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07/07/2022 | FRANCE | N°22/013111

France | France, Cour d'appel de Poitiers, 07, 07 juillet 2022, 22/013111


Ordonnance n° 39

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07 Juillet 2022
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No RG 22/01311 -
No Portalis DBV5-V-B7G-GRRB
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[D] [H]
C/
[W] [M]
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Ordonnance notifiée aux parties le :R E P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE POITIERS

ORDONNANCE DU PREMIER PRESIDENT

Contestation d'honoraires d'avocat

Rendue le sept juillet deux mille vingt deux

Dans l'affaire qui a été examinée en audience publique le vingt troi

s juin deux mille vingt deux par Madame Estelle LAFOND, conseillère, agissant sur délégation de la première présidente de la cour...

Ordonnance n° 39

-------------------------
07 Juillet 2022
-------------------------
No RG 22/01311 -
No Portalis DBV5-V-B7G-GRRB
-------------------------
[D] [H]
C/
[W] [M]
-------------------------

Ordonnance notifiée aux parties le :R E P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE POITIERS

ORDONNANCE DU PREMIER PRESIDENT

Contestation d'honoraires d'avocat

Rendue le sept juillet deux mille vingt deux

Dans l'affaire qui a été examinée en audience publique le vingt trois juin deux mille vingt deux par Madame Estelle LAFOND, conseillère, agissant sur délégation de la première présidente de la cour d'appel de POITIERS, conformément à son ordonnance en date du 13 décembre 2021, assistée de Madame Inès BELLIN, greffier, lors des débats.

ENTRE :

Maître [D] [H]
[Adresse 4]
Arobase 2
[Localité 3]

Représentée par Me Léone COUTURIER, avocat au barreau de POITIERS

DEMANDEUR en contestation d'honoraires,

D'UNE PART,

ET :

Madame [W] [M]
[Adresse 1]
[Localité 2]

comparante, assistée de Me Amandine FRANGEUL, avocat au barreau de POITIERS

(bénéficie d'une aide juridictionnelle totale no2022/003491 du 21/06/2022 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de Poitiers)

DEFENDEUR en contestation d'honoraires,

D'AUTRE PART,

ORDONNANCE :

- Contradictoire

- Prononcée publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile,

- Signée par Madame Estelle LAFOND, conseillère agissant sur délégation de la première présidente et par Madame Inès BELLIN, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

*****

Madame [W] [M] a saisi le bâtonnier de l'ordre des avocats au barreau de Poitiers d'une contestation des honoraires sollicités par Maître [D] [H].

Par décision du 25 avril 2022, Monsieur le bâtonnier [L] [U], agissant en qualité de conseiller taxateur délégué sur la délégation de Monsieur le bâtonnier de l'ordre des avocats du barreau de Poitiers a rejeté les demandes d'honoraires de Maître [D] [H] et enjoint à cette dernière d'émettre des avoirs aux fins d'annuler ses factures de 5 000 euros hors taxes, soit 6 000 euros toutes taxes comprises concernant la facture du 14 septembre 2021 relative à la procédure devant la cour d'appel de Poitiers d'une part et de 4 519,10 euros hors taxes, soit 5 422,02 euros toutes taxes comprises du 14 septembre 2021 relative à la procédure de référé devant le tribunal judiciaire de Poitiers.

La décision du bâtonnier a été notifiée à Maître [D] [H] le 28 avril 2022, laquelle a formé un recours entre les mains de la première présidente de la cour d'appel de Poitiers le 20 mai 2022.

L'affaire a été appelée à l'audience du 23 juin 2022.

Maître [D] [H], représentée à l'audience par son conseil, déclare avoir été désignée par le bâtonnier de l'ordre des avocats du barreau de Poitiers pour assister Madame [W] [M] devant la cour d'appel de Poitiers dans le cadre d'une procédure de liquidation du régime matrimonial. Elle indique que Madame [W] [M] l'aurait également missionnée pour engager une procédure en référé devant le tribunal judiciaire de Poitiers à l'encontre de la SCEA PEUBLANC, entreprise créée par elle et son ex conjoint.

Maître [D] [H] fait valoir que si Madame [W] [M] a été admise à l'aide juridictionnelle totale pour les deux procédures, deux conventions d'honoraires ont été régularisées, lesquelles prévoyaient que Madame [W] [M] renonçait au bénéfice de l'aide juridictionnelle « en cas de décision favorable à la cliente [?] lui permettant de récupérer des sommes».

