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21/08/2007 | FRANCE | N°3090

France | France, Cour d'appel de Pau, Ct0249, 21 août 2007, 3090


DP/PP

Numéro 3090/07

COUR D'APPEL DE PAU

1ère Chambre

ARRÊT DU 21/08/07

Dossier : 05/03222

Nature affaire :

Demande en garantie des vices cachés ou tendant à faire sanctionner un défaut de conformité

Affaire :

Véronique X... épouse Y...

C/

Michel Z...,

Claude A...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

A R R Ê T

prononcé par Monsieur PARANT, Président,

en vertu de l'article 452 du Nouveau Code de Procédure Civile,

assisté de Madame P

EYRON, Greffier,

à l'audience publique du 21 Août 2007

date à laquelle le délibéré a été prorogé.

* * * * *

APRES DÉBATS

à l'audience publique tenue le 24 Janvier 200...

DP/PP

Numéro 3090/07

COUR D'APPEL DE PAU

1ère Chambre

ARRÊT DU 21/08/07

Dossier : 05/03222

Nature affaire :

Demande en garantie des vices cachés ou tendant à faire sanctionner un défaut de conformité

Affaire :

Véronique X... épouse Y...

C/

Michel Z...,

Claude A...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

A R R Ê T

prononcé par Monsieur PARANT, Président,

en vertu de l'article 452 du Nouveau Code de Procédure Civile,

assisté de Madame PEYRON, Greffier,

à l'audience publique du 21 Août 2007

date à laquelle le délibéré a été prorogé.

* * * * *

APRES DÉBATS

à l'audience publique tenue le 24 Janvier 2007, devant :

Monsieur DIXIMIER, magistrat chargé du rapport,

assisté de Madame PEYRON, greffier présent à l'appel des causes,

Monsieur DIXIMIER, en application des articles 786 et 910 du Nouveau Code de Procédure Civile et à défaut d'opposition a tenu l'audience pour entendre les plaidoiries et en a rendu compte à la Cour composée de :

Monsieur PARANT, Président

Monsieur PETRIAT, Conseiller

Monsieur DIXIMIER, Conseiller

qui en ont délibéré conformément à la loi.

dans l'affaire opposant :

APPELANTE :

Madame Véronique X... épouse Y...

5 place du Foirail

64370 ARTHEZ DE BEARN

représentée par la SCP DE GINESTET / DUALE / LIGNEY, avoués à la Cour

assistée de la SCP DE GINESTET et MOUTET-FORTIS, avocats au barreau de DAX

INTIMES :

Monsieur Michel Z...

1bis rue Jean Despujols

33770 SALLES

représenté par la SCP LONGIN, avoués à la Cour

assisté de Me COULAUD, avocat au barreau de BORDEAUX

Monsieur Claude A...

rue de la Chapelle

CONTIS

40170 SAINT JULIEN EN BORN

représenté par la SCP MARBOT / CREPIN, avoués à la Cour

assisté de Me GUILLAUMEAU, avocat au barreau de BORDEAUX

sur appel de la décision

en date du 06 JUILLET 2005

rendue par le TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE DAX

FAITS, PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES

Monsieur Michel Z... a vendu le 13 mars 1998 à Monsieur Claude A... un véhicule automobile de marque Land Rover, type Range Rover, millésime 1987, équipé au GPL, immatriculé 5581 PZ 40, avec un kilométrage de 109.000 kilomètres.

Le 31 juillet 1997, le moteur avait été remis en état à 15.000 kilomètres par les Etablissements Aquitaine 4x4, à VILLENAVE D'ORNON.

Au mois de septembre 2000, Monsieur A... a revendu le véhicule à Madame Véronique X..., épouse Y..., moyennant le prix de 70.000 F ou 10.671,43 €.

Le kilométrage affiché s'élevait à 144.333 kilomètres.

Monsieur A... a donc parcouru avec ce véhicule 35.333 kilomètres en deux ans et demi.

Durant les mois qui ont suivi l'achat, Madame Y... a dû entreprendre des réparations au niveau du circuit électrique, de la carburation et de la commande de boîte de vitesses.

