PhD/AM
Numéro 3865/07
COUR D'APPEL DE PAU
2ème CH - Section 1
ARRET DU 22 octobre 2007
Dossier : 05/03454
Nature affaire :
Action en responsabilité exercée contre l'établissement de crédit pour octroi abusif de crédits ou brusque rupture de crédits
Affaire :
S.C.I. GARCIA
C/
BANQUE POPULAIRE OCCITANE
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
A R R E T
prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour le 22 octobre 2007, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Nouveau Code de Procédure Civile.
* * * * *
APRES DÉBATS
à l'audience publique tenue le 10 Septembre 2007, devant :
Monsieur LARQUE, Président
Madame TRIBOT LASPIERE, Conseiller
Monsieur DARRACQ, Vice-Président placé chargé du rapport, désigné par ordonnance du 3 septembre 2007
assistés de Madame MIQUEU, Adjoint Administratif faisant fonction de Greffier, présent à l'appel des causes.
Les magistrats du siège ayant assisté aux débats ont délibéré conformément à la loi.
dans l'affaire opposant :
APPELANTE :
S.C.I. GARCIA
Route de PAU
65000 TARBES
agissant poursuites et diligences en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège
représentée par la S.C.P. DE GINESTET / DUALE / LIGNEY, avoués à la Cour
assistée de Maître CLAVERIE, avocat au barreau de TARBES
INTIMEE :
BANQUE POPULAIRE OCCITANE
33 - 43 Avenue Georges Pompidou
31135 BALMA Cédex
venant aux droits de la BANQUE POPULAIRE TOULOUSE PYRENEES
représentée par la S.C.P. LONGIN C. ET P., avoués à la Cour
assistée de Maître DECKER, avocat au barreau de TOULOUSE
sur appel de la décision
en date du 12 SEPTEMBRE 2005
rendue par le TRIBUNAL DE COMMERCE DE TARBES
FAITS, PROCÉDURE, PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES
Par deux actes notariés, respectivement en date du 21 septembre 2002 et du 03 décembre 2002, la BANQUE POPULAIRE OCCITANE a consenti deux prêts d'argent à la SCI GARCIA dans le cadre du financement d'une acquisition immobilière.
Par lettre recommandée avec demande d'avis de réception du 20 mai 2003, la BANQUE POPULAIRE OCCITANE a mis en demeure la SCI GARCIA, également titulaire d'un compte courant dans ses livres, de régulariser deux échéances impayées, sous huitaine, en se prévalant de la clause résolutoire.
En décembre 2003, la banque a engagé une procédure de saisie immobilière au préjudice de la SCI GARCIA pour avoir paiement des sommes dues au titre des deux prêts.
Suivant exploit du 24 février 2004, la SCI GARCIA a fait assigner la banque par devant le tribunal de commerce de Tarbes en annulation de la déchéance du terme et de la résiliation des prêts, et subsidiairement en responsabilité pour abus de droit dans la résiliation des prêts.
Par jugement du 12 septembre 2005, auquel il convient expressément de se référer pour un plus ample exposé des faits et des prétentions et moyens initiaux des parties, le tribunal de commerce de Tarbes a :
- débouté la SCI GARCIA de ses demandes,
- débouté la BANQUE POPULAIRE OCCITANE de ses demandes,
- débouté les parties de leurs demandes fondées sur l'article 700 du Nouveau Code de procédure civile,
- condamné la BANQUE POPULAIRE OCCITANE aux dépens.
La SCI GARCIA a relevé appel de ce jugement, par déclaration reçue au greffe de la Cour le 28 septembre 2005, dans des conditions de forme et de délais qui ne sont pas contestées et à l'égard desquelles les seuls éléments portés à la connaissance de la Cour ne font pas ressortir qu'elles seraient contraires à l'ordre public.
