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27/10/2003 | FRANCE | N°02/00177

France | France, Cour d'appel de Pau, 27 octobre 2003, 02/00177


FP/ST Numéro /03 COUR D'APPEL DE PAU

1ère Chambre ARRÊT DU 27/10/2003

Dossier : 02/00177 Nature affaire : Demande relative à des contrats divers sans autre indication Affaire : Jeanne X... épouse Y..., UDAF DES LANDES C/ François Z...

RÉPUBLIQUE FRANOEAISE AU NOM DU PEUPLE FRANOEAIS A R R Ê T prononcé par Monsieur PUJO-SAUSSET, Président, en vertu de l'article 452 du Nouveau Code de Procédure Civile, assisté de Jacques LARRAYADIEU, Greffier, à l'audience publique du 27 octobre 2003 date à laquelle le délibéré a été prorogé. * * * * * APRES DÉBATS à

l'audience publique tenue le 26 mai 2003, devant : Monsieur PUJO-SAUSSET, Président

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FP/ST Numéro /03 COUR D'APPEL DE PAU

1ère Chambre ARRÊT DU 27/10/2003

Dossier : 02/00177 Nature affaire : Demande relative à des contrats divers sans autre indication Affaire : Jeanne X... épouse Y..., UDAF DES LANDES C/ François Z...

RÉPUBLIQUE FRANOEAISE AU NOM DU PEUPLE FRANOEAIS A R R Ê T prononcé par Monsieur PUJO-SAUSSET, Président, en vertu de l'article 452 du Nouveau Code de Procédure Civile, assisté de Jacques LARRAYADIEU, Greffier, à l'audience publique du 27 octobre 2003 date à laquelle le délibéré a été prorogé. * * * * * APRES DÉBATS à l'audience publique tenue le 26 mai 2003, devant : Monsieur PUJO-SAUSSET, Président

Madame PONS, Conseiller Monsieur TIGNOL, Conseiller assistés de Mireille PEYRON, Greffier, présent à l'appel des causes. Les magistrats du siège ayant assisté aux débats ont délibéré conformément à la loi. dans l'affaire opposant : APPELANTES : Madame Jeanne X... épouse Y... née le 14 Juin 1914 à PUYOO (64270) Résidence Maurice Ravel 8 Rue de l'Epargne 40100 DAX UDAF DES LANDES 2 Rue Dulaurier BP 149 40003 MONT DE MARSAN CEDEX ès qualités de curateur de Madame Jeanne Y... née X... représentées par la SCP DE GINESTET / DUALE, avoués à la Cour assistées de Me MORAS, avocat au barreau de DAX INTIMÉ :

Monsieur François Z... Impasse Grand A... 40100 DAX représenté

par Me Michel VERGEZ, avoué à la Cour assisté de Me DAUGA, avocat au barreau de DAX sur appel de la décision en date du 28 NOVEMBRE 2001 rendue par le TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE DAX FAITS ET PROCÉDURE

En avril 1995, Madame Jeanne Y... a remis à Monsieur François Z... la somme de 150 000 F (soit 22.867,35 ä), en contrepartie de l'engagement de ce dernier de fleurir et entretenir sa tombe après son décès et ce sans limitation de durée.

Par acte d'huissier de justice en date du 27 septembre 2000 Madame Y... et son curateur, l'UDAF des LANDES, ont fait assigner Monsieur Z... en restitution de cette somme et en paiement de la somme de 10 000 F (soit 1.524,49 ä) de dommages et intérêts en faisant valoir que cet engagement était dépourvu de cause et qu'il avait été obtenu par suite de manoeuvres frauduleuses de la part de Monsieur Z..., un égard à l'état d'infériorité dans lequel se trouvait Madame Y....

Par jugement en date du 28 novembre 2001, le Tribunal de Grande Instance de Dax a débouté Madame Y... et l'UDAF des LANDES de leurs demandes et Monsieur Z... de ses demandes reconventionnelles.

Les dépens ont été laissés à la charge de Madame Y... et de l'UDAF.

Le 18 janvier 2002 Madame Y... et l'UDAF ont régulièrement relevé appel de cette décision.

