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30/05/2024 | FRANCE | N°19/17350

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 4 - chambre 9 - a, 30 mai 2024, 19/17350


Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 9 - A



ARRÊT DU 30 MAI 2024



(n° , 17 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 19/17350 - N° Portalis 35L7-V-B7D-CAUFR



Décision déférée à la Cour : Jugement du 31 juillet 2019 - Tribunal d'Instance de PARIS - RG n° 11-17-02-0041





APPELANTE



La société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE, société anony

me à conseil d'administration agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège, venant aux droits de la société SOLFINEA ancien...

Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 9 - A

ARRÊT DU 30 MAI 2024

(n° , 17 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 19/17350 - N° Portalis 35L7-V-B7D-CAUFR

Décision déférée à la Cour : Jugement du 31 juillet 2019 - Tribunal d'Instance de PARIS - RG n° 11-17-02-0041

APPELANTE

La société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE, société anonyme à conseil d'administration agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège, venant aux droits de la société SOLFINEA anciennement dénommée BANQUE SOLFEA selon acte de cession edu 28 février 2017

N° SIRET : 542 097 902 04319

[Adresse 1]

[Localité 5]

représentée et assistée de Me Sébastien MENDES GIL de la SELAS CLOIX & MENDES-GIL, avocat au barreau de PARIS, toque : P0173

INTIMÉS

Madame [B] [E]

née le 26 Janvier 1965 à [Localité 7] (56)

[Adresse 3]

[Localité 4]

représentée par Me Schmouel HABIB de la SELEURL HERACLES, avocat au barreau de PARIS, toque : E1511

Maître [T] [Z] en qualité de liquidateur judiciaire de la société FRANCE SOLAIRE ENERGIES (SARL)

[Adresse 2]

[Localité 6]

DÉFAILLANTE

PARTIE INTERVENANTE

La SELARL [W] [U], représentée par Maître [W] [U] en qualité de mandataire ad hoc de la société FRANCE SOLAIRE ENERGIES (SARL)

[Adresse 2]

[Adresse 2]

[Localité 6]

DÉFAILLANTE

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 27 mars 2024, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposé, devant Mme Laurence ARBELLOT, Conseillère, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Mme Muriel DURAND, Présidente de chambre

Mme Laurence ARBELLOT, Conseillère

Mme Sophie COULIBEUF, Conseillère

Greffière, lors des débats : Mme Camille LEPAGE

ARRÊT :

- RÉPUTÉ CONTRADICTOIRE

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Mme Muriel DURAND, Présidente et par Mme Camille LEPAGE, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Le 11 juillet 2012, à la suite d'un démarchage à domicile, Mme [B] [E] a fait l'acquisition auprès de la société France Solaire Energies, d'une installation photovoltaïque de production d'électricité au prix de 23 900 euros.

Le même jour, elle a souscrit auprès de la société Banque Solfea aux droits de laquelle vient la société BNP Paribas personal finance ci-après dénommée société BNPPPF, un contrat de crédit affecté au financement de cette installation pour un montant de 23 900 euros remboursable en 144 mensualités de 244 euros chacune hors assurance au taux d'intérêts nominal conventionnel de 5,79 % l'an et au TAEG de 5,95 %.

Le 9 août 2012, Mme [E] a signé une attestation de fin de travaux et a demandé le déblocage des fonds. L'installation a été raccordée au réseau électrique et Mme [E] bénéficie actuellement de la revente de l'énergie produite par son équipement.

Par jugement du tribunal de commerce d'Évry en date du 21 septembre 2015, la société France Solaire Energies a été placée en liquidation judiciaire et Maître [T] [Z] désignée en qualité de mandataire liquidateur. La procédure a été clôturée pour insuffisance d'actifs le 19 novembre 2021 et Maître [W] [U] désigné en qualité de mandataire avec pour mission de poursuivre les instances en cours et de répartir le cas échéant les sommes perçues à l'issue de celles-ci.

