La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

16/01/2003 | FRANCE | N°02/00059

France | France, Cour d'appel de reims, 16 janvier 2003, 02/00059


COUR DAPPEL DE REIMS CHAMBRE CIVILE - 2ème SECTION RNB ARRET N° 5O AFFAIRE N : 02/00059 AFFAIRE X... C/ Y..., Z...

C/ une décision rendue par le Tribunal de Grande Instance CHALONS EN CHAMPAGNE le 21 Novembre 2001. ARRET DU 16 JANVIER 2003 APPELANTE:

Mademoiselle Pierrette X... 33 rue du Mont Aimé 51130 BERGERES LES VERTUS COMPARANT, concluant par la SCP DELVINCOURT - JACQUEMET avoué à la Cour, et ayant pour conseil la SCP BREAUD-Ste, avocats au barreau de CHALONS-EN-CHAMPAGNE, INTIMES Monsieur Gaston Y... 14 rue des Trois Fontaines 51130 GIVRY LES LOISY Madame Jeaninne Y..

. née Z... 14 rue des Trois Fontaines 51130 GIVRY LES LOISY COMPA...

COUR DAPPEL DE REIMS CHAMBRE CIVILE - 2ème SECTION RNB ARRET N° 5O AFFAIRE N : 02/00059 AFFAIRE X... C/ Y..., Z...

C/ une décision rendue par le Tribunal de Grande Instance CHALONS EN CHAMPAGNE le 21 Novembre 2001. ARRET DU 16 JANVIER 2003 APPELANTE:

Mademoiselle Pierrette X... 33 rue du Mont Aimé 51130 BERGERES LES VERTUS COMPARANT, concluant par la SCP DELVINCOURT - JACQUEMET avoué à la Cour, et ayant pour conseil la SCP BREAUD-Ste, avocats au barreau de CHALONS-EN-CHAMPAGNE, INTIMES Monsieur Gaston Y... 14 rue des Trois Fontaines 51130 GIVRY LES LOISY Madame Jeaninne Y... née Z... 14 rue des Trois Fontaines 51130 GIVRY LES LOISY COMPARANT,

concluant

par

la

SCP

THOMA-LE RUNIGO-DELAVEAU-GAUDEAUX, avoué à la Cour, et ayant pour conseil Me CHEMLA, avocat au barreau de CHALONS-EN-CHAMPAGNE. COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DEMBERE:

PRESIDENT DE CHAMBRE: Madame MARZI Odile A...: Madame B... Roselyne A...: Mme VILDE Nelly GREFFIER C... : Madame Michèle D..., Greffier lors des débats et du prononcé. DEBATS: A l'audience publique du 21 Novembre 2002, où l'affaire a été mise en délibéré au 16 Janvier 2003, sans opposition de la part des conseils des parties et en application des articles 786 et 910 du Nouveau Code de Procédure Civile, Madame Roselyne B... , a entendu les conseils des parties en leurs conclusions et explications, puis ce magistrat en a rendu compte à la Cour dans son délibéré, ABBET Prononcé par Madame Odile MARZI, Président de Chambre, à l'audience publique du 16 Janvier 2003 et qui a signé la minute avec le Greffier présent lors du prononcé. 1

FE,-MILS 'RO-C-F-D]M EZMVYENS DES E... 1],lonsieur Marceau X... est décédé le 13 mars 1995, à l'âge de 82 ans. Il était placé sous le régime de la tutelle depuis le 25 novembre 1992. Le 31 octobre 1995, sa soeur, Mademoiselle Pierrette X..., a saisi le Tribunal de Grande Instance de CHALONS EN CHAMPAGNE aux fins de voir prononcer l'annulation du testament olographe qu'il avait rédigé le 7 mars 1992 au profit des époux Y.... Le tribunal, par jugement du 17 décembre 1997, a ordonné une expertise, qu'il a confiée au docteur F... aux fins, notamment, d'être éclairé sur l'état mental de Monsieur X... lors de la rédaction du testament litigieux. L'expert a établi son rapport le 15 mars 2000. C'est dans ces conditions qu'a été rendu le jugement dont Mademoiselle X... a interjeté appel, qui l'a débouté de l'ensemble de ses demandes et l'a condamnée à payer aux époux Y... la somme de 762,25 euros en application des dispositions de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile. . Par conclusions déposées au greffe le 21 mai 2002, Mademoiselle X... prétend, en premier lieu, que le testament olographe a manifestement été écrit sous la dictée puisqu'il a été rédigé dans les formes alors que Monsieur X..., âgé de 82 ans, n'avait aucune connaissance juridique. Elle fait valoir, ensuite, que moins d'un mois après la rédaction du testament, le placement de Monsieur X... sous un régime de protection a été sollicité, et que le placement sous tutelle a été ordonné par le tribunal le 25 novembre 1992 et ce au vu, notamment, d'un certificat médical établi en Juillet 1992 par le docteur G... et l'audition de l'intéressé, desquels il résultait que celui-ci souffrait d'une altération de ses facultés mentales l'empêchant de gérer ses biens et de veiller à ses intérêts, altération confirmée par une procédure d'enquête diligentée par la gendarmerie et au cours de laquelle Madame Y... a elle-même reconnu que Monsieur X... n'était pas

