Ordonnance n° 44
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23 Septembre 2021
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RG no21/00185 -
No Portalis DBV5-V-B7F-GFN4
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[K] [N]
C/
[E] [I]
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Ordonnance notifiée aux parties le :R E P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE POITIERS
ORDONNANCE DU PREMIER PRESIDENT
Contestation d'honoraires d'avocat
Rendue le vingt trois septembre deux mille vingt et un
Dans l'affaire qui a été examinée en audience publique le vingt quatre juin deux mille vingt et un par Madame Gwenola JOLY-COZ, première présidente de la cour d'appel de POITIERS, assistée de Madame Véronique DEDIEU, greffier, lors des débats, et de Madame Inès BELLIN, greffier, lors de la mise à disposition,
ENTRE :
Madame [K] [N]
[Adresse 2]
[Adresse 2]
[Localité 1]
Représentée par Me Sylvie RODIER, avocat au barreau de POITIERS, substituée par Me BRUNET, avocat au barreau de POITIERS
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2021/001387 du 22/02/2021 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de POITIERS)
DEMANDEUR en contestation d'honoraires,
D'UNE PART,
ET :
Maître [E] [I]
[Adresse 1]
[Localité 1]
Représentée par Me Céline BOUILLAULT, avocat au barreau de POITIERS
DEFENDEUR en contestation d'honoraires,
D'AUTRE PART,
ORDONNANCE :
- Contradictoire
- Prononcée publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile,
- Signée par Madame Gwenola JOLY-COZ, première présidente et par Madame Inès BELLIN, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
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Par lettre réceptionnée le 3 décembre 2019, Maitre [E] [I] a saisi le bâtonnier de l'ordre des avocats au barreau de La Rochelle-Rochefort d'une demande de fixation de ses honoraires dus par Madame [K] [N].
Par décision prononcée le 3 avril 2020, Madame [U] [V], délégataire du bâtonnier de l'ordre des avocats du barreau de La Rochelle-Rochefort a, sur demande de Maitre [E] [I], fixé les honoraires dus par Madame [K] [N] à la somme de 300 euros TTC.
La décision a été notifiée à Madame [K] [N] le 10 avril 2020.
Par lettre recommandée avec accusé de réception du 15 janvier 2021, Madame [K] [N] a formé un recours contre cette décision devant la prémière présidente de la cour d'appel de Poitiers.
L'affaire a été appelée à l'audience du 24 juin 2021.
A l'audience, Madame [K] [N] ne comparait pas personnellement mais est représentée par Maitre Brunet substituant Maitre Rodier. Elle sollicite l'infirmation de la décision du bâtonnier, l'annulation du PV 659 en date du 28 décembre 2020 ainsi que l'annulation du certificat d'appel. Madame [K] [N] demande à ce que Maitre [I] soit déboutée de l'ensemble de ses demandes ainsi que sa condamnation à la somme de 1000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens.
Maitre [E] [I] est représentée par Maitre Celine Bouillault. Elle sollicite la confirmation de la décision du bâtonnier et la condamnation de Madame [K] [N] à lui verser la somme de 800 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens.
Les avocats sont autorisés lors de l'audience à s'en rapporter à leurs écritures.
MOTIFS
Sur la recevabilité du recours :
Selon l'article 176 du décret du 27 novembre 1991, la décision du bâtonnier est susceptible de recours devant le premier président de la cour d'appel qui est saisi par l'avocat ou la partie par lettre recommandée avec accusé de réception. Le délai de recours est d'un mois à compter de la notification de la décision.
La décision de taxation du bâtonnier de l'ordre des avocats du barreau de La Rochelle-Rochefort du 3 avril 2020, a été notifiée le 10 avril 2020. Le recours a été formé par Madame [K] [N] le 15 janvier 2021 donc au delà du délai.
Il est constant et admis par les parties dans leurs écritures que le délai d'appel ne court que lorsque le destinataire a eu connaissance de la décision.
Sur la recevabilité de l'appel :
L'ordre des avocats de La Rochelle a adressé sa décision à Madame [N], par lettre recommandée qui est certifiée distribuée par la poste le 10 avril 2020. Madame [N] indique "n'avoir aucun souvenir d'avoir reçu cette lettre recommandée". A la place de sa signature, apparait la mention "Covid 19" qui fait référence à la période exeptionnelle de confinement sanitaire. Les agents de la poste ayant pour consigne à l'époque de limiter les contacts avec la population pour éviter la propagation du virus, la mention explicite de la remise ne peut être contestée. La lecture du document accusé de réception ne laisse aucun doute sur l'expression du facteur, qui indique clairement avoir "remis" le courrier.
De son coté Madame [N] n'indique pas à quel moment elle a eu, selon elle, connaissance de la décision. Elle se contente d'indiquer ne l'avoir "découverte que postérieurement".