Saisi le 21 février 2017 par Mme [E] d'une demande tendant principalement à l'annulation des contrats de vente et de crédit affecté, le tribunal d'instance de Paris par un jugement réputé contradictoire rendu le 31 juillet 2019 auquel il convient de se reporter, a :

- donné acte à la société BNPPPF de son intervention aux droits de la Banque Solfea selon acte de cession de créances du 28 février 2017,

- déclaré recevables les demandes de Mme [E],

- prononcé l'annulation du contrat de vente et constaté en conséquence l'annulation du contrat de crédit,

- dit que Mme [E] est déchargée de son obligation de remboursement du capital restant dû à compter de ce jour à la société BNPPPF,

- condamné la société BNPPPF à rembourser à Mme [E] les sommes versées au titre du contrat de crédit,

- condamné la société BNPPPF à lui payer la somme de 21 352,91 euros correspondant aux mensualités perçues à la date du 5 avril 2019,

- débouté les parties de leurs autres demandes,

- condamne la société BNPPPF aux dépens.

Les demandes en annulation ont été déclarées recevables nonobstant la liquidation judiciaire du vendeur, en raison de l'absence de toute demande en paiement.

Le tribunal a considéré que le bon de commande était entaché d'irrégularités en ce qu'il ne mentionnait pas la marque des différents équipements et leurs caractéristiques techniques précises, notamment celles des panneaux et de l'onduleur, le prix unitaire des différents biens et prestations à la charge de la société prestataire, le nom écrit de manière lisible du démarcheur, le délai de livraison et de pose des différents éléments. Il a relevé que ces manquements étaient de nature à priver le consommateur de toute possibilité de s'assurer précisément du contenu des obligations du vendeur et donc de la portée et la pertinence de son investissement ainsi que de procéder à toute comparaison de prix et qu'était caractérisée une violation des dispositions de l'article L. 121-23 du code de la consommation.

Il a estimé que le fait de payer le prix, de réceptionner l'installation sans réserve, d'utiliser l'équipement pendant plus de cinq années, ne pouvait s'analyser en une confirmation tacite de l'obligation entachée de nullité. Il a constaté la nullité du contrat de crédit.

Il a retenu qu'en versant les fonds sans procéder préalablement auprès du vendeur et de l'emprunteur aux vérifications qui lui auraient permis de constater que le contrat de démarchage à domicile était affecté d'une cause de nullité, le prêteur avait commis une négligence fautive de nature délictuelle et qu'il en avait découlé pour l'emprunteur un préjudice non pas de perte de chance, mais un préjudice actuel, certain et en lien avec la faute commise, caractérisé par le fait que l'annulation des contrats après le déblocage fautif des fonds entre les mains du vendeur avait permis la réalisation d'une opération commerciale hasardeuse et avait placé le consommateur dans la situation de devoir restituer le capital emprunté sans perspective de pouvoir se retourner contre le fournisseur qui, lui-même, faisait l'objet d'une procédure de liquidation judiciaire. Il a noté que l'enrichissement n'était pas dépourvu de cause puisqu'il trouvait son origine dans la faute de la banque.

Par déclaration enregistrée le 3 septembre 2019, la société BNP Paribas personal finance venant aux droits de la société Banque Solfea a interjeté appel de cette décision.

Aux termes de ses dernières conclusions numéro 3 remises le 9 janvier 2024, l'appelante demande à la cour :

- d'infirmer le jugement en ce qu'il a déclaré recevables les demandes, en ce qu'il a prononcé la nullité des contrats, en ce qu'il a dit que Mme [E] était déchargée de son obligation de remboursement du capital restant dû à compter du jugement, en ce qu'il l'a condamnée à lui rembourser les sommes versées au jour du jugement, en ce qu'il l'a condamnée à lui payer la somme de 21 352,91 euros correspondant aux mensualités perçues à la date du 5 avril 2019, en ce qu'il l'a déboutée de ses demandes, en ce compris sa demande subsidiaire, en cas de nullité des contrats, visant à la condamnation de Mme [E] à lui régler la somme de 23 900 euros en restitution du capital prêté, sa demande plus subsidiaire visant à la condamnation de Mme [E] à lui régler la somme de 23 900 euros correspondant au capital perdu à titre de dommages et intérêts en réparation de sa légèreté blâmable, sa demande visant à voir enjoindre à Mme [E] de restituer l'installation à ses frais, sa demande de compensation des créances réciproques, sa demande de condamnation au paiement de la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, et sa demande formée au titre des dépens, en ce qu'il l'a condamnée aux dépens,

