La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

21/01/2003 | FRANCE | N°00/01149

France | France, Cour d'appel de Poitiers, 21 janvier 2003, 00/01149


Tribunal de Grande Instance de LA ROCHE SUR YON Contentieux 1ère CHAMBRE CIVILE JUGEMENT du 21 Janvier 2003 DEMANDEUR : Mr X DEFENDEURS : LA MEDICALE DE FRANCE dont le siège social est à Paris, prise en la personne de son représentant légal, le Directeur, domicilié es qualité audit siège. Mr X..., docteur en médecine LA CLINIQUE SAINT CHARLES dont le siège social est à LA ROCHE SUR YON, prise en la personne de son représentant légal domicilié es qualité audit siège. LE SOU MEDICAL ayant son siège à PARIS, pris en la personne de son représentant légal domicilié es qualité

audit siège. Monsieur Y..., docteur en médecine La CPAM DE LA VENDEE,...

Tribunal de Grande Instance de LA ROCHE SUR YON Contentieux 1ère CHAMBRE CIVILE JUGEMENT du 21 Janvier 2003 DEMANDEUR : Mr X DEFENDEURS : LA MEDICALE DE FRANCE dont le siège social est à Paris, prise en la personne de son représentant légal, le Directeur, domicilié es qualité audit siège. Mr X..., docteur en médecine LA CLINIQUE SAINT CHARLES dont le siège social est à LA ROCHE SUR YON, prise en la personne de son représentant légal domicilié es qualité audit siège. LE SOU MEDICAL ayant son siège à PARIS, pris en la personne de son représentant légal domicilié es qualité audit siège. Monsieur Y..., docteur en médecine La CPAM DE LA VENDEE, dont le siège social est à LA ROCHE SUR YON, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège. LA POSTE dont le siège est à LA ROCHE SUR YON, représentée par son Directeur Départemental, domicilié es qualité au dit siège. COMPOSITION DU TRIBUNAL : Lors des débats et du délibéré : Monsieur LAPEYRE Z... ayant fait rapport en cours de délibéré à Monsieur ROVINSKI A... et Mademoiselle LE DU B.... JUGEMENT : EXPOSE SOMMAIRE DES FAITS ET DES MOYENS DES PARTIES. Article 455 du nouveau Code de procédure civile.

Mr X qui souffrait du genou a fait l'objet d'une arthroscopie pratiquée par le Docteur Y... le 2 JUILLET 1996 à la Clinique SAINT CHARLES. Ce même praticien a procédé le 12 JUILLET 1996 à une ponction du genou.

Malgré une seconde ponction et une infiltration pratiquées par le Docteur X... et suite à l'aggravation de l'état de Mr X, le Docteur C... a pratiqué en urgence le 29 JUILLET 1996, à AIX LES THERMES une nouvelle ponction accompagnée d'une demande d'analyse du liquide synovial qui a révélé la présence d'un staphylocoque doré.

Une ordonnance de référé de ce siège du 17 JUILLET 1997 a ordonné une expertise confiée au Docteur D.... Ce dernier a rendu son rapport

en JUILLET 1998.

Pour obtenir réparation, Monsieur E... a assigné par actes des 14, 15, et 16 JUIN 2000 : - LA MEDICALE DE FRANCE, - LA Clinique SAINT CHARLES, - le Docteur Y..., - le Docteur X..., - le SOU MEDICAL et la CPAM de LA VENDEE, et demande dans ses conclusions récapitulatives du 4 SEPTEMBRE 2002 leur condamnation à lui payer, sur le fondement des dispositions de l'article 1147 du Code civil la somme de 34 797,06 Euros avec exécution provisoire outre celle de 4 000 Euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

Il explique que la clinique dont le praticien toujours responsable de sa propre faute utilise les instruments, est tenue par une présomption de faute en cas d'infection nosocomiale, sauf à elle de s'exonérer de sa responsabilité en démontrant que l'infection dont s'agit n'est pas imputable aux interventions pratiquées en son sein ; que cette infection n'était pas en incubation ni présente lors de son admission et que la clinique SAINT CHARLES, dénuée d'une obligation de sécurité résultat ne prouve pas l'existence d'une cause étrangère, que cette responsabilité présumée a été étendue aux praticiens tenus en conséquence in solidum à réparation avec l'établissement de soins ; que les dispositions de la loi du 4 MARS 2002 ne peuvent ici trouver à s'appliquer ; que les réparations suivantes lui sont dues :

- I.P.P.

