ARRÊT No
R.G : 06/00209
SARL RENOBAT
C/
SA GENERALI FRANCE
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE POITIERS
1ère Chambre Civile
ARRÊT DU 05 DÉCEMBRE 2007
Numéro d'inscription au répertoire général : 06/00209
Décision déférée à la Cour : Jugement du 2 novembre 2005 rendu par le Tribunal de Grande Instance de LA ROCHELLE.
APPELANTE :
SARL RENOBAT
dont le siège social est 2 résidence du Fief Retaille
17220 LA JARRIE
agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux, et notamment de son Gérant domicilié en cette qualité audit siège,
représentée par la SCP TAPON-MICHOT, avoués à la Cour,
assistée de la SCP MATHIERE ET ASSOCIES, avocats au barreau de LA ROCHELLE, qui a été entendue en sa plaidoirie ;
INTIMÉE :
SA GENERALI FRANCE, venant aux droits de GENERALI FRANCE ASSURANCES
dont le siège social est 7 bd Haussmann
75456 PARIS
agissant poursuites et diligences du Président de son Conseil d'Administration domicilié en cette qualité audit siège,
représentée par la SCP GALLET-ALLERIT, avoués à la Cour,
assistée de Maître Michel BELLAICHE, substitué par Maître Emmanuelle DEVIN, avocat au barreau de PARIS, qui a été entendue en sa plaidoirie ;
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 17 Octobre 2007,en audience publique, devant la Cour composée de :
M. Xavier SAVATIER, Président,
Madame Marie-Jeanne CONTAL, Conseiller,
Madame Catherine KAMIANECKI, Conseiller,
qui en ont délibéré
GREFFIER, lors des débats : Madame Sandra BELLOUET
ARRÊT:
- CONTRADICTOIRE
- Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Nouveau Code de Procédure Civile,
- Signé par Monsieur Xavier SAVATIER, Président, et par Madame Sandra BELLOUET, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
FAITS ET PROCÉDURE
La S.A.R.L. RENOBAT bénéficiait d'une police d'assurance garantissant sa responsabilité d'entrepreneur dans le cadre de l'assurance décennale obligatoire souscrite auprès de la CAISSE GÉNÉRALE D'ASSURANCES MUTUELLES (C.G.A.).
Elle est intervenue en qualité de sous-traitant de la Société MAREVA sur le chantier des époux A... qui s'est achevé au mois de janvier 1997.
Les époux A... se plaignant de désordres ont obtenu une mesure d'expertise judiciaire par ordonnance de référé.
La S.A.R.L. RENOBAT a régulièrement déclaré le sinistre auprès de la C.G.A..
En cours de procédure, la Commission de Contrôle des assurances a, par décision en date du 6 février 2003, retiré tous les agréments administratifs de la C.G.A. ce qui a entraîné la cessation de plein droit de tous les contrats souscrits par cette société dans le délai de quarante jours.
La Compagnie GENERALI ASSURANCES IARD a repris une partie des assurés de la C.G.A. dont la S.A.R.L. RENOBAT.
Par jugement en date du 2 juillet 2003, le Tribunal de Grande Instance de ROCHEFORT a condamné la S.A.R.L. RENOBAT et la C.G.A. à garantir la Compagnie d'assurance AVIVA, assureur décennal de la Société MAREVA, à concurrence de 61.866,67 € au titre du préjudice matériel et la somme de 6.500 € au titre du préjudice immatériel.
La S.A.R.L. RENOBAT s'est retournée vers la Société ACS, chargée de la gestion des sinistres de la C.G.A., par Maître B..., mandataire liquidateur de la C.G.A.. Par courrier en date du 26 février 2004, la Société ACS a informé la S.A.R.L. RENOBAT qu'elle procédait à l'inscription de la créance au passif de la liquidation de la C.G.A..
La S.A.R.L. RENOBAT, considérant que la Compagnie GENERALI ASSURANCES IARD assurait la continuité du contrat, a assigné cette dernière pour l'entendre condamner à la garantir de toutes condamnations dues au titre du jugement du Tribunal de Grande Instance de ROCHEFORT du 2 juillet 2003.
