SF/CD
Numéro 22/03638
COUR D'APPEL DE PAU
EXPROPRIATIONS
ARRÊT DU 13/10/2022
Dossier : No RG 21/04062 - No Portalis DBVV-V-B7F-ICEQ
Nature affaire :
Demande de fixation de l'indemnité d'expropriation
Affaire :
EPIC HABITAT SUD ATLANTIC - OFFICE DE L'HABITAT (HSA)
C/
SCI ARI
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
A R R Ê T
Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour le 13 Octobre 2022, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de Procédure Civile.
* * * * *
APRES DÉBATS
à l'audience publique tenue le 08 Septembre 2022, devant :
Madame de FRAMOND, Conseillère faisant fonction de Présidente
Madame ROSA-SCHALL, Conseillère
Madame GUIROY, Conseillère
qui en ont délibéré conformément à la loi.
En présence de Madame [V], Commissaire du Gouvernement représentant le Directeur départemental des Finances Publiques des Pyrénées-Atlantiques.
Assistées de Madame DEBON, faisant fonction de Greffière.
dans l'affaire opposant :
APPELANT :
EPIC HABITAT SUD ATLANTIC - OFFICE DE L'HABITAT (HSA)
représenté par son Directeur Général en exercice
[Adresse 3]
[Localité 11]
Représenté par Maître MILLE, avocat au barreau de BAYONNE
Assisté de Maître PINTAT de la SELARL PINTAT AVOCATS, avocat au barreau de PARIS
INTIMEE :
SCI ARI
prise en la personne de son gérant représentant légalement la personne morale
[Adresse 8]
[Localité 7]
Représentée par Maître PIAULT, avocat au barreau de PAU
Assistée de Maître de SAINT VICTOR, avocat au barreau de BAYONNE
sur appel de la décision
en date du 26 NOVEMBRE 2021
rendue par le TRIBUNAL JUDICIAIRE DE PAU, JUGE DE L'EXPROPRIATION DU DÉPARTEMENT DES PYRÉNÉES-ATLANTIQUESEXPOSE DU LITIGE
La SCI ARI est propriétaire d'un terrain en partie bâti d'un garage et d'un hangar de stockage à usage commercial, actuellement sans occupant, situé [Adresse 4]), cadastré section [Cadastre 14] et [Cadastre 1] d'une contenance totale de 5541 m² dont (1030 + 585) 1615 m² de bâti.
Par une déclaration d'intention d'aliéner reçue le 28 décembre 2020, la société ARI a informé la Commune de [Localité 11] qu'elle entendait céder son bien à la société SNC LIDL au prix de 6.300.000 € HT plus prorata de taxe foncière.
Par un courrier du 18 février 2021 adressé à la SCI ARI une demande de visite a été formalisée, effectuée le 5 mars 2021.
Par décision du 8 mars 2021 le Président de la Communauté d'agglomération Pays Basque a délégué son droit de préemption urbain à l'établissement public local à caractère industriel et commercial HABITAT SUD ATLANTIC (HSA).
Par un avis en date du 16 mars 2021, la direction de l'immobilier de l'État, service des Domaines, a estimé le bien à une valeur de 1.800.000 €.
Par une décision du 29 mars 2021, l'EPIC HABITAT SUD ATLANTIC a préempté le bien au prix des Domaines.
Par une lettre signifiée par huissier le 9 avril 2021, la SCI ARI a refusé l'offre de l'EPIC HSA.
Celui-ci a, par acte du 26 avril 2021, saisi la juridiction départementale de l'expropriation des Pyrénées-Atlantiques et demandé la fixation judiciaire du prix du bien et maintenu son offre d'acquérir au prix évalué par les Domaines, à savoir, 1.800.000 €.
Parallèlement la SCI ARI a saisi le 27 mai 2021 le tribunal administratif d'un recours pour excès de pouvoir.
Le transport sur les lieux et l'audience se sont tenus le 1er octobre 2021.
Par un jugement rendu le 26 novembre 2021, le juge de l'expropriation a fixé à la somme de 5.714.000 euros la valeur de l'ensemble immobilier constitué par les parcelles [Cadastre 12] de 31 a 000 ca et [Cadastre 13] de 24 a 41 ca sises au [Adresse 4] appartenant à la SCI ARI.
Dans sa décision, le juge a retenu que l'EPIC HSA avait valablement délégué à son bureau le 8 septembre 2020 le droit d'exercer la préemption déléguée par la Commune, et le bureau avait autorisé le 18 mars 2021 son directeur général à exercer le droit de préemption urbain sur le bien de la SCI ARI.
