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06/06/2024 | FRANCE | N°22/19536

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 4 - chambre 9 - a, 06 juin 2024, 22/19536


Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 9 - A



ARRÊT DU 06 JUIN 2024



(n° , 12 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 22/19536 - N° Portalis 35L7-V-B7G-CGXBE



Décision déférée à la Cour : Jugement du 25 juillet 2022 - Tribunal de proximité de JUVISY-SUR-ORGE - RG n° 11-20-001602





APPELANT



Monsieur [W], [N] [V]

né le [Date nais

sance 1] 1949 à [Localité 6]

[Adresse 3]

[Adresse 3]



représenté par Me Sandra OHANA de l'AARPI OHANA ZERHAT CABINET D'AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : C1050

ayant pou...

Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 9 - A

ARRÊT DU 06 JUIN 2024

(n° , 12 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 22/19536 - N° Portalis 35L7-V-B7G-CGXBE

Décision déférée à la Cour : Jugement du 25 juillet 2022 - Tribunal de proximité de JUVISY-SUR-ORGE - RG n° 11-20-001602

APPELANT

Monsieur [W], [N] [V]

né le [Date naissance 1] 1949 à [Localité 6]

[Adresse 3]

[Adresse 3]

représenté par Me Sandra OHANA de l'AARPI OHANA ZERHAT CABINET D'AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : C1050

ayant pour avocat plaidant Me Hakima AMEZIANE de la SELAS MIALET-AMEZIANE SELAS, avocat au barreau de l'ESSONNE

INTIMÉES

La société FINANCO, société anonyme à directoire et conseil de surveillance agissant poursuites et diligences de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

N° SIRET : 338 138 795 00467

[Adresse 5]

[Adresse 5]

[Adresse 5]

représentée par Me Olivier HASCOET de la SELARL HKH AVOCATS, avocat au barreau de l'ESSONNE

AGENCE FRANÇAISE POUR L'ISOLATION DE L'HABITAT (AFIH), SARL prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

N° SIRET : 527 864 680 00030

[Adresse 4]

[Adresse 4]

DÉFAILLANTE

PARTIE INTERVENANTE

La SELARL [D] [R], représentée par Maître [D] [R], liquidateur judiciaire de la SARL Agence Française pour l'isolation de l'habitat

[Adresse 2]

[Adresse 2]

DÉFAILLANTE

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 24 avril 2024, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Mme Laurence ARBELLOT, Conseillère, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Mme Muriel DURAND, Présidente de chambre

Mme Laurence ARBELLOT, Conseillère

Mme Sophie COULIBEUF, Conseillère

Greffière, lors des débats : Mme Camille LEPAGE

ARRÊT :

- RÉPUTÉ CONTRADICTOIRE

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Mme Muriel DURAND, Présidente et par Mme Camille LEPAGE, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Le 14 mai 2019, M. [W] [V] a passé commande auprès de la société l'Agence Française pour l'Isolation de l'Habitat ci-après dénommée société AFIH, de divers travaux portant sur l'installation d'un chauffe-eau thermodynamique d'une valeur de 2 300 euros, sur l'isolation extérieure de sa maison d'habitation pour un montant de 19 345,16 euros et sur des menuiseries pour un montant de 5 124,53 euros soit une somme totale de 26 769,69 euros.

La société Financo se prévaut d'une offre de contrat qu'elle indique avoir été validée électroniquement par M. [W] [V] le 21 mai 2019, portant sur un crédit affecté au financement de travaux réalisés par la société AFIH pour un montant de 26 769,69 euros au taux d'intérêts nominal de 3,88 % l'an remboursable en 120 mensualités de 273,84 euros cha-cune avec un différé d'amortissement de 5 mois.

M. [V] a validé les travaux sans réserve le 9 juillet 2019 mais n'a pas débuté le remboursement du crédit.

La société Financo s'est prévalue de la déchéance du terme du contrat de crédit.

Par acte d'huissier de justice en date du 24 décembre 2020, la société Financo a fait assigner M. [V] devant le juge des contentieux de la protection du tribunal de proximité de Juvisy-sur-Orge, pour solliciter le paiement des sommes restant dues au titre du crédit.

