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03/06/2008 | FRANCE | N°05/03978

France | France, Cour d'appel de Pau, 03 juin 2008, 05/03978


FA/CB



Numéro 2463/08





COUR D'APPEL DE PAU

1ère Chambre







ARRET DU 03/06/08







Dossier : 05/03978





Nature affaire :



Demande en paiement direct du prix formée par le sous-traitant contre le Maître de l'Ouvrage















Affaire :



SAS CONSTRUCTION FINANCE



C/



Jean Marc Y...




















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RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS











A R R E T



prononcé par Monsieur NEGRE, Président,

en vertu de l'article 452 du Code de Procédure Civile,



assisté de Madame LASSERRE, Greffier,



à l'audience publique du 03 Juin 2008

date à laquelle le délibéré a été prorogé
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FA/CB

Numéro 2463/08

COUR D'APPEL DE PAU

1ère Chambre

ARRET DU 03/06/08

Dossier : 05/03978

Nature affaire :

Demande en paiement direct du prix formée par le sous-traitant contre le Maître de l'Ouvrage

Affaire :

SAS CONSTRUCTION FINANCE

C/

Jean Marc Y...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

A R R E T

prononcé par Monsieur NEGRE, Président,

en vertu de l'article 452 du Code de Procédure Civile,

assisté de Madame LASSERRE, Greffier,

à l'audience publique du 03 Juin 2008

date à laquelle le délibéré a été prorogé

* * * * *

APRES DÉBATS

à l'audience publique tenue le 26 Février 2008, devant :

Monsieur NEGRE, Président

Monsieur CASTAGNE, Conseiller

Monsieur AUGEY, Conseiller, Magistrat chargé du rapport, conformément à l'article 785 du Code de Procédure Civile

assistés de Madame PEYRON, Greffier, présent à l'appel des causes.

Les magistrats du siège ayant assisté aux débats ont délibéré conformément à la loi.

dans l'affaire opposant :

APPELANTE :

SAS CONSTRUCTION FINANCE représentée par son Président en exercice domicilié en cette qualité audit siège

Résidence Les balcons d'Aspin

65100 ASPIN EN LAVEDAN

représentée par la SCP DE GINESTET / DUALE / LIGNEY, avoués à la Cour

assistée de Me Z..., avocat au barreau de TARBES

INTIME :

Monsieur Jean Marc Y...

...

65110 CAUTERETS

représenté par Me VERGEZ, avoué à la Cour

assisté de Me GAUTHIER-DELMAS, avocat au barreau de BORDEAUX

sur appel de la décision

en date du 24 OCTOBRE 2005

rendue par le Tribunal de Commerce de TARBES

La SAS CONSTRUCTION FINANCE, promoteur immobilier, a confié au mois de février 2002 à la Société EAUTECH, Entreprise générale, des travaux de construction d'une résidence à LUZ B.... Les travaux de maçonnerie ont été sous-traités à l' Entreprise Y....

Deux ordres de services ont été donnés le 12 février 2002 pour une tranche de 57 logements, et le 17 juin 2002 pour la deuxième tranche de 75 logements.

Le 10 février 2003, Monsieur Y... a adressé à la Société Construction Finance une copie de la mise en demeure qu'il avait envoyée à la Société EAUTECH, lui rappelant qu'elle était redevable d'une somme de 156 761,14 € et que si le règlement n'intervenait pas dans le délai d'un mois, il demanderait alors le paiement au Maître de l'Ouvrage, en application des dispositions des articles 12 et 13 de la loi du 31 décembre 1975 relative à la sous-traitance.

Le 11 février 2003, la Société EAUTECH a autorisé la Société Construction Finance à régler directement au sous-traitant la somme de 70 725,70 €, en précisant qu'elle viendrait en compensation des factures Eautech émises au débit du Maître de l'Ouvrage.

Le 14 février 2003, Monsieur Y... s'est engagé à poursuivre son activité sur le chantier en contrepartie de cette somme de 70 725,70 €.