Vu les conclusions déposées le 26 septembre 2006 par la SCI GARCIA aux fins de voir :
- réformer le jugement entrepris en toutes ses dispositions,
- dire et juger qu'il résulte des circonstances de l'espèce, que la BANQUE POPULAIRE OCCITANE est l'auteur d'un abus de droit caractérisé par le dépassement volontaire du cadre normal de l'exercice de résiliation du contrat de crédit la liant à elle,
- dire et juger que le prononcé de la déchéance du terme par la BANQUE POPULAIRE OCCITANE a été fait de mauvaise foi,
- dire et juger que le manquement à la bonne foi est aussi constitué par le fait que la BANQUE POPULAIRE OCCITANE n'a jamais tenu compte de l'intérêt particulier de son co-contractant,
- en conséquence :
- constater que la BANQUE POPULAIRE OCCITANE n'est pas fondée à solliciter quelconque paiement à son encontre,
- prononcer la nullité de la déchéance du terme et de la résiliation du contrat de crédit subséquente en raison de l'illécéité des motifs de la rupture du contrat,
subsidiairement :
- dire et juger sur le fondement des articles 1134 et 1142 du Code civil que la BANQUE POPULAIRE OCCITANE a commis un abus de droit qui lui a occasionné un préjudice égal au montant de la somme réclamée par la banque,
- ordonner la compensation judiciaire des sommes dues,
- condamner la BANQUE POPULAIRE OCCITANE à lui payer la somme de 3.000 euros sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de procédure civile et aux dépens.
Vu les conclusions déposées le 05 décembre 2006 par la BANQUE POPULAIRE OCCITANE aux fins de voir :
- confirmer le jugement entrepris,
- en conséquence, débouter la SCI GARCIA de son appel,
- à titre subsidiaire, vu les articles 1134,1139,1147 et 1382 du Code civil :
- dire qu'il n'y a pas de nullité sans texte,
- débouter la SCI GARCIA de sa demande de nullité de la déchéance du terme,
- la débouter de ses demandes subsidiaires tendant à l'indemnisation de son préjudice,
- à titre reconventionnel :
- condamner la SCI GARCIA au paiement de la somme de 3.000 euros à titre de dommages-intérêts pour procédure abusive,
- condamner la SCI GARCIA au paiement d'une somme de 4.000 euros sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de procédure civile et aux dépens.
Vu la clôture de l'instruction de l'affaire par ordonnance du 20 mars 2007.
MOTIFS DE LA DÉCISION
En l'absence de tout débat quant à la nature juridique, et ses conséquences procédurales, de la demande principale formée par la SCI GARCIA, manifestement née de la procédure de saisie immobilière ou qui s'y réfère directement et qui est de nature à exercer une influence immédiate et directe sur son déroulement, il sera statué sur l'entier litige soumis à la Cour ;
Aux termes de l'article 10 du cahier des charges annexé aux deux actes de prêt, l'emprunteur sera déchu du bénéfice du terme, et la somme prêtée deviendra immédiatement exigible de plein droit, huit jours après la notification qui lui aura été faite par lettre recommandée avec demande d'avis de réception mentionnant la volonté de la banque de se prévaloir de la clause résolutoire : ... à défaut de paiement à la bonne date d'une seule échéance prévue au contrat de prêt ;
En l'espèce, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception du 20 mai 2003, retirée le 07 juin 2003, dans des conditions non contestées, la BANQUE POPULAIRE OCCITANE a, en des termes clairs, précis et détaillés, mis en demeure la SCI GARCIA de régler la somme de 1.055,69 euros correspondant d'une part à l'échéance du mois de mai 2003, d'un montant de 935,04 euros au titre du premier prêt, et d'autre part au solde de l'échéance du mois de mai 2003, d'un montant de 120,65 euros (sur une échéance de 404,34 euros) au titre du second prêt ;
Conformément aux prescriptions contractuelles, la BANQUE POPULAIRE OCCITANE a exprimé sa volonté de se prévaloir de la déchéance du terme en vertu de la clause résolutoire en cas de non régularisation dans les 8 jours ;