Par acte d'huissier délivré le 27 août 2021, M. [V] a fait assigner en intervention forcée la société AFIH aux fins de voir à titre principal prononcer la résolution du contrat de prestation de services conclu entre lui et cette société au regard d'inexécutions contractuelles et de la voir condamner à lui régler la somme de 19 449,59 euros en réparation de son préjudice économique, et à titre subsidiaire, d'être garanti des condamnations prononcées à son encontre.

Par jugement réputé contradictoire rendu le 25 juillet 2022 auquel il convient de se reporter, le juge des contentieux de la protection a :

- prononcé la déchéance du droit aux intérêts de la banque,

- condamné M. [V] à payer à la société Financo la somme de 26 769,69 euros assortie des intérêts au taux légal à compter du 30 juillet 2020,

- dit que le taux légal ne pourra être majoré,

- débouté la société Financo de toutes ses autres demandes,

- débouté M. [V] de toutes ses demandes,

- dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné M. [V] aux dépens.

Pour prononcer la déchéance du droit aux intérêts, le juge a considéré que les pièces produites par la banque apparaissaient insuffisantes à justifier qu'elle aurait vérifié la solvabilité de l'emprunteur avant de conclure le contrat, qu'elle ne produisait à cet effet que la première page de l'avis d'imposition de 2018 de l'intéressé. Il a également relevé que la pièce 6 produite par la banque apparaissait insuffisante à justifier qu'elle aurait consulté le fichier des incidents de paiements (FICP) et que le contrat avait été rédigé en caractères dont la hauteur était inférieure à celle du corps huit.

Il a rappelé que la sanction de déchéance du droit aux intérêts privait également le prêteur de toute indemnité de résiliation ou de toute somme réclamée au titre des cotisations d'assurance puisque la capitalisation des intérêts était prohibée par les dispositions de l'article L. 312-38 du code de la consommation.

Il a condamné M. [V] au paiement du seul capital prêté augmenté des intérêts au taux légal sans majoration du taux prévue à l'article L. 313-3 du code monétaire et financier, pour rendre dissuasive la sanction de déchéance du droit aux intérêts.

S'agissant de la demande de résolution du contrat fondée sur des inexécutions contractuelles de la société prestataire, le juge a relevé que n'était produit qu'un rapport d'expertise amiable réalisé à la demande de l'assureur de M. [V], ce qui était insuffisant à prouver les inexécutions invoquées et que le protocole d'accord dont faisait état M. [V] n'avait pas été signé de la société AFIH.

La société AFIH a été placée en liquidation judiciaire suivant jugement du tribunal de commerce de Nanterre du 12 juillet 2022 et Maître [D] [R] désigné en tant que mandataire liquidateur.

M. [V] a interjeté appel de la décision par déclaration électronique en date du 18 novembre 2022.

Aux termes de ses ultimes conclusions numéro 2 déposées par voie électronique le 17 juillet 2023, M. [V] demande à la cour :

- de le recevoir en ses demandes, fins et conclusions, l'en dire bien-fondé et y faisant droit,

- de réformer le jugement et statuant à nouveau,

- de dire et juger qu'il est recevable et bien fondé en ses demandes,

- à titre principal, d'ordonner la résolution judiciaire du contrat d'achat et d'installation conclu entre lui et la société AFIH,

- de condamner la société AFIH prise en la personne de son liquidateur judiciaire à lui payer la somme de 26 769,69 euros en réparation de son préjudice économique,

- d'ordonner la résolution judiciaire du contrat de prêt affecté prétendument conclu entre lui et la société Financo si la cour devait retenir l'existence d'un tel lien contractuel entre lui et la société Financo,

- de prononcer la déchéance du droit aux intérêts de cette société et de la condamner à lui payer la somme de 26 769,69 euros en violation des dispositions de l'article L.312-36 du code de la consommation,

- à titre subsidiaire, de désigner tel expert qu'il plaira avec pour mission de :

- se rendre sur les lieux au [Adresse 3]

- solliciter tous les documents contractuels qu'il estimera nécessaires à l'accomplissement de sa mission