- statuant à nouveau sur les chefs contestés, à titre principal,

- à défaut, de déclarer irrecevable la demande en nullité des contrats, de dire et juger à tout le moins que les demandes de nullité des contrats ne sont pas fondées et de les rejeter ainsi que la demande en restitution des sommes réglées,

- subsidiairement, en cas de nullité des contrats, de déclarer irrecevable la demande visant à être déchargée de l'obligation de restituer le capital prêté, à tout le moins de la rejeter et de condamner Mme [E] à lui régler la somme de 23 900 euros en restitution du capital prêté,

- en tout état de cause, de déclarer irrecevable la demande visant à la privation de sa créance et à tout le moins, de la rejeter,

- de limiter la condamnation au titre des mensualités à restituer à hauteur du montant effectif des mensualités versées,

- très subsidiairement, de limiter la réparation qui serait due eu égard au préjudice effectivement subi par l'emprunteur à charge pour lui de l'établir et eu égard à la faute de l'emprunteur ayant concouru à son propre préjudice, de limiter, en conséquence la décharge à concurrence du préjudice subi à charge pour Mme [E] d'en justifier,

- à titre infiniment subsidiaire, en cas de privation de la créance de la banque, de condamner Mme [E] à lui payer la somme de 23 900 euros correspondant au capital perdu à titre de dommages et intérêts en réparation de sa légèreté blâmable, de lui enjoindre de restituer, à ses frais, le matériel installé chez elle à la Selarl [W][U], en qualité de mandataire ad hoc de la société France Solaire Energies, dans un délai de 15 jours à compter de la signification de l'arrêt, ainsi que les revenus perçus au titre de la revente d'électricité, et de dire et juger qu'à défaut de restitution, elle restera tenue du remboursement du capital prêté et subsidiairement, de la priver de sa créance en restitution des sommes réglées du fait de sa légèreté blâmable,

- de la débouter de toutes autres demandes, fins et conclusions formées à son encontre,

- d'ordonner le cas échéant la compensation des créances réciproques à due concurrence,

- de débouter Mme [E] de sa demande formée au titre de l'article 700 du code de procédure civile et au titre des dépens,

- en tout état de cause, de la condamner à lui verser la somme de 3 000 euros au titre des frais irrépétibles d'appel de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens de l'instance avec distraction au profit de la Selas Cloix & Mendes-Gil.

Elle estime être recevable et bien fondée à appeler en intervention forcée à la présente procédure, la Selarl [W][U], en qualité de mandataire ad hoc de la société France Solaire Énergies.

Visant l'article L. 622-21 du code de commerce, l'appelante soutient que les demandes d'annulation des contrats litigieux sont irrecevables en l'absence de déclaration de créance à la procédure collective de la société France Solaire Energies.

Elle poursuit l'irrecevabilité des demandes en annulation faisant état de ce que sur le fondement de l'article 1134 du code civil, l'action ne peut avoir pour objet de remettre en cause - a posteriori - un contrat au-delà du délai de rétractation pour des motifs autres que la cause de nullité invoquée, alors que la partie l'invoquant avait en réalité confirmé la cause de nullité relative.

Elle rappelle que Mme [E] bénéficie d'une installation parfaitement fonctionnelle et qu'elle revend de l'électricité.

Elle invoque le caractère irrecevable, à tout le moins non fondé du grief tiré de la nullité du contrat de vente entraînant la nullité du contrat de crédit sur le fondement d'une irrégularité formelle du bon de commande au regard des dispositions de l'article L. 121-23 du code de la consommation.

