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13/03/2001 | FRANCE | N°01/36

France | France, Cour d'appel de Poitiers, 13 mars 2001, 01/36


DU 13/03/2001 S.A. A.A.P.F.M.A. Me AMAUGER, R.C. de la SA AAPFMA C/ CAISSE REGIONALE DE CREDIT MARITIME MUTUEL DU LITTORAL CHARENTAIS N RG : 01/00036 N° D'ORDRE : 01/00048

Me FLICHE Me ROUGIER DOSSIER LE TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE ROCHEFORT ORDONNANCE DE RÉFÉRÉ Du 13 Mars 2001 DEMANDEURS : S.A. A.A.P.F.M.A., dont le siège social est 57, Avenue Lafayette 17300 ROCHEFORT, prise en la personne de son représentant légal - Maître AMAUGER, ès qualités de représentant des créanciers de la SA A.A.P.F.M.A., demeurant 2 ter, rue Jean Jaurès 17312 ROCHEFORT - REPRÉSENTÉS PAR la

SCP CABINET FLICHE - BLANCHÉ, avocats au barreau de ROCHEFORT, plai...

DU 13/03/2001 S.A. A.A.P.F.M.A. Me AMAUGER, R.C. de la SA AAPFMA C/ CAISSE REGIONALE DE CREDIT MARITIME MUTUEL DU LITTORAL CHARENTAIS N RG : 01/00036 N° D'ORDRE : 01/00048

Me FLICHE Me ROUGIER DOSSIER LE TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE ROCHEFORT ORDONNANCE DE RÉFÉRÉ Du 13 Mars 2001 DEMANDEURS : S.A. A.A.P.F.M.A., dont le siège social est 57, Avenue Lafayette 17300 ROCHEFORT, prise en la personne de son représentant légal - Maître AMAUGER, ès qualités de représentant des créanciers de la SA A.A.P.F.M.A., demeurant 2 ter, rue Jean Jaurès 17312 ROCHEFORT - REPRÉSENTÉS PAR la SCP CABINET FLICHE - BLANCHÉ, avocats au barreau de ROCHEFORT, plaidant par Maître FLICHE - DEFENDEUR : CAISSE REGIONALE DE CREDIT MARITIME MUTUEL DU LITTORAL CHARENTAIS, dont le siège social est à LA ROCHELLE et ayant Agence 11 et 13, Avenue du Général de Gaulle 17300 ROCHEFORT, prise en la personne de son représentant légal - REPRÉSENTÉE par la SCP CLAIRAND-ROUGIER, avocats au barreau de ROCHEFORT, plaidant par Maître ROUGIER - COMPOSITION DE LA JURIDICTION : Jean-Pierre MÉNABÉ, Président du Tribunal de Grande Instance de ROCHEFORT, Assisté de Madame X..., Agent assermenté. DEBATS- DELIBERE : Débats : A l'audience publique du 6 mars 2001. Délibéré : le 13 Mars 2001, date indiquée à l'issue des débats.

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES :

La SA Agence Associée de Pompes Funèbres et Marbrerie de l'Atlantique (AAPFMA) est titulaire d'un compte de chèques ouvert sur les livres de l'agence de ROCHEFORT du CRÉDIT MARITIME.

Faisant valoir qu'elle bénéficiait d'une autorisation de découvert en

compte s'élevant à environ 350.000,00 Francs, que, sans l'en avertir et alors que ce plafond n'était pas atteint, sa banque avait, à compter du 23 novembre 2000, rejeté l'ensemble des chèques, par elle émis, lors de leur présentation, que cette attitude avait persisté bien qu'elle ait, dès le 27 novembre, crédité son compte afin de le provisionner à hauteur du montant des effets antérieurement rejetés, qu'elle lui causait, par là-même, un trouble manifestement illicite et que, de surcroît, elle avait débité, pour 50.375,52 Francs TTC, son compte de frais et commissions injustifiés, la SA AAPFMA a, avec Maître Muriel AMAUGER, désignée en qualité de représentant des créanciers dans le cadre de son redressement judiciaire, fait assigner, le 9 février 2001, la CAISSE RÉGIONALE DE CRÉDIT MARITIME MUTUEL DU LITTORAL CHARENTAIS en référé par-devant le Président du Tribunal de Grande Instance de ROCHEFORT pour qu'il déclare nulles et de nul effet les lettres d'injonction adressées par la défenderesse entre le 23 novembre 2000 et le 5 janvier 2001, lui ordonne d'annuler les incidents de paiement et leur signalement à la Banque de France et la condamne à restituer à sa cliente la somme de 50.375,52 Francs. La SA AAPFMA a également sollicité une somme de 5.000,00 Francs sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile et la condamnation du CRÉDIT MARITIME aux dépens.