- examiner la pompe à chaleur acquise par lui

- examiner les travaux effectués par la société AFIH

- dire si la pose de la pompe à chaleur et les travaux selon factures, ont été faits selon les règles de l'art

- dire si le prix de la pompe à chaleur correspond aux prix pratiqués sur le marché

- décrire les désordres éventuels affectant le bien litigieux

- donner son avis sur une éventuelle réfaction du prix

- préciser les responsabilités encourues

- plus généralement, de procéder à sa mission pour permettre à la juridiction éventuellement saisie sur les suites, de désigner le ou les responsables et de chiffrer le coût réel de la prestation de la société AFIH ainsi que les indemnisations du fait des préjudices subis,

- en tout état de cause, de condamner la société AFIH prise en la personne de son liquidateur judiciaire à le garantir de toutes condamnations éventuellement mises à sa charge dans le cadre de la présente procédure,

- de condamner la société Financo à le désinscrire du fichier des incidents de remboursement des crédits aux particuliers (FICP),

- de condamner solidairement les sociétés Fianco et AFIH à lui verser la somme de 3 000 euros au titre du préjudice moral et de jouissance ainsi que la somme de 4 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens dont les frais des constats d'huissier, dont distraction au profit de la Selas Mialet Ameziane dans les termes de l'article 699 du code de procédure civile.

Il explique avoir été démarché à domicile par un représentant de la société AFIH, que ce dernier lui a conseillé différents travaux relatifs à l'installation d'une pompe à chaleur avec remplacement d'une ancienne chaudière à gaz pour le chauffage central de son pavillon, dont le prix d'achat serait partiellement remboursé par des subventions versées par l'État. Il ajoute que le démarcheur lui a également conseillé l'isolation de la maison à l'aide d'un complexe isolant extérieur ainsi que le remplacement des menuiseries extérieures en bois en simple vitrage par des menuiseries en PVC à double vitrage et que le montant total des travaux s'élevait alors à 44 032,13 euros avec promesse de toucher une aide étatique d'un montant approximatif de 35 000 euros. Il indique qu'il était âgé de 69 ans, qu'il n'avait pas conscience d'avoir souscrit un crédit à la consommation et pensait que la société AFIH prendrait en charge les démarches administratives en vue de l'obtention des aides de l'État et que donc il n'a jamais été en mesure de donner un consentement libre et éclairé.

Il ajoute que la société Financo prétend qu'une offre de prêt de 17 262,44 euros a été signée le 28 janvier 2019, que le montant en aurait été versé directement entre les mains de l'AFIH. Il ne conteste pas la réalisation des travaux de juin à septembre 2019, sans réception, avec une pompe à chaleur posée à même le sol sans socle, engendrant une absence de chauffage dès que la température descend à moins de 3 ou 4 degrés. Il estime que les travaux n'ont pas été achevés.

Il estime que sa demande de condamnation de la société Financo sur le fondement de l'article L. 312-36 du code de la consommation, sa demande d'expertise et de condamnation de la banque à une somme de 3 000 euros de dommages et intérêts sont recevables et ne sont pas nouvelles en appel. Il se prévaut de l'article 566 du code de procédure civile pour soutenir que ces demandes constituent l'accessoire, la conséquence et le complément des demandes formées en première instance.

Il invoque la résolution du contrat d'achat et celle du prêt sur le fondement de pratiques commerciales trompeuses de l'article L. 121-2 du code de la consommation, soutenant que le représentant de la société AFIH a tenu des propos on ne peut plus ambigus à son l'égard en lui faisant croire qu'il n'aurait rien à payer. Il ajoute que son âge et son absence de capital culturel le rendent particulièrement vulnérable face aux pratiques commerciales trompeuses. Il indique que la société Financo semble opérer une confusion entre la notion de dol dont le régime dépend du code civil et celle de pratiques commerciales trompeuses détaillée au sein du code de la consommation et mise en avant au sein de son argumentaire. Il ajoute qu'il se réserve le droit de saisir Madame le Procureur de la République afin de signaler les pratiques commerciales manifestement délictuelles de la société AFIH.

