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02 Décembre 2008
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08 / 03541
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Serge X...,
Sté MATEX
C /
DIRECTION NATIONALE D'ENQUETES FISCALES
COUR D'APPEL DE POITIERS
ORDONNANCE DU PREMIER PRESIDENT
Rendue publiquement le deux Décembre deux mille huit par Monsieur Yves DUBOIS, Président de Chambre agissant en remplacement du Premier Président de la cour d'appel de Poitiers, assisté de Stéphanie VERGER, greffier présent lors des débats,
Dans l'affaire qui a été examinée en audience publique le 18 Novembre 2008.
ENTRE :
Monsieur Serge X...
...
01220 DIVONNE LES BAINS
Non comparant, représenté par la S. C. P. GALLET ALLERIT, avoués à la Cour, et par la SELARL Arcane Juris, représentée par Me Jean-François DUCHENE, avocat, société inscrite aux barreaux de Bonneville et Thonon les Bains
Société MATEX
...
01220 DIVONNE LES BAINS
Représentée par la S. C. P. GALLET ALLERIT, avoués à la Cour, et par la SELARL Arcane Juris, représentée par Me Jean-François DUCHENE, avocat, société inscrite aux barreaux de Bonneville et Thonon les Bains
APPELANT,
D'UNE PART,
ET :
DIRECTION NATIONALE D'ENQUETES FISCALES
6 bis rue Courtois
93695 PANTIN CEDEX
Représentée par Me Dominique HEBRARD MINC, avocat au barreau de MONTPELLIER
INTIMÉ,
D'AUTRE PART, Par ordonnance du 24 Septembre 2008 prise en application des dispositions de l'article L 16 B du Livre des Procédures Fiscales, le Juge des Libertés et de la Détention du Tribunal de Grande Instance de Rochefort sur Mer a autorisé des agents spécialement habilités par le Directeur général des Finances Publiques à effectuer une visite domiciliaire de locaux situés à Saint Georges d'Oléron (17) susceptibles d'être occupés par le président de la Société MATEX, Monsieur X..., et / ou son épouse, pour procéder à la recherche des preuves de la fraude fiscale dont cette société et son dirigeant sont suspectés.
La Société MATEX et Monsieur X... ont interjeté appel de cette décision qu'ils entendent voir annuler, tandis que Monsieur le Directeur général des Finances Publiques conclut à sa confirmation. Chacune des parties réclame à l'autre la somme de 1. 500 € sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile.
MOTIFS
En vertu des dispositions de l'article L 16 B du Livre des Procédures Fiscales, lorsque l'autorité judiciaire, saisie par l'administration fiscale, estime qu'il existe des présomptions qu'un contribuable se soustrait à l'établissement ou au paiement des impôts sur le revenu ou sur les bénéfices ou de la taxe sur la valeur ajoutée en se livrant à des achats ou à des ventes sans facture, en utilisant ou en délivrant des factures ou des documents ne se rapportant pas à des opérations réelles ou en omettant sciemment de passer ou de faire passer des écritures ou en passant ou en faisant passer sciemment des écritures inexactes ou fictives dans des documents comptables dont la tenue est imposée par le code général des impôts, elle peut, dans les conditions prévues au II, autoriser les agents de l'administration des impôts, ayant au moins le grade d'inspecteur et habilités à cet effet par le directeur général des impôts, à rechercher la preuve de ces agissements, en effectuant des visites en tous lieux, même privés, où les pièces et documents s'y rapportant sont susceptibles d'être détenus et procéder à leur saisie, quel qu'en soit le support.
Chaque visite doit être autorisée par une ordonnance du juge des libertés et de la détention du tribunal de grande instance dans le ressort duquel sont situés les lieux à visiter.
Le juge doit vérifier de manière concrète que la demande d'autorisation qui lui est soumise est bien fondée ; cette demande doit comporter tous les éléments d'information en possession de l'administration de nature à justifier la visite.
... Le juge motive sa décision par l'indication des éléments de fait et de droit qu'il retient et qui laissent présumer, en l'espèce, l'existence des agissements frauduleux dont la preuve est recherchée.
En l'espèce, la Société MATEX, dont le siège social est à Divonne les Bains (01), est spécialisée dans l'achat et la revente de silicium à tous les niveaux de sa transformation. Elle fait l'objet d'une procédure de vérification de comptabilité et d'un contrôle étendu en matière de taxes sur le chiffre d'affaires. C'est dans ce cadre que l'administration fiscale a présenté le 17 Septembre 2008 au Juge des Libertés et de la Détention une requête aux fins d'autorisation de visite domiciliaire, au motif que la SAS MATEX est présumée procéder à des majorations de charges et en conséquence à une minoration de son résultat imposable par le biais du règlement de factures de commissions litigieuses émises par plusieurs sociétés liées à son Président Monsieur X... et ainsi procéderait à la passation d'écritures comptables irrégulières, se soustrayant à l'établissement et au paiement de l'impôt sur les sociétés et de la TVA.
La régularité de cette requête, qui permet d'apprécier qu'il existe des motifs raisonnables de croire qu'une infraction existe, n'est pas discutée.
Les appelants considèrent que le Juge des Libertés et de la Détention s'est contenté d'une motivation générale, qu'il n'a pas exercé un contrôle à charge et à décharge, et que le défaut de communication de deux pièces par l'Administration ne lui a pas permis de vérifier le caractère licite ou non de leur origine.
Cependant, la lecture de l'Ordonnance entreprise permet de constater que le juge a procédé dans un premier temps à une description détaillée des pièces produites par l'administration à l'appui de sa requête, en précisant pour celles qui le justifiaient leur origine (fichiers informatisés internes de la DGI, sites Internet d'accès publics...) et en concluant qu'elle était apparemment licite, sans omettre les éléments à décharge tels que les explications du cabinet comptable de la Société MATEX (pièce 2) ou le procès-verbal de clôture d'enquête du 3 Mai 2007 aux termes duquel les documents consultés au sein de ce cabinet comptable n'avaient pas permis de constater de manquements aux règles de facturation.
Dans un deuxième temps, et sur pas moins de sept pages, le magistrat a procédé, par une motivation extrêmement sérieuse au contraire de ce qui est prétendu, à une analyse concrète et objective des pièces qui l'a conduit à constater l'existence de présomptions des infractions recherchées par l'administration fiscale, tenant notamment à l'importance et aux variations du taux de commissions versées à certaines sociétés étrangères pratiquement fictives et dans lesquelles Monsieur X... paraissait personnellement impliqué, ceci bien évidemment au-delà de la régularité apparente des documents examinés au cabinet comptable de la Société MATEX.
Quant aux mentions : " pièce no8 : non attribuée ; pièce no9 : non attribuée ", il s'agit manifestement du mode de cotation de son dossier par l'administration fiscale qui avait " réservé " ces deux cotes sans y inclure de documents, sans que rien ne permette de présumer que la demande ne comportait pas tous les éléments d'information en possession de l'administration de nature à justifier la visite.
L'Ordonnance entreprise n'étant pas autrement contestée et le Juge des Libertés et de la Détention ayant satisfait aux exigences de l'article L 16 B du Livre des Procédures Fiscales, sa décision sera confirmée.
Enfin, il est équitable de faire application des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile.
PAR CES MOTIFS
Confirmons l'Ordonnance entreprise.
Condamnons la Société MATEX et Monsieur X... aux dépens et à payer à Monsieur le Directeur général des Finances Publiques la somme de 1. 200 € au titre des frais irrépétibles.
Les condamnons aux dépens.