Les mensualités du premier prêt était exigibles les 16 de chaque mois et celle du second le 1er ;
C'est donc à tort que la SCI GARCIA, qui reconnaît l'impayé sur le second prêt soutient que la seconde échéance n'était pas exigible à la date de la lettre recommandée avec demande d'avis de réception ;
En outre, en déclarant avoir mis en place un virement permanent de 1.350 euros à partir seulement du mois de juillet 2003, la SCI GARCIA reconnaît ne pas avoir déféré à la demande de régularisation dans le délai imparti, soit au plus tard le 16 juin 2003 ;
Il sera ici relevé, que les versements de 1.800 euros du 03 avril 2003 et de 1.500 euros du 14 mai 2003, destinés notamment à couvrir des échéances impayées antérieures, restaient insuffisants pour honorer l'échéance du mois de mai du premier prêt même en faisant abstraction des frais bancaires énumérés par l'appelante (page 4 des conclusions) ;
A cet égard, la banque fait justement observer que la SCI GARCIA n'a jamais contesté les frais inscrits en débit sur les relevés bancaires l'informant de la possibilité
de faire une réclamation contre les opérations enregistrés dans les deux mois, tandis qu'elle justifie au regard des clauses du cahier des charges des actes de prêt de l'application de frais de retard ;
Par ailleurs, l'invocation d'une prétendue libération tardive des fonds prêtés qui serait à l'origine des difficultés de fonctionnement du compte courant reste à l'état d'allégation et sans rapport avec les retards de remboursement des prêts ;
De même, l'ouverture en mai 2003 par la banque d'un sous compte dénommé "compte impayé remboursement" dédié au remboursement des prêts ne préjudiciait en rien aux droits de la SCI GARCIA qui n'avait pas contracté une ouverture de crédit en compte courant mais deux prêts immobiliers classiques ;
De même encore, il ne peut être reproché à la banque de ne pas avoir actionné la caution ou de ne pas avoir vérifié auprès de l'autre banque de la SCI GARCIA si cette dernière était solvable ;
Enfin, la circonstance que la BANQUE POPULAIRE OCCITANE ait pu encaisser des virements mis en place par la SCI GARCIA, postérieurement à la résiliation des prêts, ne saurait traduire à elle seule, une quelconque volonté de la banque de renoncer au bénéfice de la clause résolutoire découlant de sa vaine mise en demeure ;
Il suit des considérations qui précèdent que la BANQUE POPULAIRE OCCITANE a pu régulièrement se prévaloir de la déchéance du terme et exiger les sommes impayées et le capital restant dû pour chaque prêt à chacune des dates des échéances du mois de mai ;
La BANQUE POPULAIRE OCCITANE qui ne caractérise ni l'abus du droit d'agir en justice de la SCI GARCIA ni un quelconque préjudice doit être déboutée de sa demande de dommages-intérêts ;
En conséquence, le jugement entrepris sera confirmé en toutes ses dispositions à l'exception des dépens ;
La SCI GARCIA sera condamnée aux entiers dépens de première instance et d'appel d'appel et la BANQUE POPULAIRE OCCITANE déboutée de sa demande fondée sur l'article 700 du Nouveau Code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La Cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,
CONFIRME en toutes ses dispositions, l'exception des dépens, le jugement entrepris,
Y ajoutant,
CONDAMNE la SCI GARCIA aux entiers dépens de première instance et d'appel,
DÉBOUTE la BANQUE POPULAIRE OCCITANE de sa demande au titre de frais irrépétibles,
AUTORISE la SCP LONGIN, avoués, à procéder au recouvrement direct des dépens d'appel conformément aux dispositions de l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile.
Signé par Monsieur Jean-Michel LARQUE, Président, et par Madame Sylvie HAUGUEL, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
LE GREFFIERLE PRESIDENT