4 573,45 ä - I.T.T. du 2/7/96 au 5/1/97

6 097,96 ä - préjudice professionnel

7 622,45 ä - prétium doloris 4/7

7 622,45 ä - préjudice esthétique

1 524,49 ä - préjudice d'agrément

4 573,41 ä - frais d'expertise

914,69 ä - frais divers

561,73 ä - frais kilométriques

1 306,37 ä

Par conclusions récapitulatives du 18 SEPTEMBRE 2002, Mr X... et son assureur LA MEDICALE DE FRANCE demandent le rejet des prétentions de Mr X dirigées contre eux et sa condamnation à leur payer la somme de 1 525 Euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

Ils expliquent que les soins médicaux prodigués ont été conformes aux données acquises de la science médicale et pratiqués sans faute ; que c'est seulement le 29 JUILLET 1996 que le liquide ponctionné est trouble après transport en voiture et réalisation par Mr X de pansements en camping dans des conditions d'hygiène et de sécurité sommaires ; qu'il y a ainsi cause étrangère exonératoire ; que les dispositions de la loi du 4 MARS 2002 ne peuvent trouver à s'appliquer.

Mr Y... et son assureur LE SOU MEDICAL demandent par conclusions du 7 JUIN 2002 que les prétentions de Mr X dirigées contre eux soient rejetées ; que subsidiairement celles-ci soient réduites ; que Mr X ou toutes parties déclarées responsables soient condamnés à leur payer la somme de 20 000 Francs, soit 3 048,98 sur le fondement des dispositions de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

Ils font valoir qu'aucune faute médicale n'est établie tant en ce qui concerne l'indication opératoire que la réalisation du geste opératoire et la surveillance de ses suites, que le rapport du Docteur F... est sans portée probante ; que l'infection nosocomiale peut être d'origine extérieure et n'existait pas avant le 22 JUILLET 1996 ; subsidiairement, que l'IPP ne peut excéder 3 % compte tenu de l'état antérieur ; que l'ITT ne peut être prise en compte que deux à quatre semaines après l'intervention ; qu'il n'existe aucun préjudice d'agrément ni esthétique.

La SA CLINIQUE SAINT CHARLES demande par conclusions du 3 SEPTEMBRE 2001 que Mr X soit débouté de ses prétentions ; subsidiairement, que la responsabilité soit partagée avec la victime et les praticiens incriminés ; que la créance de la CPAM soit fixée à la somme de 142 258,73 Francs que soient fixées comme suit les réparations : - I.T.T.

2 000,00 F - I.P.P.

20 000,00 F - préjudice professionnel

néant - prétium doloris

20 000,00 F - préjudice esthétique

5 000,00 F - préjudice d'agrément

néant - frais divers

957,28 F - frais kilométriques

néant qu'il soit jugé que la créance de LA POSTE doit être diminuée des prestations servies durant l'arrêt de travail initial du 9 JUILLET 1996 au 15 JUILLET 1996 et que les intérêts doivent courir à compter du 5 JANVIER 1997.

Elle fait valoir que le staphylocoque est un germe présent ailleurs que dans le milieu médical, qu'elle n'a commis aucune faute en matière d'hygiène et d'asepsie ; que Mr X n'a pas respecté les règles élémentaires de prudence post opératoires ; que les ponctions de liquide clair entre les 2 et 30 JUILLET 1996 prouvent qu'aucune infection n'existait alors ; que la tardiveté manifeste de l'infection exclut la contamination due au séjour en établissement de santé alors surtout que Mr X a eu un comportement en rupture avec les règles de sécurité minimales.

