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29/05/2018 | FRANCE | N°17/022371

France | France, Cour d'appel de Poitiers, Pp, 29 mai 2018, 17/022371


R E P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

MINUTE No2
COUR D'APPEL DE POITIERS
RG 17/02237
29 Mai 2018REPARATION A RAISON D'UNE DETENTION

Joachim X...

Décision en premier ressort rendue publiquement le vingt neuf mai deux mille dix huit, par Monsieur Thierry HANOUËT, premier président de la cour d'appel de Poitiers, assisté lors des débats et du prononcé de la présente décision de Madame Inès BELLIN, greffier,

Après débats en audience publique le 3 avril 2018 ;

Sur la requête en réparation de la détention fondÃ

©e sur les articles 149 et suivants et R26 et suivants du Code de procédure pénale présentée par

REQUERAN...

R E P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

MINUTE No2
COUR D'APPEL DE POITIERS
RG 17/02237
29 Mai 2018REPARATION A RAISON D'UNE DETENTION

Joachim X...

Décision en premier ressort rendue publiquement le vingt neuf mai deux mille dix huit, par Monsieur Thierry HANOUËT, premier président de la cour d'appel de Poitiers, assisté lors des débats et du prononcé de la présente décision de Madame Inès BELLIN, greffier,

Après débats en audience publique le 3 avril 2018 ;

Sur la requête en réparation de la détention fondée sur les articles 149 et suivants et R26 et suivants du Code de procédure pénale présentée par

REQUERANT :

Monsieur Joachim X...
né le [...] [...]
[...]

représenté par Me Matthieu COUTAND, avocat au barreau de LA ROCHELLE-ROCHEFORT

EN PRESENCE DE :

Monsieur l'agent judiciaire de l'Etat
Sous-direction du droit privé
[...]

représenté par Me Patrick ARZEL substitué par Me Renaud BOUYSSI , avocat au barreau de Poitiers

ET :

Madame le procureur général près la cour d'appel de [...]

représentée par Monsieur Frédéric CLOT, substitut général

X... Joachim, né le [...] à ROCHEFORT, a été placé en détention provisoire le 12 mars 2014 par le juge des libertés et de la détention de La Rochelle dans le cadre d'une information ouverte pour des faits de violences volontaires ayant entraîné la mort sans intention de la donner.

Il a été remis en liberté sous contrôle judiciaire le 3 décembre 2014 par décision du juge des libertés et de la détention de La Rochelle.

Il a été acquitté par arrêt de la cour d'assises du département de la Charente Maritime en date du 15 février 2017, décision qui n'a pas fait l'objet de recours suivant certificat de non appel du 27 septembre 2017.

Le 26 juin 2017, X... Joachim a déposé une requête sur le fondement des articles 149 et suivants du code de procédure pénale afin d'être indemnisé des presque 9 mois de détention dont il a fait l'objet entre le 12 mars et le 3 décembre 2014.

Il sollicite :
- 35 000 euros au titre de son préjudice moral,
- 13 390,65 euros au titre du préjudice matériel,
- 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

L'Agent judiciaire de l'État propose une indemnité de 17 000 euros au titre du préjudice moral et sollicite le rejet de la demande présentée au titre du préjudice matériel. Subsidiairement, il estime que l'allocation d'une somme forfaitaire de 5000 euros assurera une juste réparation de son préjudice. Il sollicite la réduction de la demande présentée au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Le procureur général requiert qu'il soit accordé la somme réclamée au titre du préjudice moral et que la demande présentée au titre du préjudice matériel soit limitée à la somme de 5000 euros.

MOTIFS DE LA DÉCISION

L'article 149 du code de procédure pénale dispose que la personne qui a fait l'objet d'une détention provisoire au cours d'une procédure terminée à son égard notamment par une décision de non-lieu, de relaxe ou d'acquittement devenue définitive a droit, à sa demande, à la réparation intégrale du préjudice moral et matériel que lui a causé cette détention.

En l'espèce, X... Joachim, placé en détention provisoire entre le 12 mars et le 3 décembre 2014, a bénéficié d'une décision d'acquittement par arrêt de la cour d'assises du département de la Charente Maritime en date du 15 février 2017.