Au mois de mars 2001, elle confie son véhicule au garage MORIN, concessionnaire Land-Rover à LESCAR, suite à un problème au niveau des joints de culasses.

Suite à la réparation, lors de la remise en route, il est constaté par ce garagiste un desserrage des chapeaux de palier de vilebrequin, ainsi qu'une fêlure du bloc moteur.

Le garage MORIN constate que le numéro du moteur ne correspond pas à celui d'origine.

Par courrier du 19 avril 2001, Monsieur et Madame Y... ont proposé à Monsieur A... l'annulation de la vente, avec restitution du véhicule et remboursement du prix des réparations réalisées pour 16.731,71 F ou 2.550,73 €, et de la vente.

Par l'intermédiaire de Maître GUILLAUMEAU, avocat au barreau de BORDEAUX, Monsieur A... s'était alors déclaré disposer à trouver une solution amiable au différend, sous la seule réserve que s'il devait y avoir une indemnisation, que celle-ci soit réglée par le véritable responsable des désordres, et notamment Monsieur Z... qui avait changé le moteur.

Aucune solution amiable n'ayant pu être trouvée, Madame Y... a missionné le cabinet d'expertise E..., qui a pu constater des dégradations du bloc-moteur non imputables à un défaut d'entretien ou à l'utilisation du véhicule, et qui constituent un vice propre qui ne peut trouver son origine que dans une intervention antérieure à la vente (de septembre 2000).

Par acte d'huissier en date du 19 mars 2002, Madame Y... a fait assigner Monsieur Claude A... devant le Tribunal de Grande Instance de PAU en référé-expertise.

Par acte du 20 avril 2002, Monsieur A... appelait dans la cause Monsieur Michel Z..., afin que l'expertise à venir lui soit commune et opposable.

Par ordonnance de référé en date du 22 mai 2002, une expertise était confiée à Monsieur F..., qui déposait son rapport écrit le 14 décembre 2002.

Par acte d'huissier en date du 11 février 2003, Madame FERNANDEZ, épouse Y..., a fait assigner devant le Tribunal de Grande Instance de PAU Monsieur Claude A... en résolution de vente sur le fondement des articles 1641 et suivants du Code Civil.

Par une ordonnance en date du 15 décembre 2003, le juge de la mise en état a accueilli l'exception d'incompétence territoriale formée par Monsieur Claude A..., et les parties ont été renvoyées devant le Tribunal de Grande Instance de DAX.

Par acte d'huissier en date du 23 juin 2004, Monsieur A... a appelé en intervention forcée et en garantie Monsieur Michel Z....

Par un jugement en date du 6 juillet 2005, le Tribunal de Grande Instance de DAX a :

- débouté Madame Y... de ses demandes,

- débouté Monsieur Michel Z... de sa demande de dommages et intérêts,

- condamné Madame Y... à payer à Monsieur Claude A... la somme de 1.000 €, en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile,

- condamné Monsieur Claude A... à payer à Monsieur Michel Z... la somme de 500 €, sur le même fondement,

- condamné Madame Y... aux dépens.

Par déclaration faite au greffe de la Cour le 31 août 2005, Madame Véronique X..., épouse Y..., a relevé appel de ce jugement dans des conditions de forme qui ne sont pas critiquées et qui, au vu des pièces dont dispose la Cour, sont recevables.

Dans ses conclusions déposées le 2 janvier 2006, Madame Véronique Y... fait valoir :

* que la vente doit être résolue tant sur le fondement de la garantie des vices cachés, dans la mesure où Monsieur A... a failli à son obligation de résultat en lui ayant cédé un véhicule qui s'est très vite avéré hors d'usage en raison de vices pré-existants au mois de septembre 2000, et où elle a agi dans le bref délai de l'article 1648 du Code Civil, après avoir eu connaissance des vices cachés au mois de décembre 2002, lorsque Maître F... a déposé son rapport d'expertise, que sur celui du manquement à l'obligation de délivrance de l'article 1604 du Code Civil, puisqu'il lui a été délivré un véhicule qui ne correspondait pas aux caractéristiques d'un 4x4 Range Land Rover millésime 1983, en raison d'un changement de moteur,

* que le préjudice subi se décompose :

en un préjudice financier, pour avoir financé en partie l'achat du véhicule au moyen d'un prêt du Crédit Mutuel de 7.622,45 €, dont le coût s'est élevé à 802,48 €,

en un préjudice de jouissance, qui sera évalué à 990 € par mois à compter du mois de mars 2001,

en une perte éprouvée correspondant aux factures de réparation du véhicule et frais annexes, le tout s'élevant à la somme de 2.587,39 €.

