COUR D'APPEL DE PAU
2ème CH-Section 2
Arrêt du 11 avril 2011
Dossier : 10/ 04424
Nature affaire :
Demande en partage, ou contestations relatives au partage
Affaire :
Philippe Pierre Joseph X...
C/
Marie-Madeleine Anne X... épouse Y..., Anne-Marie X...
prononcé Publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour le 11 avril 2011, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile,
* * * * *
APRÈS DÉBATS
à l'audience publique tenue le 28 février 2011
Madame LACOSTE, Conseiller chargé du rapport
Madame BALIAN, Conseiller
Madame MULLER, Conseiller (en remplacement de Monsieur PIERRE, récusé)
assistés de Madame MARI, Greffier En présence de Madame ADOLFF FAVRE-ROCHEX, Greffier,
les magistrats du siège ayant assisté aux débats ont délibéré conformément à la loi.
Grosse délivrée le : à
dans l'affaire opposant :
APPELANT :
Monsieur Philippe Pierre Joseph X... de nationalité Française...
représenté par Me VERGEZ, avoué à la Cour assisté de Me MERY, avocat au barreau de PARIS
INTIMÉES :
Madame Marie-Madeleine Anne X... épouse Y... de nationalité Française...
représentée par la SCP MARBOT-CREPIN, avoués à la Cour assistée de Me ESCALANTE, avocat au barreau de BAYONNE
Madame Anne-Marie X......
représentée par la SCP DE GINESTET-DUALE-LIGNEY, avoués à la Cour assistée de Me GARMENDIA, avocat au barreau de BAYONNE
sur appel de la décision en date du 23 août 2010 rendue par le Tribunal de Grande Instance de BAYONNE
EXPOSÉ DU LITIGE
-FAITS et PROCÉDURE-
Marie E... épouse X... est décédée le 10 décembre 1994, son époux Jules X... est décédé le 2 novembre 2004, ils ont laissé à leur succession leurs trois enfants vivants :
- Marie-Madeleine X... épouse Y... née le 11 octobre 1947,- Anne-Marie X... née le 8 septembre 1949,- Philippe X... né le 21 juin 1951.
Par jugement du 29 octobre 2007, le Tribunal de Grande Instance de Bayonne a ordonné la liquidation et le partage de la succession des époux X..., commis pour y procéder Maître F..., notaire à Saint Etienne de Baigorry, sous le contrôle de M. Heliot, juge commis, ordonné une expertise sur les valeurs vénales et locatives des deux immeubles indivis, les conditions et l'ancienneté de leur occupation, la composition des lots, et le montant des mises à prix dans le cas d'une licitation, et sursis à statuer sur le surplus jusqu'au dépôt du rapport de l'expert.
L'expert a déposé son rapport de 15 avril 2008.
Maître F..., notaire désigné, a déposé un procès-verbal de difficultés le 12 juin 2009.
Par jugement du 23 août 2010, le Tribunal de grande instance de Bayonne a :
"- ordonné l'attribution préférentielle à Mme Y... des biens des parties sis à Anglet, pour la valeur de 303 000 €, les frais de cette attribution étant inclus dans les frais du partage,- ordonné la licitation à la barre de ce tribunal de l'ensemble des biens des parties, sis à Biarritz, en un seul lot, sur la mise à prix de 500 000 €, avec faculté de baisse du quart à défaut d'enchères, sur le cahier des conditions de vente à établir par Me Escalante, avocate, moyennant la publicité légale, les personnes étrangères au partage étant admises à enchérir,- dit que M. Philippe X... est redevable envers l'indivision successorale d'une indemnité d'occupation d'une valeur moyenne de 1 500 € par mois, non indexée, du 3 novembre 2004 au jour de la libération effective des lieux,- ordonné la libération par M. Philippe X... des biens de Biarritz de toute personne de tout bien,- dit que Mme Y... n'est pas redevable d'une indemnité d'occupation,- rejeté la demande de provision sur l'indemnité d'occupation et la demande d'indemnité de procédure,- dit que les dépens, y compris des frais d'expertise, seront inclus dans les frais du partage, sans qu'il y ait lieu à application de l'article 699 du Code de procédure civile. "
Un jugement en date du 20 septembre 2010 a rectifié et retranché un élément inclus dans la motivation du jugement précité.
Par déclaration du 16 novembre 2010, M. Philippe X... a formé appel de ces deux jugements.
