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09/01/2002 | FRANCE | N°01/357

France | France, Cour d'appel de Poitiers, 09 janvier 2002, 01/357


TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE

DE ROCHEFORT AFFAIRE: M. X... M. Y... Z.../ Mme A...

JUGEMENT DU 9 JANVIER 2002 JGT2002 RG. :01/357 DEMANDEURS: Luc X..., né le 18 Décembre 1960 à SAINTES (17), de nationalité française, célibataire, demeurant 34 B Chemin du Treuil à CHANIERS (17610) Guv Y..., né le 25 Juin 1932 à CHANIERS (17), de nationalité française, divorcé, demeurant 34 Z... Chemin du Treuil à CHANIERS (17610) REPRESENTÉS par Maître GEORGIN, avocat au Barreau de ROCHEFORT DÉFENDERESSE: Béatrice B... épouse A..., née le 7 Juillet 1957 à SAINTES (17), greffier

en chef des Tribunaux de Commerce, de nationalité française, demeurant 34 A Ch...

TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE

DE ROCHEFORT AFFAIRE: M. X... M. Y... Z.../ Mme A...

JUGEMENT DU 9 JANVIER 2002 JGT2002 RG. :01/357 DEMANDEURS: Luc X..., né le 18 Décembre 1960 à SAINTES (17), de nationalité française, célibataire, demeurant 34 B Chemin du Treuil à CHANIERS (17610) Guv Y..., né le 25 Juin 1932 à CHANIERS (17), de nationalité française, divorcé, demeurant 34 Z... Chemin du Treuil à CHANIERS (17610) REPRESENTÉS par Maître GEORGIN, avocat au Barreau de ROCHEFORT DÉFENDERESSE: Béatrice B... épouse A..., née le 7 Juillet 1957 à SAINTES (17), greffier en chef des Tribunaux de Commerce, de nationalité française, demeurant 34 A Chemin du Treuil à CHANIERS (17610) REPRESENTÉE par la S.C.P. CABINET FLICHE-BLANCHÉ, avocats associés au Barreau de ROCHEFORT, postulant, plaidant par Maître LEFEBVRE, avocat au Barreau de SAINTES

* COMPOSITION DU TRIBUNAL Lors des débats et du délibéré: Jean-Pierre MÉNABÉ, Président Serge VIGOT, Vice- Président, Paul ROUBEIX, Juge M.C. LABEYRIE, Greffier présente lors des débats et du prononcé JUGEMENT: Contradictoire, prononcé par Jean-Pierre MÉNABÉ, Président, en audience Publique le 9 JANVIER 2002, date indiquée à l' issue des débats. FAITS, PROCÉDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES: Mme Béatrice A... est propriétaire, à CHANIERS (17), lieudit "Le Treuil de Senouche", d' une maison d' habitation, cadastrée section AR n0 310, laquelle confronte les parcelles cadastrées section AR n°308 et n°311, appartenant, respectivement, à M. Guy Y... et à M. Luc X.... Faisant valoir que ces trois fonds étaient desservis par une bande de terre indivise, cadastrée section AR n° 309, et que Messieurs Y... et X... avaient entrepris de la clôturer au mépris de ses droits, Mme A... a, le 27 décembre 2000, fait assigner ses voisins en référé par-devant le Président du Tribunal de Grande

Instance de SAINTES afin qu' il mette fin au trouble manifestement illicite ainsi créé en les condamnant à remettre la parcelle litigieuse en état et, notamment, à retirer tout obstacle ainsi qu' à démolir les constructions irrégulièrement réalisées sous astreinte de 500,00 Francs par jour de retard à compter de la signification de l 'ordonnance à intervenir, le magistrat saisi se réservant la liquidation de l 'astreinte prescrite et une somme de 7.000,00 Francs lui étant au surplus allouée sur le fondement de l' article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile. Par décision du 23 janvier 2001, le Magistrat saisi a, en application de l' article 47 du Nouveau Code de Procédure Civile, renvoyé la connaissance de l' affaire à son homologue de ROCHEFORT eu égard à la qualité d auxiliaire de justice de Mme A... exerçant son activité dans son ressort. Suivant ordonnance du 6 mars 2001, le Juge des Référés du Tribunal de Grande Instance de ROCHEFORT a condamné Messieurs Y... et X... à remettre en état la parcelle AR n°309, en retirant notamment tout obstacle pouvant gêner son acces, dans les 8 jours de sa signification et à payer à Mme A... une somme de 2.000,00 Francs, au titre des frais irrépétibles. Arguant de ce que Mme A... n' avait, à la différence d' eux-mêmes, aucun droit sur le passage litigieux, de ce que sa parcelle AR n0 310 n' était nullement enclavée et de ce que son attitude leur avait causé un trouble de jouissance démontré, Messieurs Y... et X... l 'ont, par acte du 23 mars 2001, fait citer devant ce Tribunal afin qu 'il constate leurs droits exclusifs sur la parcelle AR n°309 et l' absence de droit de la défenderesse, qu' il lui ordonne de la libérer sous astreinte de 1.000,00 Francs par jour de retard, 15 jours après la signification à partie de la décision a intervenir, et qu' il la condamne à leur payer, communément et à part égalitaire en leur qualité de copropriétaires du passage, une somme de 10.000,00 Francs