Madame Y..., appelante, demande à la Cour de :

- réformer la décision entreprise,

- prononcer la résolution de la vente,

- ordonner la restitution du prix par Monsieur A..., soit la somme principale de 10.671,44 €, outre les intérêts au taux légal à compter du 1er septembre 2000,

- condamner Monsieur A... à lui payer les sommes de :

802,48 €, au titre du préjudice financier,

990 € par mois à compter du 1er mars 2001, au titre du préjudice de jouissance,

2.587,39 €, en remboursement des frais occasionnés par la vente,

2.500 €, par application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile,

- condamner Monsieur Claude A... aux entiers dépens, et dire que conformément aux dispositions de l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile, la SCP DE GINESTET / DUALE / LIGNEY, avoués, pourra recouvrer directement les frais dont elle a fait l'avance sans en avoir reçu provision.

Dans ses conclusions déposées le 14 mars 2006, Monsieur Claude A... répond que :

* l'action résultant des vices rédhibitoires a pour point de départ leur découverte,

* Madame Y... a eu connaissance des vices dès le mois de mars 2001, soit douze mois avant l'action en référé,

* à prendre la date la plus favorable à Madame Y..., soit le dépôt du rapport d'expertise de Maître E..., celui-ci remonterait à plus de huit mois au jour de l'assignation,

* s'agissant d'un véhicule d'occasion, le bref délai est plus court, et ne saurait jamais excéder six mois,

* l'appelante n'apporte rien de nouveau en cause d'appel de nature à modifier l'appréciation faite par le premier juge,

* le rapport d'expertise judiciaire déposé par Maître F... ne permet pas de caractériser la présence d'un vice caché qui lui soit imputable,

* il ne peut y avoir aucun cumul de fondement s'agissant de l'action résolutoire pour vice caché, avec les dispositions relatives au défaut de conformité de l'article 1604 du Code Civil, et il ne peut être excipé d'un défaut de conformité pour contourner la rigueur du bref délai dans l'action pour vice caché,

* l'achat d'une chose d'occasion s'entend normalement d'une chose dans l'état où elle se trouve,

* il n'a pu à aucun moment procéder à l'échange du moteur dont il est fait état aux termes du rapport d'expertise, et ce changement, antérieur à mars 1998, n'a pas eu pour effet de rendre la chose délivrée non conforme à son usage,

* il ignorait tout de l'existence des vices dont se prévaut aujourd'hui l'appelante, de sorte qu'il ne peut en aucun cas être redevable d'une indemnité due au titre d'une prétendue perte de jouissance,

* s'il devait être entrer en voie de condamnation à son endroit, Monsieur Z... devrait alors être condamné à le relever indemne et à le garantir, dès lors que si le véhicule est affecté d'un vice rédhibitoire ou d'un défaut de conformité, leur cause ne peut que se trouver antérieurement à l'acquisition de mars 1998.

Monsieur A..., intimé, demande à la Cour :

1o) à titre principal, de :

confirmer en toutes ses dispositions le jugement entrepris,

déclarer en conséquence irrecevable et mal fondée en son action rédhibitoire Madame Y..., comme excédant le délai prévu à l'article 1648 du Code Civil,

la débouter de l'ensemble de ses demandes plus amples, fins et conclusions,

2o) à titre subsidiaire, de :

condamner Monsieur Z... à le relever indemne de toute condamnation qui pourrait être prononcée à son encontre au profit de Madame Y...,

condamner cette dernière et Monsieur Z... à lui payer la somme de 2.000 €, sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile,

les condamner aux entiers dépens de l'instance,

autoriser la SCP MARBOT / CREPIN, avoués, à procéder au recouvrement des dépens d'appel, conformément aux dispositions de l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile.