Elle prétend que le bon de commande est conforme aux dispositions de l'article L. 121-23 du code de la consommation et que seule une omission peut entraîner la nullité et pas une simple imprécision. Elle plaide pour une interprétation stricte des textes.

Elle indique que la description du matériel vendu était suffisante, que d'ailleurs Mme [E] a bénéficié de son installation pendant plusieurs années sans émettre de grief, que la mention du "Prix global à payer" est parfaitement suffisante, que toutes les mentions relatives au crédit ont été portées à la connaissance de l'acquéreur, que la remise d'un planning détaillé de la réalisation de la prestation n'est pas exigée à peine de nullité, qu'il n'est pas possible de mentionner le délai de raccordement, puisque celui-ci dépend d'un tiers, ERDF, le vendeur ne pouvant s'engager pour le compte de ce dernier sur les délais.

Elle note qu'aux termes de son jugement, le tribunal a considéré que le bon de commande devrait être annulé au motif que le nom du démarcheur "ne serait pas écrit de manière lisible", or elle note que le nom du démarcheur figure dans la case "Conseiller" et qu'il appartient à Mme [E] de produire l'original du bon de commande.

Elle soutient que le bordereau de rétractation est parfaitement conforme, qu'il comporte des pointillés permettant son découpage et séparant de manière distincte le bordereau du bon de commande de sorte que le découpage n'entraîne la suppression d'aucune mention de celui-ci. Elle ajoute que ce grief n'est pas sanctionné par la nullité.

Elle conteste les affirmations de Mme [E] selon lesquelles le vendeur l'aurait manipulée concernant la rentabilité de l'installation, en lui faisant croire à de faux partenariats et en lui indiquant que l'installation serait entièrement autofinancée. Elle souligne que l'intéressée ne produit aucune pièce justificative de ses dires, dans un contexte où elle a assigné à la limite de l'expiration du délai de prescription quinquennale. Elle note que la réticence dolosive d'informations suppose d'établir non seulement les man'uvres constitutives d'une réticence d'informations, mais aussi l'erreur qui en aurait résulté alors que Mme [E] n'établit ni l'un, ni l'autre. Enfin, elle ajoute qu'elle n'établit pas la rentabilité effective de son installation.

Elle estime que sous couvert du moyen tiré de l'absence de cause, en réalité, l'acquéreur soulève le moyen de la lésion à savoir l'absence de prestations équivalentes ou équilibrées et soutient en réalité qu'il a payé un prix trop élevé au titre de l'installation par rapport aux revenus qu'il peut escompter retirer de la production. Elle rappelle que la lésion n'est pas une cause de nullité en droit français, sauf par dérogation au titre de certaines catégories de contrats spécifiques et indique que la cause du paiement par l'acquéreur du prix de vente est constituée par la fourniture de l'installation photovoltaïque.

Elle soutient que Mme [E] a confirmé l'acte entaché de nullité, les dispositions de l'article L. 121-23 du code de la consommation ayant été reproduites au bon de commande, en acceptant la livraison du matériel et son installation, en signant l'attestation de fin de travaux, en donnant son accord au raccordement de la centrale au réseau ERDF, en concluant un contrat de vente d'électricité, en vendant l'électricité produite ainsi qu'en honorant les échéances du prêt litigieux.

Elle rappelle que le maintien du contrat de vente entraîne le maintien du contrat de crédit. Elle précise que l'intéressée a réglé 126 mensualités de 270,29 euros, soit la somme de 34 056,54 euros.

Elle conteste la nullité du contrat de crédit motif pris de ce que la banque n'aurait pas fait parvenir son accord dans le délai de 7 jours prévu par l'article L. 311-13 du code de la consommation alors que le versement des fonds vaut agrément et que Mme [E] a remboursé les échéances du crédit.

En cas d'annulation des contrats, elle conteste avoir commis une faute et sollicite en conséquence les restitutions consécutives à la nullité.

