Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 5 - Chambre 2
ARRÊT DU 21 JUIN 2024
(n°79, 6 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : n° RG 23/05928 - n° Portalis 35L7-V-B7H-CHMCM
Décision déférée à la Cour : ordonnance du juge de la mise en état du 22 mars 2023 - Tribunal judiciaire de PARIS - 3ème chambre 3ème section - RG n°21/10854
APPELANT
M. [M] [K]
Né le 5 janvier 1985 à [Localité 8]
De nationalité française
Demeurant [Adresse 1]
Représenté par Me Benoît ROBINET de la SELARL DOURDIN - ROBINET - FERAL, avocat au barreau de PARIS, toque P 236
Assisté de Me Jean DJZABEAU plaidant pour la SELARL DOURDIN - ROBINET - FERAL, avocat au barreau de PARIS, toque P 236
INTIMEES
S.A.S. ESCAPE YOURSELF, prise en la personne de son président en exercice, M. [W] [R], domicilié en cette qualité au siège social situé
[Adresse 6]
[Localité 4]
Immatriculée au rcs de Tours sous le numéro 808 802 276
Représentée par Me Nicolas BRILLATZ, avocat au barreau de PARIS, toque C 2329
Assistée de Me Antoine BRILLATZ substituant Me Nicolas BRILLATZ, avocat au barreau de PARIS, toque C 2329
S.E.L.A.R.L. A2JZ, représentée par Me [Z] [I], prise en sa qualité d'administrateur judiciaire de la S.A.S. ESCAPE YOURSELF
[Adresse 3]
[Localité 4]
Immatriculée au rcs de Tours sous le numéro 841 442 387
Assignée conformément aux dispositions de l'article 659 du code de procédure civile et n'ayant pas constitué avocat
INTERVENANT VOLONTAIRE
Maître [U] [J], agissant en sa qualité de mandataire judiciaire de la S.A.S. ESCAPE YOURSELF
[Adresse 2]
[Localité 5]
Représentée par Me Nicolas BRILLATZ, avocat au barreau de PARIS, toque C 2329
Assistée de Me Antoine BRILLATZ substituant Me Nicolas BRILLATZ, avocat au barreau de PARIS, toque C 2329
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 805 et 905 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 15 mai 2024, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Mme Véronique RENARD, Présidente de chambre, Présidente, en présence de Mme Agnès MARCADE, Conseillère, chargée d'instruire l'affaire, laquelle a préalablement été entendue en son rapport
Mmes Véronique RENARD et Agnès MARCADE ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Mme Véronique RENARD, Présidente de chambre, Présidente
Mme Agnès MARCADE, Conseillère
Mme Isabelle DOUILLET, Présidente de chambre, désignée pour compléter la Cour
Greffière lors des débats : Mme Carole TREJAUT
ARRET :
Par défaut
Par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile
Signé par Mme Véronique RENARD, Présidente, et par Mme Carole TREJAUT, Greffière, présente lors de la mise à disposition.
Vu l'ordonnance rendue le 22 mars 2023 par le juge de la mise en état du tribunal judiciaire de Paris.
Vu l'appel interjeté le 28 mars 2023 par M. [K] intimant la société Escape Yourself et la Selarl A2JZ, administrateur judiciaire de la société Escape Yourself .
Vu les uniques conclusions remises au greffe et notifiées par voie électronique le 13 juillet 2023 par M. [K], appelant.
Vu les uniques conclusions remises au greffe et notifiées par voie électronique le 10 août 2023 par la société Escape Yourself, intimée.
Vu les uniques conclusions en intervention volontaire remises au greffe et notifiées par voie électronique le 27 février 2024 par M. [J], ès qualités de mandataire judiciaire de la société Escape Yourself.
Vu l'ordonnance de clôture rendue le 25 avril 2024.
SUR CE, LA COUR
Il est expressément renvoyé, pour un exposé complet des faits de la cause et de la procédure à la décision entreprise et aux écritures précédemment visées des parties.
M. [K] et la société Escape Yourself ont conclu un contrat intitulé « Contrat de cession de droits ' Game Design » le 5 août 2016 aux termes duquel M. [K] se voyait confier la réalisation d'un escape game. Un second contrat a été conclu entre les parties le 16 janvier 2017, intitulé « Contrat de travail à durée déterminée », renouvelé à plusieurs reprises jusqu'au 30 juin 2017.
Par acte du 17 août 2021, M. [K] a fait assigner la société Escape Yourself en contrefaçon de droits d'auteur.
Par jugement du 1er février 2022, le tribunal de commerce de Tours a prononcé l'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire à l'égard de la société Escape Yourself et désigné M. [U] [J] en qualité de mandataire judiciaire et M. [Z] [I] en qualité d'administrateur judiciaire.