La Société EAUTECH a été placée en liquidation judiciaire par le Tribunal de Commerce de BOBIGNY par jugement du 23 avril 2003.

Le 15 avril 2003, Monsieur Y... et la Société Construction Finance ont passé un marché de travaux portant sur une partie du lot numéro deux pour un prix total de 1 021 164,59 € hors taxes. Par deux avenants des 27 janvier et 17 mai 2004, ce marché a été ramené à la somme de 806 043,90 € hors taxes à fin de prendre en compte les règlements directs de certaines fournitures par la Société Construction Finance.

Le 17 novembre 2003, Monsieur Y... a adressé une lettre recommandée à la Société Construction Finance à fin qu'elle lui fournisse la preuve du contrat spécifique qu'elle aurait dû souscrire pour le garantir au titre du marché signé le 15 avril 2003, et qu'à défaut, il lui demandait de faire établir un cautionnement solidaire par son établissement bancaire. Monsieur Y... appuyait ses demandes sur les dispositions de l'article 1799 -1 du Code Civil.

Au mois de janvier 2004, Monsieur Y... mettait en demeure la Société Construction Finance de mettre en place les garanties prévues à l'article précité et de lui régler les factures impayées, en déclarant d'autre part surseoir à l'exécution de chantier.

Par décision du 21 septembre 2004, le juge des référés a accordé une provision à Monsieur Y..., lequel avait saisi d'autre part le juge du fond en se fondant sur les dispositions de l'article 14 –1 de la loi du 31 décembre 1975.

Par jugement du 24 octobre 2005, le Tribunal de Commerce de TARBES a condamné la Société Construction Finance à payer à Monsieur Y... la somme principale de 83 758,57 €, ainsi que 1500 € à titre de dommages-intérêts, et une indemnité de 1500 € au titre des frais irrépétibles.

D'autre part, le Tribunal a rejeté la demande reconventionnelle présentée par la Société Construction Finance sollicitant la réparation du préjudice causé par le retard de Monsieur Y... dans l'exécution du chantier ainsi que par les malfaçons constatées.

La Société Construction Finance a interjeté appel de ce jugement.

La Société Construction Finance a conclu à la réformation du jugement et sollicité la condamnation de Monsieur Y... au paiement des sommes suivantes :

-- 91 044,42 € représentant le montant des paiements effectués en vertu de l'exécution provisoire assortissant le jugement ;

-- une indemnité de 289 790 € à titre de dommages-intérêts représentant le montant des travaux de reprise nécessités par les malfaçons affectant les travaux de maçonnerie ;

-- une indemnité de 4500 € en application des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile.

L'appelante fait valoir d'une part que contrairement à ce qu'ont déclaré les premiers juges, Monsieur Y... n'a pas été privé du droit d'exercer l'action directe contre l'entrepreneur principal, et qu'au contraire, il l'a mise en oeuvre puisque c'est l'objet de son courrier recommandé du 10 février 2003 dans lequel il a fait expressément référence aux articles 12 et 13 de la loi relative à l'action directe du sous-traitant contre le Maître de l'Ouvrage. Elle soutient donc que les dispositions de l'article 14 -- un de cette loi ne sont pas applicables puisqu'elles visent le cas où le sous-traitant a été privé du droit d'exercer l'action directe.

Elle ajoute qu'elle a réglé à Monsieur Y... les sommes sollicitées et que son obligation à l'égard de celui-ci correspond seulement à celle qu'elle a envers l'entrepreneur principal.

Elle fait valoir par contre que Monsieur Y... a commis des fautes en abandonnant le chantier sans motif légitime ,et en rompant unilatéralement le contrat dès le mois de juillet 2004, malgré la mise en demeure adressée par l'architecte le 20 septembre 2004.