pour trouble de jouissance, outre 10.000,00 Francs en vertu de l 'article 700 précité. Les demandeurs et Mme A... ont déposé leurs dernières écritures au greffe de ce siège, respectivement, les 21 août et 18 septembre 2001. Aux termes de celles-ci, ils développent les prétentions et moyens suivants Messieurs Y... et X... maintiennent leurs réclamations, en soutenant: -que leur action est recevable nonobstant l'absence de publication de l 'acte introductif d' instance à la Conservation des Hypothèques puisqu 'ils ne revendiquent aucun droit dont ils ne soient pas déjà titulaires -que l 'ensemble des titres de propriété, en leur possession, mentionne l 'exclusivité de leurs droits indivis sur la parcelle AR n° 309, ceux de Mme A... faisant simplement état d' un passage commun comme constituant l' un des confrontants de son fonds mais ne lui reconnaissant aucun droit sur celui-ci et l 'acte de donation-partage en date du 28 juillet 1977, qui leur est opposé, étant erroné sur ce point; -que la parcelle AR n° 310 de Mme A... a un accès direct à un chemin communal, qu' elle confronte, le fait qu' elle soit entourée de barrières en bois, ayant remplacé un muret, étant sans incidence au regard des dispositions de l 'article 682 du Code Civil s 'agissant d' une obstruction volontaire de l 'accès à la voie publique -qu' il ne saurait valablement être argué de ce qu' ils ont envisagé de céder gracieusement la parcelle AR n°309 à la Commune pour effectuer les travaux nécessaires à l 'écoulement des eaux pluviales en provenance du chemin communal puisque cette offre a été refusée par le Conseil Municipal le 3 février 1997, Mme A... n' ayant pas, à l' époque, revendiqué la propriété du passage alors même que son mari siégeait au sein de cette instance -qu 'il leur est donc loisible de disposer librement de la parcelle litigieuse et de la clore. Mme A... conclut à l 'irrecevabilité de la demande adverse faute de publication de la citation et, en tout cas, à son mal-fondé.

Elle affirme, en effet, -que Messieurs Y... et X... ne rapportent pas la preuve de l 'exclusivité de leurs droits sur la parcelle AR n°309 puisque les titres, dont se prévaut M. X..., ne mentionnent pas l' identité des autres copropriétaires du passage tandis que ceux de M. Y..., en particulier un acte de donation-partage du 28 juillet 1977, reconnaissent bien à ses auteurs des droits indivis sur celui-ci, les siens propres faisant également état de ce que sa parcelle AR n°310 confronte à un passage commun; -qu'en toute hypothèse, son droit de copropriété se trouve établi par possession immémoriale dès lors que les propriétaires des trois héritages en cause se sont toujours comportés comme des copossesseurs de la parcelle litigieuse -qu 'elle n 'invoque nullement l' état d' enclave de sa propriété, mais simplement le fait qu' il faut casser la clôture existante pour pouvoir accéder à la voie publique; -que 'l utilisation du passage pour y stationner ses véhicules ne gêne pas l' accès aux trois fonds, Messieurs X... et Y... en faisant, d' ailleurs, le même usage et les attestations, par eux fournies a cet egard, étant irrégulières au regard de l' article 202 du Nouveau Code de Procédure Civile et devant être écartées des débats, celle, émanant des époux C..., qui hébergent M. Y..., étant, de surcroît, de pure complaisance -que le caractère chicanier de l' action introduite est suffisamment démontré par le fait que Messieurs Y... et X... ont eux-mêmes cherché à faire entrer la parcelle AR n° 309 dans la voirie communale en 1997. A titre reconventionnel, Mme A... invite le Tribunal à reconnaître ses droits sur la parcelle AR n° 309 ainsi qu à lui allouer les sommes de 10.000,00 Francs, à titre de dommages-intérêts, et de 10.000,00 Francs, du chef des frais irrépétibles L' ordonnance de clôture a été rendue le 4 octobre 2001. MOTIFS: -Sur la recevabilité de la demande:

Attendu que, si le décret n0 55-22 du 4 janvier 1955, en particulier son article 28, impose la

publication au bureau des hypothèques d 'un certain nombre d'actes et décisions judiciaires, il ne ressort cependant pas de ses dispositions que la citation, délivrée par Messieurs X... et Y..., ait à en faire l 'objet alors que Mme A... ne conteste pas qu' ils disposent d' un titre de propriété sur la parcelle litigieuse et qu' il ne s' agit donc pas pour eux de revendiquer un droit réel non publié Qu' il s 'ensuit que le moyen d' irrecevabilité, qui leur est opposé, manque en droit. -Sur le fond: Attendu qu' en application des articles 2228 et suivants du Code Civil, le droit de copropriété peut s' acquérir par prescription dès lors que la possession a eté exercée à ce titre Qu' il appartient à celui qui prétend avoir utilisé la chose commune en tant que possesseur d' établir l' existence d 'actes matériels de possession, la preuve de l 'élément intentionnel, exigé pour pouvoir prescrire, n 'ayant pas, à l 'inverse, à être administrée par ses soins puisque l' article 2230 du Code précité édicte à son profit une présomption de possession pour soi-meme et a titre de propriétaire Qu' il n 'a pas davantage à justifier de la réunion des caractères légaux rendant sa possession utile dans la mesure où il incombe à son adversaire de démontrer les circonstances spéciales de violence, de clandestinité ou d' équivoque, faisant d 'elle une possession vicieuse. Attendu, en l 'espèce, que Mme A... ne prouve pas qu' elle dispose d' un titre de propriété sur la parcelle à usage de passage commun cadastrée section AR n°309; Attendu, en effet, que, dans l' attestation de propriété, établie, le 14 octobre 1976, après le décès de Mme Renée D... épouse B..., sa mère, la parcelle litigieuse ne figure pas comme faisant partie du patrimoine de la défunte Que cette dernière tenait ses droits sur l'ensemble immobilier, actuellement occupé par Mme B... et contigu à ladite parcelle, d' un acte de donation, consenti par sapropre mère, Mme Marguerite E... veuve D...

remariée F..., le 4 septembre 1953, cet acte indiquant que cet ensemble immobilier confronte du couchant à un passage commun mais ne reconnaissant aucun droit indivis a son propriétaire sur celui-ci; Attendu, d'ailleurs, que l 'acte de vente en date des 27 décembre 1988 et 9 janvier 1989, conclu entre les Consorts G... et M. Luc X..., porte notamment sur des droits indivis sur une bande de terre cadastrée section AR n°309 mais ne mentionne pas l' identité du ou des autres coindivisaires, Mme A... n y étant donc pas mentionnée sous cette qualité; Attendu qu' il ne saurait, au surplus, être tiré argument de ce que le titre de propriété de M. Guy Y..., constitué par une donation de ses parents en date du 28 juillet 1977, fait état de "droits indivis avec les représentants G... Joseph et B..., dans la cour commune cadastrée section AR n°309 alors que cette précision n 'est corroborée par aucun titre antérieur, qu' elle apparaît ainsi comme constituant une erreur purement matérielle commise par le rédacteur de l 'acte et qu' en toute hypothèse, elle ne saurait profiter à un tiers , ni suppléer la carence de Mme A... dans la production d 'un titre la reprenant à son compte; Mais attendu que Mme A... invoque à bon droit l' acquisition par prescription d 'un droit de copropriété sur le passage cadastré section AR n°309 Attendu qu 'aux termes d' une attestation, régulière en la forme et dont les demandeurs n 'ont nullement remis en cause la teneur, M. René B..., père de la demanderesse, a certifié que, depuis son mariage, célébré le 15 juillet 1950, avec Mme Renée D..., il avait "toujours utilisé la parcelle AR 309 pour pénétrer dans sa propriété cadastrée 310, au même titre que les propriétaires des parcelles 309-311", qu' "aucun des propriétaires respectifs n a(vait) d' ailleurs jamais contesté cette utilisation commune de la parcelle et ce de tout temps", que "sa belle-mère, Mme veuve D... épouse en secondes noces de M. F..., ancien propriétaire de la