Dans ses écritures déposées le 3 mars 2006, Monsieur Michel Z... fait valoir que :

* l'appel dirigé à son endroit est irrecevable, faute pour Madame Y... d'un intérêt à agir à son égard, si bien que Monsieur A... ne peut, aujourd'hui, faire appel incident du même jugement à son encontre,

* l'existence d'un vice n'est considérée comme établie que s'il ne subsiste pas de doute sur la cause de l'état défectueux ou du fonctionnement insatisfaisant de la chose,

* il ne peut être fait droit à une demande fondée sur les vices cachés dès lors qu'elle repose sur des motifs dubitatifs et sur les faits postérieurs à la vente qui ne révèlent pas avec certitude l'existence d'un vice originaire,

* Maître F... se contente d'émettre des hypothèses, et précise qu'en ce qui concerne la non-conformité du moteur, il n'a aucun élément lui permettant d'en connaître l'auteur,

* une éventuelle demande reconventionnelle de Monsieur A... à son égard serait dénuée de tout fondement, dès lors que l'existence d'un vice caché du véhicule au moment de la cession entre les deux parties n'est pas établie.

Aussi, Monsieur Z... demande à la Cour :

1o) à titre principal, de constater l'irrecevabilité de l'appel interjeté par Madame Y... à son endroit,

2o) à titre subsidiaire, et pour le cas où l'appel serait déclaré recevable, de :

constater l'absence de toute demande de Madame Y... à son égard,

déclarer mal fondée toute demande reconventionnelle de Monsieur A... à son endroit,

Et en tout état de cause,

condamner in solidum Madame Y... et Monsieur A... au paiement d'une somme de 3.000 €, sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile, outre aux entiers dépens dont distraction au profit de la SCP LONGIN, avoués.

L'ordonnance de clôture de la procédure a été rendue le 7 novembre 2006.

*

* *

MOTIFS DE LA DECISION

Attendu que Madame Y... a acheté à Monsieur A..., suite à une annonce passée ainsi libellée "Range Rover Vogue GPL, excellent état, vert métallisé, nombreuses options, 70.000 F", au mois de septembre 2000, un véhicule automobile de marque Land Rover, type Range V8 LHAML8, mis en circulation le 30 octobre 1987, immatriculé 5581 PZ 40, no de série SALLHAML 8 EA 307164, équipé au GPL, avec un compteur affichant 144.333 kilomètres, moyennant le prix de 10.671,43 € (70.000 F) ;

Que le contrôle technique réalisé au moment de la cession a révélé des défauts mineurs à corriger avec une contre-visite, ayant néanmoins généré des frais au garage LATASTE, d'ARTHEZ-DE-BEARN, pour 1.924,71 F, soit 292,96 € ;

Qu'entre l'achat au mois de septembre 2000 et son immobilisation six mois plus tard, Madame Y... a dû engager des réparations pour un coût, au vu des justificatifs produits aux débats, de 2.305,34 € (15.122,04 F) ;

Attendu qu'il est constant et non contesté qu'au mois de mars 2001, Madame Y... a confié son véhicule au garage MORIN, concessionnaire Land Rover à LESCAR, à la suite d'un problème au niveau des joints de culasse ;

Qu'après réparation, et remise en marche du moteur, il a été constaté, après dépose du carter inférieur :

1) un desserrage des chapeaux de paliers de vilebrequin,

2) une fêlure du bloc moteur,

3) un numéro de moteur 17 D 00 342 (expertise MÉRET) ne correspondant pas à celui d'origine, qui était 24 D 066683 B (annexe 2 du rapport d'expertise de Maître F...) ;

Attendu que l'expertise amiable et non contradictoire de Maître E... confirmait que :

1) les chapeaux de paliers de vilebrequin 3, 4 et 5 ont battu,

2) les coussinets sont usés jusqu'au métal rose,

3) les paliers no 3 et 4 sont fendus sur la face d'appui, côté bloc moteur,

4) les paliers no 1 et 5 n'ont pas été démontés,

5) le bloc moteur est inutilisable, et le moteur est à remplacer,

Que l'expert précisait que ces dommages n'étaient pas imputables à un défaut d'entretien ou à l'utilisation du véhicule, et constituaient un vice propre qui ne pouvait trouver son origine que dans une intervention antérieure à la vente ;