Pour évaluer le bien, le juge a retenu la date du 9 novembre 2020 comme date de référence correspondant à la dernière modification du PLU, et retenu que l'EPIC HABITAT SUD ATLANTIC avait par une délibération du 10 décembre 2020, validé l'acquisition foncière amiable des parcelles cadastrées [Cadastre 12] et [Cadastre 1] pour un montant de 5.714.000€, correspondant donc à la valeur vénale du bien en l'absence d'autre terme de comparaison pertinent au regard de sa superficie et de sa situation très privilégiée.
Par une déclaration d'appel du 15 décembre 2021, l'EPIC HSA a interjeté appel de ce jugement en ce qu'il a fixé la valeur du Bien à 5.714 000 €.
Dans ses dernières conclusions du 29 août 2022 en réplique aux conclusions de Mme la Commissaire du Gouvernement et au dernier mémoire de l'intimée, l'EPIC HABITAT SUD ATLANTIC, appelante, demande à la cour de rejeter les demandes de la SCI ARI tendant à voir statuer à nouveau sur les fins de non-recevoir soulevées en 1ère instance, et d'infirmer le jugement rendu, en fixant la valeur de l'immeuble à la somme de 1.800.000 €.
L'HABITAT SUD ATLANTIC fait valoir que faute pour la SCI ARI d'avoir formé un appel incident en réclamant l'infirmation ou la réformation partielle du jugement dans ses premières conclusions, elle ne peut demander à la Cour de réexaminer les fins de non-recevoir soulevées, et subsidiairement, s'y oppose en reprenant la motivation du 1er juge.
Sur le fond,
L'EPIC HSA fait valoir que la SCI ARI n'a pas pu accepter son offre faite le 26 novembre 2020 puisqu'elle était contractuellement engagée envers la société LIDL, ce qui a entraîné la rupture des pourparlers entre HABITAT SUD ATLANTIC et la SCI ARI et que seules les cessions enregistrées au service de la publicité foncière peuvent servir de termes de comparaison ;
Elle soutient que si le juge a écarté à juste titre comme terme de comparaison l'offre d'acquisition faite par la société SNC LIDL au prix de 6.300.000 € HT, il ne pouvait ensuite retenir l'offre d'HABITAT SUD ATLANTIC qui est devenue caduque par l'offre postérieure à 1.800.000 € et par la rupture des pourparlers puisque la SCI ARI signait un compromis avec la SNC LIDL.
Qu'en outre, la validation de l'offre d'acquisition à 5.714.000 € par son bureau du 10 décembre 2020 avait pour objectif la construction d'un programme immobilier bien plus vaste et concernant d'autres parcelles que les parcelles [Cadastre 12] et [Cadastre 1]. Cette opération devait en outre être réalisée avec l'implication de BOUYGUES Immobilier considéré alors comme un partenaire privilégié pour la réalisation des logements privés ; l'HSA soutient que la société BOUYGUES Immobilier n'est plus investie dans ce projet et qu'il se lance seul dans l'aménagement du quartier Saint-Frédéric.
Elle conteste également la valeur retenue par le 1er juge qui a écarté à tort la méthode d'évaluation par comparaison alors que chacune des parties a produit des termes de référence, le bien comportant des bâtiments qui doivent être rapprochés des hangars industriels ou des ateliers, en état dégradés et il existe des termes de comparaison pour des biens similaires. L'HABITAT SUD ATLANTIC conteste également l'évaluation par comparaison avec des terrains à bâtir, qui suppose d'anticiper la destruction des bâtiments existants et ne prend donc pas en compte l'usage effectif de l'immeuble qui doit être la règle selon l'article L322-2 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique. En outre, l'évaluation par récupération foncière, c'est-à-dire après destruction du bâti, doit tenir compte de la remise en état du terrain (dépollution, amiante, etc). Au regard des 11 références pouvant être comparées pour des parcelles avec bâti, donnant une moyenne de 1.250 € le m², et avec un abattement de 11 % pour tenir compte de l'état de vétusté de ce bâti, de la présence probable d'amiante et pour l'occupation du terrain par les gens du voyage, bien antérieure à la procédure de préemption et non autorisée par la Commune de [Localité 11], l'EPIC HSA arrive à une valeur arrondie de 1.800.000 €.
Dans son mémoire reçu au Greffe le 25 mai 2022, complété par un mémoire du 12 août 2022 en réponse aux conclusions du Commissaire du Gouvernement, auquel est joint une pièce supplémentaire no 35 , la société ARI, intimée, demande à la cour de :
- statuer à nouveau sur les fins de non-recevoir soulevées,
- confirmer le jugement rendu en première instance, en ce qu'il a fixé la valeur du bien préempté à la somme de 5.714.000 euros.