Lors de l'audience du 6 mars suivant, la SA AAPFMA et Maître Muriel AMAUGER, représentées par Maître FLICHE, ont maintenu les termes de leur acte introductif d'instance, en soutenant que l'article 65-3-5 du décret-loi du 30 octobre 1935 conférait au Président du Tribunal de Grande Instance une compétence exclusive pour connaître des actions concernant l'interdiction d'émettre des chèques, que le découvert, autorisé par le CRÉDIT MARITIME, avait un caractère permanent et ne pouvait donc être dénoncé sans préavis, que la

convention de découvert en compte à durée déterminée en date du 14 novembre 2000, invoquée par la défenderesse, avait été signée dans la hâte et n'avait aucune valeur contractuelle en la forme et au fond, l'inobservation des exigences de l'article 1325 du Code Civil la privant de toute valeur probante, que la constitution d'une provision très largement supérieure au montant des chèques rejetés quatre jours après l'envoi des lettres d'injonction avait fait recouvrer au tireur le droit d'émettre des chèques et que, de surcroît, le CRÉDIT MARITIME avait contribué à créer, de façon artificielle, le découvert en débitant le compte litigieux de frais injustifiées ainsi qu'en opérant sans mandat un virement de 50.000,00 Francs vers celui d'une autre société le 6 octobre 2000.

Le CRÉDIT MARITIME, comparant par Maître ROUGIER, a conclu, à titre principal, à l'incompétence d'attribution du juge des référés du Tribunal de Grande Instance et sollicité le renvoi de l'affaire par-devant le Président du Tribunal de Commerce de ROCHEFORT, rappelant, à cet égard, que le litige opposait deux sociétés commerciales et que ce dernier magistrat tenait de l'article 873 du Nouveau Code de Procédure Civile la faculté de faire cesser tout trouble manifestement illicite.

Subsidiairement, il a estimé que l'action adverse était mal fondée dès lors que, par acte sous seing privé en date du 14 novembre 2000, souscrit dans une période d'incertitude sur le devenir de la SA AAPFMA, il avait consenti à cette dernière un découvert à concurrence d'une somme de 300.000,00 francs à échéance au 1er janvier 2001, que, s'agissant d'un contrat à durée déterminée, il n'avait pas à respecter de préavis avant de rejeter les chèques en cas de dépassement du découvert autorisé, qu'à la date du 23 novembre 2000, ce dépassement s'élevait à plus de 100.000,00 francs et qu'enfin, le Magistrat saisi ne pouvait se prononcer sur le principe et le montant

des commissions et frais divers imputés sur le compte de sa cliente sans procéder à une analyse, ressortissant au fond, des conditions contractuelles et de leur validité, ces commissions et frais ayant, au demeurant, été facturés dans le respect des prescriptions contractuelles et tarifaires.

L'affaire a alors été mise en délibéré pour Notre ordonnance être contradictoirement rendue ce jour. MOTIFS

Attendu que l'article 65-3-5 du décret-loi du 30 octobre 1935 énonce que les contestations relatives à l'interdiction d'émettre des chèques et à la pénalité libératoire fixée par ses articles 65-3-1 et 65-3-2 sont déférées à la juridiction civile, laquelle peut, même en référé, ordonner la suspension de l'interdiction d'émettre des chèques en cas de contestation sérieuse ;