La Société Construction Finance soutient que contrairement à ce que déclare Monsieur Y... pour justifier l'abandon du chantier, elle a bien rempli ses obligations relatives à la garantie du paiement de ses prestations, et elle lui a réglé d'autre part les situations de travaux justifiées, ce qui a d'ailleurs été constaté par le juge des référés dans une ordonnance du 29 septembre 2004.

L'appelante déclare d'autre part que les travaux effectués par Monsieur Y... sont entachés de nombreuses malfaçons qui lui avaient été signalées dans la lettre de mise en demeure du maître d'oeuvre du 25 juin 2004, et rappelées dans un autre courrier du 20 septembre 2004 ,mentionnant les désordres énumérés dans les comptes rendus de chantier.

Elle fait valoir qu'elle a dû faire reprendre tous ces travaux, portant sur la réalisation des allèges de loggias au premier étage de tous les ilots, la mise à niveau des linteaux des portes palières et des portes fenêtres, l'exécution des relevés de seuil pour les portes palières, la mise en oeuvre des ossatures des lucarnes et des gaines électriques de tous les îlots, la création de siphons de sol dans les logements accueillant des personnes handicapées, la mise en place d'une structure métallique porteuse pour deux escaliers, la reprise des portes palières situées en bout de coursives, etc.

Monsieur Y... a conclu à la confirmation du jugement , et sollicité d'autre part la condamnation de la Société Construction Finance au paiement des sommes suivantes :

-- 2276,87 € correspondant au montant de la retenue de garantie:

-- une indemnité de 8 000 € en application des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile.

Il fait valoir en premier lieu qu'il a subi un préjudice en sa qualité de sous-traitant, puisqu'il n'a pas été en mesure d'exercer l'action directe du fait du manquement de la Société Construction Finance dans l'accomplissement de ses obligations, laquelle, au mépris des dispositions de l'article 14 - un de la loi du 31 décembre 1975, n'a pas mis en demeure la Société EAUTECH de s'acquitter de ses obligations, de lui présenter son sous-traitant et de lui faire agréer ses conditions de paiement, et qu'au contraire, elle a poursuivi le règlement des situations de travaux directement entre les mains de cette Société.

Il soutient donc qu'il a subi un préjudice important et que le Maître de l'Ouvrage doit l'indemniser à concurrence du solde du prix des travaux, c'est-à-dire la somme de 86 035,44 €. Il fait observer que ses demandes portent exclusivement sur la période antérieure au mois de décembre 2002 puisqu' il a pu obtenir le règlement des situations de travaux directement à compter du mois de janvier 2003.

Il ajoute qu'à partir du moment où le Maître de l'Ouvrage a connaissance de l'existence du sous-traitant, la mise en demeure adressée à l'Entreprise principale doit intervenir rapidement, ce qui n'a pas été le cas en l'espèce.

Monsieur Y... fait valoir d'autre part qu'il n'a pas abandonné le chantier et qu'il avait informé le Maître de l'Ouvrage qu'il n' interviendrait pas sur le chantier pendant la période estivale, mais que par contre, il était bien présent à la réunion de chantier du 28 juillet 2004. Il déclare que c'est la Société Construction Finance qui est responsable de la rupture des relations contractuelles, dans la mesure où elle n'a pas respecté son obligation d'obtention d'une garantie bancaire, le mettant ainsi dans l'impossibilité de poursuivre son activité.

L'intimé soutient par ailleurs que les désordres et malfaçons qui lui sont imputés ne sont pas établis :

-- sur la réalisation des allèges des loggias, des structures des lucarnes et des ossatures de gaines techniques : il déclare que ces travaux ne figurent pas sur les documents contractuels et les devis qui lui ont été remis ;

-- sur la mise à niveau des linteaux, des portes palières et des portes fenêtres : il indique que ces travaux ont été réalisés dans le courant de la semaine numéro 29 pour permettre la pose des portes à compter du 19 juillet.

Il prétend par ailleurs que les seuls travaux non exécutés figurent dans des « avenants » qu'il n'a pas acceptés.

