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10/11/2003 | FRANCE | N°01/02654

France | France, Cour d'appel de Pau, 10 novembre 2003, 01/02654


PPS/JD Numéro /03 COUR D'APPEL DE PAU

1ère Chambre ARRÊT DU 10/11/2003

Dossier : 01/02654 Nature affaire : Demande en réparation des dommages causés par l'activité des auxiliaires de justice Affaire :

Fabrice X... C/ LE RECEVEUR PRINCIPAL DES IMPÈTS D'ANGLET, S.A. CRÉDIT LYONNAIS, S.A. GRANDS MOULINS DE PARIS

RÉPUBLIQUE FRANOEAISE AU NOM DU PEUPLE FRANOEAIS A R R Ê T prononcé par Monsieur PUJO-SAUSSET, Président, en vertu de l'article 452 du Nouveau Code de Procédure Civile, assisté de Mireille Y..., Greffier, à l'audience publique du 10 novembre 2

003 date à laquelle le délibéré a été prorogé. * * * * * APRES DÉBATS à l'audience pub...

PPS/JD Numéro /03 COUR D'APPEL DE PAU

1ère Chambre ARRÊT DU 10/11/2003

Dossier : 01/02654 Nature affaire : Demande en réparation des dommages causés par l'activité des auxiliaires de justice Affaire :

Fabrice X... C/ LE RECEVEUR PRINCIPAL DES IMPÈTS D'ANGLET, S.A. CRÉDIT LYONNAIS, S.A. GRANDS MOULINS DE PARIS

RÉPUBLIQUE FRANOEAISE AU NOM DU PEUPLE FRANOEAIS A R R Ê T prononcé par Monsieur PUJO-SAUSSET, Président, en vertu de l'article 452 du Nouveau Code de Procédure Civile, assisté de Mireille Y..., Greffier, à l'audience publique du 10 novembre 2003 date à laquelle le délibéré a été prorogé. * * * * * APRES DÉBATS à l'audience publique tenue le 15 septembre 2003, devant : Monsieur PUJO-SAUSSET, Président Monsieur LESAINT, Conseiller Madame RACHOU, Conseiller assistés de Mireille Y..., Greffier, présent à l'appel des causes. Les magistrats du siège ayant assisté aux débats ont délibéré conformément à la loi. Le dossier a été communiqué au Ministère Public le 26 mars 2003. dans l'affaire opposant : APPELANT : Maître Fabrice X... Le Richelieu 29 Avenue de la Légion Tchèque 64100 BAYONNE pris en sa qualité de séquestre chargé de la distribution de deniers suite à la vente de fonds de commerce de la SARL CROISSANTERIE PANNECAU, à la SARL DISTRIPAIN, le 09 mai 1996 représenté par Me Michel VERGEZ, avoué à la Cour assisté de Me FLORENT, avocat au barreau de PARIS INTIMÉES : LE RECEVEUR PRINCIPAL DES IMPÈTS D'ANGLET 11 Rue Vauban 64100 BAYONNE comptable chargé du

recouvrement agissant sous l'autorité du Directeur des Services Fiscaux des Pyrénées Atlantiques et du Directeur Général des Impôts représentée par la SCP RODON J-Y., avoués à la Cour assistée de Me DALLOZ, avocat au barreau de PAU S.A. CRÉDIT LYONNAIS 4 Place de la Liberté 64100 BAYONNE prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège représentée par la SCP F.PIAULT / M.LACRAMPE-CARRAZE, avoués à la Cour assistée de la SCP GARDERA UHALDEBORDE-SALANNE GORGUET, avocats au barreau de BAYONNE S.A. GRANDS MOULINS DE PARIS 99 Rue Mirabeau 94853 IVRY SUR SEINE CEDEX prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège représentée par Me Pierre MARBOT, avoué à la Cour assistée de Me DEBY, avocat au barreau de PARIS sur appel de la décision en date du 05 JUIN 2001 rendue par le TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE PAU FAITS ET PROCÉDURE

La SARL CROISSANTERIE PANNECAU dont le siège social était situé 48 rue Maubec à BAYONNE est redevable à la caisse du receveur des impôts d'ANGLET d'une créance représentative de taxes sur le chiffre d'affaires d'un montant de 81 011,71 ä en TVA et 43 634,57 ä de pénalités consécutive à un contrôle fiscal effectué en 1995.