Elle conteste toute faute dans la vérification de la régularité du bon de commande et rappelle qu'il n'appartenait pas à la banque de s'assurer de sa conformité, ou dans le déblocage des fonds au vu d'une attestation de fin de travaux, valant mandat, signée sans réserve prouvant l'exécution du contrat. Elle observe que Mme [E] ne justifie d'aucun préjudice susceptible de fonder l'engagement de la responsabilité de la banque. Elle rappelle que la Cour de cassation a elle-même jugé qu'il ne peut être demandé au prêteur de s'assurer de la mise en service de l'installation.

A titre subsidiaire, si la cour devait estimer qu'un préjudice a été subi et que le lien de causalité est caractérisé, elle demande de limiter la condamnation à hauteur du préjudice effectivement subi en lien de causalité avec la faute opérée, à savoir la part de la prestation qui n'aurait pas été achevée, à charge pour l'acquéreur d'en justifier et de prendre en considération la limitation de responsabilité liée à la signature fautive de l'attestation et demande de versement des fonds prêtés, ainsi qu'à l'obstruction au raccordement.

Elle s'estime bien fondée à solliciter que le jugement soit infirmé en ce qu'il a condamné la banque à restituer les mensualités réglées à hauteur de la somme de 21 652,91 euros alors que l'emprunteur n'a réglé que la somme de 19 731,17 euros.

Elle indique qu'il convient donc d'en tenir compte dans le calcul des restitutions à opérer entre la société France Solaire Energies et l'acquéreur et entre le prêteur et l'emprunteur, du fait que le matériel ne sera jamais repris par le mandataire liquidateur et que manifestement, l'acquéreur va conserver le matériel dont aucun dysfonctionnement n'est pas ailleurs établi, et l'utiliser.

Très subsidiairement, en cas de privation du capital prêté, elle demande qu'il soit enjoint à l'acquéreur d'avoir à opérer la dépose du matériel et son transport à ses frais dans les locaux de la procédure collective afin d'empêcher toute situation d'enrichissement sans cause, outre la restitution des revenus perçus au titre de la revente d'électricité. Elle demande en outre la condamnation de Mme [E] au paiement de dommages et intérêts en raison d'une légèreté blâmable liée à la signature de l'attestation de fin de travaux.

Elle estime que les autres demandes de dommages et intérêts liés à l'absence d'accréditation du vendeur à distribuer des crédits, à la participation de la banque au dol de son prescripteur et au manquement de la banque à ses obligations de dispensateur de crédit ne sont pas fondées et conduiraient à une double indemnisation. Elle rappelle que c'est à l'employeur du personnel formé qu'il appartient de produire l'attestation de formation aux fins de contrôle et donc à la société venderesse, que l'établissement de crédit n'a pas de devoir de mise en garde ou de conseil concernant l'opportunité de l'opération principale envisagée, qu'il n'est pas justifié que des plaintes auraient été émises avant même la date où Mme [E] a contracté et qu'elle en aurait eu connaissance. Elle conteste avoir été tenue à une obligation de mise en garde en l'absence de risque d'endettement.

Elle affirme avoir remis la fiche d'informations contractuelles à Mme [E] comme en atteste la clause du contrat par laquelle elle reconnaît sa remise.

Elle estime que le préjudice financier et de trouble de jouissance et le préjudice moral ne sont pas démontrés.

