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20/06/2024 | FRANCE | N°22/19882

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 4 - chambre 9 - a, 20 juin 2024, 22/19882


Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 9 - A



ARRÊT DU 20 JUIN 2024



(n° , 10 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 22/19882 - N° Portalis 35L7-V-B7G-CGX65



Décision déférée à la Cour : Jugement du 22 juillet 2022 - Juge des contentieux de la protection de PARIS - RG n° 22/02042





APPELANTE



LA BANQUE POSTALE CONSUMER FINANCE, ancienne

ment dénommée la BANQUE POSTALE FINANCEMENT, société anonyme à directoire et conseil de surveillance, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés è...

Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 9 - A

ARRÊT DU 20 JUIN 2024

(n° , 10 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 22/19882 - N° Portalis 35L7-V-B7G-CGX65

Décision déférée à la Cour : Jugement du 22 juillet 2022 - Juge des contentieux de la protection de PARIS - RG n° 22/02042

APPELANTE

LA BANQUE POSTALE CONSUMER FINANCE, anciennement dénommée la BANQUE POSTALE FINANCEMENT, société anonyme à directoire et conseil de surveillance, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés ès-qualités audit siège

N° SIRET : 487 779 035 00046

[Adresse 1]

[Localité 4]

représentée et assistée de Me Sébastien MENDES GIL de la SELAS CLOIX & MENDES-GIL, avocat au barreau de PARIS, toque : P0173

INTIMÉ

Monsieur [Y] [R] [M]

né le [Date naissance 2] 1974 au BANGLADESH

Chez association [Adresse 5]

[Adresse 5]

[Localité 3]

DÉFAILLANT

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 30 avril 2024, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Mme Muriel DURAND, Présidente de chambre, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Mme Muriel DURAND, Présidente de chambre

Mme Laurence ARBELLOT, Conseillère

Mme Sophie COULIBEUF, Conseillère

Greffière, lors des débats : Mme Camille LEPAGE

ARRÊT :

- DÉFAUT

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Mme Muriel DURAND, Présidente et par Mme Camille LEPAGE, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

La société Banque Postale Financement devenue depuis la société Banque Postale Consumer Finance a émis une offre de crédit personnel d'un montant en capital de 20 000 euros remboursable sur 74 mois soit après un moratoire de deux mois en 72 mensualités de 312,47 euros hors assurance incluant les intérêts au taux nominal de 3,50 %, le TAEG s'élevant à 3,80 %, soit une mensualité avec assurance de 326,64 euros, dont elle affirme qu'elle a été acceptée par M. [Y] [R] [M] selon signature électronique du 5 août 2020.

Plusieurs échéances n'ayant pas été honorées, la banque a entendu se prévaloir de la déchéance du terme.

Par acte du 28 mars 2022, la société Banque Postale Consumer Finance a fait assigner M. [M] devant le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Paris en paiement du solde du prêt lequel, par jugement réputé contradictoire du 22 juillet 2022, a débouté la société Banque Postale Consumer Finance de toutes ses demandes y compris sa demande sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et l'a condamnée aux dépens.

Il a considéré, s'agissant d'un contrat signé par voie électronique, qu'il n'était communiqué aucune pièce relative à l'identité de M. [M] non plus qu'aucun élément d'imposition ni aucun bulletin de paie et qu'il lui était donc impossible de s'assurer de l'identité de l'emprunteur.

Par déclaration réalisée par voie électronique le 25 novembre 2022, la société Banque Postale Consumer Finance a interjeté appel de cette décision.

Aux termes de ses conclusions déposées par voie électronique le 24 février 2023, la société Banque Postale Consumer Finance demande à la cour d'annuler le jugement et à tout le moins de l'infirmer et statuant à nouveau de constater que la déchéance du terme a été prononcée, subsidiairement de la prononcer avec effets au 18 septembre 2021, de condamner M. [M] à lui payer la somme de 21 566,51 euros avec intérêts au taux contractuel de 3,50 % l'an à compter du 21 septembre 2021 sur la somme de 19 985,20 euros et au taux légal pour le surplus en remboursement du crédit n° 50560947306, subsidiairement en cas de déchéance du droit aux intérêts contractuels de le condamner à lui payer la somme de 18 780,32 euros avec intérêts au taux légal à compter du 8 novembre 2021, date de la mise en demeure en remboursement du crédit n° 50560947306, subsidiairement de le condamner à lui payer la somme de 18 610,28 euros avec intérêts au taux légal à compter du 12 août 2020 sur le fondement de la répétition de l'indu en tout état de cause, de la condamner à lui payer la somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens avec distraction au profit de Selas Cloix & Mendes Gil.