Le comptable des impôts a authentifié sa créance par un avis de mise en recouvrement n°96-0205021 adressé à la SARL débitrice le 11 mars 1996 suivi d'une mise en demeure valant commandement en date du 27 mars 1996.

Ce receveur a régulièrement inscrit le privilège du Trésor prévu à l'article 1926 du Code général des impôts le 15 avril 1996.

La société CROISSANTERIE PANNECAU a cédé son fonds de commerce de boulangerie-pâtisserie sis 26 avenue de la chambre d'amour à ANGLET par acte sous seing privé du 9 mai 1996 enregistré à la Recette des impôts de BAYONNE le 23 mai 1996 sous les références 162/4/459 moyennant le prix de 76 224,51 ä.

Cet acte a été passé au cabinet de Maître X... qui a été nommé séquestre.

Le Receveur des impôts d'ANGLET a formé opposition au prix de vente dans les formes et délais prévus à l'article 3 de la loi du 17 mars 1909 par avis à tiers détenteur adressé à Maître X... le 23 mai 1996.

Maître X... a accusé réception de l'avis en date du 24 mai 1996 en précisant que les fonds issus de la vente devront faire l'objet d'une procédure de distribution, mesure à laquelle l'administration ne s'est pas opposée.

L'avis à tiers détenteur n'a pas été contesté dans le délai prévu par les textes en la matière.

Il est apparu que Maître X... a omis de faire figurer le Receveur des impôts d'ANGLET sur la liste des créanciers ayant vocation à la distribution des prix ;

Par acte du 15 mars 1999, le Receveur des impôts d'ANGLET a fait assigner Maître X... à comparaître devant le Tribunal de Grande Instance de Pau, afin d'obtenir sa condamnation sur le fondement de l'article 1382 du Code Civil, au paiement de la somme de 56 386,93 ä en principal avec intérêts de retard, au taux légal et celle de 1 525 ä au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

Par jugement du 5 juin 2001, le Tribunal de Grande Instance de Pau a :

- dit que Maître X... a commis une faute engageant sa responsabilité civile ;

- condamné Maître X... à verser au Receveur Principal des Impôts d'ANGLET la somme de 355 966,88 francs avec intérêts au taux légal à compter du présent jugement ;

- condamné Maître X... à verser au Receveur Principal des Impôts d'ANGLET la somme de 10 000 francs sur le fondement de l'article 700

du Nouveau Code de Procédure Civile ;

- débouté Maître X... de son appel en garantie à l'encontre du CRÉDIT LYONNAIS et de la Société LES GRANDS MOULINS DE PARIS ;

- condamné Maître X... à verser au CRÉDIT LYONNAIS et à la Société LES GRANDS MOULINS DE PARIS la somme de 5 000 francs chacun sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;

- dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile au profit du Receveur Principal des Impôts d'ANGLET et à la charge de la Société LES GRANDS MOULINS DE PARIS ;

- condamné Maître X... aux entiers dépens tant de l'instance principale que de l'instance en garantie.

Par déclaration au greffe de la Cour, en date du 17 juillet 2001, Maître X... a relevé appel de cette décision, dans des conditions de forme et de délais qui ne sont pas discutées. PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

Maître Fabrice X..., pris en sa qualité de séquestre chargé de la distribution de deniers, suite à la vente du fond de commerce de la croissanterie PANNECAU à DISTRIPAIN, demande par dernières écritures déposés le 7 janvier 2003 :

- d'infirmer le jugement du 5 juin 2001 en ce qu'il a admis la recevabilité et le bien fondé des demandes formées par le receveur Principal des Impôts d'ANGLET à son encontre ;

Et statuant à nouveau :

- de débouter le Receveur Principal des Impôts d'ANGLET de toutes ses demandes contre lui ;

SUBSIDIAIREMENT :

Si la Cour estimait devoir confirmer même partiellement le jugement en ce qu'il a admis la recevabilité et le bien fondé des demandes du Receveur Principal des Impôts d'ANGLET ;

- de condamner la Société LE CRÉDIT LYONNAIS à lui restituer étant subrogé dans les droits de Monsieur le Receveur Principal des Impôts d'ANGLET par application de l'article 1251 3° du Code Civil, la somme de 23 396,99 ä et la Société LES GRANDS MOULINS DE PARIS celle de 8 488,13 ä par application des articles 1376 et 1377 du Code Civil, sur justification du paiement de ces sommes à Monsieur le Receveur Principal des impôts d'ANGLET ;

- de condamner les parties succombantes à lui payer la somme de 1 219,59 ä au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile .

- de les condamner en tous les dépens.

L'appelant soutient :

- qu'il n'a commis aucune faute :

.

que ni le Receveur Principal, ni le Tribunal n'a indiqué les textes suivants lesquels un Trésorier ou un agent du Trésor aurait une personnalité juridique, distincte de celle du Trésor Public et de l'Etat,

.

que le privilège inscrit par Monsieur le Receveur Principal des Impôts d'ANGLET le 15 avril 1996 ne peut primer le privilège de vendeur et le nantissement sur les fonds attachés à des créances nées antérieurement,

- qu'il n'y a aucun lien de causalité entre la faute supposée et le préjudice allégué :

.

que le Receveur Principal des Impôts d'ANGLET ne démontre pas avoir fait une quelconque diligence pour recouvrer sa créance à l'encontre de son débiteur la SARL CROISSANTERIE PANNECAU,

.

qu'en toute hypothèse, le préjudice du Receveur Principal d'ANGLET qui doit être analysé comme une perte de chance ne pouvait être évalué à une somme supérieure à la différence entre le prix de cession du fond de commerce diminué des frais de justice et les sommes versées au Trésor Public, dans le cadre de la répartition ;

- subsidiairement :

.

qu'il y a lieu de constater que les sommes distribués au CREDIT LYONNAIS et aux GRANDS MOULINS DE PARIS l'ont été par erreur,

.

qu'un paiement irrégulier est un paiement indû.

Par dernières écritures déposées le 14 mars 2002, le RECEVEUR PRINCIPAL DES IMPÈTS D'ANGLET demande :

- de déclarer infondé l'appel interjeté par Monsieur X... ;

- de l'en débouter ;

- de confirmer purement et simplement le jugement entrepris ;

- de condamner Maître X... au paiement d'une indemnité de 1525 ä sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ainsi qu'aux entiers dépens.

L'intimé fait valoir :

- que le privilège des taxes sur le chiffre d'affaires prévu à l'article 1926 du Code Général des Impôts s'exerce avant tout autre et prime les privilèges spéciaux sur les meubles prévus par les textes particuliers notamment le privilège de créancier nanti sur fonds de commerce ;

- que les fonds ayant été versés et la procédure clôturée sans qu'il en ait été avisé, la responsabilité du séquestre doit être engagée dès lors que l'existence d'une faute grave dans la gestion du dossier est démontrée ;

- que le receveur, après cession du seul élément d'actif dans cette société, ne dispose plus d'aucun recours pour recouvrer sa créance ; - que les règles de la comptabilité publique ne sauraient pallier les carences d'un séquestre ;

- que le dommage causé à l'administration doit être estimé sur la base des sommes qui auraient dû normalement revenir au Receveur soit, s'agissant d'une répartition au marc le franc entre divers créanciers d'un égal privilège : 346 525 X 817 626 / 1 105 275 = 256 341 F soit 39 078,93 ä ; que dans cette mesure, l'ensemble des sommes à distribuer aurait été absorbé par les créanciers privilégiés.

Par dernières écritures en date du 30 octobre 2002, la SA CRÉDIT LYONNAIS demande de :

- déclarer Maître X... irrecevable et en tout cas mal fondé en son appel, ses demandes, fins et conclusions ; en conséquence l'en débouter ;

- confirmer le jugement entrepris ;

- condamner Maître X... au paiement d'une indemnité de 15 000 francs au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile et en tous les dépens.

L'intimé fait valoir :

- que l'appel en garantie en répétition de l'indû dirigé à son encontre est irrecevable dans la mesure où l'action n'est ouverte qu'à celui qui s'est appauvri ; or Maître X... n'est pas le créancier de la dette qui aurait été payée par erreur ;

- que le moyen selon lequel Maître X... serait subrogé dans les droits de Monsieur le Receveur est nouveau et irrecevable devant la Cour ;

- que l'action en répétition de l'indû suppose l'absence de dette ;

- que le paiement trouve sa cause dans la créance non contestée dont

le CRÉDIT LYONNAIS est titulaire.