Le président de la 2ème Chambre-II, en application des dispositions de l'article 910 du Code de procédure civile, a fixé l'affaire, par ordonnance du 15 décembre 2010, à l'audience du 28 février 2011.
- PRÉTENTIONS et MOYENS des PARTIES-
M. Philippe X... sollicite l'infirmation de la décision attaquée dans ses dernières conclusions du 3 février 2011 et demande à la Cour de :
- de déclarer irrecevable en ses effets l'ordonnance du Président du Tribunal de grande instance de Bayonne en date du 30 novembre 2010,
- d'infirmer en toutes ses dispositions le jugement du 23 août 2010,
- de constater l'existence du droit d'habitation et d'usage professionnel dont il bénéficie sur l'intégralité de la maison de Biarritz,
- de constater que la vente de l'immeuble ne saurait être ordonnée en pleine propriété compte tenu que l'usufruitier M. Philippe X... s'oppose à cette vente en pleine propriété,
- de constater que l'accord donné le 19 juin 2008 était sous condition suspensive de la problématique exprimée par Mme Y... en son acte du 14 novembre 2008,
- d'infirmer l'attribution préférentielle,
- de ne pas homologuer le rapport d'expertise,
- dire que l'occupation gratuite de l'immeuble de Biarritz interdit l'indemnité d'occupation, à titre subsidiaire la fixer de manière symbolique,
- dire que la demande reconventionnelle sur les articles 815 et suivants du Code civil et fixer une indemnité d'occupation de 1 500 € par mois pour l'immeuble d'Anglet est recevable et bien fondée,
- de faire droit à sa demande de dommages et intérêts et de condamner Mme Y... à lui payer la somme de 10 000 € sur le fondement de l'article 1382 du Code civil,
- de condamner solidairement Mme Y... et Mme G... au paiement des frais de la procédure, frais d'expertise compris, outre 8 000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile et aux entiers dépens, ceux d'appel étant directement recouvrés par Maître Vergez.
Mme Marie-Madeleine X... épouse Y... sollicite la confirmation de la décision attaquée dans ses dernières conclusions en date du 21 février 2011. Elle demande à la Cour :
- de reprendre l'analyse juridique et factuelle qui a été faite par le premier juge. Outre la confirmation de la décision,
- d'ordonner que Philippe X..., ainsi que tout occupant de son chef, quittent les lieux occupés actuellement de la propriété située... ce sous astreinte de 200 € par jour de retard en cas d'inexécution dans le mois du délai de la signification de l'arrêt à intervenir,
- de condamner le même pour appel dilatoire et abusif à la somme de 3 000 € de dommages et intérêts sur le fondement de l'article 599 du Code de procédure civile et de 5 000 € de dommages et intérêts,
- de condamner le même à lui verser la somme de 3 000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile, et aux entiers dépens, ceux d'appel étant directement recouvrés par la SCP Marbot-Crépin.
Mme Anne-Marie X... divorcée G... sollicite la confirmation partielle de la décision attaquée dans ses dernières conclusions en date du 23 février 2011. Elle demande à la Cour :
- de confirmer le jugement du 23 août 2010,
- de le réformer en condamnant M. Philippe X... à verser, à titre provisionnel, une somme de 111 500 € à l'indivision soit 37 166 €,
- de mettre à la charge de Mme Y... les frais de l'attribution du bien d'Anglet,
- Y ajoutant,
- de désigner la SCP Loustau-Garmendia et Maître Escalante pour l'établissement du cahier des charges pour l'établissement du bien de Biarritz,
- de condamner M. Philippe X... à faire cesser toute utilisation anormale par des tierces personnes des mêmes lieux tant à l'extérieur qu'à l'intérieur,
- de dire que ces obligations avec la libération des lieux de M. Philippe X..., de lui-même, de ses ayants-droits et membres de sa famille, de ses meubles, ainsi que de tous occupants de son chef, dans un délai d'un mois à compter de la signification de l'arrêt à venir, sous astreinte comminatoire de 500 € par jour de retard,
- de condamner M. Philippe X... à lui payer la somme de 4 000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile, aux entiers dépens, ceux d'appel étant directement recouvrés par la SCP De Ginestet, Duale, Ligney en application de l'article 699 du Code de procédure civile.
DISCUSSION
-Sur la loi applicable-
La liquidation et le partage ayant été ordonnés par jugement du 29 octobre 2007, sur assignation du 24 juillet 2006, la loi applicable à la présente espèce est la loi ancienne conformément aux dispositions transitoires prévues à l'article 47 II. Il en est de même pour la procédure applicable. En effet les dispositions procédurales des articles 1328 à 1381 issues du Décret No 200661805 du 23 décembre 2006 ne sont pas davantage applicables à la présente espèce.