La CPAM de LA VENDEE demande par conclusions du 14 MARS 2001 en intervention la condamnation solidaire de Mr X..., Mr Y..., du SOU MEDICAL

et de LA MEDICALE DE FRANCE, enfin de LA CLINIQUE SAINT CHARLES à lui payer la somme de 146 368,21 F, soit 22 313,69 ä avec intérêts légaux au jour du paiement, sous réserve de prestations ultérieures, outre 5 000 Francs sur le fondement des dispositions de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

LA POSTE demande par conclusions du 29 OCTOBRE 2002 en intervention volontaire la condamnation solidaire des mêmes à lui payer avec exécution provisoire la somme de 9 296,23 Euros majorée des intérêts légaux à compter du 5 JANVIER 1997 outre celle de 1 524,49 Euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

Le Tribunal entend se référer ici, en tant que de besoin, notamment pour l'exposé des faits et du litige, tant à l'ordonnance de référé du 17 JUILLET 1997 qu'au jugement avant dire droit du 2 AVRIL 2002, lequel a invité les parties à conclure sur l'application de la loi nouvelle n°2002-303 du 4 MARS 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé.

De la même manière, et pour la position respective des parties, il est référé, conformément aux dispositions du décret n°98-1231 du 28 DECEMBRE 1998 modifiant le nouveau Code de procédure civile aux écritures des parties, en particulier aux conclusions signifiées postérieurement au 2 AVRIL 2002, sauf en ce qui concerne la CPAM de LA VENDEE qui a conclu en dernier lieu le 14 MARS 2001, étant précisé que l'affaire qui devait initialement être plaidée le 16 OCTOBRE 2001 a fait l'objet d'un renvoi à celle du 5 FEVRIER 2002 à la demande du conseil du demandeur, puis d'un nouveau renvoi de l'audience du 11 JUIN 2002 à celle du 5 NOVEMBRE 2002 pour l'établissement de conclusions récapitulatives.

L'affaire a été effectivement retenue à cette dernière audience.

DISCUSSION ------------------ CONCLUSIONS DU RAPPORT D'EXPERTISE.

Le Docteur D..., désigné par ordonnance de référé, lequel s'est fait assister du Professeur BAHUAUD du service d'orthopédie de l'hôpital PICQUE de BORDEAUX a indiqué dans son rapport déposé au greffe le 13 JUILLET 1998 que l'infection avait été diagnostiquée au 28 ème jour post opératoire, mais que le tableau s'était déclaré quelques heures après le 22 JUILLET 1996, s'agissant de la ponction, suivie d'une infiltration d'une ampoule de kénacort effectuée par le Docteur X... remplaçant le Docteur Y...

Ses conclusions ont été les suivantes :

L'arthrite à staphylocoque post opératoire est bien en rapport avec l'arthroscopie du 2 JUILLET 1996, et constitue bien ce que l'on appelle un infection nosocomiale contractée dans un établissement de santé.

D'après l'étude du dossier, on peut dire que l'arthroscopie a été effectuée dans des conditions et selon des modalités correspondant aux bonnes pratiques de l'art, et qu'aucun élément ne permet de dire qu'il y a eu faute médicale de la part du Docteur Y... qui, par ailleurs, a parfaitement suivi son patient et l'a revu régulièrement. Le Docteur X..., par ailleurs, a pratiqué un geste qu'il a justifié par le côté douloureux et inflammatoire des suites de l'arthroscopie et que l'ont peut admettre, même si l'injection de cortico'des semble avoir accéléré le processus infectieux. Il n'a pas, à l'analyse, commis de faute médicale non plus.

On peut simplement regretter qu'il n'y ait pas eu d'examen bactériologique systématique sur un liquide de ponction. Rien ne permet de dire que ces examens auraient été positifs à cette époque. Il faut rappeler que même si le risque infectieux est faible pour ce

type d'intervention (chirurgie fermée et en ambulatoire) mais ici plus élevée que la moyenne du fait des antécédents du genou (une ponction ancienne et une arthrographie récente par injection de produit opaque), une infection peut survenir en dehors de toute faute médicale, et c'est ce que l'on appelle un aléa thérapeutique. notion d'actualité que nous laissons apprécier au tribunal dans le cadre de la responsabilité médicale en général.