L'appelante fait valoir que le premier juge ne pouvait soulever d'office une contestation de signature non soulevée par l'emprunteur défaillant, sur la seule base de ce que l'offre de crédit avait fait l'objet d'une signature électronique et alors qu'il ressort que des règlements ont été opérés et que le débiteur n'a formé aucune contestation. Elle ajoute qu'elle produisait le fichier de preuve et qu'il ne s'agit pas d'un moyen tiré du code de la consommation et requiert ainsi l'annulation du jugement.

Elle invoque le caractère infondé de la remise en question de la signature électronique et rappelle que la signature électronique est parfaitement admise en tant que preuve selon les dispositions des articles 1366 et 1367 du code civil et qu'il s'agit d'ailleurs d'une preuve présumée. Elle indique qu'en l'absence de contestation, elle n'a pas à produire de pièce complémentaire visant à établir la fiabilité de la signature mais qu'elle communique aux débats le document afférent au fichier de preuve de la société DocuSign retraçant l'historique de signature du contrat de crédit mais aussi la liste des produits et services qualifiés faisant ressortir que, pour certains produits, la société DocuSign France figure sur la liste des produits et services qualifiés disposant d'une qualification de l'Agence nationale de la sécurité des systèmes d'information (ANSSI) et l'attestation de conformité émise par LSTI attestant que les services et certificats électroniques délivrés par la société DocuSign sont conformes au règlement européen 910/2014 et qui permettent de justifier que la signature électronique apposée sur l'offre de prêt souscrite par M. [M] est bien fiable. Elle ajoute que M. [M] est client de la banque et que son identité a déjà été vérifiée à l'ouverture du compte. Elle souligne que son adresse a été confirmée par la délivrance de l'assignation et qu'il n'a pas réagi. Elle précise produire devant la cour la copie de la pièce d'identité de M. [M].

A défaut, elle indique que ces pièces constituent des commencements de preuve par écrit, qui sont corroborés par les autres éléments de preuve produits aux débats, notamment les prélèvements opérés sur son compte pendant plusieurs mois et ce même si certains sont revenus impayés faute de provision ce qui doit être distingué du rejet motivé par la contestation du titulaire du compte.

Elle estime que sa créance est bien fondée à hauteur de 21 566,51 euros et indique que si la cour devait estimer que la preuve du contrat de prêt n'est pas rapportée, elle serait bien fondée à solliciter la condamnation de l'emprunteur au paiement de la somme de 18 610,28 euros en restitution d'une somme perçue indûment (somme versée 20 000 euros à déduire paiements effectués pour 1 389,72 euros).

Enfin et pour répondre à la demande du conseiller de la mise en état sur la déchéance du droit aux intérêts, elle estime produire toutes les pièces demandées et qu'aucune déchéance du droit aux intérêts n'est encourue. Elle fait valoir qu'en cas de déchéance du droit aux intérêts, il conviendrait de réintégrer les mensualités d'assurance et que la somme due serait donc de 18 780,32 euros.

Aucun avocat ne s'est constitué pour M. [M] à qui la déclaration d'appel a été signifiée par acte du 12 janvier 2023 remis à étude et les conclusions ont été signifiées par acte du 10 mars 2023 délivré selon les mêmes modalités.

Pour un plus ample exposé des faits, moyens et prétentions de l'appelante, il est renvoyé aux écritures de celle-ci conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 12 mars 2024 et l'affaire a été appelée à l'audience du 30 avril 2024.

A l'audience la cour ayant examiné les pièces a relevé que la FIPEN produite n'était pas signée et que le résultat de la consultation du FICP n'apparaissait pas. Elle a fait parvenir le 2 mai 2024 au conseil de la banque par RPVA un avis rappelant que dans un arrêt du 7 juin 2023 (pourvoi 22-15.552) la première chambre de la cour de cassation avait considéré que la preuve de la remise de la FIPEN ne pouvait se déduire de la clause de reconnaissance et de la seule production de la FIPEN non signée, ce document émanant de la seule banque, souligné que l'intimé ne comparaissait pas et a invité la banque à produire tout justificatif de la remise de cette FIPEN et du résultat de la consultation du FICP dont l'absence était susceptible d'entraîner une déchéance du droit aux intérêts et le cas échéant à faire valoir ses observations sur la déchéance du droit aux intérêts encourue à défaut de preuve de remise, et ce au plus tard le 30 mai 2024.

