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06/05/2003 | FRANCE | N°JURITEXT000006942469

France | France, Cour d'appel de reims, 06 mai 2003, JURITEXT000006942469


COUR D'APPEL DE REIMS CHAMBRE CIVILE-1 ° SECTION BM ARRET N° 309 AFFAIRE N : 02/00482 AFAIRE X... C/ L'ADMINISTRATION DES IMPOTS

C/ une décision rendue le 25 Septembre 2001 par le Tribunai de Grande Instance de REIMS. ARRET DU 28 AVRIL 2003

APPELANTE:

Madame Suzanne X... veuve Y...

8 Boulevard de la Paix

51100 REIMS

COMPARANT, concluant par la SCP SIX - GUILLAUME avoués à la

Cour, et ayant pour conseil Me Guy LAUBIN, avocat au barreau de

REIMS,

INTIMEE : L'ADMINISTRATION DES IMPOTS, prise en la personne de Monsieur le

Z... des Services Fiscaux du DépaRtement de la Marne Cité Adminstrative Tirlet 7 rue de la Charrière 51000...

COUR D'APPEL DE REIMS CHAMBRE CIVILE-1 ° SECTION BM ARRET N° 309 AFFAIRE N : 02/00482 AFAIRE X... C/ L'ADMINISTRATION DES IMPOTS

C/ une décision rendue le 25 Septembre 2001 par le Tribunai de Grande Instance de REIMS. ARRET DU 28 AVRIL 2003

APPELANTE:

Madame Suzanne X... veuve Y...

8 Boulevard de la Paix

51100 REIMS

COMPARANT, concluant par la SCP SIX - GUILLAUME avoués à la

Cour, et ayant pour conseil Me Guy LAUBIN, avocat au barreau de

REIMS,

INTIMEE : L'ADMINISTRATION DES IMPOTS, prise en la personne de Monsieur le Z... des Services Fiscaux du DépaRtement de la Marne Cité Adminstrative Tirlet 7 rue de la Charrière 51000 CHALONS EN CHAMPAGNE COMPARANT, concluant parla SCP GENET - BRAIBANT avoues à la COUR, COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DELIBERE Monsieur RUFFIER, Président de Chambre Monsieur MICHEL, Conseiller Monsieur ALESANDRINI, Conseiller GREFFIER :

Monsieur Francis A..., Greffier lors des débats et Madame Maryline B..., Greffier lors du prononcé, MINISTERE PUBLIC: Auquel l'affaire a été régulièrement communiquée. DÉBATS : A l'audience publique du 05 Février 2003, où l'affaire a été mise en délibéré au 28 Avril 2003, ARRET: Prononcé par Monsieur RUFFIER, Président de Chambre, à l'audience publique du 28 avril 2003, conformément aux dispositions de l'article 452 du nouveau code de procédure civile, qui a signé la minute avec le Greffier, présent lors du prononcé. 1 Madame Suzanne X... veuve Y... est la fille unique et !'unique héritière de sa mère Madame Hélène C... veuve D... décédée le 27 avril 1996. Par notification de redressement du 22 septembre 1998 l'administration fiscale a réintégré dans l'actif