Il met en avant une absence de loyauté contractuelle, telle que prévue à l'article 1104 du code civil, prétend que le commercial a abusé de sa confiance en affirmant qu'il aurait droit à des aides de l'État et que la société AFIH s'occuperait des démarches administratives, en lui faisant signer un contrat de crédit à son insu, en lui faisant remplir une fiche de liaison qui en vérité a été utilisée pour contracter un crédit à son nom. Il rappelle que la société AFIH a effectué un véritable travail de "sagouin" car la pose du matériel n'a pas été finalisée et exécutée dans les règles de l'art. Il évoque un abus de confiance et une manipulation.

Il invoque également un enrichissement sans cause. Il explique que ces pratiques frauduleuses ont été signalées de longue date par les associations de défense des consommateurs qui traquent et recensent les arnaqueurs qui profitent de la vulnérabilité des particuliers pour leur vendre des produits à des prix sensiblement plus élevés que ceux habituellement trouvés sur le marché. Il soutient que la société AFIH a installé une pompe à chaleur de marque AUER, que pendant tout un hiver sa famille a été contrainte de se chauffer grâce à des radiateurs électriques et qu'il a appris que le modèle de pompe à chaleur qui lui a été vendu est proposé à un prix sensiblement plus bas sur le marché. Il estime qu'au regard de tout ce qui précède, il est bien fondé à demander la résolution judiciaire du contrat d'achat avec la société AFIH.

Il indique solliciter la résolution du contrat qui le lie avec la société AFIH, en application de l'article 1227 du code civil, entraînant ainsi la résolution du contrat de crédit affecté et permettant de rendre la société AFIH redevable des sommes éventuellement dues par lui à la banque.

Il estime que c'est à tort que la banque a qualifié le contrat de "prêt personnel", que l'affectation du crédit n'est pas précisée au contrat, que le crédit est exclusivement affecté aux travaux commandés et que les fonds empruntés n'auraient jamais dû être versés avant l'exécution complète et certifiée des travaux, que l'interdépendance entre les deux contrats est manifeste. Il indique que la résolution du contrat principal emporte celle du contrat de crédit. Il souligne n'avoir jamais signé de document attestant de la conformité des travaux, que la responsabilité contractuelle de la société AFIH étant acquise, en raison de ses inexécutions nombreuses, la résolution de ce premier contrat est encourue et qu''il peut demander dès lors indemnisation pour le préjudice subi auprès de la société AFIH et solliciter la résolution du contrat de crédit affecté à ce premier contrat.

Il demande la déchéance du droit aux intérêts du prêteur en reprenant les motifs retenus par le juge. Il estime que la lettre de mise en demeure du 21 mai 2020 ne contient aucun avertissement sur les risques majeurs encourus en violation de l'article L. 312-36 du code de la consommation.

Si la juridiction devait par extraordinaire s'estimer insuffisamment éclairée pour statuer sur sa demande de résolution judiciaire du contrat d'achat, il sollicite, à titre subsidiaire, une expertise judiciaire.

Aux termes de ses dernières conclusions déposées par voie électronique le 26 avril 2023, la société Financo demande à la cour :

- de déclarer M. [V] irrecevable en sa demande de condamnation de la banque à lui payer la somme de 26 769,69 euros sur le fondement de l'article L. 312-36 du code de la consommation, cette demande étant présentée pour la première fois en cause d'appel,

- de le déclarer irrecevable en sa demande d'expertise présentée pour la première fois en cause d'appel,

- de le déclarer irrecevable en sa demande de condamnation de la banque à lui payer une somme de 3 000 euros à titre de dommages et intérêts au titre d'un prétendu préjudice moral et de jouissance, présentée pour la première fois en cause d'appel,

- de la déclarer recevable et bien fondée en ses demandes, fins et conclusions,

- y faisant droit,

- de confirmer le jugement dont appel en toutes ses dispositions,

- à titre subsidiaire, si la cour venait à prononcer la résolution judiciaire des conventions, de condamner M. [V] à lui rembourser le capital emprunté d'un montant de 26 769,69 euros augmenté des intérêts au aux légal à compter de l'arrêt à intervenir, en l'absence de faute de sa part et en toute hypothèse en l'absence de préjudice et de lien de causalité,

- en tout état de cause, de le condamner à lui payer la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens.