Le 30 mai 2024, la banque a fait parvenir une note en délibéré aux termes de laquelle elle fait valoir :

- s'agissant de la consultation du FICP que celle-ci a été produite en pièce 1 et qu'elle le produit de nouveau en pièce 15 dans le cadre du délibéré,

- s'agissant de la FIPEN qu'il ressort du fichier de preuve intégré à la pièce n° 1 et reproduit pour les besoins de la présente note en pièce n° 16, qu'il apparaît en page 3 du fichier de preuve : "Visualisation du(des) document(s) présenté(s) pour consentement Le(s) Document(s) qui a(ont) été présentés au Signataire pour recueillir son consentement a(ont) été visualisé(s) de la manière suivante : "Contrat.pdf visualisé le 5 août 2020 16 :15 :51 CEST au moyen du visualisateur de documents PDF intégré au navigateur web utilisé par le signataire au moment de la signature", qu'elle produit aux débats ce document intitulé dans le fichier de preuve "Contrat.pdf", lequel est intégré à la pièce n° 1 et reproduit de manière séparée en pièce n° 17 pour les besoins de la présente note, que ce document PDF intègre bien la FIPEN en pages 1/13 et 2/13, laquelle a donc bien été visualisée par M. [M] avant signature électronique, ce qui atteste de la remise effective du document par la banque.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Selon l'article 472 du code de procédure civile, lorsque le défendeur ne comparaît pas, il est néanmoins statué sur le fond, le juge ne fait droit à la demande que s'il l'estime régulière, recevable et bien fondée.

Il résulte de l'article 954 dernier alinéa du code de procédure civile que la partie qui ne conclut pas ou qui, sans énoncer de nouveaux moyens, demande la confirmation du jugement est réputée s'en approprier les motifs.

Le présent litige est relatif à un crédit souscrit le 5 août 2020 soumis aux dispositions de la loi n° 2010-737 du 1er juillet 2010 de sorte qu'il doit être fait application des articles du code de la consommation dans leur rédaction en vigueur après le 1er mai 2011 et leur numérotation postérieure à l'ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016 et au décret n° 2016-884 du 29 juin 2016.

Sur l'annulation du jugement

L'appelante soutient que si le juge peut soulever d'office tout moyen résultant de l'application des dispositions du code de la consommation comme l'y autorisent les dispositions de l'article R. 632-1 du code de la consommation, il ne peut en revanche soulever d'office tout moyen que le débiteur pourrait soulever et qui ne relève pas du strict champ d'application des dispositions du code de la consommation. Elle indique que le juge ne pouvait donc présupposer un fait qui n'est pas allégué par le défendeur non comparant, à savoir que celui-ci ne serait pas signataire de l'offre de crédit.

Selon les articles 4 et 5 du code de procédure civile, l'objet du litige est déterminé par les prétentions respectives des parties et le juge doit se prononcer sur tout ce qui est demandé et seulement sur ce qui est demandé.

Selon l'article 12 du même code, le juge tranche le litige conformément aux règles de droit qui lui sont applicables, et doit donner leur exacte qualification aux faits et actes litigieux sans s'arrêter à la dénomination que les parties en auraient proposée.

En application de l'article 472 du même code, si le défendeur ne comparaît pas, il est néanmoins statué sur le fond. Le juge ne fait droit à la demande que dans la mesure où il l'estime régulière, recevable et bien fondée.

En l'espèce, le premier juge a constaté l'absence de comparution du défendeur et a visé les dispositions de l'article 472 du code de procédure civile.

Considérant qu'il n'était pas produit de pièces propres à justifier que M. [M] avait bien signé le document par voie électronique, il a estimé que la société Banque Postale Consumer Finance n'apportait ainsi pas suffisamment la preuve de la conclusion d'un contrat avec M. [M].

Ce faisant, il ne résulte pas de ces énonciations que le premier juge ait entendu opérer d'office une vérification de signature dans les termes de l'article 287 du code de procédure civile alors qu'il entre dans son office, particulièrement en l'absence de comparution du défendeur à une action en paiement, de vérifier que les conditions d'application des textes invoqués sont remplies et que les pièces produites sont suffisantes à fonder une condamnation, la signature d'un contrat fût-elle électronique, faisant partie intégrante des éléments soumis aux débats. C'est donc en procédant à une analyse des pièces soumises aux débats que le premier juge a rejeté la demande en paiement, sans excéder ses pouvoirs.