Il doit donc etre constaté que Madame [N] a bien eu connaissance de la décision le 10 avril 2020. Le certificat de non appel du 29 juin 2020 a donc été régulièrement délivré.
Sur le procès verbal de recherches infructueuses :
Maitre [I] a ensuite missionné un huissier de justice pour signification de la décision, rendue entre temps exécutoire par ordonnance du tribunal judiciaire de La Rochelle le 3 aout 2020. L'huissier a dressé le 28 decembre 2020 un procès-verbal de recherches infructueuses, conformément à l'article 659 du code de procédure civile. L'huissier y décrit ses diligence : déplacement au domicile de Madame [K] [N], constat sur place d'absence de nom sur une boite à lettres, appels téléphoniques, recherche sur google. Des vérifications auprès du trésor public, de pôle emploi et de la CAF sont attestées par les courriers.
L'ensemble de ces recherches sont contestées par Madame [K] [N] qui verse au dossier l'attestation de l'entreprise Agir pro qui indique avoir été sur place, en sa présence, pour des travaux le 28 décembre 2020.
Que les discussions sur la nullité du procès verbal sont sans conséquence sur la recevabilité de l'appel.
Sur le fond :
Sur la convention d'honoraires :
Les contestations concernant le montant et le recouvrement des honoraires des avocats sont réglées en recourant à la procédure prévue aux articles 174 et suivants du décret no91-1197 du 27 novembre 1991.
Il résulte de l'article 10 de la loi no71-1130 du 31 décembre 1971, modifié par la loi du 10 juillet 1991 portant réforme de certaines professions judiciaires et juridiques, que sauf en cas d'urgence ou de force majeure ou lorsqu'il intervient au titre de l'aide juridictionnelle totale ou de la troisième partie de la loi no 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique, l'avocat conclut par écrit avec son client une convention d'honoraires, qui précise notamment le montant ou le mode de détermination des honoraires couvrant les diligences prévisibles, ainsi que les divers frais et débours envisagés.
Cependant, en l'absence de convention les honoraires sont alors fixés selon les usages, en tenant compte de la situation de fortune du client, de la difficulté de l'affaire, des frais exposés par l'avocat, de sa notoriété et des diligences de celui-ci.
Qu'en conséquence, l'absence de convention d'honoraires, d'autant plus dans le cadre d'une procédure d'urgence, ne saurait priver Maitre [I] de son droit à rémunération.
Sur les diligences accomplies et le montant des honoraires :
L'article 10 de la loi no71-1130 du 31 décembre 1971 portant réforme de certaines professions judiciaires et juridiques prévoit que "l'avocat conclut par écrit avec son client une convention d'honoraires, qui précise, notamment, le montant ou le mode de détermination des honoraires couvrant les diligences prévisibles, ainsi que les divers frais et débours envisagés. Les honoraires tiennent compte, selon les usages, de la situation de fortune du client, de la difficulté de l'affaire, des frais exposés par l'avocat, de sa notoriété et des diligences de celui-ci."
Maitre [I] a assisté Madame [N] dans le cadre de la garde à vue pour une affaire de stupéfiants, au titre d'une commission d'office pour laquelle elle a été rémunérée. Sa demande d'honoraires ne concerne pas cette mission.
Maitre [I] a ensuite assitée Madame [N] lors de son défèrement puis pendant l'audience de comparution immédiate du 21 mai 2019, au cours de laquelle un renvoi a été ordonné avec placement sous controle judiciaire. Le dossier a été étudié, des échanges teléphoniques ont eu lieu.
Les honoraires facturés sont conformes aux usages, difficulté de l'affaire et diligences accomplies. Il convient d'en confimer le montant à hauteur de 300 euros TTC.
Sur l'article 700 du code de procédure civile :
Le juge condamne la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens en tenant compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à ces condamnations.
En l'espèce il apparait inéquitable de laisser Maitre [I] supporter les frais par elle exposés. Madame [N], qui succombe, sera condaméne à 300 euro sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS :
Nous, Gwenola Joly-Coz, première présidente, statuant publiquement et par décision contradictoire,
Déclarons le recours irrecevable ;
Disons n'y avoir lieu à annulation ni du certificat de non appel du 29 juin 2020, ni du procès verbal de recherches infructueuses du 28 décembre 2020 ;
Confirmons l'ordonnance du bâtonnier de l'ordre des avocats du barreau de La Rochelle-Rochefort en date du 3 avril 2020, en ce qu'il fixe à la somme de 300 € TTC les honoraires dus par Madame [K] [N] à Maitre [I] ;
Condamnons Madame [K] [N] à verser à Maître [I] la somme de 300 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile outre les dépens.
La greffière,La première présidente,