en mesure de gérer ses biens, ainsi que par l'expert désigné judiciairement qui a conclu que l'altération des facultés mentales existait au moment de la rédaction du testament. Elle stigmatise l'attitude vénale du couple Y..., l'ascendant exercé par Madame Y... sur Monsieur X... laquelle, uniquement soucieuse des ses intérêts, n'aurait eu aucun souci de son bien être et lui aurait soutiré plusieurs sommes en établissant des chèques à son profit. Elle ajoute que Madame Y... s'était fait établir une procuration sur les comptes de monsieur X..., et que les époux avaient cessé de lui payer la rente viagère dont ils lui i 2 étaient redevables pour avoir acheté sa maison en viager en 1990, tous éléments établissant leur mauvaise foi et leur seul souci de dépouiller Monsieur X... de l'ensemble des ses biens. Elle demande en conséquence à la Cour, en application des articles 489, 901 et 503 du code civil, de prononcer l'annulation du testament, de condamner les époux Y... à restituer à la succession de Monsieur X... la somme de 12.195 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 8 avril 1992 et la somme de 30.489,90 euros avec intérêts au taux légal à compter du 2 avril 1997, d'ordonner la capitalisation desdits intérêts, de les, condamner à lui payer 3.000 euros à titre de dommages et intérêts et la même somme sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile. Les époux Y... répliquent que Mademoiselle X... ne rapporte pas la preuve que, lors de la rédaction du testament, Monsieur X... était atteint d'une altération profonde et durable de ses facultés mentales et font valoir que l'annulation est écartée en cas d'un simple affaiblissement d'esprit dû à l'âge, notamment les troubles de mémoire. Ils ajoutent que ni le libellé du testament, établi selon un modèle que Monsieur X... s'est procuré en l'étude du notaire, ni la mise sous tutelle, à la demande de Mademoiselle

X..., ne suffisent à établir l'insanité d'esprit. Ils ajoutent qu'aucun élément du dossier n'établit l'insanité d'esprit et prétendent que le rapport d'expertise est une simple compilation de témoignages succincts et évasifs, sans aucune précision temporelle et qui ne tient pas compte de l'avis des médecins ayant suivi Monsieur X..., notamment celui des docteurs Pierre et Paul BOUET. Ils ajoutent que Monsieur X... était très proche de Madame Y..., qu'il se plaignait de sa soeur et refusait qu'elle prenne en charge la gestion de son patrimoine, de sorte qu'il est manifeste qu'il a volontairement gratifié les époux Y... au détriment de sa soeur qui se désintéressait de lui, pour les remercier des soins prodigués et de l'hébergement offerts. Ils demandent à la Cour de confirmer la décision entreprise et de leur allouer une somme de 2.300 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile. SISE Attendu qu'il est constant, au vu de l'ensemble des témoignages produits comme de ceux recueillis par l'expert, notamment auprès des médecins traitants de Monsieur X..., que celui-ci, âgé de 82 ans lors de la rédaction du testament, souffrait d'importants troubles de mémoire, et d'un affaiblissement de ses facultés intellectuelles, notamment d'abstraction, de sorte qu'il était dans l'incapacité de s'occuper de ses affaires ; que toutefois ce déclin, manifestement dû à 4 3 son grand âge, ne peut être assimilé à l'insanité d'esprit au sens des articles 489 et 501 du code civil ; Attendu en effet que ni les témoins ni les médecins interrogés par l'expert n'ont constaté qu'il se trouvait en état de démence ou qu'il avait perdu ses facultés de jugement; Que les auditions de Monsieur X..., tant par les services de gendarmes, en mai 1992, que par Monsieur G... qui l'a examiné et interrogé à l'occasion de la procédure de mise sous tutelle, font au contraire apparaître qu'il restait parfaitement

capable de comprendre la portée de ses actes, et qu'il avait conservé un bon niveau de conscience ; Que s'il a indiqué aux gendarmes avoir 62 ans, et ne pas se souvenir du montant de son compte en banque, il s'est aussi expliqué, de façon très cohérente, sur ses rapports avec Madame Y... et les raisons qui l'ont conduit à quitter son domicile son patrimoine ; Que le docteur G... , dans son certificat médical établi en juillet 1992 soit près de cinq mois après la rédaction du testament, relève que les réponses de Monsieur X... sont adaptées et que leur imprécision est liée aux troubles mnésiques, dont il a d'ailleurs conscience et que s'il a du mal à se situer dans le temps, il est capable de décrire sa biographie ; que ce médecin relève que le contact relationnel est bon, que Monsieur X... comprend bien le sens de l'examen, reste attentif tout au long de l'entretien, ne présente pas de trouble de la perception ; qu'il n'a constaté, comme symptômes, que des troubles mnésiques entraînant une diminution des performances intellectuelles et une anxiété diffuse liée aux circonstances de l'examen et à son appréhension, cette anxiété majorant les troubles déficitaires; Que Mademoiselle X... n'a d'ailleurs jamais allégué, lors de son audition par les services de gendarmerie, que son frère se trouvait en état de démence et s'est bornée, pour solliciter l'ouverture d'une tutelle, à expliquer qu'il avait des trous de mémoire et ne pouvait plus s'occuper sérieusement de ses affaires ; Que cette incapacité à gérer ses biens si elle a rendu nécessaire l'ouverture de la tutelle, ce à quoi l'intéressé a d'ailleurs volontiers consenti, ne signifie pas qu'il avait perdu sa lucidité et qu'il était incapable d'exprimer ses dernières volontés ; Attendu par ailleurs que l'argumentation de l'appelante relative au comportement du couple Y... et plus spécifiquement de Madame Y..., de l'ascendant qu'elle exerçait sur Monsieur X..., est sans incidence sur la validité du

