Tribunal de Grande Instance de LA ROCHE SUR YON Contentieux 1ère CHAMBRE CIVILE JUGEMENT du 04 Février 2003 DEMANDEUR : La Caisse de Mutualité Sociale de la VENDEE ayant son siège social 33 Boulevard Réaumur - 85011 LA ROCHE SUR YON CEDEX, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux demeurant en cette qualité audit siège. représentée par la SCP DE GUERRY DE BEAUREGARD - CUFI, avocats au barreau de LA ROCHE SUR YON, avocats plaidant. DEFENDEURS : La S.A. LES VOLAILLES DE SAINT MARS - SA au capital de 1 155 000 Francs, inscrite au RC 83 B 378 dont le siège social ets situé 7 rue Rouvet à PARIS 19ème, poursuites et diligences de son X... Directeur Général domicilié en cette qualité audit siège et ayant établissement secondaire à 44540 ST MARS LA JAILLE. représentée par Me Claude DOMINAULT, avocat au barreau de LA ROCHE SUR YON, avocat postulant et Me PAPIN LE BRESTEC Avocat au barreau de NANTES, avocat plaidant. La S.A. J.S.A. chez SA BOYE représentée par Mr Y..., ayant son siège "La Villonnière" - 79310 LA BOISSIERE EN GATINE. représentée par la SCP BUET-CAUMEAU-CHALOPIN, avocats au barreau de LA ROCHE SUR YON, avocats postulant et la SCP CORNET VINCENT ET ASSOCIES avocat au barreau de NANTES, avocat plaidant. Monsieur Z... A... pas constitué avocat. COMPOSITION DU TRIBUNAL : Lors des débats et du délibéré : Monsieur LAPEYRE X... ayant fait rapport en cours de délibéré à Monsieur ROVINSKI B... et Madame LE DU C.... Greffier : Madame D.... DEBATS : à l'audience publique du 5 NOVEMBRE 2002, le X... du Tribunal a indiqué aux parties que le jugement serait prononcé, pour plus ample délibéré à l'audience du 04 Février 2003. JUGEMENT : EXPOSE SOMMAIRE DES FAITS ET DES MOYENS DES PARTIES. Article 455 du nouveau Code de procédure civile.
Le 30 MAI 1995 Monsieur Z..., salarié de la Société JSA a été victime d'un accident du travail alors qu'il déchargeait un container de volailles aux abattoirs de la SA LES VOLAILLES DE SAINT MARS,
consécutif à la rupture d'une béquille soutenant la plate forme reliant le camion au quai de déchargement.
Monsieur E..., représentant la société LES VOLAILLES DE SAINT MARS et Monsieur Y..., représentant la Société JSA, ont été condamnés pour blessures involontaires avec ITT supérieure à trois mois par le tribunal correctionnel de NANTES le 28 MARS 1997.
Par ordonnance de référé du 5 FEVRIER 1999, une expertise médicale a été ordonnée à l'initiative de la C.M.S.A. de LA VENDEE, celle-ci se prévalant des dispositions de l'article L 454-1 du Code de la sécurité sociale selon lesquelles "Si la responsabilité du tiers est partagée avec l'employeur, la caisse ne peut poursuivre un remboursement que dans la mesure où les indemnités dues par elle en vertu du présent livre, dépassent celles qui auraient été mises à la charge de l'employeur en vertu du droit commun".
Sur la base du rapport d'expertise et afin d'établir le partage des responsabilités et ses suites, la C.M.S.A. de LA VENDEE a assigné par actes des 20 et 21 JUIN 2001 : - la SA LES VOLAILLES DE SAINT MARS, - la SA JSA chez SA BOYE, - Monsieur Z... et demande par conclusions récapitulatives du 11 MARS 2002 et sous réserve du partage des responsabilités entre eux la condamnation avec exécution provisoire de la SA LES VOLAILLES DE SAINT MARS à lui payer avec intérêts légaux à compter de la décision, la somme de 39 148,99 Euros outre celle de 1 000 Euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.
Elle fait valoir que le Tribunal de ce siège est bien compétent rationae materiae ; que les dispositions de l'article L 431-2 du Code de la Sécurité Sociale ne s'appliquent qu'aux droits aux prestations sociales et indemnités et ne peuvent s'appliquer en l'espèce, ce qui exclut toute prescription de son action avant le délai de dix ans prévu à l'article 2270-1 du Code civil ; subsidiairement que de
nombreux actes interruptifs de prescription sont intervenus ; qu'elle propose un partage à parité égale des responsabilités entre les sociétés défenderesses ; que les préjudices de droit commun peuvent être fixés comme suit : - frais médicaux
15 675,72 ä - I.T.T. (31/5/95 au 31/8/96
20 381,79 ä - ITP du 1/9/96 au 23/1/97
3 233,43 ä - IPP 8%
7 600,00 ä
-----------------
soit au total
46 890,94 ä
Que les indemnités qui auraient été mises à la charge de l'employeur peuvent être estimées à la somme de 23 445,47 Euros ;
Que les prestations de l'organisme social s'élèvent à la somme de 62 594,46 ä et qu'elle est donc bien fondée à réclamer la condamnation de la SA LES VOLAILLES DE SAINT MARS à lui payer la somme de 39 148,99 Euros ;
La SA JSA BOYE demande par conclusions du 10 NOVEMBRE 2001 que la
CMSA de VENDEE soit déboutée de ses prétentions et condamnée à lui payer la somme de 1 524,49 Euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.