Sur les fins de non-recevoir :
La SCI ARI fait valoir principalement au visa de l'article R211-5 du code de l'urbanisme, que le Directeur général d'HABITAT SUD ATLANTIC a reçu délégation, non pas du Conseil d'administration comme le prévoit ce texte, mais par le bureau, qui n'en a pas reçu compétence pour les préemptions urbaines, mais peut seulement décider des programmes de réservation ; en outre, la délégation invoquée vise l'aliénation du bien, ce qui est l'exact opposé de l'acquisition par préemption. Ce qui rend le Directeur général d'HABITAT SUD ATLANTIC incompétent pour opérer la préemption, dès lors irrégulière.
La SCI ARI soulève également l'irrecevabilité d'HABITAT SUD ATLANTIC à offrir un prix très en deçà de son offre signée le 11 décembre 2020, caractérisant une mauvaise foi devant conduire à la déclarer irrecevable en sa procédure de préemption en vertu de l'adage selon lequel il n'est pas permis d'aller contre son propre fait.
Sur le fond et l'évaluation du bien préempté, la SCI ARI soutient qu'elle était déjà en pourparlers avec la SNC LIDL pour l'acquisition de son bien quand l'HABITAT SUD ATLANTIC lui a fait son offre le 26 novembre 2020, conduisant LIDL a augmenté son offre à 6.300.000 €. Une fois la préemption notifiée, la SCI ARI indique avoir accepté la première offre d'HABITAT SUD ATLANTIC à 5.740.000 euros, mais non pas celle à 1.800.000 €. La SCI ARI rappelle le devoir de loyauté des parties dans leurs négociations, l'offre énoncée le 26 novembre 2020 après une étude de faisabilité par l'HABITAT SUD ATLANTIC et la manifestation sans aucune équivoque d'acquérir le bien et donc le revirement de mauvaise foi d'HABITAT SUD ATLANTIC 3 mois plus tard doit conduire à déclarer celui-ci irrecevable, l'accord du 26 novembre 2020 sur la chose vendue et son prix constituant la vente de ce bien entre HSA et la SCI ARI.
Une procédure est d'ailleurs pendante devant le tribunal judiciaire de Bayonne, à l'initiative de la SCI ARI pour voir constater que la signature le 9 avril 2021 par celle-ci de l'offre d'HABITAT SUD ATLANTIC réitérée le 10 décembre 2020 caractérise la conclusion du contrat de vente.
Sur ses termes de comparaison, la SCI ARI considère que peu importe que les bâtiments soient des maisons ou des hangars s'ils ont vocation à être démolis.
Elle conteste l'évaluation, envisagée par la Commissaire du Gouvernement, en poursuite d'usage des biens dont l'état est très dégradé et nécessite leur démolition.
Sur la méthode de comparaison selon le prix du terrain, elle demande d'écarter, pour manque d'objectivité, la référence concernant une mutation du 21 octobre 2020 sur la parcelle [Cadastre 15] à un prix très inférieur aux autres termes de comparaison qui a été acquise par l'EPIC HSA, appelante dans la présente affaire, et constate que les références situées chemin des Hêtres sont éloignées du bien préempté de 5 km.
Sur la qualification du bien par l'appelante de terrain occupé, la SCI ARI fait valoir que des gens du voyage se sont effectivement installés à son insu, mais nécessairement avec l'accord tacite de la Commune puisque l'alimentation en eau a été maintenue par la Régie de la ville de [Localité 11]. Aucun abattement pour occupation ne peut donc être appliqué.
Par ailleurs, elle considère que les termes de comparaison d'HABITAT SUD ATLANTIC ne sont pas pertinents car non situés dans une zone géographique comparable sur le plan de l'urbanisme.
Dans son mémoire reçu au Greffe le 3 juin 2022, la Commissaire du Gouvernement demande que la Cour fixe la valeur du bien à la somme de 4.416.177 €, soit 797,40 € le m². Il est constaté que le bâti des parcelles est dégradé et devait être démoli, mais que la méthode par comparaison peut aussi valoriser le bien en poursuite d'usage en tenant compte de l'état du bâti, ce qui donnerait alors une valeur de 1.978.375 €.
MOTIFS DE LA DÉCISION :
Sur la recevabilité des demandes de la SCI ARI tendant à l'irrecevabilité du Directeur général d'HABITAT SUD ATLANTIC à exercer la préemption :
La Cour observe que le juge de 1ère instance n'a pas été saisi d'une demande tendant à déclarer irrecevable le Directeur Général de HABITAT SUD ATLANTIC à exercer le droit de préemption, et que le dispositif du jugement ne statue pas sur cette question de la compétence relevant du droit administratif, le juge ayant examiné la question de la compétence du Directeur général comme un moyen au fond soulevé par la SCI ARI pour s'opposer à l'évaluation du bien préempté.
