Ordonnance n° 52
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16 Juillet 2019
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No RG 19/00046
No Portalis DBV5-V-B7D-FYHP
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SCI MAIRE GUITON
C/
SAS TOO ANDRE
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R E P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE POITIERS
ORDONNANCE DU PREMIER PRÉSIDENT
RÉFÉRÉ
Rendue publiquement le seize juillet deux mille dix neuf par M. Thierry HANOUËT, premier président de la cour d'appel de Poitiers, assisté de Mme Inès BELLIN, greffier,
Dans l'affaire qui a été examinée en audience publique le vingt juin deux mille dix neuf, mise en délibéré au seize juillet deux mille dix neuf.
ENTRE :
SCI MAIRE GUITON, Société Civile Immobilière au capital de 750.000 € immatriculée au Registre du Commerce et des Sociétés de LA ROCHELLE sous le no 487 808 859, représentée par Mesdames R... F... et Q... J..., cogérantes, domiciliées en cette qualité audit siège social sis [...]
Représentant : Me Fabien-jean GARRIGUES, substitué par Me KIENNER Yohan de la SCP GARRIGUES ASSOCIES, avocats au barreau de LA ROCHELLE-ROCHEFORT
DEMANDEUR en référé ,
D'UNE PART,
ET :
SAS TOO ANDRE, Société par Actions Simplifiée au capital de 1.000 €, immatriculée au Registre du Commerce et des Sociétés de GRENOBLE sous le no 838 431 013, représentée par son Président, domicilié en cette qualité audit siège social sis [...]
Représentants : - Me Jérôme CLERC, substitué par Me THIBAULT, de la SELARL LEXAVOUE POITIERS - ORLEANS, avocat au barreau de POITIERS, avocat constitué
- Me Séverine VALADE, avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant
DEFENDEUR en référé ,
D'AUTRE PART,
Par acte d'huissier délivré le 22 mai 2019, la SCI MAIRE GUITON a fait assigner en référé la SAS TOOANDRE, sur le fondement de l'article 524 du code de procédure civile, afin que soit ordonné l'arrêt de l'exécution provisoire dont est assorti le jugement rendu par le juge des loyers commerciaux du tribunal de grande instance de LA ROCHELLE en date du 19 mars 2019 dont elle a relevé appel le 26 avril suivant.
À l'audience du 20 juin 2019, la SCI MAIRE GUITON a indiqué que l'exécution provisoire aurait des conséquences manifestement excessives compte tenu de sa situation financière. Ne disposant pas des ressources nécessaires pour régler le montant des condamnations elle se trouverait immédiatement en état de cessation des paiements.
La SAS TOOANDRE s'oppose à la demande de la SCI MAIRE GUITON. Elle souligne que cette dernière ne produit aucune pièce comptable attestant de son prétendu état de cessation des paiements, qu'elle a été négligente en ne provisionnant pas de sommes sur les loyers versés, qu'enfin, il lui est tout à fait possible de recourir à un emprunt pour rembourser sa dette.
Reconventionnellement, elle sollicite la somme de 1500 euros par application de l'article 700 du CPC.
MOTIFS :
En droit, l'article 524 du code de procédure civile dispose que "lorsque l'exécution provisoire a été ordonnée, elle ne peut être arrêtée, en cas d'appel, que par le premier président et dans les cas suivants :
1o Si elle est interdite par la loi ;
2o Si elle risque d'entraîner des conséquences manifestement excessives ; dans ce dernier cas, le premier président peut aussi prendre les mesures prévues aux articles 517 à 522.
Le même pouvoir appartient, en cas d'opposition, au juge qui a rendu la décision.
Lorsque l'exécution provisoire est de droit, le premier président peut prendre les mesures prévues au deuxième alinéa de l'article 521 et à l'article 522.
Le premier président peut arrêter l'exécution provisoire de droit en cas de violation manifeste du principe du contradictoire ou de l'article 12 et lorsque l'exécution risque d'entraîner des conséquences manifestement excessives".