Qu'en l'espèce, le Président du Tribunal de Grande Instance a donc compétence, nonobstant le fait que la SA AAFPMA et la CAISSE RÉGIONALE DE CRÉDIT MARITIME MUTUEL DU LITTORAL CHARENTAIS sont des sociétés commerciales, pour se prononcer, en référé, sur ce chef de demande ;

Attendu que le prononcé de la suspension de l'interdiction d'émettre des chèques, adressée à la SA AAPFMA, suppose qu'il soit préalablement constaté, soit que l'interdiction a été décidée dans des conditions discutables, soit que le tireur a recouvré la possibilité d'émettre des chèques, par application de l'article 65-3 du décret-loi précité, en ayant réglé le montant des chèques impayés ou constitué une provision suffisante et disponible destinée à leur règlement par les soins du tiré ainsi qu'en ayant, le cas échéant, payé la pénalité libératoire par lui due ;

Attendu, sur le premier point, qu'il est constant que la SA AAPFMA a reçu du CRÉDIT MUTUEL 12 lettres d'injonction datées du 23 novembre 2000, l'avisant du rejet d'autant de chèques, émis par elle pour un

montant total de 74.300,93 Francs, et lui interdisant d'émettre des chèques pendant 10 ans sauf régularisation de sa situation avant le 26 décembre suivant ;

Attendu que le CRÉDIT MUTUEL prétend qu'il a été amené à rejeter les effets dont s'agit dès lors que le compte, sur lequel ils avaient été tirés, présentait un solde débiteur excédant le découvert en compte de 300.000,00 Francs à effet au 1er janvier 2001, convenu avec sa cliente suivant acte sous seing privé du 14 novembre précédent ;

Attendu, cependant, que la SA AAPFMA fait à juste titre observer qu'une telle convention, qui emportait des obligations réciproques, le CRÉDIT MUTUEL s'engageant, en particulier, à honorer les ordres de paiement jusqu'à concurrence du montant maximum de 300.000,00 Francs, aurait dû, en vertu de l'article 1325 du Code Civil, être faite en double original et que, faute de mention sur ce point dans l'acte lui-même, la preuve du respect de cette exigence n'est pas rapportée ;

Que, si l'inobservation de la formalité édictée à l'article 1325, n'entraîne pas la nullité de la convention, elle la prive, en revanche, de valeur probante, de sorte qu'en l'état de la contestation de la SA AAPFMA sur son contenu et à défaut d'éléments extrinsèques la complétant, il peut être sérieusement soutenu que le CRÉDIT MUTUEL ne pouvait se prévaloir de ses dispositions pour fonder sa décision de rejeter les chèques et aurait dû se référer à la pratique antérieurement suivie ;

Attendu, à cet égard, qu'il y a lieu de constater, au vu des relevés du compte litigieux afférents à la période du 31 décembre 1999 au 20 novembre 2000, que celui-ci a, en permanence, présenté un solde débiteur, lequel a oscillé entre 170.438,53 Francs au 10 mars 2000 et 395.552,64 Francs au 17 janvier 2000, le découvert moyen s'établissant à environ 320.000,00 Francs;

Que la permanence des soldes négatifs du compte démontre qu'il existait bien un découvert autorisé non occasionnel à durée indéterminée ;

Qu'indépendamment de la convention du 14 novembre 2000, dont la portée est sujette à discussion pour les motifs précédemment énoncés, la prétention de SA AAPFMA, selon laquelle le CRÉDIT MUTUEL ne pouvait interrompre son concours sans notification et préavis préalables sauf à violer les dispositions de l'article 60 de la loi du 24 janvier 1984 les prévoyant, ne saurait être considérée comme manifestement infondée ;

Qu'en conséquence, toute discussion sur le montant exact du débit à la date du 23 novembre 2000 devient sans intérêt dans le cadre de la présente instance ;

Qu'il en est de même s'agissant des rejets de chèques que le CRÉDIT MUTUEL a notifiés à la SA AAPFMA entre le 14 décembre 2000 et le 5 janvier 2001, le solde débiteur du compte, tel que ressortant des relevés adressés au tiré pour la période considérée, s'étant situé en permanence dans la fourchette précédemment autorisée par la Banque ; Attendu, sur le second point, que le CRÉDIT MUTUEL ne remet pas en cause le fait que la SA AAPFMA a, le 27 novembre 2000, constitué une provision de 86.844,28 Francs, laquelle permettait de couvrir le règlement de l'intégralité des chèques rejetés le 23 novembre précédent ;