Il résulte également des articles 542 et 954 du code de procédure civile et de la jurisprudence de la Cour de Cassation (Chambre civile 2, 17 septembre 2020, 18-23.626 sanction applicable aux appels formés après cette décision du 17 septembre 2020) que lorsque l'appelant (principal ou incident) ne demande dans le dispositif de ses premières conclusions ni l'infirmation ni l'annulation du jugement, il est réputé demander la confirmation pure et simple de la décision déférée. En l'espèce, non seulement la SCI ARI n'a pas formé d'appel incident en demandant dans ses conclusions (ni premières ni dernières) la réformation partielle du jugement déféré, mais le dispositif de ses conclusions ne comporte aucune prétention sur la compétence ou la recevabilité du Directeur Général d'HABITAT SUD ATLANTIC à exercer le droit de préemption sur le bien appartenant à la SCI ARI, puisque se bornant à demander de « statuer à nouveau sur les fins de non-recevoir soulevées ». La Cour considère donc qu'elle n'est saisie d'aucune demande de ce chef de la part de la SCI ARI qui n'a demandé que la confirmation de la décision du 26 novembre 2021.
Sur l'évaluation du bien :
Aux termes des articles L213-4 et suivants du code de l'urbanisme, lorsqu'il y a préemption, à défaut d'accord amiable, le prix d'acquisition est fixé par la juridiction compétente en matière d'expropriation ; le prix est fixé, payé ou, le cas échéant, consigné selon les règles applicables en matière d'expropriation.
La décision fixe la somme allouée en précisant les bases sur lesquelles ces diverses indemnités sont allouées. En matière de préemption, ce prix est exclusif de toute indemnité accessoire, et notamment de l'indemnité de réemploi.
Sur la date de référence :
En matière de préemption, selon l'article L213-4 du code de l'urbanisme la date de référence est, pour les biens non compris dans une zone d'aménagement différé, la date à laquelle est devenu opposable aux tiers le plus récent des actes rendant public, approuvant, révisant ou modifiant le plan d'occupation des sols, ou approuvant, révisant ou modifiant le plan local d'urbanisme et délimitant la zone dans laquelle est situé le bien ;
En l'espèce, la dernière révision du PLU de [Localité 11] a été approuvée par délibération du Conseil Communautaire le 9 novembre 2020, qui est donc la date de référence retenue et non contestée. Le bien est situé en zone UB du PLU qui concerne des zones urbaines denses bâties de manière discontinue, principalement de l'habitat.
Sur la qualification du bien :
La visite effectuée le 1er octobre 2021 révèle que sur le terrain de 5541 m² se trouvent un ancien garage de pièces et servies pour l'automobile en état d'usage et un hangar de stockage, occupant 1615 m². Le terrain est à proximité immédiate de la voie ferrée, entièrement bitumé. Il est occupé par des gens du voyage depuis un an et demi.
L'intérieur des bâtiments est délabré, un mur est tagué, des câbles électriques arrachés, un escalier à l'intérieur du hangar a été démonté, il n'est pas établi que la toiture contienne de l'amiante, bien que l'âge des bâtiments et les matériaux utilisés le laissent supposer.
Sur les indemnités :
Selon l'article L321-3 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique, l'indemnité principale d'expropriation correspond à la valeur vénale du bien exproprié à la date du jugement fixant l'indemnité (L322-2) même en cas d'appel, selon son état à la date de l'ordonnance d'expropriation (L322-1).
Pour apprécier la valeur vénale d'un bien, il y a lieu de procéder à des comparaisons avec les ventes de terrains présentant des caractéristiques similaires dans un secteur géographique proche et les plus récentes possibles.
En matière de préemption selon l'article L213-4 du code de l'urbanisme, à défaut de transactions amiables constituant des références suffisantes pour l'évaluation du bien dans la même zone, il pourra être tenu compte des mutations et accords amiables intervenus pour des biens de même qualification situés dans des zones comparables.