Par jugement contradictoire en date du 2 novembre 2005, le Tribunal de Grande Instance de ROCHEFORT SUR MER a :
- débouté la S.A.R.L. RENOBAT de ses prétentions tendant à voir déclarer la Compagnie GENERALI ASSURANCES IARD contractuellement tenue de garantir le sinistre objet de sa condamnation par le Tribunal de Grande Instance de ROCHEFORT du 2 juillet 2003 et l'ensemble des sinistres consécutifs à un dommage survenu pendant le délai de la garantie décennale et relatifs à des travaux ayant fait l'objet d'une ouverture de chantier depuis le 1er janvier 1993, s'il s'agissait de sinistres déjà connus ;
- débouté la S.A.R.L. RENOBAT de sa demande tendant à voir constater la nullité de l'avenant du 7 juillet 2003 ;
- déclaré la Compagnie GENERALI ASSURANCES IARD responsable du manquement de ses agents à leur obligation de conseil ;
- condamné la Compagnie GENERALI ASSURANCES IARD à garantir la S.A.R.L. RENOBAT des condamnations prononcées à son encontre le 2 juillet 2003 à hauteur de la moitié ;
- débouté la S.A.R.L. RENOBAT de sa demande en dommages et intérêts ;
- condamné la Compagnie GENERALI ASSURANCES IARD à verser à la S.A.R.L. RENOBAT la somme de 1.000 € au titre des dispositions de l'article 700 du Nouveau code de Procédure civile ;
- ordonné l'exécution provisoire ;
- condamné la Compagnie GENERALI ASSURANCES IARD aux entiers dépens de l'instance.
LA COUR
Vu l'appel de ce jugement interjeté par la S.A.R.L. RENOBAT selon déclaration au greffe de la Cour en date du 20 janvier 2006 ;
Vu les conclusions de la S.A.R.L. RENOBAT en date du 18 mai 2006 aux termes desquelles elle demande à la cour de :
- réformer le jugement entrepris en ce qu'il l'a déboutée de sa demande tendant à voir constater la nullité de l'avenant du 7 juillet 2003 ainsi qu'à voir déclarer la Compagnie GENERALI ASSURANCES IARD contractuellement tenue à garantir le sinistre, objet du jugement du 2 juillet 2003 et l'ensemble des sinistres consécutifs à un dommage survenu pendant le délai de la garantie décennale et relatifs à des travaux ayant fait l'objet d'une ouverture de chantier depuis le 1er janvier 1993 s'il s'agit de sinistres déjà connus ;
- dire que la Compagnie GENERALI ASSURANCES IARD a repris en l'état la police antérieurement souscrite par la S.A.R.L. RENOBAT auprès de la C.G.A. ;
- dire nulle la clause d'exclusion de reprise du passé figurant à l'avenant du 7 juillet 2003 ;
- dire que la Compagnie GENERALI ASSURANCES IARD devra couvrir l'ensemble des sinistres faisant l'objet d'une réclamation formulée pendant les dix années à compter de la réception de l'ouvrage et relatifs à des travaux ayant fait l'objet d'une ouverture de chantier postérieure au 1er mars 1993 ;
- condamner la Compagnie GENERALI ASSURANCES IARD à la garantir de toutes condamnations due au titre du jugement du 2 juillet 2003 ;
- dire que ces condamnations interviendront sous déduction des sommes d'ores et déjà réglées par les liquidateurs de la C.G.A. ;
- subsidiairement, confirmer le jugement en ce qu'il a déclaré la Compagnie GENERALI ASSURANCES IARD responsable du manquement de ses agents à leur obligation de conseil ;
- condamner la Compagnie GENERALI ASSURANCES IARD à garantir la S.A.R.L. RENOBAT de l'intégralité des condamnations prononcées à son encontre par le Tribunal de Grande Instance de ROCHEFORT suivant le jugement du 2 juillet 2003 ;
- condamner la Compagnie GENERALI ASSURANCES IARD au paiement de la somme de 10.000 € à titre de dommages et intérêts pour réparation du préjudice subi ;
- condamner la Compagnie GENERALI ASSURANCES IARD à lui verser la somme de 2.000 € par application de l'article 700 du Nouveau code de Procédure civile ;
Vu les conclusions de la Compagnie GENERALI ASSURANCES IARD du 6 octobre 2006 selon lesquelles la Compagnie GENERALI ASSURANCES IARD demande à la Cour de :
- confirmer le jugement , en ce qu'il a jugé que les garanties de la compagnie GENERALI ASSURANCES ne pouvaient être acquises ni pour le sinistre A..., ni pour aucun sinistre se rapportant à un chantier dont la déclaration d'ouverture est antérieure au 1cr février 2003 ;
- en toute hypothèse, dire que la garantie de la Compagnie GENERALI ASSURANCES ayant pris effet le 1er juillet 2003 ne peut être recherchée au titre d'un sinistre pleinement réalisé lors de la souscription, la police ayant de surcroît été souscrite sans reprise du passé inconnu ;
- débouter en conséquence la S.A.R.L. RENOBAT de l'ensemble de ses demandes ;
- dire que la société RENOBAT ne peut à l'évidence contester la réalité du contrat souscrit auprès de GENERALI, ayant réglé les primes depuis la souscription et signé l'avenant no1;
- débouter la société RENOBAT de l'ensemble de ses demandes ;
- dire que la Compagnie GENERALI ASSURANCES ne peut être recherchée au titre d'un défaut d'information et de conseil ;
- dire n'y avoir lieu à application des articles L 511-1 et R 511-1 du Code des assurances ;
- condamner la société RENOBAT à restituer à la compagnie GENERALI ASSURANCES les sommes réglées en exécution des condamnations prononcées par les premiers juges et ce avec intérêts à compter du jugement ;
- condamner la société RENOBAT à payer à la Compagnie GENERALI ASSURANCES la somme de 5.000 € sur le fondement de l'article 700 du Nouveau code de Procédure civile , ainsi qu'en tous les dépens ;
SUR CE
Il convient de rappeler que la Compagnie CGA a fait l'objet du retrait de tous ses agréments administratifs par la Commission de contrôle des assurances par décision du 6 février 2003 publiée au Journal Officiel du 7 février 2003.