Elle fait valoir que le tribunal correctionnel, suite à la constitution de partie civile de la C.M.S.A., a omis de statuer sur la demande de condamnation dirigée contre elle à payer la somme de 138 472,25 Francs, soit 21 109,96 , en principal ; que ce tribunal est toujours saisi et doit se prononcer sur recours en omission de statuer ; que deux juridictions ne peuvent être saisies d'une même demande en violation en outre de la règle "una via electa" ; qu'en outre, le recours de la C.M.S.A. fondé sur les dispositions de l'article L 454-1 du Code de la sécurité sociale se greffe sur l'action en responsabilité dirigée contre l'auteur du dommage et son assureur et relève de la compétence du même juge, soit le tribunal correctionnel de NANTES en l'espèce ; qu'enfin, l'action engagée par la C.M.S.A. de la VENDEE est prescrite en application des dispositions de l'article L 431-2 du Code de la sécurité sociale.
La SA LES VOLAILLES DE SAINT MARS demande par conclusions du 12 NOVEMBRE 2001 qu'il soit jugé que la responsabilité civile incombe à Monsieur Z... pour l'essentiel ; que le tribunal se déclare incompétent et au subsidiaire que les prétentions de la C.M.S.A. de VENDEE soient réduites et qu'en tout cas celle-ci soit condamnée à lu payer la somme de 914,69 Euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.
Elle expose que si le tribunal de céans est compétent pour se prononcer sur le partage des responsabilités, en revanche, il ne peut connaître de la demande en paiement de la C.M.S.A. de VENDEE qui relève de la compétence exclusive du Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale ; que Monsieur Z... a ignoré l'interdiction de
déchargement sans l'avis préalable du bureau ; que subsidiairement, il faut tenir compte de la part de responsabilité incombant à la société LES VOLAILLES DE SAINT MARS. SUR CE, SUR LA PRETENDUE OMISSION DE STATUER DU TRIBUNAL CORRECTIONNEL DE NANTES.
Attendu que le jugement du 28 MARS 1997 de cette juridiction, versé aux débats, fait apparaître la M.S.A. partie intervenante mais non comparante représentée par Maître FELS ; qu'en page 2 de la décision, il est noté de manière contradictoire aux mentions précédemment citées que "Maître FELS, avocat de la M.S.A. a été entendue en sa demande" ; que le reste du jugement tant dans ses motifs que dans son dispositif ne fait plus état de la présente et des demandes de l'organisme social en cause ;
Attendu que le tribunal correctionnel n'a pas omis de statuer sur les demandes présentées par la M.S.A. dès lors que cet organisme après constitution d'avocat n'a pas déposé ses conclusions demeurées à l'état de projet, l'absence de toute certification de leur dépôt par le greffier audiencier en faisant foi ;
Attendu que la M.S.A. ne peut en conséquence, à défaut de toute décision la concernant dans le jugement correctionnel définitif dont s'agit, se voir opposer une quelconque omission de statuer qui l'empêcherait aujourd'hui d'agir devant la juridiction civile ; SUR LA COMPETENCE RATIONAE MATERIAE DE LA JURIDICTION DE CEANS.
Attendu que le tribunal correctionnel n'a jamais été saisi des demandes relatives à la responsabilité civile consécutives à d'éventuelles réparations de dommages et de remboursements de créances des organismes sociaux ;
Attendu que, en vertu des dispositions de l'article L 454-1 du Code de la sécurité sociale applicables aux accidents du travail, "Les caisses primaires d'assurance maladie sont tenues de servir à la victime ou à ses ayants droit les prestations et indemnités prévues
par le présent livre, sauf recours de leur part contre l'auteur responsable de l'accident... Si la responsabilité du tiers auteur de l'accident est entière ou si elle est partagée avec la victime, la caisse est admise à poursuivre le remboursement des prestations mises à sa charge à due concurrence de la part d'indemnité mise à la charge du tiers qui répare l'atteinte à l'intégrité physique de la victime, à l'exclusion de la part d'indemnité, de caractère personnel, correspondant aux souffrances physiques ou morales par elle endurées et au préjudice esthétique et d'agrément... Si la responsabilité du tiers est partagée avec l'employeur, la caisse ne peut poursuivre un remboursement que dans la mesure où les indemnités dues par elle en vertu du présent livre dépassent celles qui auraient été mises à la charge de l'employeur en vertu du droit commun" ;
Attendu que le tribunal, juridiction de droit commun, est compétent pour statuer sur le partage éventuel des responsabilités entre l'employeur de la victime et le tiers impliqué dans l'accident du travail, préalable nécessaire à la mise en oeuvre de l'action en remboursement subrogatoire de la caisse et à la détermination du montant des réparations dues à la victime à l'occasion d'un accident du travail ayant par ailleurs donné lieu au service de prestations ; Que le tribunal est donc valablement saisi ; SUR L'EXCEPTION DE PRESCRIPTION.