Elle rappelle qu'en première instance, M. [V] a uniquement sollicité à titre principal la résolution judiciaire des conventions et la condamnation de la société venderesse à lui payer la somme de 19 459,59 euros en réparation d'un prétendu préjudice économique alors qu'il forme à hauteur d'appel des demandes nouvelles (condamnation à hauteur de la somme de 26 769,69 euros en violation des dispositions de l'article L. 312-36 du code de la consommation, expertise et condamnation à hauteur de 3 000 euros à titre de dommages et intérêts) qui sont irrecevables.

La société Financo soutient que contrairement à ce que prétend M. [V], elle n'a jamais financé une pompe à chaleur mais un chauffe-eau électrique d'une valeur de 2 300 euros, l'isolation extérieure pour un montant de 19 345,16 euros et des menuiseries pour un montant de 5 124,53 euros de sorte que tous les développements relatifs à celle-ci lui sont inopposables et sont manifestement hors sujet.

Elle fait valoir que M. [V] procède par voie d'affirmations au plus pur mépris des règles les plus élémentaires en matière de preuve en énonçant que la société AFIH lui aurait promis des aides étatiques, que de telles promesses pourraient éventuellement caractériser un dol qui pourrait lui-même servir à solliciter la nullité des conventions alors que M. [V] se contente de solliciter la résolution judiciaire. Elle souligne qu'il y a manifestement une confusion de quelques notions élémentaires du droit et que par ailleurs il n'est pas prouvé qu'il n'ait pas perçu des aides de l'Etat même pour un montant inférieur.

Elle indique que si M. [V] prétend qu'il n'avait pas conscience de signer un contrat de crédit, pour autant, l'offre est intitulée "offre de contrat de crédit affecté", la FIPEN mentionne "informations précontractuelles européennes normalisées en matière de crédit aux consommateurs" et elle se demande pourquoi il aurait signé une fiche de dialogue si ce n'est pour obtenir un crédit. Elle ajoute qu'il a signé une attestation de livraison avec demande de financement et que l'intéressé n'explique pas comment il aurait payé l'intégralité de ces prestations, sauf à obtenir le crédit.

Elle fait observer que pour solliciter la résolution judiciaire des conventions, M. [V] s'est contenté de verser aux débats un rapport d'expertise privée non contradictoire lequel ne peut à lui seul emporter la conviction de la cour. Elle ajoute que si en cause d'appel il verse aux débats des devis relatifs à la pompe à chaleur et surtout un procès-verbal de constat du 17 février 2022, ces documents ne portent que sur la pompe à chaleur qui n'a pas été financée par elle.

Elle fait observer que M. [V] ne se plaint pas du bon fonctionnement du chauffe-eau thermodynamique, qu'il ne remet pas non plus en cause l'isolation extérieure de sa maison et la parfaite exécution des prestations de menuiserie et que tout ce qui ressort du rapport d'expertise relève en revanche du service après-vente qui, par définition, est inopposable à la société Financo.

Elle indique que s'il se prétend victime de pratiques commerciales trompeuses, force est de constater que la nullité n'a jamais été sollicitée et que quoi qu'il en soit, on cherchera en vain les man'uvres frauduleuses du vendeur. Elle ajoute que l'action fondée sur un enrichissement sans cause a un caractère subsidiaire et qu'on se demande bien comment une action sur le fondement d'un enrichissement sans cause pourrait prospérer en la matière.

Elle note que M. [V] n'apporte pas la preuve d'une faute du vendeur suffisamment grave pour justifier la résolution judiciaire.

S'agissant du contrat de crédit, elle fait observer qu'il s'est écoulé moins de 2 ans entre le premier impayé non régularisé de janvier 2020 et l'assignation du 24 décembre 2021, que son action est donc recevable et que concernant la déchéance du droit aux intérêts prononcée en première instance, elle ne la remet pas en question. Elle ajoute que la demande formée sur le fondement de l'article L. 312-36 du code de la consommation est mal fondée car la mise en demeure préalable a été régulièrement adressée à l'emprunteur de sorte que la déchéance du terme est régulière. Elle demande à défaut, la résiliation du contrat du fait des impayés.