Attendu qu'autrement dit, Madame Y... a acquis au mois de septembre 2000 un véhicule qui, malgré 13 ans d'âge et un kilométrage de 144.333 (ce qui ne représente qu'un peu plus de 11.000 kilomètres par an, ce qui est raisonnable et peu excessif), était affecté de défauts cachés notables, non apparents d'évidence pour un acquéreur sérieux, diligent et prudent, mais profane en matière automobile, et nullement professionnel en mécanique comme pouvait l'être Madame Y... ;

Que ces vices cachés affectaient les qualités substantielles du véhicule, et sa qualité en générale que Madame Y... était normalement en droit d'en attendre, au point de le rendre au bout de six mois totalement impropre à l'usage auquel il était normalement destiné ;

Attendu que s'agissant d'un véhicule d'occasion, si Madame Y... devait faire preuve, en tant qu'acquéreur normalement prudent et avisé, d'un minimum d'attention, elle n'était absolument pas tenue de procéder à des investigations complètes et complexes sur l'état du véhicule ;

Attendu que celui-ci est confirmé en tout point par le rapport d'expertise judiciaire, et Maître F... émet deux hypothèses sur les causes des vices :

soit une réparation défectueuse par les Etablissements Aquitaine 4x4, à VILLENAVE D'ORNON, au mois de juillet 1997 à 95.000 kilomètres, intervenue au niveau du vilebrequin et des cylindrées,

soit un reconditionnement insatisfaisant du moteur, avec un mauvais serrage des vis de palier du vilebrequin, lors d'un échange standard qui a pu se produire après la réparation sus-évoquée ;

1o) Sur le bref délai de l'action rédhibitoire :

Attendu qu'en application des dispositions de l'article 1648, alinéa 1er, du Code Civil, "l'action doit être intentée par l'acquéreur dans un bref délai, suivant la nature des vices rédhibitoires et l'usage du lieu où la vente a été faite" ;

Attendu qu'il est de jurisprudence constante que l'action rédhibitoire doit être mise en oeuvre à bref délai, lequel n'est pas fixé dans sa durée, à compter de la découverte du vice ;

Attendu en la cause que Madame Y... a eu connaissance des vices affectant le véhicule lorsqu'elle l'a confié au garage MORIN au mois de mars 2001, suite à un problème au niveau des joints de culasse, puisque cette intervention a révélé :

un desserrage des chapeaux de paliers du vilebrquin,

une fêlure du bloc moteur,

que le numéro moteur ne correspondait pas à celui d'origine ;

Que tout au plus, Madame Y... ne peut pas soutenir qu'elle ignorait encore l'existence des défauts notables rendant le Range Rover inapte à son usage normal après le dépôt du rapport privé et amiable de Monsieur E... confirmant en tout point le diagnostic du garage MORIN ;

Que si des échanges de courrier en vue d'une solution amiable ont bien eu lieu au mois d'avril 2001, après conseil pris auprès de la Direction Départementale de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des LANDES, pour autant le courrier du 25 avril 2001 du conseil de Monsieur A..., aux termes duquel celui-ci n'entendait pas supporter la responsabilité de cette affaire, estimant n'avoir aucune part de responsabilité dans le préjudice allégué par Madame Y..., ne laissait subsister aucun doute sur l'impossibilité de trouver une solution et une issue amiables au différend ;

Attendu qu'il n'est absolument pas établi que des pourparlers transactionnels aient perduré au-delà du mois d'avril 2001 ;

Attendu qu'en faisant délivrer une assignation en référé-expertise 18 mois après l'achat du véhicule et 12 mois après, non pas l'apparition des premiers incidents mécaniques qui se sont manifestés peu après l'achat, la connaissance des vices majeurs affectant le moteur du véhicule, voire 8 mois après la confirmation par le cabinet E... de l'existence de ces vices, alors qu'il n'y avait plus aucune possibilité de solution amiable au mois de juillet 2001, l'exigence du bref délai prescrite par l'article 1648 du Code Civil n'a pas été respectée par Madame Y..., qui devait tout au plus, s'agissant d'un véhicule d'occasion de 13 ans ayant parcouru près de 150.000 kilomètres dans des conditions d'utilisation peut-être assez rudes, s'agissant d'un 4x4, engager son action en garantie dans les six mois de la découverte des vices cachés (mars 2001 septembre 2001, voir tout au plus fin décembre 2001) ;