Le moyen tendant à l'annulation du jugement est donc infondé.

Sur la preuve de l'obligation

En application de l'article 1353 du code civil en sa version applicable au litige, celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver et réciproquement, celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l'extinction de son obligation.

Il incombe à chaque partie, par application de l'article 9 du code de procédure civile, de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de sa prétention.

L'article 1366 du code civil dispose que : "L'écrit électronique a la même force probante que l'écrit sur support papier, sous réserve que puisse être dûment identifiée la personne dont il émane et qu'il soit établi et conservé dans des conditions de nature à en garantir l'état l'intégrité".

L'article 1367 alinéa 2 du même code dispose que "lorsqu'elle est électronique, la signature consiste en l'usage d'un procédé fiable d'identification garantissant son lien avec l'acte auquel elle s'attache. La fiabilité de ce procédé est présumée, jusqu'à preuve contraire, lorsque la signature électronique est créée, l'identité du signataire assurée et l'intégrité de l'acte garanti, dans des conditions fixées par décret en conseil d'État".

L'article premier du décret n° 2017-1416 du 28 septembre 2017, relatif à la signature électronique, énonce que la fiabilité d'un procédé de signature électronique est présumée, jusqu'à preuve du contraire, lorsque ce procédé met en 'uvre une signature électronique qualifiée, et que constitue "une signature électronique qualifiée, une signature électronique avancée, conforme à l'article 26 du règlement dont il s'agit et créée à l'aide d'un dispositif de création de signature électronique qualifié, répondant aux exigences de l'article 29 du règlement, qui repose sur un certificat qualifié de signature électronique répondant aux exigences de l'article 28 de ce règlement".

En l'espèce, l'appelante produit aux débats au soutien de ses prétentions l'offre de crédit établie au nom de M. [M] acceptée électroniquement, le dossier de recueil de signature électronique avec un fichier de preuve comprenant une attestation de signature électronique de la société DocuSign, la chronologie de la transaction, le descriptif juridique et technique établi par la banque explicitant le process de certification de la signature électronique via son espace personnel en ligne, le guide établi par la société DocuSign, le certificat de conformité délivré à la société DocuSign attestant qu'elle délivre des services de confiance conformes au règlement européen 910/2014 , la copie de la pièce d'identité de M. [M] et son avis d'imposition 2020 sur les revenus de 2019.

Il en résulte suffisamment que dans le cadre de la transaction 2XLBPF1-SERVID01-50560947306-20200805161549-5VC2BVJ745HDZG82, M. [M] identifié par son mail [Courriel 6] a apposé sa signature électronique le 5 août 2020 à partir de 16 :16 :47 sur le contrat et la fiche de dialogue via l'application de la banque, que les date et heure de validation sont bien horodatées avec certificat d'horodatage et M. [M] identifié par un code utilisateur. Aucun élément ne vient contredire la présomption de fiabilité du procédé de recueil de signature électronique utilisé telle que prévue au décret susvisé pris pour l'application de l'article 1367 du code civil.

L'historique de compte communiqué atteste du déblocage des fonds au profit de M. [M] le 12 août 2020, puis du prélèvement du montant des échéances du crédit à compter du 12 octobre 2020 sans difficulté jusqu'au 10 février 2021 inclus, les suivantes ayant été rejetées.

L'ensemble de ces éléments établit suffisamment l'obligation dont se prévaut l'appelante à l'appui de son action en paiement. C'est donc à tort que le premier juge a rejeté l'intégralité des demandes de la société Banque Postale Consumer Finance. Partant le jugement doit être infirmé.

Sur la recevabilité de l'action au regard du délai de forclusion

L'article R. 312-35 du code de la consommation dispose que les actions en paiement à l'occasion de la défaillance de l'emprunteur dans le cadre d'un crédit à la consommation, doivent être engagées devant le tribunal dans les deux ans de l'événement qui leur a donné naissance à peine de forclusion et que cet événement est notamment caractérisé par le premier incident de paiement non régularisé.

La recevabilité de l'action de la société Banque Postale Consumer Finance au regard de la forclusion n'a pas été vérifiée par le premier juge. Or en application de l'article 125 du code de procédure civile, il appartient au juge saisi d'une demande en paiement de vérifier d'office même en dehors de toute contestation sur ce point que l'action du prêteur s'inscrit bien dans ce délai.

En l'espèce, il résulte de l'historique de compte que le premier impayé non régularisé date du 10 mars 2021 Dès lors la banque qui a assigné le 28 mars 2022 n'est pas forclose en son action et doit être déclarée recevable.