- Sur la procédure-
La Cour constate que l'affaire no 10/ 4424 avait été fixée à l'audience du 28 février 2011, en application des dispositions de l'article 910 du Code de procédure civile. Le Président de la 2éme Chambre-II avait estimé, dans le cadre de son pouvoir d'appréciation, à la demande d'une partie, que cette affaire était en état d'être jugée.
La demande de renvoi formulée par M. Philippe X... a été examinée lors de l'audience et refusée par la Cour. Puis, ce dernier a formé une demande de récusation à l'encontre du Président de la chambre qui s'est abstenu.
En application des dispositions de l'article 346 alinéa 2 du Code de procédure civile, la Cour, composée, conformément à l'ordonnance du Premier Président du 17 décembre 2010, a repris les débats en application des dispositions de l'article 432 du Code de procédure civile et suivants, puis mis l'affaire en délibéré au 11 avril 2011.
- Sur la demande de réouverture des débats-
La Cour a été saisie par la déclaration d'appel général de M. Philippe X... en date du 16 novembre 2010, du jugement du Tribunal de grande instance de Bayonne en date du 23 août 2010, et du jugement rectificatif du 20 septembre 2010. Conformément aux articles 4 et 5 du Code de procédure civile, seules ces décisions seront soumises à l'appréciation de la Cour.
M. Philippe X..., se prévalant des dispositions de l'article 16 du Code de procédure civile et de l'article 6-1 de la CEDH, demande la réouverture des débats pour que la Cour respecte le principe d'impartialité et d'égalité entre les parties et le principe de la contradiction.
Il est constant que conformément aux dispositions de l'article 444 du Code de procédure civile le président doit ordonner la réouverture des débats chaque fois que les parties n'ont pas été à même de s'expliquer contradictoirement sur les éclaircissements de droit ou de fait qui leurs avaient été demandés.
La demande de récusation initiée par M. Philippe X... sera jugée selon les voies de droit prévues à cet effet sans que la Cour, saisie du fond, n'ait a en connaître. En effet c'est conformément à l'ordonnance du Premier Président du 17 décembre 2010, que la Cour a repris les débats dans une composition différente. En conséquence le moyen tiré du défaut d'impartialité ne peut prospérer.
S'agissant du respect du principe d'égalité et de celui de la contradiction. Cette affaire successorale est soumise à l'ancienne loi et donc à l'ancienne procédure. Cette dernière permet d'examiner toutes les difficultés liées à la procédure de liquidation partage sans que la notion procédurale " de prétention nouvelle " puisse être opposée y compris en appel. M. Philippe X... ne peut donc prétendre que le respect du principe de la contradiction exigeait qu'il puisse répondre aux conclusions des autres héritiers en particulier celles de Mme Anne-Marie X.... En effet, toutes les prétentions en lien avec la procédure de liquidation-partage sont recevables.
Ecartant la demande de réouverture des débats formulée par M. Philippe X..., la Cour a examiné l'affaire au vu des dernières conclusions des parties, de leurs moyens de fait et de droit et des pièces contradictoirement échangées, à l'exception des pièces retirées sur audience par Mme Anne-Marie X... (communication du 23 février 2011).
- Sur les difficultés liées à la liquidation et au partage de la succession-
Vu le jugement du 29 octobre 2007.
La Cour constate que les difficultés sont concentrées sur les deux immeubles revenant à l'indivision successorale. Alors que les parties avaient fait une déclaration de succession le 2 avril 2005, elles se sont opposées sur le partage de l'indivision successorale.
Il ressort de l'expertise diligentée par M. H... que le partage en nature est possible et que la consistance de l'indivision permet de faire trois lots :- 1er lot l'immeuble d'Anglet,- 2ème lot la maison de Biarritz,- 3ème lot, issu de la division de l'immeuble de Biarritz, les parties pourraient dégager un lot constructible supérieur à 800 m2.
I-L'immeuble...... (64600)
Il résulte du rapport d'expertise que " cette maison était occupée par M. Jules X... jusqu'au jour de son décès le 2/ 11/ 2004. Depuis cette date, elle n'est pas occupée... l'estimation moyenne de cet immeuble 303 000 €.... "
1. L'attribution du bien
Madame Marie-Madeleine Y... a sollicité depuis le début de la procédure l'attribution préférentielle de cet immeuble.
