CC/PL
Numéro 22/864
COUR D'APPEL DE PAU
Ordonnance du 01 Mars 2022
Dossier : No RG 21/02539 - No Portalis DBVV-V-B7F-H6GG
Affaire :
[X] [G]
C/
S.E.L.A.R.L. PPBL HUISSIERS ME. [Y]
O R D O N N A N C E
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RECOURS CONTRE ORDONNANCE DE TAXE
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DEMANDEUR AU RECOURS :
Madame [X] [G]
[Adresse 1]
[Localité 3]
représentée par Me Pauline LE GUINIO, avocat au barreau de PARIS
DÉFENDEUR AU RECOURS :
S.E.L.A.R.L. PPBL HUISSIERS ME. [Y]
Sise [Adresse 4]
[Localité 2]
représentée par Me Frédéric BELLEGARDE, avocat au barreau de PAU
MAGISTRAT TAXATEUR :
Madame Christel CARIOU Conseillère, déléguée par Monsieur le Premier Président de la Cour d'Appel de PAU par ordonnance du 3 décembre 2021
GREFFIER :
Monsieur Patrick LOM, faisant fonction de greffier,
AUDIENCE :
Le 1er février 2022, en audience publique, tenue devant Madame Christel CARIOU, Conseillère assistée de Monsieur Patrick LOM, faisant fonction de greffier, l'affaire a été mise en délibéré au 01 Mars 2022
Faits et procédure :
Par requête en date du 21 juillet 2016, Mme [X] [G] a saisi le conseil des prud'hommes de Pau d'une action formée contre son employeur, en contestation de la cause réelle et sérieuse de son licenciement et en paiement de créances indemnitaires, outre les frais de procédure,
Par jugement du 18 décembre 2017, le conseil des prud'hommes de Pau a condamné M.[P] [O] en sa qualité de liquidateur de la société SYN TRAINING à verser les sommes de 16.000 euros à titre d'indemnités pour non-respect de l'obligation de reclassement et à 800 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
Par arrêt du 16 janvier 2020, la cour d'appel de Pau a confirmé les condamnations et y ajoutant a condamné M. [P] [O] en sa qualité de liquidateur de la société SYN TRAINING à verser à Mme [X] [G] la somme de 1.476,17 euros au titre de l'indemnisation des heures supplémentaires, 147,62 euros au titre des congés payés afférents et 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
Mme [X] [G] mandatait la société PPBL, huissiers de justice.
Le 25 novembre 2020, ladite société adressait un décompte définitif à hauteur de 504,35 euros comportant un droit proportionnel au titre l'article R444-3 du code du commerce.
Le vice-président du tribunal judiciaire de PAU, a selon ordonnance du 16 juin 2021 taxé à la somme de 504,35 euros le montant des frais des actes.
Par courrier du 26 juillet 2021, parvenu à la cour d'appel de 29 juillet 2021, Mme [X] [G], par l'intermédiaire de son conseil, exerçait un recours à l'encontre de ladite ordonnance de taxe.
A l'audience du 9 novembre 2021, Mme [X] [G] sollicite l'infirmation de l'ordonnance de taxe litigieuse et la condamnation de la SELARL PPBL à la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
La SELARL PPBL demande le débouté de Mme [X] [G] et sa condamnation au paiement de la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
La décision a été mise en délibéré au 14 décembre 2021 et prorogée au 10 janvier 2022,
Par ordonnance du 10 janvier 2022, une réouverture des débats était décidée aux fins de production du décompte du 25 novembre 2020 établi par la société PPBL,
A l'audience du 1er février 2022, les parties n'ont pas fourni la pièce requise.
L'affaire a été mise en délibéré au 1er mars 2022.
Prétentions et moyens des parties :
Madame [X] [G] expose que la somme réclamée au titre du droit proportionnel n'est pas due car :
- la SELARL PPBL s'étant dessaisie du dossier de Madame [X] [G] le 17 février 2021, elle ne pouvait solliciter un pourcentage des condamnations versées par M.[P] [O] le 4 mars 2021, que par ailleurs, elle ne démontre pas le caractère déterminant de ses diligences dans le recouvrement des condamnations prononcées par la cour d'appel de Pau ;
- en tout état de cause la créance de Madame [X] [G] est née de l'exécution du contrat de travail et est donc exclue du droit proportionnel, en application des dispositions des articles R 444-53 et 55 du code de commerce.
En réponse, la société PPBL indique que :
- le règlement des sommes dues part M. [P] [O] est bien lié aux diligences accomplies par elle-même,
- la créance recouvrée contre la société SYN TRAINING n'a pas un caractère alimentaire mais indemnitaire, sanctionnant le manquement de l'employeur à une obligation de reclassement et dès lors, est soumise au principe de l'émolument de l'article R444 du code du commerce.
Motifs de la décision :
1. Sur la recevabilité
Il ressort de l'examen de la procédure que le recours devant la présente juridiction a été valablement formé dans les formes et délais prévus aux articles 714 et suivants du code de procédure civile. Il est donc recevable.
2. Sur la contestation
Aux termes de l'article 10 du décret du 12 décembre 1996,
"Lorsque les huissiers de justice recouvrent ou encaissent, après avoir reçu mandat ou pouvoir à cet effet conformément aux articles 507 du code de procédure civile et 18 du décret du 29 février 1956 portant application de l'ordonnance no 45-2592 du 2 novembre 1945 relative au statut des huissiers de justice, des sommes dues par un débiteur, il leur est alloué, en sus éventuellement du droit visé à l'article 8, un droit proportionnel dégressif à la charge du créancier. Ce droit, qui ne peut être inférieur à 10 taux de base ni supérieur à 1 000 taux de base et est exclusif de toute perception d'honoraires libres, est calculé sur les sommes encaissées ou recouvrées au titre de la créance en principal ou du montant de la condamnation, à l'exclusion des dépens.