Elle soutient que le bâtonnier a fait une application erronée de l'article 50 de la loi de 1991 sur l'aide juridictionnelle.

Elle indique avoir parfaitement exécutées les missions pour lesquelles elle s'était engagée.

Maître [D] [H] sollicite ainsi l'infirmation de l'ordonnance rendue par le bâtonnier de l'ordre des avocats du barreau de Poitiers le 25 avril 2022 et la condamnation de Madame [W] [M] à s'acquitter du montant des factures émises en application des conventions d'honoraires ainsi qu'au paiement de la somme de 600 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Madame [W] [M], représentée à l'audience par son conseil, déclare avoir été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale pour les deux procédures et avoir accepté de signer les conventions d'honoraires présentées par Maître [D] [H] par peur de ne pas être représentée.

Elle fait valoir, que l'arrêt de la cour d'appel de Poitiers ne procure aucune somme à Madame [W] [M] et qu'il ne peut être considéré comme lui étant favorable dès lors qu'elle souhaitait se pourvoir en cassation.
S'agissant de la procédure de référé devant le tribunal judiciaire de Poitiers, Madame [W] [M] soutient que Maître [D] [H] ne démontrerait pas la réalité des diligences accomplies.

Elle indique, qu'il s'agisse de la procédure devant la cour d'appel de Poitiers ou de la procédure de référé devant le tribunal judiciaire de Poitiers, qu'aucune décision du bureau d'aide juridictionnelle ne permet de considérer que l'aide juridictionnelle accordée a été réduite ou supprimée.

Madame [W] [M] conclut au débouté des demandes de Maître [D] [H] et sollicite la confirmation de l'ordonnance rendue par le bâtonnier de l'ordre des avocats du barreau de Poitiers le 25 avril 2022 ainsi que la condamnation de Maître [D] [H] à lui payer la somme de 1 000 euros au titre de son préjudice moral.

MOTIFS

Sur la recevabilité :

Selon l'article 176 du décret du 27 novembre 1991, la décision du bâtonnier est susceptible de recours devant le premier président de la cour d'appel qui est saisi par l'avocat ou la partie par lettre recommandée avec accusé de réception. Le délai de recours est d'un mois à compter de la notification de la décision.

En l'espèce, le recours de Maître [D] [H] est recevable et régulier en la forme.

Sur le fond :

Les contestations concernant le montant et le recouvrement des honoraires des avocats sont réglées en recourant à la procédure prévue aux articles 174 et suivants du décret no91-1197 du 27 novembre 1991.

Il résulte de l'article 10 de la loi no71-1130 du 31 décembre 1971, modifié par la loi du 10 juillet 1991 portant réforme de certaines professions judiciaires et juridiques, que sauf en cas d'urgence ou de force majeure ou lorsqu'il intervient au titre de l'aide juridictionnelle totale ou de la troisième partie de la loi no 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique, l'avocat conclut par écrit avec son client une convention d'honoraires, qui précise notamment le montant ou le mode de détermination des honoraires couvrant les diligences prévisibles, ainsi que les divers frais et débours envisagés.

A défaut de convention, les honoraires sont fixés au regard de la situation de fortune du client, de la difficulté de l'affaire, des frais exposés par l'avocat, de sa notoriété et des diligences de celui-ci, conformément au quatrième alinéa de l'article 10 de la loi no71-1130 du 31 décembre 1971.

Il sera rappelé qu'il n'entre pas dans les pouvoirs du juge de l'honoraire de se prononcer sur l'éventuelle responsabilité civile de l'avocat à l'égard de son client, liée au manquement à son devoir de conseil et d'information, ou à une exécution défectueuse de sa prestation. De tels griefs relèvent de la responsabilité professionnelle de l'avocat et non de l'évaluation des honoraires et ils ne peuvent pas non plus justifier une réduction de sa rémunération.

En l'espèce, Maître [D] [H] a été désignée par le bâtonnier de l'ordre des avocats du barreau de Poitiers pour assister Madame [W] [M] devant la cour d'appel de Poitiers dans la cadre d'une procédure de liquidation du régime matrimonial.

Maître [D] [H] a également été missionnée par Madame [W] [M] pour engager une procédure en référé devant le tribunal judiciaire de Poitiers à l'encontre de la SCEA PEUBLANC, entreprise créée par elle et son ex conjoint.