Sur la déchéance du droit aux intérêts

La remise de la fiche d'informations précontractuelles

Il résulte de l'article L. 312-12 du code de la consommation applicable au cas d'espèce que préalablement à la conclusion du contrat de crédit, le prêteur ou l'intermédiaire de crédit donne à l'emprunteur, par écrit ou sur un autre support durable, les informations nécessaires à la comparaison de différentes offres et permettant à l'emprunteur, compte tenu de ses préférences, d'appréhender clairement l'étendue de son engagement.

Cette fiche d'informations précontractuelles européennes normalisées -FIPEN- est exigée à peine de déchéance totale du droit aux intérêts par l'article L. 341-1 du même code, étant précisé qu'il incombe au prêteur de rapporter la preuve de ce qu'il a satisfait à son obligation d'information.

A cet égard, la clause type, figurant au contrat de prêt, selon laquelle les emprunteurs reconnaissent avoir pris connaissance de la fiche d'informations précontractuelles normalisées européennes, n'est qu'un indice qu'il incombe au prêteur de corroborer par un ou plusieurs éléments complémentaires.

Il a toutefois été jugé qu'un document qui émane du seul prêteur ne peut utilement corroborer les mentions de cette clause type de l'offre de prêt pour apporter la preuve de l'effectivité de la remise. (Cass. civ. 1, 7 juin 2023, n° 22-15.552).

La banque produit le contrat qui a été visualisé ainsi qu'il résulte de la page 3 du fichier de preuve établi par la société DocuSign, lequel est constitué d'une liasse de 13 pages qui se suivent portent toutes la référence du contrat 50560947306 qui est celui qui a été signé par M. [M] et comporte :

- en pages 1 à 2 la FIPEN remplie,

- en pages 3 à 6 le contrat soumis à signature électronique,

- en pages 7 à 8 le document d'information sur l'assurance,

- en pages 9 à 10 la fiche conseil en assurance,

- en pages 11 à 12 la notice d'assurance,

- en page 13 la fiche de dialogue soumise à signature électronique.

Ceci permet d'établir la remise de la FIPEN. Aucune déchéance du droit aux intérêts ne saurait donc être prononcée de ce chef.

La vérification de la solvabilité

L'article L. 312-16 du code de la consommation impose au prêteur avant de conclure le contrat de crédit, de vérifier la solvabilité de l'emprunteur à partir d'un nombre suffisant d'informations y compris des informations fournies par ce dernier à la demande prêteur et de consulter le fichier prévu à l'article L. 751-1, dans les conditions prévues par l'arrêté mentionné à l'article L. 751-6.

S'agissant de la justification de la consultation du fichier des incidents de remboursement des crédits aux particuliers par les organismes prêteurs, l'arrêté du 26 octobre 2010 relatif au fichier national des incidents de remboursement des crédits aux particuliers prévoit, dans sa rédaction modifiée par l'arrêté du 17 février 2020, qu'en application de l'article L. 751-6 du code de la consommation, afin de pouvoir justifier qu'ils ont consulté le fichier, les établissements et organismes mentionnés à l'article 1er doivent conserver des preuves de la consultation du fichier sur un support durable et être en mesure de démontrer que les modalités de consultation du fichier et de conservation des éléments de preuve de ces consultations garantissent l'intégrité des informations ainsi collectées, que constitue un support durable tout instrument permettant aux établissements et organismes mentionnés à l'article 1er de stocker les informations constitutives de ces preuves, d'une manière telle que ces informations puissent être consultées ultérieurement pendant une période adaptée à leur finalité et reproduites à l'identique, que les éléments de preuve sont apportés conformément au modèle figurant en annexe au présent arrêté et qu'ils sont à restituer sur papier d'affaire reprenant les mentions obligatoires prévues aux articles R. 123-237 et R. 123-238 du code de commerce.

Cette annexe prévoit que le document doit être ainsi présenté :

Logo de l'établissement

L'établissement : code interbancaire --- dénomination ---

A effectué une consultation obligatoire du FICP pour la clé BDF ----

Le ---

Pour (nom prénom date de naissance)

Dans le cadre (d'un octroi de crédit) (d'un renouvellement de crédit)

Pour un crédit type (immobilier) ou (consommation)

A laquelle il a été répondu le (année mois jour heure minute secondes)

Numéro de consultation obligatoire.

