euros oITT (67. 508 francs) 10. 291. 53 euros oIPP (32. 000 francs) 4. 878, 37 euros º déduction des prestations versées par GMA (29. 120 francs) 4. 439, 32 euros, Total 11. 800, 77 euros-en conséquence, d'ordonner la restitution par Madame A... du trop perçu, soit la différence entre la somme de 23. 172, 25 euros (152. 000 francs) versée par la SA RHODIA compte tenu de l'exécution provisoire dont était assortie le jugement entrepris et la somme de 15. 612 euros, soit 7. 560, 25 euros,- condamner Madame A... à leur verser la somme de 1. 500 euros à titre d'indemnité pour frais irrépétibles ainsi qu'aux dépens.
Ils exposent que les termes du rapport d'expertise du docteur B... sont particulièrement précis, de sorte que la victime ne saurait en aucune manière tenter d'instaurer à nouveau une discussion concernant la date de consolidation de son état. Ils font valoir que les différents experts qui ont examiné Madame A... ont tous retenus un taux d'IPP de 8 % et insistent sur le fait que l'expert B... ne retient aucune incidence professionnelle, indiquant dans son rapport que Les séquelles alléguées ne comportent en fait aucune anomalie objective véritablement significative et témoignant en fait d'une surcharge fonctionnelle majeure en rapport avec un terrain névrotique indépendant de l'accident. SUR CE 1 º) Sur la réparation du préjudice subi par Yvette A... Attendu que la date de consolidation fixée au 23 juin 1992 par l'expert B... est identique à celle proposée par les docteurs E... et F... et est corroborée par les pièces versées aux débats et notamment par les doléances de Madame A..., dans la mesure oÿ postérieurement à cette date, correspondant à un examen médical, celle-ci ne démontre pas une modification substantielle de son état, et d'ailleurs de la persistance sensiblement inchangée, des manifestations fonctionnelles décrites par cette dernière ; Que par conséquent, il convient d'infirmer le jugement entrepris de ce chef et de fixer la date de consolidation, telle que retenue par le docteur B... au 23 juin 1992 ; Attendu qu'au vu du rapport d'expertise rédigé par le docteur D..., le 13 décembre 2001, ordonné par la Cour de céans, compte tenu des contradictions opposées par les parties entre les rapports médicaux établis à la demande des compagnies d'assurances et l'expertise judiciaire du docteur Z... sur lequel s'est fondé le jugement déféré, contre lequel (le rapport du docteur D...) aucune critique sérieuse et / ou probante médicalement fondée ne peut être retenue, de l'âge de la victime (51 ans au moment de l'accident et 52 au moment de la consolidation), de la situation familiale et professionnelle de la victime (mariée, mère de deux enfants, monitrice et exploitante d'auto-école), des blessures subies (traumatisme cervical par brusque mouvement de flexion extension et une contusion lombaire, sans lésion osseuse ou discale) et des séquelles en résultant, la Cour dispose des éléments d'information suffisants pour liquider le préjudice de Madame A..., née le 13 juin 1950 comme suit : A) Préjudice soumis à recours * frais médicaux et pharmaceutiques et divers restés à la charge de la victime compte tenu de la date de consolidation retenue au 23 juin 1992 1. 070, 19 euros * ITT : depuis l'accident, Madame A... a été de façon presque continue, soit en arrêt de travail à temps complet, soit à mi-temps. Toutefois, si cette dernière invoque une indemnisation de 1. 423 jours à 69 euros par jour, les éléments médicaux fournis aux débats et notamment ceux du docteur B... que la Cour retient comme acquis, laissent apparaître que lesdits arrêts ne sont pas justifiés au regard de la terminologie médico-judiciaire par les traumatismes cervical et lombaire subis, même compliqués d'une sciatalgie bilatérale ou d'une névralgie cervico-brachiale gauche sans substratum objectif. Les arrêts de travail postérieurs au rapport d'expertise seront écartés pour les mêmes motifs que ceux retenus par le docteur B... concernant le lien de causalité et la proportionnalité avec ces derniers et les blessures résultant de l'accident. Ainsi, doivent être retenus 216 jours d'arrêt à 100 % et 109 jours à 50 %, soit (216 X6 9) (1 0 9X3 4, 5) 18. 664, 50 euros IPP au taux de 8 % retenu par l'expert B... correspondant à un déficit fonctionnel, étant souligné que l'ensemble des médecins qui ont examiné Madame A... ont fixé un taux relativement modeste eu égard à l'importance des plaintes formulées par la victime et au retentissement sur sa vie professionnelle et personnelle mais aussi de l'absence d'anomalies objectives, ce qui compte tenu de l'âge de la victime porte la somme globale de ce chef à 7 680 euros * Préjudice économique : l'expert B... souligne de manière indiscutable au vu de l'évolution des doléances et de l'état de santé de la victime que AU TOTAL, l'ensemble de la symptomatologie observée témoigne d'une surcharge fonctionnelle manifeste en rapport avec une structure névrotique indépendante du traumatisme et dont témoignent notamment les phobies d'enfermement dont l'exemple le plus