de la succession - des créances qui ne figuraient pas dans la déclaration correspondant à deux prêts de 128.000 F et de 781.764 F consentis par la défunte à la société SAPP Développement, - des dons manuels pour un montant global de 235.000 F. Madame Suzanne X... veuve Y... a fait assigner le 20 novembre 2000 devant le Tribunal de Grande Instance de REIMS Monsieur le Z... des Services Fiscaux de la Marne en annulation de l'imposition complémentaire fondée sur les prêts. Par jugement contradictoire prononcé le 25 septembre 2001 le Tribunal de Grande Instance de REIMS statuait ainsi ];erge que les prêts consentis en mai 1989 et mars 1995 par Mladarrie consent D... à la SA P.P. Développement ne constituent pas des créances à terme, -juge que la valeur vénale des créances de Madame D... sur ladite SA doit être appréciée au 27 avril etgt;996, date du décès de Madame D..., à la valeur en capital desdites créances, soit 128.000 F et 78f.78-lF, - déboute en conséquence Madame Y... de ses demandes en annulation des décisions des services fiscaux et avis de mise en recouvrement contestés, - condamne Madame Y... aux dépens. Par déclaration remise le 20 février 2002 Madame X... veuve Y... relevait appel de ce jugement. ------------ A titre principal l'appelante soutient que la notification de redressement du 22 septembre 1998 adressés à Madame Suzanne Y..., la réponse de l'administration fiscale en date du 28 octobre 1998 adressée à Madame Suzanne Y..., l'avis de recouvrement du 5 février 1999 établi au nom de Madame Suzanne Y... sont irréguliers au regard de l'article 4 de la loi du 6 fructidor An II et qu'elle aurait du être désignée par lé nom de famille et le prénom portés sur l'acte de naissance X... Suzanne. Les irrégularités viciant l'ensemble des procédures de redressement et d'imposition doivent, selon l'appelante conduire au prononcé de l'annulation des impositions consécutives. Sur ce même fondement !'appelante sollicite l'annulation du jugement prononcé à

son encontre le 25 septembre 2001. Si dans l'énoncé du nom des parties c'est Madame X... veuve Y... qui est indiquée en qualité de demanderesse, c'est Madame Y... 2 qui est déboutée de ses demandes, ce sont les prétentions de Madame Y... qui sont déclarée irrecevables, et c'est Madame Y... qui est condamnée aux dépens. A titre subsidiaire l'appelante approuve le premier juge d'avoir considéré que la créance de prêts relevait de l'article 758 du code général des impôts, mais lui reproche de n'avoir pas admis que cette créance était irrécouvrable au jour du décès ; la société P.P. Développement étant à cette date en cessation des paiements. Dans ses conclusions déposées le 15 janvier 2003 l'appelante demande à la Cour de - dire et juge tant recevable que bien fondé Madame Suzanne X... Veuve Y..., - y faisant droit, - vu les articles 4 de la loi du 6 fructidor an II, 758 et 760 du code général des impôts, -- à titre principal, annuler le jugement rendu par le Tribunal de Grande Instance de REIMS le 25 septembre 2001 et constater l'irrégularité des procédures de redressement et d'imposition pour désignation de la contribuable sous le nom de son conjoint décédé aux lieu et place de son nom de naissance dans tous les actes y relatifs, - à titre subsidiaire, infirmer en toutes ses dispositions le jugement rendu par letamp; Tribunal de Grande Instance de REIMS le 25 septembre 2001, .- constater l'inapplicabilité, des dispositions de l'article 760 du code général des impôts, - constater le défaut de respect des prescriptions de l'article 758 susvisé du code général des impôts, - constater que la créance de Madame Hélène D... sur la société P. P. Développment doit être évaluée en valeur vénale, - dire et juger au vu des pi éces produites, que la valeur vénale de ces créances est nulle au jour du décès de Madame Hélène D... eu égard à la situation de trésorerie et à la situation comptable de la société P.P. Développement, - dire et juger Madame

Suzanne X... veuve DROPS E... recevable et fondée en sa demande d'expertise, - y faisant droit, - ordonner la désignation de tel expert qu'il plaira à la Cour aux fins de déterminer la valeur ou l'absence de valeur de ces deux créances de la succession de Madame Hélène D..., - annuler en toute hypothèse la décision de rejet de Monsieur Le Z... des Services fiscaux, la notification de redressements, la réponse aux observations du contribuable et l'avis de mise en recouvrement contestés, - dire et juger n'y avoir lieu à imposition aux droits de succession et intérêts de retard y afférents, - décharger Madame Suzanne X... veuve Y... des impostes, intérêts de retard mis à sa charges d'un montant de 31.274, 92 euros (205.150 F), - condamner Monsieur Le Z... des Services fiscaux de la Marre au paiement d'une indemnité de 800 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile, 3 - débouter Monsieur Le Z... des Services fiscaux de la Mame de toutes ses demandes fins et conclusions plus amples ou contraires, - condamner Monsieur Le Z... des Services fiscaux de la Mame aux entiers dépens. L'administration des impôts soutient que le fait de déplacer la loi du 6 fructidor an II hors de son contexte historique et de son caractère pénal très prononcé, n'a aujourd'hui aucune signification, que la Cour de cassation, dans un arrêt du 6 février 2001, n'a pas fait une exacte application de l'article 4 de cette loi, que la loi fiscale ne régit pas l'état des personnes mais leur qualité de redevable et ne comporte aucune disposition quant à l'obligation de désigner sous son nom patronyme une femme mariée. Quant au bien fondé de l'imposition l'administration fait valoir que les difficultés . de trésorerie de la société PI.P. DÉVELOPPEMENT n'étaient pas telles que l'on devait considérer que cette société était en état' de cessation des paiements, que l'argumentation développée par l'appelante démontre