Si la cour venait à faire application des dispositions du code de la consommation et prononçait la nullité ou la résolution du contrat de crédit par suite de la nullité ou la résolution du contrat de vente, elle rappelle que l'emprunteur doit être condamné à rembourser le montant du capital emprunté et ce indépendamment du fait que les fonds ont été libérés entre les mains du vendeur. Elle conteste toute faute dans la libération des fonds sur la base d'une attestation de livraison dont elle estime qu'elle a bien été signée par M. [V].

Elle note qu'en l'absence de déclaration de créances au passif de la procédure collective du vendeur, la restitution des matériels est impossible. Elle fait état de l'absence de tout préjudice, de tout lien de causalité entre ses prétendues fautes et les prétendus problèmes de service après-vente rencontrés par l'acquéreur.

M. [V] a fait signifier sa déclaration d'appel et ses conclusions à la société AFIH représentée par Maître [R] par actes délivrés les 31 janvier 2023 à personne morale et 15 mars 2023 selon les modalités de l'article 659 du code de procédure civile, laquelle n'a pas constitué avocat.

Pour un plus ample exposé des faits, moyens et prétentions des parties, il est renvoyé aux écritures de celles-ci conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 12 mars 2024 et l'affaire a été appelée à l'audience du 24 avril 2024.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la recevabilité des demandes de M. [V]

A titre liminaire, la cour constate que la société Financo se prévaut d'un contrat de crédit affecté validé entre elle et M. [V] le 21 mai 2019, portant sur la somme de 26 769,69 euros affectée au financement de travaux réalisés par la société AFIH et portant sur l'installation d'un chauffe-eau thermodynamique d'une valeur de 2 300 euros, sur l'isolation extérieure de la maison d'habitation pour un montant de 19 345,16 euros et sur des travaux de menuiseries pour un montant de 5 124,53 euros soit une somme totale de 26 769,69 euros.

Pour se défendre à l'action en paiement exercée contre lui par la société Financo et selon assignation du 24 décembre 2020, M. [V] a attrait en la cause la société AFIH afin d'une part de demander la résolution du contrat signé avec cette société et une indemnisation au regard des malfaçons et désordres affectant la pompe à chaleur installée à son domicile et d'autre part de se voir garanti par cette société de toute condamnation prononcée à son encontre. A hauteur d'appel, il maintient ses demandes, y ajoutant la condamnation de la banque à hauteur de la somme de 26 769,69 euros pour violation des dispositions de l'article L. 312-36 du code de la consommation, une demande d'expertise concernant la pompe à chaleur et une demande de condamnation de la banque à la somme de 3 000 euros à titre de dommages et intérêts.

M. [V] fait donc un lien entre le contrat de vente souscrit avec la société AFIH portant sur une pompe à chaleur et le contrat de crédit affecté au financement de cette installation dont la société Financo poursuit le remboursement.

La société Financo produit les trois devis non contestés validés par M. [V] le 14 mai 2019, signés de sa main et revêtus de la mention "bon pour accord" portant uniquement sur l'installation d'un chauffe-eau thermodynamique (2 300 euros), sur l'isolation extérieure de la maison d'habitation (19 345,16 euros) et sur des travaux de menuiseries (5 124,53 euros) soit une somme totale de 26 769,69 euros. Ce sont bien ces travaux qui ont été financés au moyen du crédit souscrit par M. [V] auprès de la société Financo le 21 mai 2019 selon le crédit affecté produit aux débats. M. [V] ne conteste pas la réalisation de ces travaux à son domicile, ni ne fait état de désordres les concernant et il produit à cet effet les trois factures établies par la société AFIH le 21 août 2019 lesquelles ont toutes été acquittées. Ce sont bien ces travaux qui ont fait l'objet d'un procès-verbal de livraison sans réserve signé par M. [V] le 9 juillet 2019, aux termes duquel il donne l'ordre à la société Financo de débloquer les fonds au profit de la société AFIH. Il est établi que les fonds ont été libérés par virement bancaire en date du 11 juillet 2019.