Les séquelles actuelles peuvent être analysées et estimées ainsi : - date de consolidation : 10 DECEMBRE 1997, jour de l'expertise, - incapacité temporaire totale du 2 au 9 JUILLET 1996 (sept jours pour l'arthroscopie du 2 JUILLET 1996), du 29 JUILLET au 2 AOUT 1996 (hospitalisation au centre hospitalier de FOIX), du 18 au 25 SEPTEMBRE 1996 (hôpital de LA ROCHE SUR YON), - IPP : séquelles d'arthrite du genou droit à type de douleur, flexum, limitation de la flexion 5%, - aggravation possible et précoce de l'arthrose antérieure, détectée en 1995 avant l'arthroscopie, avec conséquence professionnelle (reclassement envisageable), - quantum doloris :

assez important compte tenu de douleurs physiques et morales de ce patient qui présente par ailleurs un état dépressif chronique, - préjudice esthétique : faible compte tenu du résultat cosmétique, - préjudice d'agrément : laissé à l'appréciation du tribunal dans la mesure où Mr X produit une licence de tennis de table et qu'il dit ne plus pouvoir s'adonner à ce sport.

Le rapport critique du Docteur F... qui a assisté aux opérations d'expertise, lequel estime d'ailleurs in fine que l'évaluation des divers postes de préjudice est parfaitement correcte, ne permet nullement de retenir une faute tant à l'égard du Docteur Y... que du Docteur X...

Le Professeur BAHUAUD, spécialiste en la matière a d'ailleurs indiqué : "On peut dire que l'arthroscopie a été effectuée dans des

conditions et selon des modalités correspondant aux bonnes pratiques de l'art, et qu'aucun élément ne permet de dire qu'il y a eu une faute médicale de la part du Docteur Y... qui, par ailleurs, a parfaitement suivi son patient et l'a revu régulièrement."

Le Docteur D... ajoute quant à lui : "On ne trouve pas de faute caractérisée dans les techniques utilisées qui sont conformes aux données acquises de la science à l'époque de ces interventions. Les soins et actes médicaux pratiqués l'ont été de façon attentive, diligente et conforme aux données acquises de la science. On ne met pas en évidence de faute susceptible d'engager la responsabilité du Docteur Y... chirurgien..."

Par ailleurs, aucun élément contraire ne démontre que l'intervention du Docteur Y... n'était pas indispensable et rien ne permet de remettre en cause la prescription d'antibiotiques ; de plus le traitement anti inflammatoire par ailleurs prescrit par le Docteur X... ne peut être critiqué ; enfin l'infection nosocomiale ne peut être aucunement mise à la charge de l'intervention de l'un ou l'autre de ces médecins, le devoir d'information n'ayant jamais été mis en cause au cours des opérations d'expertise.

Il résulte de ces éléments, comme déjà indiqué, qu'aucune faute ne peut être imputée aux Docteurs Y... et X... SUR LE NOUVEAU REGIME JURIDIQUE DES INFECTIONS NOSOCOMIALES.

La loi du 4 MARS 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé, comporte des dispositions particulières qui instituent un nouveau régime légal de responsabilité et de réparation en matière d'infections nosocomiales (articles L 1142-1 et suivants du Code de la santé publique).

Ces nouvelles dispositions instituent une responsabilité pour faute, une responsabilité sans faute et une réparation par la solidarité nationale de "l'aléa nosocomial".

Le nouvel article L 1142-1 du Code de la santé publique issu de cette loi pose le principe suivant lequel hormis, d'une part, les dommages résultant d'un défaut d'un produit de santé, d'autre part, les dommages résultant d'infections nosocomiales contractées dans les établissements, service ou organisme dans lesquels sont réalisés des actes individuels de prévention, de diagnostic ou de soins, les professionnels de la santé ne sont responsables qu'en cas de faute.

Il résulte en conséquence, de manière certaine de ce texte qu'est condamnée la jurisprudence qui, en matière d'infection nosocomiale, avait mis à la charge des médecins une obligation de sécurité de résultat (arrêts dits des staphylocoques dorés du 29 JUIN 1999 et arrêt du 13 FEVRIER 2000).

