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28/03/2001 | FRANCE | N°00/758

France | France, Cour d'appel de Poitiers, 28 mars 2001, 00/758


JUGEMENT DU 28 MARS 2001 n° 97 / 2001 RG N 758/00

Epoux X... Y.../ Epoux Z... A..., PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES :

Les époux Michel X... sont copropriétaires de la résidence "Les Palmyriennes" à LA PALMYRE, Commune des MATHES (17), leurs droits portant sur le pavillon n 21, contigu à celui des consorts Z.../B....

Faisant valoir que, courant 1997, leurs voisins avaient percé le mur pignon aveugle de leur lot pour y installer une fenêtre à verre translucide, ce qui avait créé une vue directe sur leur fonds, que cette ouverture était contraire aux dis

positions du règlement de copropriété, que, si le Tribunal d'instance de MARENN...

JUGEMENT DU 28 MARS 2001 n° 97 / 2001 RG N 758/00

Epoux X... Y.../ Epoux Z... A..., PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES :

Les époux Michel X... sont copropriétaires de la résidence "Les Palmyriennes" à LA PALMYRE, Commune des MATHES (17), leurs droits portant sur le pavillon n 21, contigu à celui des consorts Z.../B....

Faisant valoir que, courant 1997, leurs voisins avaient percé le mur pignon aveugle de leur lot pour y installer une fenêtre à verre translucide, ce qui avait créé une vue directe sur leur fonds, que cette ouverture était contraire aux dispositions du règlement de copropriété, que, si le Tribunal d'instance de MARENNES avait, le 25 novembre 1999, considéré comme prescrite l'action possessoire, par eux introduite, il avait néanmoins donné acte aux consorts Z.../B... de leur intention de déplacer la fenêtre litigieuse à 60 centimètres de la limite séparative des lots et qu'en faisant cette proposition, ces derniers avaient implicitement admis l'irrégularité de l'ouverture créée, les époux X... les ont, le 6 juin 2000, faits assigner devant ce Tribunal pour qu'il leur ordonne de remettre en état le mur pignon dans le mois de la signification de la décision à intervenir et sous astreinte de 1.000,00 Francs par jour de retard, passé ce délai, et les condamne au paiement d'une somme de 30.000,00 Francs, en réparation de leur préjudice de jouissance, le tout assorti du bénéfice de l'exécution provisoire.

Les époux X... ont également sollicité une somme de 10.000,00

Francs, ultérieurement portée à 15.000,00 Francs, sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile, et la condamnation de leurs adversaires aux dépens, incluant le coût d'un procès-verbal de constat en date du 12 mai 1998.

Aux termes de leurs dernières écritures, respectivement déposées les 15 novembre et 13 octobre 2000, les époux X... et les Consorts Z.../B... développent les prétentions et moyens suivants :

Les époux X... soutiennent :

- qu'ils ont qualité à agir, le prénom du mari, tel que figurant dans leur titre de propriété, étant le second par lui porté dans l'ordre de son acte de naissance ;

- qu'ils sont également recevables agir dès lors qu'un copropriétaire peut se pourvoir individuellement contre celui qui enfreint le règlement de copropriété et qu'en toute hypothèse, la servitude de vue, créée par les défendeurs, leur cause un préjudice personnel, parfaitement reconnu par ces derniers ;

- que les consorts Z.../B... ont violé tant l'article 9 du règlement de copropriété, qui permet à chaque copropriétaire de jouir de ses parties privatives sous réserve de ne pas nuire aux autres, que son article 10, qui interdit toute modification de l'aspect général de l'ensemble immobilier;

- qu'au surplus, ils ont percé, au mépris de l'article 63 dudit règlement, une partie commune sans autorisation préalable de l'assemblée générale des copropriétaires ;

- qu'enfin, ils ne peuvent tirer argument de l'absence d'action du

syndicat des copropriétaires contre ceux d'entre eux ayant créé des ouvertures identiques, cette inertie ne valant pas autorisation de ces modifications.

Mr Z... et Mme B... concluent :

- à titre principal, à l'absence de qualité à agir des époux Michel X..., le pavillon n 21 appartenant aux époux Prosper X..., et, en tout cas, à l'irrecevabilité de leur action, le syndicat des copropriétaires étant seul habilité à agir en cas de violation du règlement de copropriété à défaut de préjudice personnel subi par l'un des copropriétaires et les demandeurs ne justifiant pas d'un tel préjudice dès lors que la vue créée ne porte pas atteinte à leur intimité ;

- subsidiairement, au mal-fondé de la réclamation adverse, l'aspect général du lotissement ne se trouvant pas altéré par la création de la fenêtre litigieuse eu égard aux ouvertures identiques précédemment réalisées par de nombreux autres copropriétaires ;

- très subsidiairement, à la prescription de mesures réparatrices différentes de celles voulues par les époux X..., savoir la pose d'un châssis fixe et d'un verre translucide.