testament dès lors , et a pu préciser la consistance de 4 qu'elle ne démontre pas que celui-ci a été rédigé à l'instigation de Madame Y... ni même que celle-ci en avait connaissance; Qu'il ressort en effet du témoignage de Madame H..., clerc de notaire chez Me ROUILLON, que Monsieur X... s'est rendu seul à l'étude pour demander un modèle de testament en février 1992, qu'elle lui a dressé par courrier le 2 mars 1992 ; que le testament litigieux en est la stricte reproduction de sorte qu'il est patent que Monsieur X... s'est borné à le recopier et ne l'a manifestement pas écrit sous la dictée contrairement à ce que prétend l'appelante ; Que certes, il apparaît que les époux Y... ont, sans états d'âme et abondamment profité de l'argent de Monsieur X..., jusqu'à l'ouverture de la tutelle; que toutefois, il n'est pas établi ni même d'ailleurs allégué par l'appelante, qu'ils ont usé de manoeuvres pour le conditionner et capter son héritage ; qu'il n'est d'ailleurs pas contesté que c'est Monsieur X... qui, de sa propre initiative, et, d'après ses explications, parce qu'il ne s'entendait plus avec sa soeur qui s'occupait jusqu'alors de lui, a décidé, au mois de décembre 1991, de quitter son domicile pour aller vivre chez Madame Y... qu'il connaissait depuis longtemps et dont il avait-été l'amant, de sorte qu'il n'est pas exclu qu'ils aient conservé l'un pour l'autre des sentiments d'affection pouvant expliquer d'une part l'accueil de Madame Y... et d'autre part les dispositions testamentaires prises par Monsieur X... ; Que si madame F... a considéré, à l'issue de ses opérations d'expertise, que Monsieur X..., à l'époque de la rédaction du testament, n'avait plus de volonté propre et qu'il était sous la domination complète de madame Y... - questions auxquelles le tribunal lui avait, il est vrai, demandé de répondre- , il n'empêche que cette appréciation , nécessairement subjective, n'entrait pas dans son domaine de

compétence; Que seul l'avis médical de ce médecin importe à la Cour qui observe que, sur ce point, l'expert s'est borné à indiquer que Monsieur X... présentait une altération des facultés mentales, laquelle, ainsi qu'il a été dit ci-dessus, se distingue de l'insanité d'esprit ; Qu'il convient, au vu de l'ensemble de ces éléments, de confirmer le jugement en toutes ses dispositions. PAR CES MOTIFS La Cour, statuant publiquement et contradictoirement ; Reçoit Mademoiselle X... en son appel mais le dit mal fondé et l'en déboute ; 5 Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions ; Y ajoutant, condamne Mademoiselle X... à payer aux époux Y... la somme de 800 euros (HUIT CENTS EUROS) en application des dispositions de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile; La condamne aux dépens de l'appel lesquels pourront être recouvrés directement par la SCP THOMA LE RUNIGO DELAVEAU GAUDEAUX conformément aux dispositions de l'article 699 du Nouveau Code de procédure Civile. LE GREFFIER

LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de reims
Numéro d'arrêt : 02/00059
Date de la décision : 16/01/2003

Analyses

TESTAMENT - Capacité du testateur - Insanité d'esprit

L'insanité d'esprit énoncée à l'article 489 du Code civil se distingue d'une simple altération des facultés mentales. Une soeur n'est donc pas fondée à contester la validité du testament olographe de son frère défunt, mis sous tutelle quelques mois après la rédaction du testament, dès lors que l'avis de l'expert médical se borne à indiquer que l'incapacité du défunt à gérer ses propres biens a rendu nécessaire l'ouverture de la tutelle. En l'espèce, l'incapacité à gérer ses biens nécessitant l'ouverture d'une tutelle ne signifie pas que le testateur avait perdu sa lucidité et qu'il était incapable d'exprimer ses dernières volontés, alors qu'il est établi que s'il souffrait de troubles mnésiques, il avait de bons contacts relationnels, et était à même de comprendre la portée de ses actes


Références :

Code civil, article 489

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.reims;arret;2003-01-16;02.00059 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award