Monsieur Y... ajoute qu'en tout état de cause, ces prétendus désordres et malfaçons ne sont pas établis et que d'ailleurs, la Société Construction Finances n'a pas produit le moindre document technique tel qu'un rapport d'expertise pour justifier ses dires.

Il fait observer que c'est une Entreprise dénommée Profil du Futur qui a conçu et fabriqué les structures composant l'ossature de ce chantier, et que de nombreux désordres invoqués par l'appelante résultent de la non-conformité de ces structures et ne peuvent donc lui être imputés.

Monsieur Y... déclare enfin qu'il ne peut lui être imputé de pénalités de retard, dans la mesure où le retard de six mois dans l'exécution du chantier ne relève pas de sa responsabilité mais qu'il incombe à d'autres corps de métier, et qu'en tout état de cause, le Maître de l'Ouvrage ne lui avait pas remis un échéancier précis.

L'ordonnance de clôture a été rendue le huit janvier 2008.

MOTIFS DE L'ARRET

1) sur la demande principale présentée par Monsieur Y....

La SAS CONSTRUCTION FINANCE, promoteur immobilier, a confié au mois de février 2002 à la Société EAUTECH, Entreprise générale, des travaux de construction d'une résidence à LUZ B.... Les travaux de maçonnerie ont été sous-traités à l' Entreprise Y....

Deux ordres de services ont été donnés le 12 février 2002 pour une tranche de 57 logements, et le 17 juin 2002 pour la deuxième tranche de 75 logements.

Le 10 février 2003, Monsieur Y... a adressé à la Société Construction Finance une copie de la mise en demeure qu'il avait envoyée à la Société EAUTECH, lui rappelant qu'elle était redevable d'une somme de 156 761,14 € et que si le règlement n'intervenait pas dans le délai d'un mois, il demanderait alors le paiement au Maître de l'Ouvrage, en application des dispositions des articles 12 et 13 de la loi du 31 décembre 1975 relative à la sous-traitance.

Le 11 février 2003, la Société EAUTECH a autorisé la Société Construction Finance à régler directement au sous-traitant la somme de 70 725,70 €, en précisant qu'elle viendrait en compensation des factures Eautech émises au débit du Maître de l'Ouvrage.

Le 14 février 2003, Monsieur Y... s'est engagé à poursuivre son activité sur le chantier en contrepartie de cette somme de 70 725,70 €.

La Société EAUTECH a été placée en liquidation judiciaire par le Tribunal de Commerce de BOBIGNY par jugement du 23 avril 2003.

Le 15 avril 2003, Monsieur Y... et la Société Construction Finance ont passé un marché de travaux portant sur une partie du lot numéro deux pour un prix total de 1 021 164,59 € hors taxes. Par deux avenants des 27 janvier et 17 mai 2004, ce marché a été ramené à la somme de 806 043,90 € hors taxes à fin de prendre en compte les règlements directs de certaines fournitures par la Société Construction Finance.

Le 17 novembre 2003, Monsieur Y... a adressé une lettre recommandée à la Société Construction Finance afin qu'elle lui fournisse la preuve du contrat spécifique qu'elle aurait dû souscrire pour le garantir au titre du marché signé le 15 avril 2003, et qu'à défaut, elle fasse établir un cautionnement solidaire par son établissement bancaire.

Monsieur Y... appuyait ses demandes sur les dispositions de l'article 1799 -1 du Code Civil.

Au mois de janvier 2004, Monsieur Y... mettait en demeure la Société Construction Finance de mettre en place les garanties prévues à l'article précité et de lui régler les factures impayées, en déclarant d'autre part surseoir à l'exécution de chantier.

Par décision du 21 septembre 2004, le juge des référés a accordé une provision à Monsieur Y..., lequel avait saisi d'autre part le juge du fond en se fondant sur les dispositions de l'article 14-1 de la loi du 31 décembre 1975.