Si M. [V] produit aux débats une facture émise par la société AFIH le 10 juillet 2019 portant sur une pompe à chaleur au prix de 17 272,44 euros, il est acquis que le crédit dont se prévaut la société Financo validé le 21 mai 2019 n'était pas destiné à financer cette pompe à chaleur mais l'installation d'un chauffe-eau thermodynamique, des travaux d'isolation extérieure et de menuiseries, le montant acquitté par le prêteur entre les mains de la société prestataire correspondant exactement au montant du crédit octroyé et M. [V] n'émettant pas de critique quant à la réalisation de ces travaux.

Le contrat principal et le contrat de crédit dédié à son financement forment une opération commerciale unique au sens de l'article L. 311-1, 11° du code de la consommation. L'unicité de cette opération commerciale s'accompagne d'une interdépendance entre le contrat principal et le crédit qui le finance, une telle interdépendance étant d'ordre public. Elle signifie notamment que l'annulation ou la résolution du contrat principal entraîne de plein droit celle du contrat de crédit accessoire ce que confirme l'article L. 312-55 du code de la consommation.

Si le premier juge a statué sur la demande en recouvrement formée par le prêteur sur la base du crédit validé le 21 mai 2019, en revanche, il a statué sur la demande de résolution, d'indemnisation puis de garantie formée par M. [V] sur la base d'un contrat principal ne pouvant être rattaché au crédit objet du litige.

Selon l'article 70 du code de procédure civile, les demandes reconventionnelles ou additionnelles ne sont recevables que si elles se rattachent aux prétentions originaires par un lien suffisant. Tel n'est pas le cas en l'espèce des demandes de M. [V] formées à l'encontre de la société AFIH suivant assignation du 27 août 2021 et maintenues à hauteur d'appel à savoir sa demande de résolution du contrat de prestation de services conclu entre lui et cette société au regard d'inexécutions contractuelles, sa demande de condamnation de cette société à lui régler la somme de 26 769,69 euros en réparation de son préjudice économique, et à titre subsidiaire, d'être garanti des condamnations prononcées à son encontre.

Il en est de même des demandes d'expertise et de condamnation solidaire de la société Financo et de la société AFIH à lui verser une somme de 3 000 euros au titre de son préjudice de jouissance et de son préjudice moral, formées qui plus est pour la première fois à hauteur d'appel.

Ces demandes devront être déclarées irrecevables tout comme celle visant à obtenir la résolution du contrat de crédit par suite de l'anéantissement du contrat principal. Partant le jugement ayant débouté M. [V] de ses demandes à l'encontre de la société AFIH doit être infirmé.

M. [V] demande pour la première fois, à hauteur d'appel, la condamnation de la société Financo à lui payer la somme de 26 769,69 euros pour non-respect des dispositions de l'article L. 312-36 du code de la consommation. La société Financo invoque l'irrecevabilité de cette prétention nouvelle.

L'article 564 du code de procédure civile rend irrecevables à hauteur d'appel les prétentions nouvelles si ce n'est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l'intervention d'un tiers, ou de la survenance ou de la révélation d'un fait.

Il doit être considéré que la demande d'indemnisation formée par M. [V] pour la première fois en appel tend à faire écarter la demande en paiement du prêteur ayant consenti le crédit à la consommation, et la rend donc recevable au regard du texte susvisé.

Sur la demande en paiement

Le contrat de crédit affecté conclu le 21 mai 2019 est soumis aux dispositions de la loi n° 2010-737 du 1er juillet 2010, de sorte qu'il sera fait application des articles du code de la consommation dans leur rédaction en vigueur après le 1er mai 2011 et leur numérotation postérieure à l'entrée en vigueur de l'ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016.

L'article R. 312-35 du code de la consommation dispose que les actions en paiement à l'occasion de la défaillance de l'emprunteur dans le cadre d'un crédit à la consommation, doivent être engagées devant le tribunal dans les deux ans de l'événement qui leur a donné naissance à peine de forclusion et que cet événement est caractérisé par le premier incident de paiement non régularisé.