Par dernières écritures en date du 11 juillet 2002, la Société GRANDS MOULINS DE PARIS demande à son tour :

- de débouter Maître X... de toutes ses demandes, fins et conclusions et confirmer en toutes ses dispositions la décision déférée ;

- y ajoutant, de condamner Maître X... au paiement de la somme supplémentaire de 1220,00 ä au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile, outre les entiers dépens tant de première instance que d'appel.

L'intimé fait valoir :

- que Maître X... n'a pas qualité pour exercer l'action en répétition de l'indû, n'étant pas le créancier de la dette qui aurait été payée par erreur, si tant est qu'une erreur soit démontrée ; que le paiement trouve sa cause dans la créance non contestée qu'elle détient à l'égard de la SARL CROISSANTERIE PANNECAU.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 13 mai 2003.

DISCUSSION

Attendu qu'à titre principal, Me Fabrice X..., agissant en qualité de séquestre chargé de la distribution des deniers suite à la vente du fonds de commerce de la S.A.R.L. CROISSANTERIE PANNECAU à la S.A.R.L. DISTRIPAIN, persiste à soutenir devant la Cour, que le privilège inscrit par le Receveur Principal des Impôts d'ANGLET, le 15 avril 1996, ne peut primer le privilège de vendeur et le nantissement sur le fonds attachés à des créances nées antérieurement ;

Qu'à titre subsidiaire, l'appelant sollicite la restitution par la

société CRÉDIT LYONNAIS et la société GRANDS MOULINS DE PARIS des sommes qui leur ont été indûment réglées .

Sur la responsabilité professionnelle de Me Fabrice X... ès qualité

Attendu qu'il est constant que Me Fabrice X... a omis de faire figurer le Receveur Principal des Impôts d'ANGLET, sur la liste des créanciers ayant vocation à la distribution du prix de la vente du fonds de commerce de la S.A.R.L. CROISSANTERIE PANNECAU à la S.A.R.L. DISTRIPAIN , alors qu'il avait été destinataire, le 24 mai 1996, d'un avis à tiers détenteur d'un montant de 817 626 F. ;

Attendu que c'est à tort que Me Fabrice X... soutient :

- que la conception française du Trésor Public repose sur les principes essentiels de l'unité de caisse sous l'autorité du Ministre des Finances ;

- et que le privilège inscrit par le Receveur Principal des Impôts d'ANGLET, le 15 avril 1996, ne peut primer sur le privilège de vendeur et le nantissement sur le fonds attachés à des créances nées antérieurement ;

Qu'en effet, les services financiers de l'Etat, chargés du recouvrement de l'impôt, sont organisés en différentes directions au sein du Ministère des Finances, et chacune d'elles bénéficie d'une autonomie de gestion, assortie d'une responsabilité pécuniaire personnelle de chaque comptable public, qui interdit à un débiteur éventuel de désintéresser l'une pour l'autre ;

Attendu que le premier juge a exactement retenu que la primauté des privilèges fiscaux s'exerce à l'encontre de tous autres privilèges, quelles que soient leurs dates d'inscription, qu'il s'agisse de privilèges généraux ou même de privilèges spéciaux mobiliers ;

Qu'il a fait une juste interprétation de l'article 2098 alinéa 2 du Code Civil, conforme à la jurisprudence constante et univoque de la Cour de Cassation, en considérant que le privilège du vendeur dans lequel la société CRÉDIT LYONNAIS se trouvait subrogée et le privilège du créancier nanti étaient en l'espèce primés par le privilège du Trésor ;

Que le tribunal a d'ailleurs souligné l'incohérence du raisonnement soutenu par Maître Fabrice X..., en observant que ce dernier avait modifié son projet initial après une réunion de conciliation du 4 juillet 1997, en établissant, le 4 septembre suivant, un nouveau projet de répartition colloquant la Trésorerie Principale d'ANGLET et celle de BAYONNE, avant la société GRANDS MOULINS DE PARIS ;

Attendu que c'est par des motifs pertinents que la Cour s'approprie que le Tribunal de Grande Instance de PAU a relevé :