L'appréciation du bien-fondé de la décision entreprise ressort exclusivement de l'appréciation de la cour statuant au fond, le premier président ou son délégataire n'ayant pas à se prononcer sur le bien fondé ou le mal fondé des moyens développés par la requérante au soutien de son appel mais uniquement sur les conséquences susceptibles d'être engendrées par l'exécution provisoire sur sa situation, eu égard à ses facultés de paiement ou aux facultés de remboursement de son adversaire dans l'hypothèse d'une infirmation du jugement dont appel.
Les critères d'appréciation tenant aux facultés de paiement du débiteur ou aux facultés de remboursement du créancier sont alternatifs et non cumulatifs.
Par jugement du juge des loyers commerciaux du tribunal de grande instance de LA ROCHELLE, en date du 19 mars 2019, la SCI MAIRE GUITON a été notamment condamnée à rembourser à la SAS TOOANDRE les trop perçus de loyers depuis le 1er janvier 2016, avec intérêts au taux légal à compter de chaque échéance trimestrielle, et la somme de 4500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et ce, sous le bénéfice de l'exécution provisoire. Le total des sommes dues s'établit à la somme de 187 312,70 euros suivant compte en date du 23 mai 2019.
Il appartient à la partie en demande d'établir que l'exécution du jugement en cause aurait pour elle des conséquences manifestement excessives.
Il sera rappelé qu'il n'entre pas dans les pouvoirs du premier président, saisi d'une demande tendant à l'arrêt de l'exécution provisoire ordonnée par le juge, d'apprécier la régularité ou le bien fondé de la décision entreprise.
La SCI MAIRE GUITON soutient que l'exécution provisoire aurait des conséquences manifestement excessives compte tenu de sa situation financière car, ne disposant pas des ressources nécessaires pour régler le montant des condamnations, elle se trouverait immédiatement en état de cessation des paiements. Elle verse à l'appui de sa demande une attestation en ce sens de son expert-comptable (pièce 3).
La SAS TOOANDRE fait observer à juste titre qu'il n'est produit aucune pièce comptable par la SCI MAIRE GUITON, ni aucune autre pièce, en sorte qu'on ignore tout de la consistance de son patrimoine, de l'état de ses dettes et charges ou de sa trésorerie.
Il est constant que le bail liant les parties est en cours depuis plus de 20 ans, moyennant un loyer annuel de 58 700 euros hors taxes, tel qu'arbitré par le juge des loyers commerciaux.
Il est possible que la SCI MAIRE GUITON ne dispose pas des liquidités nécessaires pour faire face au montant des condamnations. Pour autant, cela ne signifie pas qu'elle ne dispose par de la possibilité de recourir à un concours bancaire, au regard de son patrimoine et du revenu qu'elle en retire.
De ce qui précède, il résulte que la SCI MAIRE GUITON n'établit pas que l'exécution de la condamnation risque d'entraîner pour elle des conséquences manifestement excessives (elle a la charge de la preuve) en sorte qu'elle doit être déboutée de sa demande.
Il y a lieu d'accorder à la partie en défense la somme de 1500 euros par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS :
Nous, Thierry HANOUËT, premier président, statuant par mise à disposition au greffe, en matière de référé et par ordonnance contradictoire :
DEBOUTONS la SCI MAIRE GUITON de sa demande d'arrêt de l'exécution provisoire dont est assorti le jugement rendu par le juge des loyers commerciaux du tribunal de grande instance de LA ROCHELLE en date du 19 mars 2019 rendu entre les parties ;
CONDAMNONS la SCI MAIRE GUITON à verser à la SAS TOOANDRE la somme de 1500 euros par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
DEBOUTONS au surplus ;
CONDAMNONS la SCI MAIRE GUITON aux dépens.
Et nous avons signé la présente ordonnance avec le greffier.
Le greffier, Le premier président,
Inès BELLIN Thierry HANOUËT