Attendu, dans ces conditions, que Monsieur A... est fondé à soulever la fin de non-recevoir résultant de l'expiration du bref délai ;

Qu'il s'ensuit l'irrecevabilité de la demande en résolution de la vente au titre des articles 1641 et suivants du Code Civil présentée par Madame FERNANDEZ, épouse Y... ;

Que le jugement querellé sera confirmé de ce chef ;

2o) Sur le manquement à l'obligation de délivrance :

Attendu que Monsieur A... était tenu de mettre à la disposition de Madame Y... en temps et lieu convenu un véhicule, selon les stipulations de l'annonce parue, "Range Rover Vogue GPL, vert métallisé, en excellent état, avec de nombreuses options, moyennant le prix de 70.000 F ;

Attendu que l'objet de la délivrance, qui est une obligation de résultat par excellence, doit évidemment être conforme à ce qui avait été convenu avec ses accessoires, et Monsieur A... devait délivrer à Madame Y... un véhicule Range Rover conforme avec l'annonce dans sa qualité, sa quantité et son identité ;

Qu'il s'ensuit que si Madame Y..., s'agissant d'un véhicule âgé de 13 ans et ayant parcouru près de 145.000 kilomètres, devait faire preuve d'un minimum d'attention en tant qu'acquéreur prudent, diligent et normalement avisé, sans être tenue pour autant de procéder à des investigations complexes, son vendeur était tenu de lui délivrer un véhicule en excellent état ;

Attendu que la non-conformité est l'absence, non pas d'une qualité attendue (défaut objectif), mais d'une qualité promise, de nature plus subjective ;

Qu'une différence notable sur la qualité du moteur du véhicule qui, au lieu d'être un moteur d'origine de millésime 1983 ayant parcouru près de 145.000 kilomètres, avec des risques afférents à cette vétusté, est un moteur de seconde monte, plus ancien, équipé d'un carburateur et non d'une injection, au kilométrage réel inconnu, avec des aléas sur sa fiabilité, et affecté au moment de la transaction de vices cachés suffisamment graves au point de le rendre inapte à son usage six mois plus tard, même s'il n'est pas établi que ce moteur n'était pas conforme à la réglementation technique et aux spécificités de ce type de véhicule, et n'a jamais interdit l'utilisation du véhicule (pas de passage aux mines), ni de l'assurer, n'en constitue pas moins un défaut de conformité ;

Que Monsieur A... avait promis de délivrer un véhicule en "excellent état" ;

Que la réalité a été toute autre ;

Attendu que la conformité, à côté de son aspect matériel (nature, quantité, caractéristiques apparentes de la chose vendue) présente en outre un aspect fonctionnel caractérisé par l'aptitude de la chose à l'usage pour lequel elle a été achetée ;

Attendu en la cause qu'il y a :

1) une différence notable entre la chose promise et les caractéristiques convenues : un véhicule en "excellent état", et celles du véhicule livré, en mauvais état mécanique (le moteur expirant au bout de six mois d'utilisation, après avoir parcouru 6.738 kilimètres),

2) une différence ayant entraîné une diminution puis la perte de l'usage, ou autrement dit, l'absence de conformité du véhicule à sa destination parce que vicié,

3) la certitude qu'en sa qualité de profane en matière automobile et de non professionnel de la mécanique, Madame Y... n'a pas pu découvrir cette différence lors de la délivrance ;

Qu'il s'ensuit un cumul d'une délivrance non conforme et d'un vice caché, et si Madame Y... est irrecevable à agir sur le fondement des articles 1641 et suivants du Code Civil, elle est recevable à agir au titre du manquement de son vendeur à l'obligation de délivrance ;