Il a déposé sa requête en indemnisation le 15 juin 2017.

Il a donc droit à la réparation prévue par l'article 149 du code de procédure pénale précité et sa requête est recevable en la forme au regard des dispositions de l'article 149-2 du code de procédure pénale.

Il a effectué un petit peu moins de 9 mois de détention à la maison d'arrêt de Niort.

X... Joachim, âgé de 18 ans au moment de son incarcération, n'avait aucun antécédent judiciaire. Il a sans doute été éprouvé par la détention mais il n'évoque pas avoir eu besoin de soins médicaux.

Ses proches témoignent de la souffrance de X... Joachim et témoignent aussi de leur propre souffrance. Sa mère justifie par un certificat médical avoir été suivie pour un état dépressif consécutif à l'incarcération de son fils, sa concubine atteste des difficultés de son compagnon après sa remise en liberté (épisodes d'alcoolisation, dépression, idées suicidaires sans passages à l'acte).

Compte tenu de ces éléments et au vu des pièces produites, l'allocation d'une somme de 18 000 euros indemnisera intégralement le préjudice moral qu'il a subi du fait de sa détention. Ce préjudice consiste essentiellement dans le choc de la mise en détention pour un tout jeune homme sans antécédent et dans la réelle dureté de la vie carcérale à Niort compte tenu de l'état de la maison d'arrêt, majorée par le taux d'occupation élevée du lieu de détention.

Au titre du préjudice matériel, il est sollicité la somme de 13390,65 euros pour les pertes de salaires subies soit 9 x 1487,85 euros, alors qu'il était en intérim et effectuait des missions pour la société TIMAC AGRO en qualité d'ensacheur.

X... Joachim produit des contrats de missions temporaires à plein temps pour les périodes du 16 au 27 décembre et 30 au 31 décembre 2013, du 1er au 3, du 6 au 8, du 9 au 17 et du 20 au 24 janvier 2014, du 10 au 21, du 24 au 28 février, du 3 au 14 mars.

Il justifie donc avoir travaillé trois mois sans évoquer qu'il aurait travaillé antérieurement et au vu des bulletins de salaires produits, sa rémunération mensuelle s'établissait à la somme de 1487,85 euros.

Son inscription dans un parcours professionnel était très récente et précaire, s'agissant de missions d'intérim.

Pour autant, X... Joachim a travaillé très régulièrement pendant cette période pour le même employeur, ce qui laisse à penser qu'il donnait satisfaction.

Le renouvellement de ses missions a été interrompu par son placement en détention et compte tenu de ce qui précède il pouvait légitimement penser qu'elles se poursuivraient, mais sans réelle certitude.

Il a donc subi une perte de chance de continuer à travailler pour la société TIMAC AGRO qui, compte tenu de la précarité de la relation de travail sera fixée à 40%.

Dès lors, son préjudice matériel sera retenu à hauteur de la somme de 1487,85 euros x 9/0,40 = 5356,26 euros.

Les conditions d'application de l'article 700 du code de procédure civile sont réunies au vu des pièces du dossier. Il convient d'allouer à X... Joachim une somme de 1 000 euros à ce titre.

PAR CES MOTIFS

Vu l'article R. 38 du Code de procédure pénale ;

Statuant publiquement, sur requête en matière de réparation de la détention et en premier ressort,

Déclarons la requête de X... Joachim recevable ;

Allouons à X... Joachim les sommes de :

- 18 000 euros en réparation de son préjudice moral,
- 5356,26 euros au titre de son préjudice matériel
- 1 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

Déboutons au surplus ;

Laissons les dépens à la charge de l'État.

Et nous avons signé la présente ordonnance avec le greffier.

Le greffier, Le premier président,

I. BELLIN T. HANOUËT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Poitiers
Formation : Pp
Numéro d'arrêt : 17/022371
Date de la décision : 29/05/2018
Sens de l'arrêt : Fait droit à une partie des demandes du ou des demandeurs sans accorder de délais d'exécution au défendeur

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.poitiers;arret;2018-05-29;17.022371 ?
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