Ils réclament, en toute hypothèse, une somme de 10.000,00 Francs au titre des frais irrépétibles.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 10 janvier 2001. MOTIFS :

Attendu que le règlement de copropriété ayant la nature d'un contrat, chaque copropriétaire a le droit d'en exiger le respect par les autres ;

Qu'il s'ensuit que l'action individuelle d'un copropriétaire, qui en assigne un autre afin de voir sanctionner la violation de ses

dispositions, est recevable sans qu'il soit astreint à démontrer qu'il subit un préjudice personnel et spécial distinct de celui dont souffre la collectivité des membres du syndicat, son intérêt à agir trouvant sa source dans le respect du règlement de copropriété ;

Attendu, par ailleurs, que chaque copropriétaire tient de l'article 15 de la loi du 10 juillet 1965 le droit d'agir au titre de la sauvegarde des parties communes dès lors qu'il justifie d'un préjudice personnel éprouvé dans la jouissance ou la propriété, soit des parties privatives comprises dans son lot, soit des parties communes ;

Attendu, en l'espèce, qu'il doit liminairement être statué sur la fin de non-recevoir tirée du défaut de qualité des époux Michel X..., dès lors que, selon les défendeurs, ils ne seraient pas copropriétaires au sein de l'ensemble immobilier "Les Palmyriennes" ; Attendu, à cet égard, qu'il suffit de consulter le titre de propriété en date des 27 et 30 avril 1990, versé aux débats, pour constater que les lots 9 et 73 dudit ensemble ont été vendus à Mr Prosper Michel X..., né aux EGLISOTTES (33), le 16 août 1929, et à Mme Arlette Raymonde C..., son épouse, née à SAINT-MARTIN DE GURSON (24), le 6 novembre 1931, les seconds prénoms et les dates et lieux de naissance des acquéreurs correspondant aux prénoms, dates et lieux de naissance des demandeurs, tels que figurant dans la citation ;

Qu'il est, en conséquence, avéré que les demandeurs sont bien copropriétaires au sein de l'ensemble immobilier "Les Palmyriennes", ce qui leur donne intérêt à agir afin de voir Mr Z... et Mme B... condamnés à prendre les mesures propres à faire cesser l'atteinte dénoncée aux prescriptions du règlement de copropriété ainsi qu'à réparer le préjudice qui en est résulté pour eux ;

Attendu que l'article 9 dudit règlement autorise chacun des

copropriétaires à jouir et disposer librement des locaux lui appartenant exclusivement à la condition de ne pas nuire aux droits des autres copropriétaires ;

Que son article 10, s'il lui permet de modifier, comme bon lui semble, la disposition intérieure de ses locaux, lui impose, cependant, de ne rien faire qui puisse changer l'aspect général de l'ensemble immobilier ;

Qu'enfin, son article 63 subordonne l'exécution de travaux affectant les parties communes ou l'aspect extérieur de l'immeuble à une autorisation préalable de l'assemblée générale des copropriétaires statuant à la majorité des voix de tous les copropriétaires, le mur pignon, dans lequel a été créée l'ouverture litigieuse, ayant le caractère d'une partie commune en vertu des dispositions du règlement figurant en ses pages 17 et 18 ;

Attendu que, si, à défaut d'informations relatives à la conception initiale des différents lots de la résidence, il est impossible d'affirmer que l'ouverture, percée par les Consorts Z.../B..., en a changé l'aspect et a nui à son harmonie générale, les défendeurs ne sauraient, en revanche, soutenir valablement que leur initiative n'a pas porté atteinte aux droits des autres copropriétaires, alors que l'huissier de justice, saisi par les époux X..., a, aux termes d'un procès-verbal de constat du 12 mai 1998, relevé que la fenêtre créée dominait l'intégralité de leur jardin puisqu'étant même visible à partir de l'extrémité droite de celui-ci et qu'ils ont, de la sorte, imposé à leurs voisins une vue qui, si elle est oblique, n'en est pas moins réelle ;

Que les défendeurs ne sauraient échapper aux conséquences de la violation des règles communes, à eux imputable, en arguant de précédents de même nature, dès lors que de tels précédents, à supposer que leur existence soit démontrée, ce qui n'est pas le cas,

ne seraient pas constitutifs d'une modification du règlement de copropriété décidée par les membres du syndicat, ni ne mettraient leurs auteurs à l'abri d'une action similaire à celle engagée par les époux X... ;