Attendu, en conséquence, que la Cour infirmera de ce chef la décision déférée, et prononcera la résolution judiciaire du contrat de vente, qui a pour effet de remettre les parties dans l'état où elles se trouvaient antérieurement ;

Qu'il s'ensuit que Madame Y... devra remettre le véhicule à la libre disposition de Monsieur A..., lequel devra restituer le prix, outre tels dommages et intérêts que de droit, puisque l'article 1184, alinéa 2, du Code Civil permet le cumul de la résolution judiciaire et des dommages et intérêts en réparation des préjudices subis qui sont une suite directe, immédiate et nécessaire du manquement à l'obligation de délivrance ;

Attendu que Madame Y... sollicite de ce chef :

* d'une part, la réparation d'un préjudice de jouissance, dont elle ne justifie pas, dès lors qu'il n'est produit aux débats qu'une estimation tarifaire de louage par Avis d'un véhicule de même type, sans qu'il soit établi que Madame Y... aurait effectivement loué un véhicule, ni pour quelle durée ; qu'aucune facture n'est versée aux débats ; que la Cour rejettera cette demande,

* et, d'autre part, le remboursement des frais de réparation du Range Rover après l'achat et les frais d'immobilisation ; qu'au vu des documents versés aux débats (factures du garage LATASTE des 2 et 13 octobre 2000, du 19 janvier 2001, du 27 janvier 2001, du garage TAILLEUR du 9 mars 2001, de Maître G... du 9 mars 2001, du garage LAND SERVICE à Cheville (95420) du 13 mars 2001, et des Etablissements MORIN, des 22 décembre 2000 et 13 avril 2001), il convient d'allouer de ce chef de préjudice une somme de 2.598,30 € ;

3o) Sur l'appel en intervention forcée et en garantie de Monsieur Michel Z... :

a) sur la recevabilité de l'appel à l'égard de Monsieur Z... :

Attendu que Madame Y... n'a formé en première instance que des demandes à l'égard de Monsieur A..., lequel a appelé en intervention forcée et en garantie Monsieur Z... par acte en date du 23 juin 2004 ;

Que si, en cause d'appel, elle n'en forme pas plus devant la Cour à l'endroit de Monsieur Z..., Madame Y... a relevé appel du jugement sur le tout, conformément à l'article 546 du Nouveau Code de Procédure Civile, dès lors qu'elle a intérêt à agir contre Monsieur Z... appelé en garantie ;

Que cet intérêt à agir procède à la fois du recours en garantie dont dispose Monsieur A... vis-à-vis de son vendeur, selon la théorie des contrats successifs et des recours en cascade y découlant, et de ce que Madame Y... a intérêt dans la mesure où le premier juge ne lui a donné satisfaction sur aucune de ses demandes ;

Attendu, dès lors, qu'appelant sur le tout, son appel porte sur l'appel en garantie de Monsieur A... qui doit être déclaré recevable, en raison de l'intérêt de Madame Y... à agir contre Monsieur Z... ;

Qu'il s'ensuit que Monsieur A..., en sa qualité d'intimé, peut faire appel incident du jugement querellé contre Monsieur Z..., lui-même ayant endossé la qualité d'intimé en raison de l'appel en garantie dont il est sujet de la part de Monsieur A... ;

b) sur le fond :

Attendu qu'il résulte du rapport d'expertise judiciaire de Maître F... que Monsieur A... a parcouru environ 49.000 kilomètres durant la période d'utilisation du véhicule, entre la cession par Monsieur Z... en mars 1998 et la vente à Madame Y... en septembre 2000 ;

Que l'expert précise, page 10 de son rapport, nonobstant un moteur non conforme à celui monté d'origine, que les conditions d'entretien et d'utilisation du véhicule ne sont pas intervenues dans la survenance des désordres constatés, et se contente, page 11, d'émettre deux hypothèses sur l'origine des avaries, pour lesquelles il n'existe aucune certitude ;

Attendu, en conséquence, que rien ne permet d'imputer que le défaut de conformité du moteur du véhicule litigieux inhérent à la différence notable entre ce qui était promis par Monsieur A..., un véhicule en excellent état, et la chose qu'il a délivrée, viciée et en mauvais état, trouverait sa cause originaire dans un fait imputable à Monsieur Z... ;