Dans ces conditions est aussi condamnée toute transposition au médecin de la jurisprudence qui avant les arrêts du 29 JUIN 1999, avait en matière d'infection nosocomiale retenu une présomption de responsabilité.

Dès lors, la victime qui veut mettre en cause la responsabilité d'un établissement de santé doit seulement démontrer que son état est consécutif à une infection contractée dans l'établissement, puis, dans la mesure où cette relation de causalité est rapportée, la présomption de responsabilité de l'établissement de santé joue, ce dernier devant démontrer pour se décharger de celle ci qu'il n'a commis aucune faute dans la prise des mesures d'aseptie.

S'agissant en conséquence d'un médecin dont la responsabilité recherchée en raison d'une infection nosocomiale, ou plus généralement de toute infection consécutive à un acte invasif, piqûre ou infiltration par exemple, pratiqué sur le patient, il convient donc en principe de revenir à la responsabilité fondée sur la faute prouvée, ce qui renvoie à la jurisprudence antérieure aux arrêts précités, ladite jurisprudence reposant essentiellement sur l'un des

devoirs fondamentaux des médecins qui est de donner à leur patient des soins conformes aux données acquises à la science, parmi lesquels a toujours figuré l'obligation de respecter les règles relatives à l'aseptie c'est à dire toutes les méthodes destinées à prévenir les maladies septiques ou infectieuses, en empêchant l'introduction de microbes dans l'organisme, que les soins soient pratiqués en milieu hospitalier ou ambulatoire.

En fait, et dans le cas d'infection nosocomiale, si un établissement, service ou organisme dans lequel sont réalisés des actes individuels de prévention, de diagnostic ou de soins est en cause pour une infection nosocomiale, il est responsable de plein droit, sauf à prouver une cause étrangère et que c'est que dans l'hypothèse où cette preuve est rapportée et qu'il y a en conséquence survenance d'un aléa nosocomial, qu'il peut y avoir réparation au titre de la solidarité nationale.

Par contre si une personne physique, professionnelle de la santé, le plus souvent médecin, est en cause, sa responsabilité ne peut en principe être engagée pour les dommages résultant des infections nosocomiales que si la faute est prouvée par la victime, et qu'en l'absence de preuve d'une faute, il pourra également y avoir éventuellement réparation de l'aléa nosocomial.

Enfin dans l'hypothèse d'une mise en cause simultanée de personne physique et d'établissement de santé, une application distributive pourra certes intervenir, voire une condamnation in solidum, la seule difficulté sérieuse tenant au seuil à partir duquel il peut y avoir indemnisation de l'aléa nosocomial (cf. pour l'application de ce nouveau régime juridique des infections nosocomiales : ordonnance de référé du 23/7/2002 TGI de LA ROCHE SUR YON, GUERRY C/ CHAILLOUS et MAUGIN).

Les dispositions de cet article (article 1142-1 alinéa 2 du Code de

la santé publique) sont applicables aux instances en cours n'ayant pas donné lieu à une décision irrévocable, en application des dispositions de l'article 101 de la loi précitée (TGI NANTES 4/9/2002 TERRIEN C/ SA NOUVELLE CLINIQUE NANTAISE ET AUTRES ; TGI GRENOBLE 20/6/02 BECKER C/ CLINIQUE BELLE DONNE et AUTRES).

La modification apportée à l'article L 1142-21 du Code de procédure pénale par la loi n°2002-1577 du 30 DECEMBRE 2002 sur l'obligation d'appeler en la cause l'Office National d' Indemnisation créé par l'article L 1142-22 du même code, -lequel établissement public est en cours de "constitution"-, ne justifie pas d'un nouveau renvoi de l'affaire. APPLICATION DE CES DISPOSITIONS AU CAS D'ESPECE.

Au vu de ce qui précède, il convient de recevoir Mr X en son action dirigée seulement contre la CLINIQUE SAINT CHARLES et de prononcer la mise hors de cause des Docteurs Y... et X...

Les demandes faites par ces derniers, ainsi que leur assureur, au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile n'apparaissent cependant pas justifiées et seront en conséquence rejetées. SUR L'EVALUATION DU PREJUDICE.