- que Maître Fabrice X... ès qualité avait commis une faute en ayant omis d'adresser au Receveur Principal des Impôts d'ANGLET, bénéficiant d'une inscription, l'avis d'avoir à déclarer sa créance, et en ne constatant pas que ce créancier ne figurait ni parmi les privilégiés qui avaient déclaré leur créance, ni parmi les créanciers opposants n'ayant pas procédé à cette formalité ;

- que Maître Fabrice X... ès qualité ne pouvait s'abriter derrière le fait que la Trésorerie Principale d'ANGLET et le Trésorier Principal de BAYONNE aient constitué un seul avocat pour s'exonérer de sa responsabilité ;

- que le Receveur Principal des Impôts d'ANGLET disposait d'un droit juridiquement acquis à obtenir le paiement de sa créance privilégiée, à due concurrence de sa collocation selon son rang ;

- que dès lors, par sa faute, Maître Fabrice X... ès qualité a privé ce créancier de l'exercice de son droit , générant directement le préjudice résultant du défaut de paiement de sa créance ;

- qu'il ne pouvait être reproché une prétendue inaction au Receveur Principal des Impôts d'ANGLET, alors que l'exercice du privilège de ce dernier n'est pas soumis à la condition d'avoir vainement exercé des poursuites à l'encontre de son débiteur ;

Que le jugement entrepris sera en conséquence confirmé sur ces points ;

Attendu que le préjudice subi par le Receveur Principal des Impôts d'ANGLET ne peut être analysé, comme le soutient encore Maître Fabrice X..., en une simple perte de chance ;

Qu'au contraire, en évinçant le Receveur Principal des Impôts d'ANGLET de la distribution du prix de vente du fonds appartenant à la S.A.R.L. CROISSANTERIE PANNECAU, Maître Fabrice X... ès qualité de séquestre a commis une faute en application de l'article 1382 du Code Civil ;

Qu'après la cession du seul élément d'actif de la S.A.R.L. CROISSANTERIE PANNECAU, débitrice, le receveur ne disposait d'aucun recours pour recouvrer sa créance ;

Que le dommage subi par le Receveur Principal des Impôts d'ANGLET doit être estimé sur la base des sommes qui auraient dû normalement lui revenir, s'agissant d'une répartition au marc le franc entre divers créanciers titulaires d'un égal privilège ;

Que la somme à répartir, consignée à la Caisse des Dépôts et Consignations, le 10 décembre 1996, est de 346 525,80 F. ;

Que la créance du Receveur Principal des Impôts d'ANGLET est de 817 626 F. ;

Que la somme des créances des comptables publics est de 1 105 275 F. ;

Que le dommage s'élève à 256 341 F. selon le calcul suivant :

346 525,80 x 817 626

1 105 275

Que le préjudice causé au Receveur Principal des Impôts d'ANGLET sera ainsi fixé à 39 078,98 ä ;

Sur l'action en répétition de l'indû contre la société CRÉDIT LYONNAIS et la société GRANDS MOULINS DE PARIS

Attendu que Maître Fabrice X... soutient que, dans la mesure où la réclamation du Receveur Principal des Impôts d'ANGLET est admise, il convient de constater que les sommes distribuées à la société CRÉDIT LYONNAIS et à la société GRANDS MOULINS DE PARIS l'ont été par erreur et que ces dernières sont tenues de restituer ces sommes, par application des dispositions des articles 1376 et 1377 du Code Civil ;

Mais attendu que l'action en répétition de l'indû suppose l'absence de dette ;

Que le premier juge a exactement relevé :

- que le paiement n'a pas été effectué sans cause, alors que, tant la société CRÉDIT LYONNAIS que la société GRANDS MOULINS DE PARIS, disposaient d'une créance certaine sur le prix de vente du fonds de commerce ;

- que le fait que la société CRÉDIT LYONNAIS et la société GRANDS MOULINS DE PARIS aient reçu des sommes à la suite d'une erreur du séquestre chargé de la distribution des deniers, ne peut être considéré comme un paiement indû ;

Attendu que le caractère indû d'un paiement a trait à la créance elle- même et non au paiement ;