L'article 12 de cette loi dispose que le sous-traitant à une action directe contre le maître d'ouvrage si l'entrepreneur principal ne paie pas, un mois après en avoir été mis en demeure, les sommes qui sont dues en vertu du contrat de sous-traitance. Une copie de cette mise en demeure est adressée au Maître de l'Ouvrage . Cette action directe subsiste même si l'entrepreneur principal est en état de liquidation judiciaire.

L'article 13 précise que l'action directe ne peut viser que le paiement correspondant aux prestations prévues par le contrat de sous-traitance, et dont le Maître de l'Ouvrage est effectivement bénéficiaire. Les obligations du Maître de l'Ouvrage sont limitées à ce qu'il doit encore à l'entrepreneur principal à la date de la réception de la copie de la mise en demeure prévue à l'alinéa précédent.

L'article 14 -1 dispose que le Maître de l'Ouvrage doit ,s'il a connaissance de la présence sur le chantier d'un sous-traitant n'ayant pas fait l'objet des obligations définies à l'article trois, à l'article six, ainsi que celles définies à l'article cinq, mettre l'entrepreneur principal ou le sous-traitant en demeure de s'acquitter de ses obligations.

En l'espèce, il n'est pas contesté que dès le début du chantier, le maître d'ouvrage avait connaissance de l'existence de l' Entreprise Y... en qualité de sous-traitant de la Société EAUTECH, puisqu'elle assistait à toutes les réunions de chantier et qu'elle figurait sur tous les comptes rendus correspondants. L'Entreprise Y... aurait du être présentée et agréée dès le mois de mars ou avril 2002

Cependant, le Maître d'C... s'est abstenu de remplir ses obligations édictées par l'article 14 -1 de la loi précitée, en ne mettant pas en demeure la Société EAUTECH Entreprise principale de s'acquitter de ses obligations, à savoir de faire accepter le sous-traitant et d' agréer les conditions de paiement de ce contrat de sous-traitance.

La Société Construction Finance qui n'a pas rempli ses obligations doit donc indemniser le sous-traitant et le préjudice de celui-ci est représenté par le solde du marché de travaux mentionné dans la mise en demeure du 10 février 2003.

Le montant des factures sollicitées s'élevait à 156 761,14 € et Monsieur Y... a reçu seulement un règlement de 70 725,70 €.. Le sous-traitant peut recevoir un paiement partiel sur le fondement de l'action directe et recouvrer le reste de sa créance sous forme de dommages-intérêts. Enfin, le fait que Monsieur Y... ait conclu un marché le 15 avril 2003 avec la Société Construction Finance à fin de poursuivre directement l'exécution de ce chantier ne signifie pas pour autant qu'il ait renoncé à toute action en responsabilité à l'encontre de ladite Société.

En conséquence, la Société Construction Finance sera condamnée à payer à Monsieur Y... la somme de 86 035,44 € en réparation de son préjudice.

2) sur les demandes reconventionnelles présentées par la Société Construction Finance.

En premier lieu, la Société Construction Finance soutient que Monsieur Y... a abandonné le chantier sans motif légitime. Celui-ci objecte qu'il avait pris soin d'informer le Maître de l'Ouvrage qu'il n'interviendrait pas sur le chantier pendant la période d'été, compte tenu des nuisances sonores générées par son activité ; il ajoute qu'il était présent à la réunion de chantier du 28 juillet 2004 et que dans un courrier du 03 août 2004, il indique avoir pris acte de la volonté de l'architecte et du maître d'ouvrage qu'il n'intervienne plus sur ce chantier .Il fait valoir qu'en tout état de cause ,aux termes de l'article 1799-1 du Code Civil, le Maître de l'Ouvrage aurait dû lui justifier d'une garantie de paiement par un établissement de crédit ou un organisme de garantie collective, mais qu'il n'a pas déféré à cette demande malgré les mises en demeure qu'il lui a adressée le cinq janvier 2004.