Dans ses dernières écritures, Mr X a demandé réparation des divers préjudices prétendu subis par lui de la manière suivante : - IPP 5%

30 000 F - 4 573,47 ä - ITT du 2/7/96 au 5/1/97

40 000 F - 6 097,96 ä - incidence professionnelle

50 000 F - 7 622,45 ä - pretium doloris (4/7 retentissement moral et psychologique)

50 000 F - 7 622,45 ä - préjudice esthétique

10 000 F - 1 524,49 ä - préjudice d'agrément

30 000 F - 4 573,47 ä - frais d'expertise

6 000 F - 914,69 ä - frais divers

3 617,68 F - 551,51 ä - frais kilométriques

8 569,20 F - 1 306,37 ä - article 700

26 238,28 F - 4 000 ä

LA CLINIQUE SAINT CHARLES a proposé l'évaluation suivante : préjudice soumis à recours : créance des organismes prestataires, - CPAM

21 687,60 ä - LA POSTE . la créance de LA POSTE devra être diminuée des prestations servies durant l'arrêt de travail initial de Mr X, soit du 2 JUILLET 1996 au 15 JUILLET suivant. . Il n'y a pas lieu de faire courir les intérêts sur ladite créance à compter du 5 JANVIER 1997. . ITT

304,90 ä . IPP

3 048,98 ä . préjudice professionnel

néant préjudice personnel : - pretium doloris

3 048,98 ä - préjudice esthétique

762,25 ä - préjudice d'agrément

néant - frais divers

145,94 ä - frais kilométriques

néant

Le Tribunal, au vu des pièces produites, est en mesure de fixer divers préjudices de la manière suivante : créance de la CPAM : la créance de la CPAM qui demande le remboursement des frais d'hospitalisation à hauteur de 22 313,69 Euros, englobe à tort les frais d'hospitalisation dus à l'arthroscopie du 2 JUILLET 1996 qui reste sans lien avec le présent litige.

Il y a lieu en conséquence de déduire les frais afférents à cette intervention initiale d'un montant de 4 109,48 Francs, soit 612,77 Euros.

Il doit lui être en conséquence allouée la somme de 21 687,60 Euros. créance de LA POSTE :

Mr X a été en arrêt de travail du 16 JUILLET 1996 au 5 JANVIER 1997. Dans ses dernières écritures LA POSTE a ramené sa réclamation à la

somme de 9 296,23 Euros.

Celle-ci n'est intervenue en la cause que le 7 AOUT 2001 date à laquelle sa créance portera intérêts. Incapacité temporaire totale :

Mr X sollicite une indemnité en raison d'une incapacité subie du 2 JUILLET 1996 au 5 JANVIER 1997.

Or, selon les conclusions du rapport d'expertise, d'ailleurs admises sur ce point par le Docteur F..., l'incapacité a été totale durant les périodes du 2 au 9 JUILLET 1996 pour l'arthroscopie, du 29 JUILLET au 2 AOUT et du 18 au 25 SEPTEMBRE 1996.

Sur la base mensuelle proposée par lui l'indemnité qu'il convient de lui allouer de ce chef sera fixée à la somme de 2 000 Euros.

Il n'existe par ailleurs aucune incidence professionnelle ainsi qu'il résulte de la fiche de la médecine de prévention médicale du 14 FEVRIER 1997, Mr X ayant effectivement été maintenu à son poste. Incapacité permanente partielle :

Le taux d'incapacité a été fixé par les experts à 5% ; il n'englobe pas l'état antérieur de Mr X comme l'indique à tort la CLINIQUE SAINT CHARLES, ce d'autant plus que les experts ont signalé une possible aggravation de son état en raison notamment de l'arthrose antérieure détectée avant l'arthroscopie, avec il est vrai, un reclassement professionnel envisageable.

Il convient de lui allouer la somme réclamée par lui, soit 4 573,47 Euros. Souffrances physiques et morales :

Ce préjudice a été qualifié d'assez important compte tenu des douleurs physiques et morales de l'intéressé.