que l'entreprise pouvait rembourser ses dettes à la date du décès, que la valeur vénale des créances doit être appréciée à la valeur en capital soit 128.000 F (19.513,47 ) et 781.764 F (119.179,15 ). Dans ses conclusions déposées le 16 . octobre 2002. elle demande à la Cour de - confirmer la décision expresse de rejet de la réclamation contentieuse de Madame Y..., - maintenir les redressements notifiés, - confirmer le jugement rendu le 25 septembre 2009 par le Tribunal de Grande Instance de REIMS, - déclarer non fondée la demande de l'appelante rendant au remboursement des frais inépétibles conformément à l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile, - condamner Madame Y... en tous les dépens tant de première instance que d'appel. Dans les motifs de ses conclusions l'administration avait également sollicité la condamnation de l'appelante au paiement d'une somme de 800 par application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile. L'ordonnance de clôture prononcée le 29 janvier 2003 a renvoyé la procédure pour plaidoiries à l'audience du 5 février 2003. MOTIFS DE LA DÉCISION La loi du 6 fructidor An 11 (23 août 1794) invoquée par Madame Suzanne X... veuve Y... dispose en son article 1 4 "Aucun citoyen ne pourra porter de nom ni de prénom autres que ceux exprimés dans son acte de naissance, ceux qui les auraient quittés seront tenus de les reprendre" L'article 4 de cette même loi précise "ll est expressément défendu à tous fonctionnaires publics de désigner les citoyens dans les actes autrement que par le nom de famille, les prénoms portés en l'acte de naissance ou les surnoms maintenus par l'article 2 ni d'en exprimer d'autres dans les expéditions et extraits qu'ils délivreront à l'avenir". En ses articles 5, 6 et 7, la loi prévoit de lourdes sanctions à l'encontre des fonctionnaires qui contreviendraient aux obligations énoncées à l'article 4 :

destitution - interdiction d'exercer une fonction publique - amende égale au quart des revenus.

L'],aion publique n'a très certainement jamais été exercée pour infraction à l'articie .4; au moins durant le XXe siècle, elle n'est jamais exércée aujourd'hui. Le "contexte historique" évoqué par l'administration concerne ce volet de la loi, qui ne figure d'ailleurs plus dans les éditions privées du Code Civil et dans l'édition "Codes et Lois" du Jurisclasseur. '

En revanche la loi du 6 fructidor an II en sesarticles 1, 2 et 4 (l'article 3 a été abrogé) figure à la suite de l'article 57 du Code Civil. Cette loi n'est pas abrogée: aucune abrogation expresse n'a été prononcée (sauf pour l'article 3), son abrogation implicite ne pourrait être envisagée que si elle résultait nécessairement de dispositions nouvelles inconciliables avec la loi ancienne, ce qui n'est pas le cas. D'autre part, une loi ne peut tomber en désuétude par suite d'une tolérance plus ou moins prolongée. Enfin les articles 1 à 6 du Code Civil n'opèrent aucune distinction entre la loi civile et la loi fiscale. L'on ne peut ainsi soutenir comme le fait l'administration, que cette loi qui, pourtant par application de l'article 1 du code civil, est exécutoire sur tout le territoire français, "n'a aucune signification". II est vrai, comme l'administration le souligne que Madame X... dispose d'un droit d'usage sur le nom de feu son mari Monsieur Y... et qu'elle a utilisé ce nom, non seulement dans les actes de la vie courante mais encore dans la correspondance échangée avec l'administration (étant observé que c'est l'administration qui, la première a désigné l'appelante sous le nom de Y...) et que l'usage du nom marital peut répondre à des nécessités pratiques.