Le 12 juin 2009, Maître F... a dressé un procès-verbal de difficulté dont il résulte s'agissant de l'immeuble d'Anglet :
- Mme Y... " accord sur l'attribution à son profit, de l'immeuble d'Anglet sur la base de la valeur de l'expertise immobilière sus-indiquée, soit 303 000 €.... à la condition que l'immeuble de Biarritz soit cédé à titre onéreux au prix net revenant aux trois indivisaires de700 000 €..., "
- Mme X.../ G... " accord sur l'attribution au profit de madame Y..., de l'immeuble d'Anglet sur la base de la valeur de l'expertise immobilière sus-indiquée, soit 303 000 €..., "
- M. Philippe X... " n'a pas déféré à la convocation... il résulte d'une télécopie en date du 10 juin 2009... pour ne pas retarder le dossier entre vos mains, je ne m'oppose pas à ce que la réunion se tienne effectivement sans moi... être d'accord pour que la maison d'Anglet soit attribuée à Mme Y........ " Il ne reprend pas l'accord antérieur, formalisé dans un courrier daté du 19 juin 2008, pour une attribution à sa soeur sur la base de 303 000 €.
Ce même procès-verbal constate l'accord des héritiers pour une attribution de l'immeuble d'Anglet à Madame Y....
La Cour constate que si le principe de l'attribution de ce bien à Mme Y... a été acquis, la date de jouissance divise n'ayant pas été admise par les parties, l'attribution de cet immeuble à Mme Y... se fera sur la base de sa valeur au jour du partage.
En conséquence la décision du premier juge sera réformée pour partie sur ce point, l'immeuble d'Anglet sera attribué à Mme Y..., selon la valeur de ce bien au jour du partage.
2. L'indemnité d'occupation
Il résulte du rapport d'expertise que cet immeuble n'est plus occupé depuis le décès.
M. Philippe X... demande qu'une indemnité d'occupation soit mise à a charge de sa soeur, Mme Y..., au motif qu'elle en aurait une occupation privative. Il est admis comme un fait constant par les parties qu'une serrure a été modifiée depuis le décès.
Selon l'article 815-9 du Code civil, l'indivisaire qui use ou jouit privativement de la chose indivise est, sauf convention contraire, redevable d'une indemnité. Il en résulte que l'indemnité, contrepartie du droit de jouir privativement, peut être due même en l'absence d'occupation effective des lieux.
La Cour constate que Mme Y... réside dans l'immeuble,..., et rapporte la preuve que l'immeuble voisin, appartenant à l'indivision, n'est pas occupé par elle ou par des personnes de son fait. S'il est exact que pour des raisons de sécurité, une clef a été changée, pour autant M. X... ne rapporte pas la preuve que, ce changement de serrure, ait eu pour conséquence une jouissance exclusive par Mme Y.... En effet l'expert, mandaté par le premier juge, a pu constater que l'accès à cette maison n'était pas interdit par le changement de serrure aux autres indivisaires.
En conséquence, au cas particulier, la jouissance de cet immeuble d'Anglet n'étant ni privative ni exclusive, la décision du premier juge ayant écarté la demande en fixation d'indemnité d'occupation sera confirmée.
II.- L'immeuble de Biarritz,... Biarritz (64200)
Mme Y... et Mme X.../ G... sollicitent la confirmation de la décision de licitation et s'accordent donc dans leurs dernières conclusions sur la nécessité de vendre l'immeuble de Biarritz occupé par leur frère.
M. Philippe X... prétend à la reconnaissance de ses droits sur cet immeuble dans les termes suivants " Le père a fait don à son fils d'un droit d'usage sur le bien de Biarritz, (dernières conclusions, page 7) " et " M. Philippe X... dispose d'un double usufruit (non limité dans le temps se continuera la vie durant de son bénéficiaire à moins qu'il n'accepte volontairement sa suppression, (dernières conclusions, page 8). "
1. Les droits de M. Philippe X...
Il se fonde sur deux documents écrits par son père dont les autres parties à la procédure ne contestent pas qu'ils émanent du défunt :
- un premier, daté du 15 août 1999, " Je soussigné Jules X..., propriétaire au... (64200) certifie que Monsieur et Madame Philippe E...- X... habitent dans ma maison depuis le 15 août 1999. "- un second, daté du 16 septembre 2001 " J'autorise mon fils Maître Philippe E...- X..., avocat au Barreau de Paris, à utiliser ma maison située au..., pour ouvrir un cabinet secondaire d'avocat au Barreau de Bayonne, à partir de ce jour. "
Il n'est pas contesté, par les autres héritiers, que lors de la rédaction de ces deux documents le défunt était usufruitier du bien.