Madame [W] [M] a obtenu l'aide juridictionnelle totale pour ces deux procédures.
Deux conventions d'honoraires ont été régularisées par Madame [W] [M] :
- l'une en date du 13 mars 2021 relative à la procédure pendante devant la cour d'appel de Poitiers
- l'une en date du 24 mars 2021 relative à la procédure de référé devant le tribunal judiciaire de Poitiers
Lesdites conventions prévoient que Madame [W] [M] renoncera au bénéfice de l'aide juridictionnelle « en cas de décision favorable à la cliente [?] lui permettant de récupérer des sommes ».
Maître [D] [H] se prévaut des dispositions de l'article 50 de la loi no 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique selon lesquelles : « Sans préjudice des sanctions pénales éventuellement encourues, le bénéfice de l'aide juridictionnelle est retiré, même après l'instance ou l'accomplissement des actes pour lesquels il a été accordé, si ce bénéfice a été obtenu à la suite de déclarations ou au vu de pièces inexactes.
Il est retiré, en tout ou partie, dans les cas suivants :
1o S'il survient au bénéficiaire, pendant cette instance ou l'accomplissement de ces actes, des ressources telles que si elles avaient existé au jour de la demande d'aide juridictionnelle, celle-ci n'aurait pas été accordée ;
2o Lorsque la décision passée en force de chose jugée a procuré au bénéficiaire des ressources telles que si elles avaient existé au jour de la demande d'aide juridictionnelle, celle-ci ne lui aurait pas été accordée ;
3o Lorsque la procédure engagée par le demandeur bénéficiant de l'aide juridictionnelle a été jugée dilatoire ou abusive ».

Cependant, au regard des éléments versés au débats, il appert que l'arrêt de la cour d'appel de Poitiers du 16 juin 2021 ne procure aucune ressource complémentaire à Madame [W] [M].
Quant à la procédure de référé, Maître [D] [H] justifie de l'établissement d'un projet d'assignation, lequel n'a jamais été délivré. Ainsi, la procédure n'étant pas aboutie, il ne saurait en être déduit qu'elle aurait procuré une quelconque ressource complémentaire à Madame [W] [M].

En outre, il y a lieu de constater qu'aucune décision du bureau d'aide juridictionnelle n'est venue réduire ou retirer à Madame [W] [M] le bénéfice de l'aide juridictionnelle. Il ne peut d'ailleurs qu'être constaté que Madame [W] [M] bénéficie également de l'aide juridictionnelle dans le cadre de la présente procédure.

Il en résulte que Maître [D] [H] n'est pas fondée à facturer des honoraires à Madame [W] [M] laquelle bénéficiait de l'aide juridictionnelle totale.

C'est donc à juste titre que le bâtonnier de l'ordre des avocats du barreau de Poitiers a rejeté la demande de taxe présentée par Maître [D] [H] et la décision déférée sera en conséquence confirmée.

Sur la demande de Madame [W] [M] au titre du préjudice moral :

Madame [W] [M] sollicite la somme de 1 000 euros au titre du préjudice moral qu'elle estime avoir subi.
Un tel préjudice n'est cependant pas démontré et la demande de Madame [W] [M] à ce titre sera rejetée.

Sur l'article 700 du code de procédure civile :

Le juge condamne la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens en tenant compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à ces condamnations.

En l'espèce, succombant à la présente instance, Maître [D] [H] sera débouté de sa demande au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.

Sur les dépens :

L'article 696 du code de procédure civile dispose que la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n'en mette la totalité ou une fraction à la charge d'une autre partie.

Succombant à la présente instance, Maître [D] [H] en supportera les dépens.

PAR CES MOTIFS :

Nous, Estelle LAFOND, conseillère chargée du secrétariat général de la première présidence, statuant par délégation de la première présidente, par mise à disposition au greffe et par ordonnance contradictoire,

Déclarons le recours de Maître [D] [H] recevable et régulier en la forme ;

Confirmons l'ordonnance du bâtonnier de l'ordre des avocats du barreau de Poitiers en date du 25 avril 2022 ;

Y ajoutant,

Déboutons Madame [W] [M] de sa demande de dommages et intérêts pour préjudice moral ;

Disons n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 ;

Condamnons Maître [D] [H] aux dépens.

Le greffier, La déléguée de la première présidente,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Poitiers
Formation : 07
Numéro d'arrêt : 22/013111
Date de la décision : 07/07/2022
Sens de l'arrêt : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.poitiers;arret;2022-07-07;22.013111 ?
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