Dans leurs dernières écritures en date du 3 mai 2002, elles demandent à la Cour :

- d'infirmer le jugement en toute ses dispositions ;

- au visa des articles 1131, 1118, 488, 1131, 1235 et 1376 du Code Civil , de prononcer l'annulation de l'engagement souscrit par

Monsieur Z... ;

- de le condamner à restituer la somme de 150 000 F (soit 22.867,35 ä) outre intérêts à compter de la première mise en demeure en date du 14 Avril 1998 ;

- de le condamner au paiement de la somme de 3000 ä de dommages et intérêts outre la somme de 2000 ä en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

Elles exposent que :

- Monsieur Z..., fonctionnaire de la poste, a obtenu la confiance de Madame Y... et a pu prendre connaissance de l'état de ses comptes bancaires ;

- c'est dans le cadre de ces relations que l'engagement pris par Monsieur Z... a été conclu moyennant le versement de la somme de 150 000 F (soit 22.867,35 ä) alors que Madame Y... était âgée de 81 ans ;

- trois ans après, celle-ci a souhaité revenir sur cet engagement et a mis en demeure Monsieur Z... par Lettre Recommandée Accusé Réception en date du 14 avril 1998 de lui restituer la somme de 150 000 F (soit 22.867,35 ä), ce qu'il a refusé.

Elles soutiennent que :

- l'engagement est dépourvu de cause, faute de contrepartie sérieuse ;

- l'engagement est lésionaire pour avoir exploité la faiblesse de Madame Y....

Monsieur François Z..., par conclusions déposés le 17 octobre 2002 demande à la Cour :

- de débouter Madame Y... et l'UDAF de leurs demandes ;

- de les condamner au paiement de la somme de 3000 ä de dommages et

intérêts pour procédure abusive outre la somme de 2 300 ä en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

Il expose que :

- les fonds qu'il a reçus ont pour cause l'engagement pris par lui en contrepartie de fleurir et entretenir la tombe de Madame Y... après son décès et ce, sans limitation de durée ;

- cette cause est licite, elle existait au moment de la souscription de l'engagement, et la contrepartie n'est pas dérisoire ;

- il n'a fait que répondre à la demande de Madame Y... et n'a pas fait pression sur elle ; la preuve des manoeuvres alléguées n'est d'ailleurs pas rapportée ;

- c'est en toute connaissance du risque d'inexécution de l'engagement que ce soit en cas de pré-décès ou de non respect de la parole donnée que Madame Y... a contracté ;

- Madame Y... n'a fait l'objet d'une mesure de protection que le 21 décembre 2000 ;

- la convention étant en date du mois d'avril 1994, l'action en nullité pour existence d'un trouble mental se trouve prescrite en application de l'article 1304 du Code Civil, l'action en justice ayant été engagée le 27 septembre 2000 ;

- Madame Y... et l'UDAF, ne démontrent pas l'existence d'un trouble mental au moment de la souscription de l'engagement et elle avait pleine capacité de contracter en 1994 ;

L'ordonnance de clôture est en date du 28 janvier 2003.

DISCUSSION

Attendu que conformément à l'article 1131 du Code Civil l'obligation sans cause ou sur une fausse cause ou sur une cause illicite ne peut avoir aucun effet ;

Attendu que par acte sous-seing privé en date du 13 avril 1995 et non 1994 comme l'écrit Monsieur François Z... dans ses écritures, celui-ci s'est engagé à fleurir et entretenir, après son décès, la tombe de Madame Jeannine Y..., et ce sans limitation de durée ;

Que par courrier en date du 27 avril 1995, il a reconnu avoir reçu à cette fin la somme de 150.000 F (soit 22.867,35 ä) ;

Attendu que par courrier en date du 14 avril 1998, Madame Y... lui a exprimé son souhait d'obtenir la restitution de cette somme estimant que sa confiance avait été abusée ;

Attendu qu'il est constant que Madame Jeanne X... Veuve Y... née le 14 juin 1914 était âgée de 81 ans lors de la conclusion de l'engagement litigieux ;

Qu'elle a été placée sous curatelle le 21 décembre 2000 par jugement du juge des tutelles de DAX puis sous curatelle renforcée par jugement du 26 septembre 2002 ;