M. [K] a déclaré sa créance au passif de la procédure collective le 30 mars 2022.
Par acte du 22 juillet 2022, M. [K] a fait assigner en intervention forcée M. [I], ès qualités d'administrateur judiciaire de la société Escape Yourself.
Les deux instances ont été jointes par le juge de la mise en état le 20 octobre 2022.
La société Escape Yourself et M. [I], ès qualités, ont saisi le juge de la mise en état de conclusions d'incident aux fins de nullité de l'assignation du 17 août 2021 et de l'assignation en intervention forcée du 22 juillet 2022.
C'est dans ce contexte qu'a été rendu l'ordonnance dont appel, qui a :
- annulé l'assignation délivrée à la société Escape Yourself par acte d'huissier du 17 août 2021 ;
- débouté M. [I], ès qualités d'administrateur judiciaire de la société Escape Yourself, de sa demande en nullité de l'assignation en intervention forcée délivrée par acte d'huissier du 22 juillet 2022 ;
- condamné M. [K] à payer à la société Escape Yourself la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- débouté M. [I], ès qualités d'administrateur judiciaire de la société Escape Yourself, de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- condamné M. [K] aux dépens.
M. [K] a interjeté appel de cette ordonnance par un acte du 28 mars 2023.
Par jugement du 24 janvier 2023, le tribunal de commerce de Tours a arrêté le plan de redressement de la société Escape Yourself, nommé comme commissaire à l'exécution du plan M. [U] [J] et mis fin à la mission de la Selarl A2JZ qui, le 22 juin 2023, a refusé de recevoir l'acte de signification de la déclaration d'appel aux motifs qu'elle avait été déchargée de sa mission d'administrateur judiciaire.
La Selarl A2JZ en la personne M. [I], ès qualités, n'a pas constitué avocat.
M. [J], ès qualités, est intervenu volontairement à la présente instance par conclusions du 27 février 2024.
Par ses conclusions, M. [K] demande à la cour de :
- infirmer l'ordonnance du juge de la mise en état du 22 mars 2023 en ce qu'elle a annulé l'assignation délivrée à la société Escape Yourself par acte d'huissier du 17 août 2021 ;
- déclarer valide l'assignation délivrée à la société Escape Yourself par M. [K] par acte d'huissier du 17 août 2021 ;
- débouter la société Escape Yourself et M. [I], ès qualités, de leur demande de nullité de l'assignation ;
- infirmer l'ordonnance du juge de la mise en état du 22 mars 2023 en ce qu'elle a condamné M. [K] à payer à la société Escape Yourself la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens ;
- condamner la société Escape Yourself et M. [I], ès qualités, au paiement de la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens. »
Par ses conclusions, la société Escape Yourself demande à la cour de :
A titre principal :
- confirmer l'ordonnance entreprise ;
En tout état de cause :
- condamner M. [K] à lui payer la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.
Par ses conclusions, M. [J], ès qualités de mandataire judiciaire de la société Escape Yourself, demande à la cour de :
A titre principal :
- déclarer recevable son intervention volontaire ;
- confirmer l'ordonnance entreprise ;
En tout état de cause :
- condamner M. [K] à lui payer la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.
A titre liminaire, la cour constate que la recevabilité de l'intervention volontaire de M. [J], ès qualités, n'est pas discutée.
De même, il sera relevé que le chef de l'ordonnance ayant débouté M. [Z] [I], ès qualités d'administrateur judiciaire de la société Escape Yourself de sa demande en nullité de l'assignation en intervention forcée délivrée par acte du 22 juillet 2022 n'est pas contestée. Ce chef de la décision entreprise est irrévocable.
Sur la nullité de l'assignation
L'article 56 du code de procédure civile dispose notamment que :
« L'assignation contient à peine de nullité, outre les mentions prescrites pour les actes d'huissier de justice et celles énoncées à l'article 54 :
[']
2° Un exposé des moyens en fait et en droit ;
3° La liste des pièces sur lesquelles la demande est fondée dans un bordereau qui lui est annexé;
[']
Elle vaut conclusions »
M. [K] reproche au juge de la mise en état d'avoir annulé l'assignation en date du 17 août 2021 au motif que celle-ci manque en fait au sens de l'article 56 du code de procédure civile et que la défenderesse est dans l'impossibilité de savoir sur quel objet précis portent les différentes demandes, alors que l'ordonnance critiquée ne prend pas en considération les demandes relatives à l'inexécution fautive du contrat du 5 août 2016 qui figuraient pourtant dans la partie « discussion » de l'assignation. Il ajoute que l'acte introductif d'instance détaille explicitement les droits patrimoniaux et moraux dont il est titulaire au titre des 'uvres créées et qu'il n'a nul besoin de caractériser l'originalité de ces 'uvres contrairement à ce qu'a considéré le juge de la mise en état.