Qu'en toute hypothèse, le simple fait que les Consorts Z.../B... ne contestent pas avoir omis de requérir l'autorisation de l'assemblée générale des copropriétaires avant d'entreprendre des travaux affectant incontestablement une partie commune et l'aspect extérieur de la résidence, la position du syndic les invitant simplement à solliciter une autorisation de travaux du Maire des MATHES étant à cet égard inopérante, suffit pour que les époux X... soient déclarés recevables et fondés en leur action ;

Attendu que le seul moyen de remédier à l'atteinte apportée à la loi commune des parties est de contraindre les Consorts Z.../B... à supprimer l'ouverture irrégulièrement créée, peu important, à cet égard, que les époux X... ait, par courrier du 29 juillet 1997 adressé au syndic, évoqué la simple installation d'une fenêtre fixe avec verre martelé dès lors qu'aucun arrangement amiable n'a pu se concrétiser ;

Qu'en effet, la pose d'un châssis fixe et d'un verre translucide ne suffisent pas à faire disparaître le changement d'aspect du mur pignon litigieux, que les époux X... souhaitent désormais voir sanctionné, sa remise en état, qui n'est pas matériellement impossible, devant être prescrite ;

Attendu, s'agissant du préjudice de jouissance invoqué par les époux D..., qu'il ne peut être raisonnablement nié que la création d'une vue dominante sur leur jardin a été à l'origine du sentiment de moindre intimité éprouvé dans le cadre de sa jouissance ;

Attendu, toutefois, que l'immeuble de LA PALMYRE constitue, pour eux, une résidence secondaire ;

Que l'utilisation intensive du jardin est limitée à la belle saison ; Que, surtout, les clichés photographiques, annexés au procès-verbal de constat du 12 mai 1998, révèlent qu'il est séparé d'espaces communs par un portillon bas, de sorte que ceux qui s'y trouvent sont parfaitement visibles de l'extérieur ;

Attendu, dans ces conditions, qu'il y a lieu de leur allouer, à titre de dommages-intérêts, une somme de 3.000,00 Francs de ce chef ;

Attendu qu'eu égard au caractère limité du trouble subi par les époux X... à raison du manquement contractuel sanctionné par le présent jugement, il n'apparaît pas opportun d'ordonner son exécution provisoire ;

Attendu, enfin, qu'il n'est pas inéquitable que les Consorts Z.../B... soient condamnés à prendre en charge, à hauteur de 4.500,00 Francs, tout ou partie des frais irrépétibles, incluant le coût du procès-verbal de constat d'huissier de justice en date du 12 mai 1998, que les époux X... ont été contraints d'exposer. PAR CES MOTIFS :

Statuant publiquement, contradictoirement et en premier ressort.

CONDAMNE Mr Antonio Z... et Mme Marie-Christine B... à remettre en état le mur pignon du logement, dont ils sont propriétaires au sein de l'ensemble immobilier en copropriété dénommé "Les Palmyriennes", sis à LA PALMYRE, Commune des MATHES (17), dans les trois mois de la signification du présent jugement et sous astreinte provisoire de CINQ CENTS FRANCS (500,00 Francs) (76,22 Euros) par jour de retard, passé ce délai.

LES CONDAMNE solidairement à payer aux époux Prosper Michel X... les sommes de TROIS MILLE FRANCS (3.000,00 Francs) (457,35 Euros), à titre de dommages-intérêts, et de QUATRE MILLE CINQ CENT FRANCS (4.500,00 Francs) (686,02 Euros) sur le fondement de l'article 700 du

Nouveau Code de Procédure Civile.

DIT n'y avoir lieu à ordonner l'exécution provisoire.

CONDAMNE solidairement Mr Antonio Z... et Mme Marie-Christine B... aux dépens.

AUTORISE Me Gerty ANDRÉA à recouvrer directement ceux dont elle a fait l'avance sans avoir reçu provision. LE GREFFIER LE PRÉSIDENT M.C. LABEYRIE J.P. MÉNABÉ


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Poitiers
Numéro d'arrêt : 00/758
Date de la décision : 28/03/2001

Analyses

COPROPRIETE - Action en justice - Action individuelle des copropriétaires - Action concernant la propriété ou la jouissance des lots - Parties privatives - Action en cessation de l'utilisation contraire au règlement de copropriété - Préjudice personnel - Nécessité (non) - /

Le règlement de copropriété ayant la nature d'un contrat, chaque copropriétaire a le droit d'en exiger le respect par les autres. L'action individuelle d'un copropriétaire, qui en assigne un autre afin de voir sanctionner la violation des dispositions du règlement de copropriété, est donc recevable sans qu'il soit astreint à démontrer qu'il subit un préjudice personnel et spécial distinct de celui dont souffre la collectivité des membres du syndicat


Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.poitiers;arret;2001-03-28;00.758 ?
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