Qu'il s'évince d'ailleurs des relevés de compte produits que les 12 effets en cause ont, en définitive, été payés, les mouvements débiteurs correspondants étant intervenus entre le 1er et le 12 décembre 2000 ;

Attendu, dans ces conditions, qu'il doit être considéré que la contestation, soulevée par la SA AAPFMA, est sinon bien fondée du

moins suffisamment sérieuse pour que soit prononcée, en référé, la suspension de l'interdiction d'émettre des chèques qui lui a été notifiée ;

Qu'en revanche, l'article 65-3-5 ci-dessus mentionné ne permet pas au Magistrat saisi d'édicter d'autres prescriptions, l'annulation des lettres d'injonction comme l'annulation des incidents de paiement supposant une appréciation du bien-fondé des prétentions respectives des parties ressortissant au fond ;

Qu'il ne l'autorise pas davantage à se prononcer sur le chef de la demande tendant à voir créditer le compte professionnel de la SA AAPFMA du montant des frais et commissions prélevés par le CRÉDIT MUTUEL, soit 50.75,52 Francs, dès lors que ce chef s'analyse comme un réclamation accessoire à la contestation relative à l'interdiction d'émettre des chèques et relevant, par suite, de la compétence de la juridiction civile statuant sur le fond et qu'à supposer même qu'il puisse être regardé comme une demande de provision autonome, il appartiendrait au Président du Tribunal de Commerce d'en connaître en référé en vertu de l'article 873 du Nouveau Code de Procédure Civile s'agissant d'une réclamation opposant deux sociétés commerciales ;

Que la SA AAPFMA et Maître Murie AMAUGER seront, dès lors, renvoyées, au surplus, à se pourvoir au principal ;

Attendu, enfin, qu'eu égard à la solution donnée au litige, il n'est pas inéquitable que chacune des parties conserve la charge de ses propres frais irrépétibles et dépens. PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement, contradictoirement et en premier ressort,

Suspendons l'interdiction d'émettre des chèques prononcée par la CAISSE RÉGIONALE DE CRÉDIT MARITIME MUTUEL DU LITTORAL CHARENTAIS à l'encontre de la SA AAPFMA.

Renvoyons au surplus la SA AAPFMA et Maître AMAUGER à se pourvoir au principal.

Rejetons les demandes fondées sur l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

Rappelons que la présente décision bénéficie de plein droit de l'exécution provisoire.

Disons que les parties conserveront la charge de leurs propres dépens. LE GREFFIER

LE PRÉSIDENT B. X...

J.P. MÉNABÉ


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Poitiers
Numéro d'arrêt : 01/36
Date de la décision : 13/03/2001

Analyses

BANQUE - Emission.

L'article 65-3-5 du décret du 30 Octobre 1935 énonce que les contestations re- latives à l'interdiction d'émettre des chèques sont déférées à la juridiction civile, laquelle peut,même en référé, ordonner la suspension de l'interdiction d'émettre des chèques en cas de contestation sérieuse. Le prononcé d'une telle suspension suppose qu'il soit préalablement constaté soit que l'interdiction a été décidée dans des conditions discutables, soit que le tireur a recouvré la possibilité d'émettre des chèques

BANQUE - Paiement - Refus de paiement.

L'article 1325 du Code civil exige,pour les actes sous seing privé contenant des conventions synallagmatiques, un double original. Si l'inobservation de cet- te formalité n'entraîne pas la nullité de la convention, elle la prive de valeur probante.Le rejet des chèques par la banque ne peut donc se fonder sur une convention ne respectant pas cette formalité. Ainsi, doit être décidée la su- spension de l'interdiction d'émettre des chèques, la contestation étant suffi- samment sérieuse


Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.poitiers;arret;2001-03-13;01.36 ?
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