5 Ces considérations toutefois ne dispensaient par l'administration dans ses actes de désigner l'appelante sous le nom de X... qui est celui de sa naissance et non sous celui de Y... qui est le nom de feu son mari. Car les redressements notifiés comme (avis de

recouvrement sont bien des actes générateurs de droit émanant de fonctionnaires publics et comme tels entrent dans le cadre la toi du 6 fructidor an Il. La Cour constate en conséquence l'irrégularité de la notification de redressement du 22 septembre 1998, de la réponse aux observations de la contribuable du 28 octobre 1998 et de l'avis de mise en recouvrement du 5 février 1999. C'est donc â bon droit que Madame Suzanne X... soulève la nullité.comme de l'ensemble de la procédure de redressement. Il n'y a pas lieu, en conséquence, d'examiner le bien fondé dés impositions mises à la charge de l'appelante. Si, dans l'énoncé des partie, le jugement entrepris a régulièrement désigné "Madame X... veuve Y..., c'est en revanche "Madame Y..." qui dans le dispositif, est déboutée et condamnée, le jugement ne sera donc pas annulé mais infirmé, et Madame Suzane X... veuve Y... déchargée de l'intégralité des impositions supplémentaires résulatant de l'avis de mise en recouvrement qui lui fut notifié le 5 février 1999. Compte tenu des éléments de la cause il est conforme à l'équité de laisser entièrement à la charge des parties les frais irrépétibIes qu'elles ont exposés. Les dépens de première instance en d'appel seront mis à la charge de l'administration fiscale. PAR CES MOTIFS La Cour, statuant publiquement, contradictoirement, DIT recevable et bien fondé l'appel formé par Madame Suzanne X... veuve Y... , INFIRME le jugement prononcé le 25 septembre 2001 par le Tribunal de

; Grande Instance de REIMS, Et, statuant à nouveau, Et, statuant à nouveau, Vu l'article 4 de le loi du 6 fructidor An II, CONSTATE l'irrégularité de la notification de redressement du 22 septembre 1998, de la réponse aux observations de la contribuable du 28 octobre 1998, de l'avis de mise en recouvrement du 5 février 1999 dans la mesure où ces actes désignent la contribuable sous le nom marital "Y..." aux lieu et place du nom porté sur son acte de naissance,

ANNULE en conséquence les actes visés et décharge Madame Suzanne X... veuve Y... de toute imposition résultant de l'avis de recouvrement créance n' 9900340 qui lui fut notifié le 5 février 1999, DEBOUTE les parties de toutes leurs prétentions contraires ou lus amples non afférentes aux dépens, CONDAMNE l'Administration Fiscale aux dépens de première instance ee d'appel, avec pour ceux d'appel, faculté de recouvrement direct au profit de la SCP SIX GUILLAUME SIX, avoués, conformément aux dispositions de l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile. LE GREFFIER, LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de reims
Numéro d'arrêt : JURITEXT000006942469
Date de la décision : 06/05/2003

Analyses

NOM - Loi du 6 fructidor an II - Article 4 - Violation - Sanction

Les dispositions de la loi du 6 fructidor An II sont toujours en vigueur en dehors de toute abrogation expresse ou implicite, celle-ci ne pouvant résulter que de dispositions nouvelles inconciliables avec la loi ancienne, et alors qu'une loi ne peut tomber en désuétude par suite d'une tolérance plus ou moins prolongée. Doivent, dès lors, être annulés différents actes intervenus au cours d'une procédure de redressement à l'encontre d'une contribuable désignée sous son nom marital dans ces actes générateurs de droit émanant de fonctionnaires publics, et entrant comme tels dans le cadre de la loi du 6 fructidor an II, peu important que l'intéressée ait elle-même utilisé le nom de son mari dans la correspondance échangée avec l'administration


Références :

Loi du 6 fructidor An II

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.reims;arret;2003-05-06;juritext000006942469 ?
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