manifeste a été l'impossibilité d'effectuer I'IRM du fait d'une sensation d'étouffement ayant amené la patiente à demander qu'on la sorte du caisson d'examen (...) et conclut (...) Madame A... n'a nullement perdu son autonomie personnelle et n'a nul besoin d'une tierce personne pour un quelconque acte de la vie quotidienne. (...) Madame A... peut poursuivre l'exercice de sa profession notamment l'enseignement de la conduite de véhicules automobiles, ce qu'elle fait d'ailleurs, et n'a nul besoin d'une reconversion. Ainsi, l'expertise médicale ordonnée par la Cour de céans, avant dire droit, permet d'établir que l'appelante effectue une distinction entre une incapacité physiologique et une incapacité économique ; que cependant cette distinction ne s'impose qu'à partir du moment oÿ la victime établit que les pertes de revenus invoqués ou la diminution de son potentiel d'activité sont directement liées à l'accident, ce que Madame A... ne justifie pas en l'espèce. Dès lors, aucune somme n'est due de ce chef....................................... 0 euros * A déduire les prestations versées par GMA étant précisé que Madame A... n'a pas produit de document actualisé comme la Cour l'avait invitée à le faire dans son arrêt du 31 mai 2001, la somme retenue sera donc la même que celle fixée par les premiers juges, montant que prennent en compte les intimés dans leur calcul4. 439, 32 euros Soit un total de 27. 414, 69 — 4. 439, 32 = 22. 975, 37 euros Que par conséquent, il convient d'infirmer le jugement entrepris des sommes allouées au titre du préjudice soumis à recours ; B) Préjudice non soumis à recours Attendu qu'eu égard aux blessures subies décrites précédemment et en tenant compte des soins qu'elles ont nécessités et de la rééducation jusqu'à la date de la consolidation, les souffrances physiques endurées chiffrées à 3 / 7 justifient le paiement de la somme de 3. 794 euros, telle qu'allouée par le jugement déféré (25. 000 francs), l'indemnisation de ce poste de préjudice étant acceptée par les intimés ; Que dès lors, la confirmation de ce chef sera ordonnée ; Attendu que les circonstances de l'affaire et la fragilité de la victime commandent de retenir un préjudice d'agrément indéniablement existant à la suite des blessures subies et des soins prodigués empêchant le maintien temporaire d'activités de loisirs, d'un montant de 800 euros et d'infirmer le jugement contesté sur ce point ; 2 º) Sur la paiement de la réparation des préjudices subis par Madame A... Attendu que le Tribunal dans le jugement déféré du 7 janvier 2000 a fixé le préjudice corporel global de Madame A... à la somme de 33. 538, 78 euros et a condamné Monsieur Y... et son assureur, la SA RHODIA à payer à Madame A... la somme de 23. 172, 25 euros au titre du préjudice corporel global (déduction faite des indemnités provisionnelles versées à hauteur de 10. 366, 53 euros) ; Qu'au cas présent, à hauteur de Cour la fixation du préjudice corporel global est de 27. 569, 37 euros ; Que dès lors, compte tenu des provisions déjà versées par les intimés pour un montant de 10. 366, 53 euros et de l'exécution du jugement critiqué assorti de l'exécution provisoire, soit le paiement de 23. 172, 25 euros, il convient d'infirmer la décision entreprisé et d'ordonner la restitution par Madame A..., de la somme de (33. 538, 78 – 27. 569, 37) = 5. 969, 41 euros à Monsieur Y... et à la SA RHODIA ; Attendu que conformément à l'article 696 du nouveau Code de Procédure Civile, Monsieur Y... et la SA RHODIA succombant, eu égard à la nature du litige, seront tenus in solidum aux dépens ; Les circonstances de l'affaire et l'équité commandent de débouter les parties de leur demande en paiement respective fondée sur l'article 700 du nouveau Code de Procédure Civile ;
PAR CES MOTIFS
La Cour statuant publiquement et par arrêt réputé contradictoire, Infirme le jugement rendu par le Tribunal de Grande Instance de CHARLEVILLE-MEZIERES en toutes ses dispositions, sauf dans l'évaluation du pretium doloris ; Et statuant à nouveau, Vu le rapport du docteur B... rédigé le 13 décembre 2001, Fixe à la somme globale de 27. 569, 37 euros le préjudice corporel global de Madame Yvette A... ; Compte tenu des indemnités provisionnelles versées à hauteur de 10. 366, 53 et de 23. 172, 25 euros compte tenu de l'exécution provisoire dont était assorti le jugement déféré, il convient d'ordonner la restitution par Madame Yvette A... de la somme globale de 5. 969, 41 euros à Monsieur Yves Y... et à la SA RHODIA ASSURANCES ; Déboute les parties de leur demande en paiement respective fondée sur l'article 700 du nouveau Code de Procédure Civile ; Déclare cet arrêt opposable à la MUTUELLE SANTE DES INDEPENDANTS, venant aux droits de la MATI ; Condamne in solidum Monsieur Yves Y... et à la SA RHODIA ASSURANCES aux dépens comprenant notamment les frais d'expertise des docteurs Z... et B... et autorise la SCP THOMA LE RUNIGO DELAVEAU GAUDEAUX, avoués, à les recouvrer dans les formes et conditions de l'article 699 du nouveau Code de Procédure Civile ; LE GREFFIERLE CONSEILLER