Cette décision est postérieure à la déclaration de sinistre faite par la S.A.R.L. RENOBAT auprès de la Compagnie CGA le 20 février 2001 dans le cadre du chantier des époux A.....
En application des dispositions des articles L 326-2 et L 326-12 du Code des assurances, le retrait de l'agrément entraîne de plein droit à la date de sa publication la dissolution de la personne morale avec ouverture d'une procédure de liquidation judiciaire. Les contrats souscrits cessent de plein droit d'avoir effet le 40 ème jour à midi à compter de la publication au Journal Officiel de la décision de la Commission de contrôle des assurances.
Il n'est pas contesté par les parties que les contrats souscrits par la S.A.R.L. RENOBAT ont fait l'objet d'un transfert auprès de la S.A. GENERALI FRANCE.
En effet, par courrier en date du 7 mars 2003, l'agent général d'assurance représentant à l'origine la Compagnie CGA repris par la S.A. GENERALI FRANCE a informé la S.A.R.L. RENOBAT de ce que tous ses contrats étaient transférés en l'état à la S.A. GENERALI FRANCE et qu'elle n'avait aucune démarche à effectuer.
Si ce courrier peut être considéré comme prêtant à confusion, dans un second courrier en date du 24 mars 2003, la S.A. GENERALI FRANCE a écrit à la S.A.R.L. RENOBAT : nous nous sommes engagés à garantir la totale continuité de vos contrats. Nous vous confirmons donc que sauf cas de refus formel de votre part, vous êtes assuré auprès de GENERALI FRANCE assurances depuis le 1er février 2003. Dans les prochains jours, vous recevrez les nouveaux contrats qui matérialisent vos garanties.
Il ressort clairement de ce courrier que de nouveaux contrats allaient être proposés à la S.A.R.L. RENOBAT avec une prise d'effet au 1er février 2003 et que cette dernière avait la possibilité de refuser de contracter. Ces seuls éléments démontrent à l'évidence que la S.A. GENERALI FRANCE n'entendait pas poursuivre les contrats existants mais proposait simplement des contrats en tout point identique en remplacement de ceux qui cessaient de plein droit du fait de la liquidation judiciaire de la CGA.
La S.A. GENERALI FRANCE produit aux débats un exemplaire d'un contrat en date du 9 avril 2003 no AA210671 à date d'effet du 1er février 2003 ainsi qu'un avenant à ce même contrat en date du 9 juillet 2003.
Si effectivement le contrat initial ne porte aucune signature de la part de la S.A.R.L. RENOBAT, il n'en demeure pas moins que l'avenant, lui, a été signé par la S.A.R.L. RENOBAT . En outre, la S.A.R.L. RENOBAT ne prétend nullement ne pas avoir contracté avec la S.A. GENERALI FRANCE puisqu'elle demande sa garantie . Elle ne conteste que le contenu de ce contrat et notamment la validité de la clause d'exclusion de reprise du passé.
Or il y a lieu de noter que l'avenant signé par la S.A.R.L. RENOBAT précise en caractères très apparents, dans un paragraphe spécifique avec un titre en majuscules et en gras la mention EXCLUSION DE LA REPRISE DU PASSE et renvoie aux dispositions générales du contrat.