Il est fixé selon les tranches suivantes :
12 % jusqu'à 125 euros ;
11 % au-delà de 125 et jusqu'à 610 euros ;
10,5 % au-delà de 610 et jusqu'à 1.525 euros ;
4 % au-delà de 1.525 euros."
- S'agissant du droit à la perception de cette somme au regard des diligences effectuées :
Il ressort des pièces versées au dossier que Me LE GUINIO saisissait la société d'huissiers par mail le 11 mars 2020 d'une demande de signification de l'arrêt du 16 janvier 2020 ce qui était effectué par acte du 7 mai 2020. De même, le 7 mai 2020, la société d'huissiers signifiait à M.[P] [O], ès qualité de liquidateur de la SARL SYN TRAINING un commandement aux fins de saisie-vente portant sur la somme principale de 3.623,79 euros (indemnisation heures supplémentaires et article 700 du code de procédure civile). Le 28 septembre 2020, la SELARL PPBL Huissiers adressait un chèque de 2.500 euros à Mme [X] [G]. Il ressortait d'un mail de Me LE GUINIO du 26 octobre 2020 que le conseil de M. [P] [O] avait pris contact avec la SELARL PPBL pour réglement éventuel de la créance de première instance. Le 16 septembre 2020, la société d'huissiers délivrait un commandement aux fins de saisie-vente à M. [P] [O], cette fois-ci pour une créance principale de 20.423,79 euros correspondant aux condamnations de première instance confirmées par la cour d'appel (indemnité non-respect reclassement et article 700 du code de procédure civile) et aux condamnations en appel (heures supplémentaires, congés payés et article 700 du code de procédure civile).
Faute de retour, la SELARL PPBL contactait le conseil de Mme [X] [G] pour obtenir des renseignements quant au compte bancaire de la société condamnée. Le 25 novembre 2020 ; ce dernier informait la société d'huissiers que le conseil de M. [P] [O] avait sollicité une suspension de l'exécution forcée ce qui suspendait toute action de l'huissier. Le 10 décembre 2020, la SELARL PPBL adressait un courrier au conseil de M. [P] [O] sollicitant le règlement de la somme due à Mme [X] [G]. Un contact était établi et un RIB adressé au débiteur le 14 décembre 2020. Me LE GUINIO en était tenue informée. Une relance intervenait de nouveau le 21 janvier 2021.
Par mail du 17 février 2021, Me LE GUINIO, conseil de Mme [X] [G] remerciait la société PPBL pour ses diligences et annonçait le règlement des sommes par le débiteur.
Il ressort de ce qu'il précède que la société PPBL a bien effectué les diligences qui lui incombait par la délivrance régulières d'actes ou de courriers aux fins de recouvrir les sommes dues, en fonction des éléments qui ont pu lui être apportés par Mme [X] [G] ou son conseil (en effet, le 12 juin 2020, la société d'huissiers n'a pas été destinataire du jugement de première instance confirmé par la cour d'appel et devra émettre une relance le 3 juillet 2020 auprès du conseil de Mme [G] pour l'obtenir).
En outre, même si le versement des sommes dues n'est intervenu qu'après la clôture du dossier par l'huissier, ce versement est bien la conséquence, en partie, de l'action de ce dernier puisque le règlement interviendra mi-février après trois courriers de l'huissier entre décembre et janvier et contact téléphonique avec le conseil de M. [P] [O] dans cette même période.
- S'agissant de la nature de la créance :
Aux termes de l'article 11 du décret du 12 décembre 1996, le droit visé à l'article 10 n'est pas dû lorsque le recouvrement est effectué sur le fondement d'un titre exécutoire constatant une créance née de l'exécution d'un contrat de travail ou une créance alimentaire.
La créance de Mme [X] [G] se décompose ainsi :
- 16.000 euros à titre d'indemnité pour non-respect de l'obligation de reclassement,
- 2.800 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- 1.476,17 euros au titre de l'indemnisation des heures supplémentaires,
- 147,62 euros au titre de congés payés afférents.
Cette créance globale de 20.423,82 euros n'est née de l'exécution d'un contrat de travail qu'à hauteur de 1.623,82 euros (soit 8% de la somme). En effet, la créance due pour non-respect de l'obligation de reclassement est bien née de la rupture du contrat de travail et non de son exécution comme affirmé à tort par l'appelante.
Dès lors, la créance est pour sa majeure partie soumise à l'émolument dû et cet argument sera rejeté.
Il convient en conséquence de confirmer, en toutes ses dispositions, l'ordonnance du président du tribunal judiciaire de PAU en date du 16 juin 2021.
3. Sur l'article 700 du code de procédure civile et les dépens :
Il y lieu de condamner Mme [X] [G] à la somme de 300 euros à ce titre.
Madame [X] [G] qui succombe, est condamnée aux dépens de l'instance.
PAR CES MOTIFS :
Statuant publiquement par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions définies à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile, par ordonnance contradictoire et en dernier ressort,
Déclarons le recours de Madame [X] [G] recevable,
Au fond, confirmons l'ordonnance de taxe du Président du tribunal judiciaire de PAU du 16 juin 2021,
Condamnons Mme [X] [G] à la somme de 300 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
Disons que les dépens de l'instance seront supportés par Mme [X] [G].
La présente ordonnance a été signée par Madame Christel CARIOU, Magistrate déléguée et par Monsieur Patrick LOM, faisant fonction de greffier présent lors du prononcé.
Le Greffier P/Le Premier Président
La Conseillère
Patrick LOM Christel CARIOU