Attendu que néanmoins Madame Y... et L'U.D.A.F ne produisent aucun document de nature à démontrer que Madame Y... était atteinte d'un trouble mental au moment de la souscription de l'acte ; Attendu que les pressions et le dol dont elle prétend avoir été victime qui auraient déterminés la remise des fonds ne sont pas davantage démontrées ;

Qu'en effet, le seul fait pour Monsieur Z... d'avoir entretenu des relations amicales avec Madame Y... même si elle était âgée de 80 ans et qu'il gérait son compte courant, en sa qualité d'employé des POSTES, est insuffisant à lui seul, pour démontrer l'existence d'une contrainte ou d'une tromperie dès lors qu'il n'est pas établi

que Madame Y... était diminuée ou affaiblie physiquement ou mentalement par son âge lors de la souscription de l'engagement ;

Qu'en outre, l'action ayant été engagée le 27 septembre 2000 soit plus de cinq ans après le versement des fonds et la souscription de l'engagement, la demande de nullité fondée sur les articles 488 et suivants du Code Civil ainsi que sur la violence ou le dol n'est pas recevable en application de l'article 1304 de ce même code ;

Attendu que sur l'absence de cause, il convient de relever que le versement par Madame Y... de la somme de 150.000 F (soit 22 867,35 ä) a pour contrepartie l'engagement pris par Monsieur Z... de fleurir et d'entretenir sa tombe sans limitation de durée ;

Qu'il est donc causé au moment de sa formation ;

Que néanmoins, la consistance de l'engagement souscrit par Monsieur Z..., fleurir et entretenir la tombe de Madame Y..., est dérisoire par rapport à l'importance de la somme reçue en contrepartie eu égard à la nature de prestation future et à l'absence de possibilité pour Madame Y... d'obtenir l'exécution de l'engagement ou des dommages-intérêts en cas d'inexécution ;

Que la demande de nullité de la convention passée entre Madame Y... et Monsieur Z... pour absence de cause est donc fondée ; Qu'il convient d'y faire droit et d'ordonner la restitution par Monsieur Z... à Madame Y... de la somme de 22.867,35 ä avec intérêts de droit au taux légal à compter du 27 septembre 2000 ;

Attendu que Madame Y... qui ne justifie d'aucun préjudice particulier sera déboutée de sa demande de dommages-intérêts ;

Attendu qu'il est inéquitable de laisser à la charge de Madame

Y... et de l'UDAF la totalité des frais irrépétibles par elles exposés ;

Qu'en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile, Monsieur Z... sera condamné à leur payer la somme de 1.500 EUROS ;

PAR CES MOTIFS

LA COUR

Statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,

Reçoit Madame Y... et L'UDAF en leur appel ;

Infirme la décision déférée en toutes ses dispositions ;

Annule la convention conclue le 13 avril 1995 entre Monsieur Z... et Madame Y... relative à l'entretien futur de la tombe de celle-ci.

Condamne Monsieur Z... à restituer à Madame Y... la somme de 22.867,35 ä avec intérêts de droit au taux légal à compter du 27 septembre 2000.

Condamne Monsieur Z... en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile à payer à Madame Y... et à l'UDAF, es-qualité, la somme de 1.500 EUROS au titre des frais irrépétibles exposés en cause d'appel.

Rejette comme inutiles ou mal fondées toutes demandes plus amples ou contraires des parties.

Condamne Monsieur Z... aux entiers dépens de première instance et d'appel et autorise la S.C.P. de GINESTET-DUALE, Avoués, à recouvrer directement ceux d'appel conformément aux dispositions de l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile.

LE GREFFIER

LE PRESIDENT

Jacques LARRAYADIEU

Philippe PUJO-SAUSSET


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Pau
Numéro d'arrêt : 02/00177
Date de la décision : 27/10/2003

Analyses

CONTRATS ET OBLIGATIONS CONVENTIONNELLES - Cause - Absence

Est nulle pour absence de cause la convention par laquelle une personne s'engage à fleurir et entretenir la tombe de son cocontractant après son décès dès lors que sont constatés le caractère dérisoire de l'engagement par rapport à la somme versée en contrepartie (150 000 francs) et l'impossibilité pour le bénéficiaire de la prestation d'obtenir l'exécution de cet engagement ou des dommages-intérêts en cas d'inexécution


Références :

Code civil, article 1131

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.pau;arret;2003-10-27;02.00177 ?
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