Conformément aux dispositions de l'article 595 du Code civil l'usufruitier a des droits personnels opposables au nu-propriétaire indivis jusqu'à la cessation de l'usufruit. En l'espèce, les deux documents analysés attestent de la volonté expresse de M. Jules X... d'autoriser son fils à résider et à installer son cabinet professionnel,..., sans contrepartie financière. Pour autant conformément aux dispositions sus visées, ces documents n'attestent que la cession de son usufruit à titre gratuit au profit de son fils. Il s'agit d'un accord de jouissance gratuite qui ne peut avoir d'effet après le décès du titulaire de l'usufruit.
Ecartant les prétentions de M. Philippe X..., la Cour rappelle qu'à compter du décès de son père, ses droits sont les droits d'un héritier réservataire, au même titre que ses deux soeurs. 2. L'indemnité d'occupation
Il résulte du rapport d'expertise que cet immeuble est occupé par M. Philippe X...
Mme Y... et Mme X.../ G... sollicitent la confirmation de la décision attaquée en ce qu'elle a fixé à la charge de leur frère une indemnité d'occupation. M. Philippe X... demande à la Cour de constater que son occupation n'est pas privative et qu'en conséquence il n'est pas tenu à une indemnité.
Selon l'article 815-9 du Code civil, l'indivisaire qui use ou jouit privativement de la chose indivise est, sauf convention contraire, redevable d'une indemnité. Il en résulte que l'indemnité, contrepartie du droit de jouir privativement, peut être due même en l'absence d'occupation effective des lieux.
La Cour estime que l'accord de jouissance gratuite du bien indivis dont a bénéficié M. Philippe X... ne peut constituer une convention, au sens de l'alinéa 2 de l'article 815-9 du Code civil, pour la période postérieure au décès de l'usufruitier et ne le dispense du paiement d'une indemnité d'occupation à compter du décès.
En effet le rapport d'expertise établit de manière incontestable qu'il a la jouissance privative de ce bien. Ce constat de l'expert ne peut pas être remis en cause par le fait qu'il ait été ponctuellement désigné gardien du mobilier indivis, pas davantage par le fait qu'une de ses soeurs ait organisé une fête familiale dans cette propriété familiale.
Au vu des éléments descriptifs fournis par l'expert, c'est par une juste appréciation des faits de la cause et du droit applicable que le premier juge a fixé à la charge de M. Philippe X... une indemnité d'occupation mensuelle de 1 500 €, sans indexation, à compter du décès jusqu'à la libération effective des lieux.
3. Les modalités du partage
La Cour constate que les parties n'arrivent pas à s'accorder sur le partage de ce bien. En effet il résulte du procès-verbal de difficulté dressé par le notaire liquidateur, s'agissant de l'immeuble de Biarritz, que les trois indivisaires sont d'accord pour une cession à titre onéreux de cet immeuble.
Ce désaccord ne s'est pas résolu pendant la procédure judiciaire et c'est la raison pour laquelle la licitation décidée par le premier juge est le seul moyen de parvenir au partage de cette succession.
L'expert a analysé la valeur de cette propriété et les potentialités qu'elle présente, en particulier la possibilité d'isoler un lot constructible qui représente une valeur certaine dans une commune ou les terrains à bâtir sont rares. Toutefois, le conflit entre les parties a atteint un tel degré que cette solution raisonnable, conforme à leurs intérêts respectifs bien compris, ne peut prospérer.
En conséquence, il convient de confirmer la décision du premier juge en ce qu'il a ordonné la licitation en un seul lot et fixé ses modalités pratiques. Toutefois, au vu de l'évaluation de l'expert la mise à prix sera fixée à 650 000 €, avec possibilité de baisse du quart à défaut d'enchères.
4. La libération du bien par M. Philippe X...
Il ressort de la présente décision que M. Philippe X..., qui occupe privativement le bien indivis, n'a pas de droits particuliers sur cet immeuble. La Cour de manière surabondante remarque qu'il n'en a pas demandé l'attribution en nature.
Il devra donc libérer ce bien, ainsi que tout occupant de son chef, comme l'a décidé à juste titre le premier juge, ajoutant à la décision, à défaut de libération dans les trois mois de la signification du présent arrêt, il sera condamné à une astreinte de 150 € par jour de retard.