En outre, la mention de cette clause figure juste au dessus de la signature de la S.A.R.L. RENOBAT. Il apparaît ainsi que la clause d'exclusion a été régulièrement portée à la connaissance de la S.A.R.L. RENOBAT qui en signant cet avenant a manifestement accepté cette clause laquelle est donc parfaitement valable.
Au vu de l'ensemble de ces éléments et en application des dispositions de l'article L 121-15 du code des assurances, il y a lieu de débouter la S.A.R.L. RENOBAT de sa demande dirigée contre la S.A. GENERALI FRANCE tendant à l'entendre condamner à garantir le sinistre survenu sur le chantier des époux A... et ce tant en raison du fait que la S.A.R.L. RENOBAT a vu sa créance inscrite au passif de la liquidation de la CGA ainsi que cela résulte d'un courrier en date du 26 février 2004 du GIE ASSURANCES CONSTRUCTION SERVICE chargé, par délégation de Monsieur C..., liquidateur des opérations d'assurances de la CGA, de la gestion, qu'en raison de l'absence de tout aléa, le sinistre préexistant au contrat.
D'autre part, compte tenu de la validité de la clause d'exclusion de la reprise du passé rappelée ci-dessus, il y a lieu de débouter la S.A.R.L. RENOBAT de sa demande de condamnation de la S.A. GENERALI FRANCE à prendre en charge les sinistres consécutifs à un dommage survenant pendant le délai de garantie décennale et relatifs aux chantiers ouvert depuis le 1er janvier 1993 jusqu'au 1er février 2003.
La S.A.R.L. RENOBAT soutient qu'à tout le moins la S.A. GENERALI FRANCE a manqué à son obligation de conseil et de loyauté à son égard en lui laissant croire qu'elle garantissait la continuité des contrats.
Cependant c'est à tort que la S.A.R.L. RENOBAT prétend qu'elle pensait que la S.A. GENERALI FRANCE la représenterait devant la juridiction chargée du litige l'opposant aux époux A... puisque par un courrier en date du 16 juin 2003, le GIE ASSURANCES CONSTRUCTION SERVICE l'avait informée de la nécessité pour elle de se faire représenter par son propre conseil.
Au surplus, même à supposer que l'agent général d'assurance ou la S.A. GENERALI FRANCE n'aient pas été suffisamment précis sur la portée du nouveau contrat, il n'est nullement démontré que ce défaut d'information serait à l'origine d'un préjudice direct de la S.A.R.L. RENOBAT à savoir la perte d'une chance de se voir représenter devant le Tribunal de Grande Instance de ROCHEFORT qui l'a condamnée au paiement. En effet, dans la mesure où le contrat d'assurance de la S.A. GENERALI FRANCE ne pouvait porter sur un risque déjà réalisé, une information plus explicite n'aurait en rien modifié cette situation, la S.A.R.L. RENOBAT ne pouvant prétendre à aucun titre être prise en charge par la S.A. GENERALI FRANCE.
Il y a lieu de réformer le jugement déféré et de débouter la S.A.R.L. RENOBAT de sa demande de condamnation de la S.A. GENERALI FRANCE au paiement des sommes mises à sa charge par le Tribunal de Grande Instance de ROCHEFORT du 2 juillet 2003.
Enfin la S.A.R.L. RENOBAT succombant dans ses demandes, il y a lieu de la débouter de sa demande en dommages et intérêts fondée sur l'existence d'une attitude abusive de la part de la S.A. GENERALI FRANCE.
PAR CES MOTIFS
Confirme le jugement en ce qu'il a débouté la S.A.R.L. RENOBAT de ses prétentions tendant à voir déclarer la Compagnie GENERALI ASSURANCES IARD contractuellement tenue de garantir le sinistre objet de sa condamnation par le Tribunal de Grande Instance de ROCHEFORT du 2 juillet 2003 et l'ensemble des sinistres consécutifs à un dommage survenu pendant le délai de la garantie décennale et relatifs à des travaux ayant fait l'objet d'une ouverture de chantier depuis le 1er janvier 1993, s'il s'agissait de sinistres déjà connus ainsi que de sa demande tendant à voir constater la nullité de l'avenant du 7 juillet 2003.
Infirme pour le surplus.
Statuant à nouveau,
Déboute la S.A.R.L. RENOBAT tant de sa demande fondée sur un manquement de la S.A. GENERALI FRANCE à son obligation d'information.
La déboute en outre de sa demande en dommages et intérêts.
Déboute la S.A. GENERALI FRANCE de sa demande fondée sur l'article 700 du Nouveau code de Procédure civile.
Condamne la S.A.R.L. RENOBAT aux dépens d'instance et d'appel.
Autorise l'application de l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile.
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,