La SCI ARI demande que la Cour se fonde sur l'offre de l'EPIC HSA d'acquérir la parcelle en décembre 2020 pour le prix de 5.714.000 €. Cette offre a été faite dans le cadre d'un programme précis envisagé avec un promoteur immobilier. Il n'est pas justifié comment a été faite cette évaluation, qui s'inscrivait dans une concurrence entre l'EPIC HSA et la société LIDL, mais la participation du promoteur BOUYGUES Immobilier a nécessairement intégré une évaluation par le bilan promoteur, selon les dépenses prévisionnelles et le prix de revente escompté. Or, d'une part, il n'est pas établi qu'à ce jour, deux ans après cette offre, le même programme immobilier soit toujours prévu, surtout si un autre promoteur intervient aux côtés de l'EPIC HSA, mais surtout les prix de construction ayant beaucoup augmenté récemment, l'évaluation selon cette méthode apparaît très aléatoire et peu fiable pour évaluer le bien préempté.
Dès lors que l'offre de l'EPIC HSA n'a pas été acceptée par la SCI ARI, dans le cadre de négociations spéculatives, celui-ci est en droit de se fonder sur la valeur vénale du bien au prix du marché indépendamment de son projet initial.
Le bien sera donc évalué selon sa valeur vénale au jour du jugement le 26 novembre 2021 à partir des termes de comparaison fournis par les parties et Mme la Commissaire du Gouvernement.
Si on considère que les bâtiments du bien préempté sont dégradés et destinés à être détruits, qu'ils se situent dans une zone à forte pression d'urbanisation, il y a lieu de comparer des terrains selon leur récupération foncière et leur prix au mètre carré de terrain à bâtir (ici 5541 m²) étant précisé que dans ce cas, les prix de cession comparés intègrent déjà le coût de la remise en état du terrain et de la démolition éventuelle des bâtiments anciens. Seront donc écartées les références en poursuite d'usage des bâtiments existant.
La Cour retient comme pertinentes les références suivantes (terrain occupé ou non mais destiné à la reconstruction ne conservant pas le bâti) étant précisé que les références antérieures à 2019 sont écartées comme trop anciennes au regard de l'évolution haussière très récente du marché, et que les références situées dans la zone UY destinée à accueillir des activités industrielles, artisanales, commerciales et tertiaires sont également écartées pour n'être pas assez comparables en terme de récupération foncière à la zone UB destinée principalement aux logements.
Adresse : à [Localité 11] Références Date de cession Surface au sol
en m² Prix total
en euros Prix au m² de terrain
[Adresse 9]
zone UB terrain 28/06/19 854 500.000 585,48
[Adresse 6], zone UB maison à démolir 28/09/19 2401 1.400.000 583,09
[Adresse 2]
zone UB maison à démolir 28/06/19 2280 1.050.000 460,53
CAM de Prats CE 252
zone UB terrain nu, constructions à vocation sociale par l'EPIC HSA 21/10/20 1800 656.635 364,80
A ) Moyennes des prix de cession : 498,47
Une référence plus récente et très proche de la date du jugement rend manifeste la tendance haussière très forte des prix des terrains à construire sur [Localité 11] (prix doublé) à partir de 2021, et conduit la Cour à faire une moyenne entre la moyenne précédente et cette nouvelle référence, comme proposée par Mme la Commissaire du Gouvernement :
Adresse : à [Localité 11] Références Date de cession Surface au sol
en m² Prix total
en euros Prix au m² de terrain
B) [Adresse 10] terrain nu 19/08/21 1277 1.400.000 1.096,32
Moyenne des prix de cession entre A et B 498,47 + 1096,32 =
797,40
Prix du bien préempté au 26 novembre 2021 (jugement) 5541 4.416.177 797,00
Il y a donc lieu d'infirmer le jugement rendu le 26 novembre 2021 en ce qu'il fixe la valeur du bien préempté à la somme de 5.714.000 € et de fixer le prix du bien à la somme de 4.416.177 €.
Le jugement déféré doit être confirmé sur la condamnation de l'EPIC HSA aux dépens de 1ère instance.
La cour, y ajoutant, condamne la SCI ARI aux dépens d'appel.
PAR CES MOTIFS LA COUR
La cour, après en avoir délibéré, statuant, publiquement, contradictoirement, en dernier ressort et par arrêt mis à disposition au greffe,
Infirme le jugement rendu le 26 novembre 2021 en ce qu'il fixe le prix du bien préempté à la somme de 5.714.000 € et le confirme pour le surplus.
Statuant à nouveau et y ajoutant,
Fixe à la somme de 4.416.177 € la valeur de l'ensemble immobilier constitué des parcelles [Cadastre 12] de [Cadastre 5] et [Cadastre 13] de 2441 m² sises au [Adresse 4] appartenant à la SCI ARI.
Condamne la SCI ARI aux dépens d'appel.
Arrêt signé par Madame de FRAMOND, Conseillère faisant fonction de Présidente, et par Madame DEBON, faisant fonction de greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
LA GREFFIÈRE, LA PRÉSIDENTE,