Or il résulte de l'article 1799 -- 1 du Code Civil que l'entrepreneur peut surseoir à l'exécution du contrat après une mise en demeure restée sans effet à l'issue d'un délai de 15 jours, mais à la condition qu'aucune garantie n'ait été fournie et que l'entrepreneur demeure impayé pour les travaux exécutés.

Or, la Société Construction Finance rapporte la preuve que les factures émises par Monsieur Y... au titre des ouvrages réalisés en exécution du contrat du 15 avril 2003 ont été réglées, ou bien couvertes par une traite non arrivée à échéance à la date du 12 juillet 2004 correspondant à l'assignation en référé.

En conséquence, l'une des conditions requises pour l'application de l'article 1799- 1 du Code Civil n'est pas remplie, et dès lors, Monsieur Y... n'est pas en droit d'abandonner le chantier ; la rupture du contrat lui est donc imputable.

La Société Constructions Finance sollicite le paiement de deux séries de sommes, à savoir des pénalités de retard au motif que le chantier a été achevé avec six mois de retard en raison de l'abandon de chantier par Monsieur Y..., et que d'autre part les travaux qu'il a effectué sont entachés de malfaçons qui ont dû être reprises par d'autres Entreprises.

a) sur les pénalités de retard.

La Société Construction Finance sollicite à ce titre une indemnisation d'un montant de 145 800 € en s'appuyant sur les dispositions de l'article 0.22.5 du Cahier des Charges Techniques Particulières que Monsieur Y... aurait signé .Elle a versé ce document aux débats, dont il résulte d'une part qu'il a bien été signé par Monsieur Y... et que l'article 0.22.5 stipule que l'entrepreneur dispose d'un délai de 10 jours pour lever les réserves dans toutes les parties du bâtiment, et que passé ce délai, le Maître de l'Ouvrage pourra appliquer, sans mise en demeure, une pénalité de 1/ 100 ème sur le montant global du marché de l'entrepreneur par jour calendaire de retard, qui ne pourra être inférieur à 15,25 € hors taxes par jour.

Cependant, la Société Construction Finance n'a pas versé aux débats le procès-verbal de réception des travaux qui aurait permis d'une part de déterminer le point de départ du délai de retard de six mois qu'elle invoque d'ailleurs sans précision ni justificatifs, et de déterminer d'autre part l'imputabilité des retards constatés, d'autant que de nombreuses Entreprises sont intervenues sur ce chantier, et qu'il ressort de certains procès verbaux de réunions de chantier que d'autres Entreprises peuvent aussi être concernées par ces retards.

En conséquence, la Cour juge que la Société Construction Finance ne rapporte pas la preuve que les retards constatés sur ce chantier puissent être exclusivement imputés à Monsieur Y... et ne justifie pas sa demande. En conséquence, elle sera déboutée de cette demande.

b) sur les malfaçons.

La Société Construction Finance n'a pas fait établir de rapport d'expertise à ce sujet mais par contre, elle a versé aux débats les comptes rendus de chantiers des 12 et 19 mai, 9,16, 23 et 30 juin 2004, ainsi que ceux des 7 et 21 juillet 2004.

Il ressort de l'examen de ces documents que d'une part Monsieur Y... était présent lors de ces réunions ,à l'exception de celle qui s'est tenue le 28 juillet 2004, et que d'autre part il résulte des compte rendus de réunions de coordination des 7,21 et 28 juillet que de nombreux manquements ont été constatés par le maître d'oeuvre dans l'exécution des travaux confiés à Monsieur Y... :

–réalisation des allèges des loggias au premier étage des ilots;

–reprise des portes palières en bout de coursives conformément au plan de l'architecte;

– mise à niveau des linteaux des portes palières et des portes- fenêtres donnant sur les loggias ;

–terminer les relevés de seuils pour les portes palières, pour permettre à l'étancheur d'intervenir ;