Qu'en l'espèce, la cause du paiement fait à la société CRÉDIT LYONNAIS et à la société GRANDS MOULINS DE PARIS est bien l'existence de leur créance privilégiée respective ;

Attendu que le jugement sera confirmé en ce qu'il a :

- débouté Maître Fabrice X... ès qualité de son appel en garantie à l'encontre de la société CRÉDIT LYONNAIS et de la société GRANDS MOULINS DE PARIS ;

- condamné Maître Fabrice X... à verser à ces dernières à chacune d'elle, la somme de 762,25 ä (5 000 F.), sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;

Attendu qu'il serait inéquitable de laisser à la charge des intimés les frais qu'ils ont été contraints d'exposer pour résister à argumentation de l'appelant ,

Que Maître Fabrice X... ès qualité sera condamné à payer à titre d'indemnité sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile :

- 1 525 ä au Receveur Principal des Impôts d'ANGLET ;

- 1 525 ä à la société CRÉDIT LYONNAIS ;

- 1 220 ä à la société GRANDS MOULINS DE PARIS ;

Attendu que Maître Fabrice X... supportera enfin des dépens d'appel ;

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort ;

Déclare l'appel recevable en la forme ;

Confirme le jugement du Tribunal de Grande Instance de PAU, en date du 5 juin 2001, sauf à condamner Maître Fabrice X... ès qualité à verser au Receveur Principal des Impôts d'ANGLET la somme de 39 078,98 ä. ;

Y ajoutant ,

Condamne Maître Fabrice X... ès qualité à payer, en application des dispositions de l' article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile :

- 1 525 ä au Receveur Principal des impôts d'ANGLET ;

- 1 525 ä à la société CRÉDIT LYONNAIS ;

- 1 220 ä à la société GRANDS MOULINS DE PARIS ;

Condamne Maître Fabrice X... aux dépens d'appel ; autorise la SCP RODON la SCP PIAULT-LACRAMPE CARRAZE et Me MARBOT, avoués, à recouvrer directement contre la partie condamnée ceux des dépens dont ils ont fait l'avance, sans avoir reçu provision .

LE GREFFIER,

LE PRÉSIDENT,

M. Y...

Ph. PUJO SAUSSET


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Pau
Numéro d'arrêt : 01/02654
Date de la décision : 10/11/2003

Analyses

SEQUESTRE

Le séquestre chargé de la distribution des deniers suite à la vente du fonds de commerce d'une société à responsabilité limitée a omis de faire figurer le receveur principal des impôts d'Anglet sur la liste des créanciers ayant vocation à la distribution du prix de la vente du fonds de commerce. Le premier juge a exactement retenu que la primauté des privilèges fiscaux s'éxerce à l'encontre de tous autres privilèges quelles que soient leurs dates d'inscription, qu'il s'agisse de privilèges généraux ou même de privilèges spéciaux mobiliers. Il a fait une juste interprétation de l'article 2098 alinéa 2 du Code civil, conforme à la jurisprudence constante et univoque de la Cour de cassation en considérant que le privilège du vendeur dans lequel la banque se trouvait subrogée et le privilège du créancier nanti étaient en l'espèce primés par le privilège du trésor. Le séquestre a donc commis une faute en ayant omis d'adresser au receveur principal des impôts l'avis d'avoir à déclarer sa créance et en ne constatant pas que ce créancier ne figurait ni parmi les privilèges qui avaient déclaré leur créance, ni parmi les créanciers opposants n'ayant pas procédé à cette formalité.Le receveur principal des impôts disposait d'un droit juridiquement acquis à obtenir le paiement de sa créance privilégiée, à due concurrence de sa collocation selon son rang. Par sa faute le séquestre l'a privé de l'exercice de son droit générant directement le préjudice résultant du défaut de paiement de sa créance. Le préjudice ainsi subi par le receveur principal des impôts ne peut être analysé en une simple perte de chance. Aprés la cession du seul élément d'actif de la SARL, débitrice, le receveur ne diposait d'aucun recours pour recouvrer sa créance. Le dommage subi doit être estimé sur la base des sommes qui auraient dû normalement lui revenir s'agissant d'une répartition au marc le franc entre divers créanciers titulaires d'un égal privilège


Références :

Code civil, article 2098

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.pau;arret;2003-11-10;01.02654 ?
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