Mr X a en effet subi une arthrographie, cinq ponctions successives du genou droit, trois arthroscopies dont deux sous anesthésie générale, une infiltration cortisonique, une synovectomie antérieure par artériotomie sous anesthésie générale.

L'indemnité réclamée par lui apparaît justifiée et il y a lieu en conséquence de lui allouer la somme demandée, soit 7 622,45 Euros. Préjudice esthétique :

Ce préjudice esthétique a été qualifié de faible compte tenu du résultat cosmétique ; l'indemnité réclamée de ce chef apparaît justifiée ; ce préjudice sera en conséquence fixé à 1 524,49 Euros. Préjudice d'agrément :

Mr X pratiquait le tennis de table depuis des années ainsi qu'il résulte des pièces produites ; le rapport du docteur F... ne fait que rapporter les dires de l 'intéressé ; l'indemnité qu'il convient de lui allouer à ce titre sera fixée à la somme de 3 048,98 Euros. Frais d'expertise :

Ces frais sont compris dans les dépens ; cette demande ne peut qu'être rejetée. Frais divers et frais kilométriques restés à charge :

Il est évident que Mr X a supporté divers frais divers ; certains frais médicaux ou pharmaceutiques sont d'ailleurs restés à sa charge ; au vu des pièces produites il convient de lui allouer à ce titre la somme globale de 1 868 Euros.

La somme totale qu'il convient d'allouer à Mr X en réparation des divers préjudices corporels et matériels s'élève à 20 637,26 Euros. SUR L'APPLICATION DE L'ARTICLE 700 DU NCPC

Les indemnités qu'il parait équitable d'allouer à ce titre doivent être fixées comme suit : - Mr X

1 600 ä - CPAM de LA VENDEE

200 ä - LA POSTE

200 ä SUR L'EXECUTION PROVISOIRE

Compte tenu des faits de la cause et de l'ancienneté du litige, l'exécution provisoire apparaît justifiée ; il convient de l'ordonner en ce qui concerne la somme principale de 20 637,26 Euros allouée à

Mr X.

PAR CES MOTIFS --------------------------

Le Tribunal statuant publiquement, contradictoirement, en matière civile et en premier ressort,

Vu l'ordonnance de référé du 17 JUILLET 1997 et le rapport d'expertise déposé le 13 JUILLET 1998 ;

Vu le jugement en date du 2 AVRIL 2002 ;

Déclare la SA CLINIQUE SAINT CHARLES responsable des dommages de Mr X résultant de l'infection nosocomiale résultant des opérations effectuées courant JUILLET 1996 ;

Met hors de cause les Docteurs Y... et X...;

Fixe le préjudice personnel et matériel subi par Mr X à la somme totale de 20 637,26 Euros ;

Condamne la SA CLINIQUE SAINT CHARLES à payer à : - Mr X la somme de 20 637,26 Euros, et ce avec le bénéfice de l'exécution provisoire ; - la CPAM de LA VENDEE, la somme de 21 687,60 Euros ; - la POSTE, la somme de 9 296,23 Euros avec intérêts au taux légal à compter du 7 AOUT 2001 ;

Condamne la SA CLINIQUE SAINT CHARLES à payer au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, les sommes suivantes : - à Mr X

1 600 ä - à la CPAM de LA VENDEE

200 ä - à LA POSTE

200 ä

Rejette toute demande plus ample ou contraire au présent dispositif ; Condamne la SA CLINIQUE SAINT CHARLES aux dépens en ce compris ceux de référé et les frais et honoraires d'expertise ;


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Poitiers
Numéro d'arrêt : 00/01149
Date de la décision : 21/01/2003

Analyses

PROFESSIONS MEDICALES ET PARAMEDICALES - Médecin - Responsabilité contractuelle - Infection nosocomiale

En cas d'infection nosocomiale contractée dans un établissement de santé, la responsabilité de celui-ci est engagée de plein droit, à charge pour lui de démontrer l'existence d'une cause étrangère. En revanche, la responsabilité d'une personne physique professionnelle de la santé ne peut être engagée, pour les dommages résultant d'une infection nosocomiale, que si sa faute est prouvée par la victime


Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.poitiers;arret;2003-01-21;00.01149 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award