–reprise des sciages des panneaux en bois;

–mise en oeuvre des structures des lucarnes ;

–réalisation des murs de soutènement au droit des ilots numéros trois et quatre;

–reprise des étanchéités au droit des relevés béton;

–reprise des pieds des ossatures non horizontales de l'îlot numéro huit:

–montage de la structure des ilots 9.5 et 9.6;

–réalisation du dallage de l'îlot numéro sept, et montage de la structure métallique, y compris la livraison de celle-ci sur le chantier ;

– nettoyage du chantier et enlèvement des ossatures ainsi que des vieux mobiliers.

Le maître d'oeuvre , Monsieur D..., lui a adressé le 25 juin 2004 une lettre de mise en demeure d'effectuer les travaux en cause , ainsi qu'un nouveau courrier très explicite le 20 septembre 2004 auquel il a annexé un tableau récapitulatif des différents désordres et malfaçons imputés à. celui-ci.

Ces constatations ont également été reprises dans un constat d'huissier du premier septembre 2004.

Dans un courrier du trois août 2004 adressé à l'avocat de la Société Construction Finance, ,Monsieur Y... a contesté en partie les griefs allégués à son encontre tout en reconnaissant d'autre part le bien-fondé d'une partie d'entre eux, à savoir :

– mise à niveau des linteaux des portes palières et des portes fenêtres ;

–reprise des étanchéités au droit des relevés béton, et des pieds des ossatures de l'îlot numéro huit;

–montage de la structure des ilots 9.5 , 9.6 et 7 ;

–nettoyage général du chantier ;

–enlèvement des lits et vieux mobilier de l'îlot numéro trois.

Il a soutenu que les autres travaux mentionnés ci-dessus n'étaient pas prévus contractuellement, ou bien qu'ils ont été réalisés.

Monsieur Y... ne rapporte pas la preuve de l'exécution complète des travaux en cause, pas plus que celle relative au caractère non contractuel des autres travaux, pas plus que celle de l'imputabilité de certains désordres à d'autres corps de métier.

La Société Construction Finance a versé aux débats et communiqué les devis, factures, et ordres de travaux passés en vue de remédier aux désordres constatés (devis et factures des Entreprises La Metallerie Occitane , Prestige Construction Ile de France, Cibat, Finibat,....).

Le montant total de ces devis, factures et ordres de travaux s'élève à la somme de 143 990 € hors taxes. Monsieur Y... sera donc condamné à payer cette somme à la SAS CONSTRUCTION FINANCE.

Chacune des parties succombe partiellement sur ses demandes ; la SAS CONSTRUCTION FINANCE et Monsieur Jean Marc Y... seront donc déboutés de leurs demandes respectives en indemnité fondées sur l'application des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile..

Pour le même motif, il convient de faire masse des dépens et frais de procédure et de les partager par moitié entre les parties.

PAR CES MOTIFS,

La Cour,

Après en avoir délibéré, statuant publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort.

Réforme le jugement du 24 octobre 2005 rendu par le Tribunal de Commerce de TARBES et statuant un nouveau.

Condamne la SAS Constructions Finance à payer à Monsieur Jean Marc Y... la somme de 86 035,44 €.

Condamne Monsieur Jean Marc Y... à payer à la SAS CONSTRUCTION FINANCE la somme de 143 990 € hors taxes.

Déboute les parties de leurs autres demandes.

Fait masse des dépens et les partage par moitié entre les parties et autorise les avoués de la cause à recouvrer directement ceux d'appel, en application des dispositions de l'article 699 du Code de Procédure Civile.

LE GREFFIERLE PRESIDENT

Michèle LASSERRERoger NEGRE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Pau
Numéro d'arrêt : 05/03978
Date de la décision : 03/06/2008
Sens de l'arrêt : Autre

Références :

Décision attaquée : Tribunal de commerce de Tarbes


Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2008-06-03;05.03978 ?
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