5. La provision sur l'indemnité d'occupation
Mme X.../ G... demande à la Cour de condamner M. Philippe X... à lui payer une provision de 11 500 € à valoir sur l'indemnité d'occupation.
La liquidation et le partage de la succession ayant été ordonnés par le jugement du 29 octobre 2007, l'indemnité d'occupation sera liquidée au jour du partage.
En conséquence c'est à bon droit que le premier juge a écarté cette demande, sa décision sera confirmée.
6. Les dépenses effectuées par M. Philippe X...
M. Philippe X... réclame une indemnité de 30 000 €. Mme X.../ G... soutient que cette demande est irrecevable.
L'ancienne procédure étant applicable à la présente espèce, la demande de M. X... est recevable.
Conformément aux dispositions de l'article 815-13 du Code civil, il est tenu compte en équité de la valeur apportée au bien indivis lorsqu'un indivisaire a amélioré, à ses frais, l'état d'un bien indivis ou a financé des impenses nécessaires à sa conservation. Toutefois, il appartient à l'indivisaire qui se réclame de l'application de cette disposition de rapporter la preuve de cette amélioration. La Cour constate que M. Philippe X... ne rapporte aucun élément probant à l'appui de cette prétention. Il en sera donc débouté.
- Sur les demandes de dommages et intérêts-
Mme Y... réclame 5 000 € de dommages et intérêts à M. Philippe X....
M. Philippe X... réclame 10 000 € de dommages et intérêts à Mme Y....
Conformément aux dispositions de l'article 1382 du Code civil, le seul fait de s'opposer dans une procédure et d'exercer les recours prévus ne constituent pas la preuve d'un abus de procédure, pas plus que le fait de défaillir dans l'exercice de ses droits.
Tant Mme Y... que M. X... seront déboutés de leurs demandes respectives car ils ne rapportent pas la preuve des fautes particulières invoquées et des préjudices qui en résulteraient.
- Sur les frais de partage-
L'attribution en nature du bien immobilier d'Anglet étant une des modalités du partage successoral, c'est à bon droit que le premier juge a décidé qu'il faudrait faire masse de tous les dépens, des frais d'expertise, le tout constituant les frais privilégiés de partage. Sa décision sera donc confirmée.
- Sur l'article 700 du Code de procédure civile et les dépens-
M. Philippe X... défaillant dans ses prétentions, il sera tenu aux dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile. L'équité commande de le condamner à régler à chaque intimée la somme de 1 000 €.
Il sera fait masse de tous les dépens de première instance et d'appel et des frais d'expertise, le tout constituant les frais privilégiés de partage.
PAR CES MOTIFS
La Cour statuant en audience publique, contradictoirement et en dernier ressort
Reçoit l'appel de M. Philippe X... et les appels incidents limités de Mme Y... et Mme X.../ G...,
Dit n'y avoir lieu à réouverture des débats,
Réforme le jugement du Tribunal de grande instance de Bayonne en date du 23 août 2010 sur l'attribution du bien indivis d'Anglet, et sur la mise à prix du bien indivis de Biarritz,
Statuant à nouveau,
Dit que le bien indivis situé à Anglet sera attribué en nature à Mme Y... à sa valeur au jour du partage,
Dit que la mise à prix pour la licitation du bien indivis situé..., sera de 650 000 € (six cent cinquante mille euros),
Confirme le jugement du 23 août 2010 pour le surplus,
Confirme le jugement rectificatif du 20 septembre 2010,
Y ajoutant,
Dit que M. Philippe X... a uniquement des droits d'héritier réservataire sur le bien indivis situé à Biarritz,
Dit qu'il devra libérer le bien indivis,..., ainsi que tout occupant de son chef, dans un délai de trois mois, à compter de la signification du présent arrêt, passé ce délai il sera redevable d'une astreinte journalière de 150 € par jour de retard,
Ecarte la demande de M. Philippe X... fondée sur l'article 815-13 du Code civil,
Renvoie les parties, après la licitation, devant le notaire pour liquider définitivement leurs droits issus de la succession sur les bases fixées par le présent arrêt,
Condamne M. Philippe X... à payer 1 000 € (mille euros) à Mme Y... et 1 000 € (mille euros) à Mme X.../ G... en application de l'article 700 du Code de procédure civile,
Dit qu'il sera fait masse de tous les dépens, des frais d'expertise et que le tout constituera les frais privilégiés de partage.
Arrêt signé par Madame LACOSTE, Conseiller faisant fonction de Président et par Madame MARI, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.