Que l'expert n'impute absolument pas les vices du véhicule à l'intervention du garage Aquitaine 4x4 le 31 juillet 1997, dont on ne sait s'il n'aurait pas remplacé les coussinets de palier de vilebrequin, ou négligé le couple de serrage des paliers ;

Qu'il ne résulte ni du rapport d'expertise, ni des pièces versées aux débats, que Monsieur Z... ait procédé à l'échange standard du moteur, avec la fourniture d'une motorisation non conforme dont le reconditionnement n'aurait pas été satisfaisant ;

Attendu que la demande reconventionnelle de Monsieur A... à l'égard de Monsieur Z... sera déclarée infondée, et Monsieur A... sera ainsi débouté de son appel en garantie et de ses demandes à l'endroit de Monsieur Z... ;

*

* *

Attendu qu'il serait inéquitable de laisser à la charge de Madame Y... la totalité des frais irrépétibles de procédure qu'elle a exposés en cause d'appel pour faire valoir ses droits et assurer la défense de ses intérêts ;

Que l'équité commande de lui allouer une indemnité de 1.500 €, sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;

Attendu que cette même équité commande d'allouer à Monsieur Michel Z... une indemnité de 1.000 €, sur le même fondement ;

*

* *

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Après en avoir délibéré, statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort ;

Confirme le jugement rendu le 6 juillet 2005 par le Tribunal de Grande Instance de DAX en ce qu'il a dit et jugé irrecevable l'action engagée par Madame Véronique X..., épouse Y..., aux fins de nullité de vente pour vices cachés ;

L'infirme pour le surplus ;

Et statuant à nouveau,

Constate un manquement de Monsieur Claude A... à son obligation de délivrance ;

Et au visa des articles 1604 et suivants du Code Civil,

Prononce la résolution de la vente conclue au mois de septembre 2000 entre Monsieur Claude A... et Madame Véronique X..., épouse Y..., portant sur un véhicule automobile de marque Land Rover, type Range Rover, millésime 1987, équipé GPL, immatriculé 5581 PZ 40 ;

Dit qu'en échange de la restitution du véhicule, Monsieur A... doit :

1o) restituer à Madame Véronique X..., épouse Y..., le prix de vente, soit la somme de dix mille six cent soixante et onze euros et quarante trois centimes (10.671,43 €) ;

2o) payer à Madame Véronique X..., épouse Y..., une somme principale de deux mille cinq cent quatre vingt dix huit euros et trente centimes (2.598,30 €) à titre de dommages et intérêts compensatoires de son préjudice financier ;

Dit que ces sommes produiront les intérêts de droit au taux légal à compter du prononcé de cet arrêt jusqu'à parfait règlement ;

Dit et juge recevable l'appel en intervention forcée et en garantie de Monsieur Michel Z... à la requête de Monsieur Claude A... ;

Au fond,

Dit et juge mal fondé cet appel en garantie ;

Déboute Monsieur Claude A... de l'ensemble de ses demandes à l'encontre de Monsieur Michel Z... ;

Condamne Monsieur Claude A... à payer à Madame Véronique X..., épouse Y..., une indemnité de mille cinq cents euros (1.500 €), sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;

Condamne Monsieur Claude A... à payer à Monsieur Michel Z... une indemnité de mille euros (1.000 €), sur le même fondement ;

Déboute les parties à la procédure de toutes autres demandes plus amples ou contraires ;

Condamne Monsieur Claude A... aux entiers dépens de première instance, en ce compris les frais d'expertise judiciaire, et d'appel ;

Autorise la SCP DE GINESTET / DUALE / LIGNEY, avoués, à procéder au recouvrement direct de ceux d'appel, conformément aux dispositions de l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile.

LE GREFFIER, LE PRESIDENT,

Mireille PEYRON André PARANT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Pau
Formation : Ct0249
Numéro d'arrêt : 3090
Date de la décision : 21/08/2007

Références :

Décision attaquée : Tribunal de grande instance de Dax, 06 juillet 2005


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.pau;arret;2007-08-21;3090 ?
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