Pour démontrer avoir satisfait à son obligation de consultation préalable du fichier des incidents de remboursement des crédits aux particuliers, la société Banque Postale Consumer Finance communique un document en tous points conforme et qui démontre qu'elle a consulté le fichier le 5 août 2020 soit avant le déblocage des fonds le 12 août 2020.

Aucune déchéance du droit aux intérêts contractuels n'est donc encourue.

Sur le montant des sommes dues

En application de l'article L. 312-39 du code de la consommation en cas de défaillance de l'emprunteur, le prêteur peut exiger le remboursement immédiat du capital restant dû, majoré des intérêts échus mais non payés. Jusqu'à la date du règlement effectif, les sommes restant dues produisent les intérêts de retard à un taux égal à celui du prêt. En outre, le prêteur peut demander à l'emprunteur défaillant une indemnité qui, dépendant de la durée restant à courir du contrat et sans préjudice de l'application des articles 1152 et 1231 (de l'article 1231-5 du code civil), est fixée suivant un barème déterminé par décret.

L'article D. 312-16 du même code dispose que le prêteur peut demander une indemnité égale à 8 % du capital restant dû à la date de défaillance. Aucune autre pénalité notamment de retard ne peut être exigée par le prêteur.

La société Banque Postale Consumer Finance produit en outre l'offre de contrat de crédit qui comporte une clause de déchéance du terme, l'historique de prêt, le tableau d'amortissement, la mise en demeure avant déchéance du terme du 6 août 2021 enjoignant à M. [M] de régler l'arriéré de 1 776,87 euros sous 15 jours à peine de déchéance du terme et celle notifiant la déchéance du terme du 8 novembre 2021 portant mise en demeure de payer le solde du crédit et un décompte de créance.

Il en résulte que la société Banque Postale Consumer Finance se prévaut de manière légitime de la déchéance du terme du contrat et de l'exigibilité des sommes dues et qu'elle est fondée à obtenir paiement des sommes dues à la date de déchéance du terme soit :

- 2 286,48 euros au titre des échéances impayées

- 17 698,72 euros au titre du capital restant dû

- 21,03 euros au titre des intérêts échus

soit un total de 20 006,23 euros majorée des intérêts au taux de 3,50 % à compter du 8 novembre 2021 sur la seule somme de 19 985,20 euros.

Elle est en outre fondée à obtenir une indemnité de résiliation de 8 % laquelle, sollicitée à hauteur de 1 560,28 euros, apparaît excessive au regard du taux et du préjudice subi et doit être réduite à la somme de 180 euros et produire intérêts au taux légal à compter du 8 novembre 2021.

La cour condamne donc M. [M] à payer ces sommes à la société Banque Postale Consumer Finance.

Sur les dépens et les frais irrépétibles

Le jugement doit être infirmé en ce qu'il a condamné la banque aux dépens de première instance et confirmé en ce qu'il a rejeté la demande de la société Banque Postale Consumer Finance sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile. M. [M] qui succombe doit supporter les dépens de première instance. En revanche rien ne justifie de le condamner aux dépens d'appel, alors que n'ayant jamais été présent ou représenté ni en première instance, ni en appel, il n'a jamais fait valoir aucun moyen ayant pu conduire le premier juge à statuer comme il l'a fait. La société Banque Postale Consumer Finance conservera donc la charge de ses dépens d'appel et de ses frais irrépétibles.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Statuant par arrêt rendu par défaut et en dernier ressort,

Infirme le jugement sauf en ce qu'il a rejeté la demande sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

Statuant à nouveau et y ajoutant,

Déclare la société Banque Postale Consumer Finance recevable en sa demande ;

Dit n'y avoir lieu à déchéance du droit aux intérêts contractuels ;

Condamne M. [Y] [R] [M] à payer à la société Banque Postale Consumer Finance les sommes de 20 006,23 euros majorée des intérêts au taux de 3,50 % à compter du 8 novembre 2021 sur la seule somme de 19 985,20 euros au titre du solde du prêt et de 180 euros majorée des intérêts au taux légal à compter du 8 novembre 2021 au titre de l'indemnité légale de résiliation ;

Condamne M. M. [Y] [R] [M] aux dépens de première instance ;

Laisse les dépens d'appel à la charge de la société Banque Postale Consumer Finance ;

Rejette toute demande plus ample ou contraire.

La greffière La présidente


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 4 - chambre 9 - a
Numéro d'arrêt : 22/19882
Date de la décision : 20/06/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 29/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-06-20;22.19882 ?
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