Attendu que les droits de la victime ou de ses ayants droit aux prestations et indemnités prévues par le présent livre se prescrivent par deux ans en application des dispositions de l'article L 431-2 du Code de la sécurité sociale mais que celles-ci ne peuvent ici trouver à s'appliquer dès lors que le tribunal se trouve saisi du recours de la caisse en remboursement de ses prestations contre le tiers responsable auquel s'applique le délai de prescription de droit
commun fixé à l'article 2270-1 du Code civil ;
Que l'exception de prescription doit en conséquence être rejetée ; SUR LE PARTAGE DES RESPONSABILITES.
Attendu que de l'enquête de gendarmerie il ressort que l'accident est dû à la rupture brutale de la barre de fer droite soudée au hayon qui, placé en porte à faux du quai de déchargement, a été secoué violemment, entraînant le basculement d'un conteneur et la chute de la victime ;
Que de l'enquête, il ressort que la victime ne peut se voir reprocher aucune imprudence, le hayon étant par sa nature affecté au déchargement de conteneurs de poids élevés qui avaient été correctement manipulés et que l'accident est dû à la seule rupture de la béquille ;
Qu'il appartenait par ailleurs aux responsables de l'abattoir SA de SAINT MARS LA JAILLE d'émettre toutes objections et interdictions en temps utile relativement aux mode de déchargement pratiqué par les salariés de la société JSA et d'interdire notamment le stockage des conteneurs sur la plate forme ;
Qu'en outre, la Société JSA devait solliciter de la SA LES VOLAILLES DE SAINT MARS toutes informations pour prendre les mesures de prévention nécessaires, définir les moyens propres à éviter les risques liés aux installations et matériels et formuler toutes instructions utiles à ses salariés ; qu'ainsi, les deux employeurs ont négligé de définir concrètement les conditions matérielles de la livraison et d'être présents par leurs représentants compétents pour guider les opérations afférentes ;
Attendu que ces circonstances justifient que chaque employeur soit déclaré civilement responsable à hauteur de 50% ; SUR LA
DETERMINATION DU MONTANT DU PREJUDICE DE DROIT COMMUN ET LE PRONONCE D'UNE CONDAMNATION AU PAIEMENT.
Attendu que le tribunal de sécurité sociale de ce siège a compétence exclusive pour statuer sur le recours de l'organisme social fondé sur les dispositions de l'article L 454-1 du code de la sécurité sociale et qu'il y a lieu de renvoyer devant cette juridiction pour statuer sur ces points ;
Attendu que l'exécution provisoire, compatible avec la nature de l'affaire et le contenu de la décision, doit être ordonnée ;
Attendu que la somme de 600 euros doit être allouée à la C.M.S.A sur le fondement des dispositions de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ; PAR CES MOTIFS ------------------------
Le Tribunal statuant publiquement, par décision réputée contradictoire, en matière civile ;
Rejetant toutes exceptions et fins de non recevoir soulevées par les parties,
Dit que la SA VOLAILLES DE SAINT MARS et la Société J.S.A. sont responsables civilement chacune à hauteur de moitié des dommages subis par Monsieur Z... le 30 MAI 1995 ;
Vu les dispositions de l'article 96 du nouveau Code de procédure civile ;
Dit que le Tribunal de Sécurité Sociale de ce siège a compétence exclusive pour statuer sur le recours de la CAISSE de MUTUALITE SOCIALE AGRICOLE de LA VENDEE (C.M.S.A.) en application des dispositions de l'article L 454-1 du Code de la sécurité sociale contre le tiers civilement responsable ;
Renvoie de ce chef devant le Tribunal de Sécurité Sociale de LA ROCHE SUR YON et pour ce faire ordonne que le dossier de l'affaire lui soit transmis avec copie de la présente décision de renvoi après achèvement du délai de contredit ;
Rejette toutes autres demandes plus amples des parties ou contraires au présent dispositif ;
Ordonne l'exécution provisoire du présent jugement ;
Condamne la SA VOLAILLES DE SAINT MARS à payer à la CAISSE DE MUTUALITE SOCIALE AGRICOLE DE LA VENDEE (C.M.S.A.) la somme de 600 Euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ;
Condamne la SA VOLAILLES DE SAINT MARS et la Société J.S.A. chez SA BOYE aux dépens ;