La première échéance était exigible le 19 décembre 2019 et M. [V] n'a jamais réglé la moindre somme au titre du crédit. En assignant le 24 décembre 2020, soit moins de deux années après ce premier impayé, la société Financo est recevable en son action, sans que M. [V] n'émette aucune contestation à ce sujet.

La société Financo demande confirmation du jugement en ce qu'il a condamné M. [V] à lui payer la somme de 26 769,69 euros correspondant au capital prêté assortie des intérêts au taux légal à compter du 30 juillet 2020 sans majoration légale. M. [V] n'émet aucune critique quant à ce chef de condamnation de sorte qu'il convient de le confirmer.

M. [V] invoque une violation de l'article L. 312-36 du code de la consommation devant conduire à la condamnation de la banque à des dommages et intérêts d'un montant égal à sa condamnation.

Aux termes de l'article L. 312-36 du code de la consommation, dès le premier manquement de l'emprunteur à son obligation de rembourser, le prêteur informe celui-ci, sur support papier ou tout autre support durable des risques qu'il encourt au titre des articles L. 312-39 et L. 312-40 ainsi que, le cas échéant, au titre de l'article L. 141-3 du code des assurances.

La première échéance du crédit était exigible le 19 décembre 2019 et l'historique de compte démontre que M. [V] n'a jamais réglé la moindre somme au titre du crédit. Préalablement à la déchéance du terme du contrat suivant courrier du 25 juillet 2020, la société Financo lui a adressé un courrier préalable de mise en demeure le 21 mai 2020 lui enjoignant de régler la somme de 1 528,75 euros en principal correspondant aux échéances impayées.

S'il n'est pas justifié de l'envoi d'un courrier d'alerte en bonne et due forme dès le premier manquement de l'emprunteur, force est de constater que le texte susvisé n'est pas sanctionné par le code de la consommation qui ne prévoit pas de sanction particulière ni civile ni pénale. M. [V] ne démontre aucun préjudice en lien avec le non-respect de cette disposition, alors qu'il aurait pu, dès réception du courrier de mise en demeure du mois de mai 2020, régulariser sa situation, ce qu'il n'a pas fait, de sorte qu'il doit être débouté de sa demande d'indemnisation à ce titre.

Il n'y a pas lieu de faire droit à la demande de désinscription de M. [V] du FICP.

Le jugement doit être confirmé en ses dispositions relatives aux dépens et aux frais irrépétibles.

M. [V] qui succombe doit supporter la charge des dépens d'appel. L'équité commande de ne pas faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Statuant par arrêt réputé contradictoire en dernier ressort

Confirme le jugement sauf en ce qu'il a débouté M. [W] [V] de ses demandes en résolution des contrats, de condamnation de la société l'Agence Française pour l'Isolation de l'Habitat à des dommages et intérêts et de sa demande de garantie ;

Statuant à nouveau et y ajoutant,

Déclare irrecevables les demandes formées par M. [W] [V] en résolution des contrats de vente et de crédit, en condamnation de la société l'Agence Française pour l'Isolation de l'Habitat à lui régler la somme de 26 769,69 euros en réparation de son préjudice économique et à le garantir des condamnations prononcées à son encontre, et de ses demandes d'expertise et de condamnation solidaire des sociétés Financo et l'Agence Française pour l'Isolation de l'Habitat à lui verser une somme de 3 000 euros au titre de son préjudice de jouissance et de son préjudice moral ;

Déclare la société Financo recevable en son action ;

Déclare recevable la demande de M. [W] [V] tendant à la condamnation de la société Financo à lui payer la somme de 26 769,69 euros ;

Déboute M. [W] [V] de ses demandes ;

Condamne M. [W] [V] aux dépens d'appel ;

Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile ;

Rejette toute demande plus ample ou contraire.

La greffière La présidente


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 4 - chambre 9 - a
Numéro d'arrêt : 22/19536
Date de la décision : 06/06/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 13/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-06-06;22.19536 ?
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