L'exposé du moyen en fait, comme d'ailleurs celui du moyen en droit et celui de l'objet de la demande, doit permettre au destinataire de l'assignation de savoir ce qu'on lui demande, d'apprécier si le tribunal saisi est compétent, s'il est opportun de se défendre, et par quels moyens. Le juge apprécie la validité de l'assignation au regard de l'objet de l'action dont il est saisi.
L'assignation délivrée par M. [K] à la société Escape Yourself le 17 août 2021 mentionne certes dans le paragraphe « II ' Discussion » en premier lieu l'inexécution contractuelle fautive de la société Escape Yourself mais énumère dans le dispositif de cet acte qui lie seul le tribunal en application de l'article 768 alinéa 2 du code de procédure civile, des demandes fondées sur l'atteinte aux droits patrimonial et moral d'auteur dont M. [K] serait titulaire « sur les 'uvres qu'il a créées dans le cadre du contrat de cession de droit du 5 août 2018 (sic) et du CDD renouvelé à trois reprises pour la période s'écoulant su 16 janvier au 30 juin 2017 ». Aucune prétention fondée sur une manquement contractuel ne figure à ce dispositif.
S'agissant d'une action en contrefaçon de droit d'auteur, il appartient au demandeur, M. [K], d'identifier les 'uvres sur lesquelles il fonde ses demandes et de décrire les caractéristiques de celles-ci ce quand bien même, il n'a pas à caractériser l'originalité de ces 'uvres au stade de l'assignation.
Pour identifier les 'uvres qu'il invoque à l'appui de ses demandes au titre de la contrefaçon de droit d'auteur, M. [K] évoque « 4 escapes Game » ainsi dénommés : Museum, le château d'[10], le château de [Localité 9] et l'Abbaye Royale de [Localité 7]. M. [K] fait valoir sa qualité d'auteur reconnue dans le contrat conclu avec la société Escape Yourself le 5 août 2016 s'agissant de l'escape Game « Museum ». Il argue également de sa qualité de « game designer » pour avoir conçu et créé « le background du jeu, le scenario et le « game design », ces trois notions étant définies en des termes généraux. Il cite également à titre d'exemple le « Game design » de l'escape Game « Abbaye royale de [Localité 7] » qui détaille l'univers du jeu ainsi que le background du scenario, ce même travail ayant selon lui été réalisé pour les autres escape Game qu'il a créés.
Pour autant, ces considérations générales par lesquelles M. [K] décrit le rôle d'un « Game designer », mentionne les escape Games sur lesquels il revendique des droits par le seul nom du lieu où ils seraient situés sont insuffisantes à décrire ni même à identifier les 'uvres revendiquées par lui au titre de la contrefaçon de droit d'auteur. Il en va de même de la fourniture du « Game design » de l'escape Game « Abbaye royale de [Localité 7] » (pièce 29 jointe à l'assignation) dont M. [K] reconnaît lui-même en page 14 de ses écritures qu'il « n'a jamais prétendu défendre la seule création de ce « game design document ». Au contraire, ses créations vont bien au-delà d'un compte-rendu de l''uvre ». Enfin le contrat du 5 août 2016 fournit en pièce 3 concerne la conception de différents éléments d'un nouveau scénario d'escape Game et l'acquisition des droits d'exploitation par la société Escape Yourself sans que l''uvre commandée objet du contrat soit identifiée précisément ni décrite dans ses caractéristiques.
En conséquence, l'assignation ne permet pas à la société Escape Yourself de se défendre utilement et doit être annulée.
L'ordonnance entreprise mérite confirmation de ce chef.
Sur les autres demandes
Le sens de l'arrêt conduit à confirmer les dispositions de l'ordonnance concernant les dépens et les frais irrépétibles.
Partie perdante, M. [K] est condamné aux dépens d'appel et à payer à la société Escape Yourself, en application de l'article 700 du code de procédure civile, une indemnité qui sera, en équité, fixée à la somme de 2 000 euros.
L'équité commande de ne pas accueillir la demande de M. [J], ès qualités, au titre des frais irrépétibles. Cette demande sera rejetée.
PAR CES MOTIFS
La cour, dans les limites de l'appel,
Dit recevable l'intervention volontaire de M. [U] [J], ès qualités de mandataire judiciaire de la société Escape Yourself,
Confirme l'ordonnance entreprise,
Condamne M. [M] [K] à payer à la société Escape Yourself la somme de 2 000 euros au titre des frais irrépétibles d'appel,
Rejette la demande de M. [U] [J], ès qualités de mandataire judiciaire de la société Escape Yourself, au titre des frais irrépétibles d'appel,
Condamne M. [M] [K] aux dépens d'appel.
La Greffière La Présidente