maison, avait laissé depuis de nombreuses années un char à bancs sur cette parcelle et aucun propriétaire n' a(vait) soulevé de difficultés", que l 'acces à sa propriété a toujours été le même",celle-ci étant"entourée de murs de pierres sèches avec à l' angle un four à pain rendant impossible tout accès au chemin communal"; Qu' il est constant, au vu des autres attestations figurant à son dossier, que Mme A..., devenue occupante de la maison cadastrée AR 310, a continué à accéder à son fonds par la parcelle AR 309, même lorsqu' elle a fait démolir la quasi totalité du mur enserrant la cour de son immeuble pour le remplacer par une barrière dépourvue d' ouverture sur le chemin communal, et à l 'utiliser pour y stationner ses véhicules ou y faire garer ceux de ses visiteurs, Messieurs X... et Y... ayant d 'ailleurs confirmé la réalité de l' accès au fonds A... par la bande de terrain litigieuse dans un courrier adressé au Maire de CHANIERS le 10 janvier 1997; Attendu qu' il est, en conséquence, avéré que Mme A... et ses auteurs se sont comportés, à tout le moins depuis 1950, comme les copossesseurs de la parcelle litigieuse, le fait que le titre de propriété de M. Guy Y... fasse état de droits indivis des "représentants B..." sur celle-ci révélant que, pour ses copropriétaires titrés, l 'utilisation qu' en faisaient leurs voisins ne procédait pas d' un acte de simple tolérance de leur part; Attendu que Messieurs Y... et X..., qui ont attendu 1997 pour se prétendre seuls propriétaires du passage commun et l' an 2000 pour dénier à Mme A... tout droit de copropriété sur celui-ci, n' allèguent l' existence d' aucun vice rendant cette possession vicieuse et donc inefficace; Attendu, dans ces conditions, qu 'eu égard à l'acquisition par Mme A... d 'un droit réel sur la parcelle AR n°309 par prescription, ils doivent être déboutés de leur demande Attendu, par ailleurs, que Mme A... ne justifie pas de ce que la

procédure, engagée par ses adversaires, lui a causé un préjudice particulier méritant indemnisation Qu' en revanche, il serait inéquitable qu' elle conserve intégralement à sa charge les frais, non compris dans les dépens, qu' elle a été contrainte d' exposer; Qu' une somme de 915,00 euros lui sera, en conséquence, allouée sur le fondement de l 'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile. PAR CES MOTIFS: Statuant publiquement, contradictoirement et en premier ressort, DECLARE recevable la demande de Messieurs Guy Y... et Luc X... DIT que Mme Béatrice B... épouse A... a acquis par prescription un droit de copropriété sur la parcelle sise à CHANIERS (17), lieu-dit "Le Treuil de Senouche", cadastrée section AR n°309 pour 2 ares 75 centiares. EN CONSEQUENCE, déboute Messieurs Guy Y... et Luc X... LES H... solidairement à payer à Mme Béatrice B... épouse I... la somme de 915,00 euros, sur le fondement de l' article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile. REJETTE la demande de dommages-intérêts de Mme A... H... solidairement M. Guy Y... et M. Luc X... aux dépens. AUTORISE la S.C.P. FLICHE-BLANCHÉ à recouvrer directement ceux dont elle a fait l' avance sans avoir reçu provision.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Poitiers
Numéro d'arrêt : 01/357
Date de la décision : 09/01/2002

Analyses

POSSESSION - Caractère

En application des articles 2228 et suivants du Code Civil, le droit de propriété peut s'acquérir par prescription dès lors que la possession a été exercée à ce titre. Il appartient à celui prétendant avoir utilisé la chose commune en tant que possesseur d'établir l'existence d'actes matériels de pos- session, la preuve de l'élément intentionnel n'ayant pas à être administrée par puisque l'article 2230 du Code Civil édicte à son profit une présomption de possession pour soi-même et à titre de propriétaire


Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Composition du Tribunal
Président : Président : - Rapporteur : - Avocat général :

Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.poitiers;arret;2002-01-09;01.357 ?
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