Aux termes de ses dernières conclusions remises le 9 janvier 2024, Mme [E] demande à la cour :

- de confirmer le jugement en ce qu'il a déclaré recevables ses demandes, prononcé la nullité des contrats, dit qu'elle est déchargée de son obligation de remboursement du capital restant dû à compter du jugement, condamné la société BNPPPF à lui rembourser les sommes que cette dernière lui a versées au jour du jugement, condamné la société BNPPPF à lui payer la somme de 21 352,91 euros correspondant aux mensualités perçues à la date du 5 avril 2019, condamné la société BNPPPF aux dépens,

- de l'infirmer pour le surplus et statuant à nouveau,

- de débouter la société BNPPF de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,

- et partant, d'ordonner le remboursement par la société BNPPPF des sommes qui lui ont été versées par elle jusqu'au jour de l'arrêt à intervenir, outre les mensualités postérieures acquittées,

- à titre subsidiaire, de condamner la société BNPPPF à lui verser la somme de 11 950 euros à titre de dommages et intérêts, du fait de la négligence fautive de la banque,

- et statuant à nouveau, de condamner la société BNPPPF à lui verser les sommes de 3 000 euros au titre de son préjudice financier et du trouble de jouissance et de 3 000 euros au titre de son préjudice moral,

- en tout état de cause, de la condamner à lui payer la somme de 3 000 au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens.

A titre liminaire et au visa de l'article L. 621-40-1 du code de commerce, elle indique que son action tend à l'annulation du contrat conclu avec la société France Solaire Energies et non à la condamnation de celle-ci au paiement de quelque somme que ce soit, de sorte qu'elle est recevable sans avoir besoin de déclarer sa créance à la procédure collective du vendeur.

A titre principal, elle estime que le bon de commande n'est pas conforme aux dispositions des articles L. 121-23 à L. 121-25 du code de la consommation notamment en ce qui concerne la désignation et les caractéristiques du matériel promis à défaut de mention de la marque, du nombre, du modèle et des références des panneaux, de leur puissance unitaire, de la dimension, du poids, de l'aspect, de la couleur des panneaux, du type de cellules, et s'agissant de l'onduleur, de la marque, du modèle, des références, de la performance, de la dimension, du poids, comme l'ensemble des autres matériels faisant partie de l'installation (coffrets de protection, écran sous toiture, connectiques, clips de sécurité, câbles'). Elle déplore que rien ne soit indiqué concernant les modalités de pose, l'impact visuel, les délais de livraison et de mise en service.

Elle note qu'aucun plan technique n'a été communiqué avec le bon de commande, alors même que l'orientation des panneaux détermine le rendement de l'installation et permet de donner une information objectivement concrète et précise aux consommateurs.

Elle estime que le contrat de vente encourt également une annulation à défaut de comporter toutes les indications relatives aux conditions de financement avec un taux nominal non renseigné, une absence de coût total de l'emprunt et le détail du coût de l'installation.

Elle prétend que le bordereau de rétractation ne peut être facilement détaché sans amputer le contrat d'éléments importants à savoir la signature des parties.

Elle fait également valoir que le bon de commande doit être annulé en raison de réticences dolsiveos et de man'uvres dolosives du démarcheur ayant vicié son consentement sur le fondement des articles 1130 et 1137 du code civil. Elle dénonce ne pas avoir été renseignée sur les caractéristiques essentielles des matériels, affirme que le démarcheur a invoqué de faux partenariats avec la société EDF afin de pénétrer son habitation et a formulé une présentation fallacieuse de la rentabilité de l'installation et une fausse promesse d'autofinancement. Elle déplore une présentation de l'ensemble contractuel en une simple candidature sans engagement.

Au visa des articles L. 311-1 et L. 311-32 du code de la consommation, elle rappelle que la nullité du contrat principal entraîne la nullité du contrat de crédit affecté.

Elle soulève également la nullité du contrat de crédit pour non-respect du délai de 7 jours prévu à l'article L. 311-13 puisque selon elle le contrat a été signé le 11 juillet 2012 et l'agrément donné le 27 juillet 2012.

Elle conteste toute confirmation de l'acte entaché de nullité en relevant que si les conditions générales de vente reproduisent effectivement les articles L. 121-23 à L. 121-26 du code de la consommation, sa ratification qu'elle conteste ne serait limitée qu'aux nullités relatives à l'inobservation des articles précités. Elle fait observer que d'autres causes de nullités sont invoquées qui trouvent leur origine dans des dispositions du code de la consommation qui ne figurent pas sur le bon de commande à savoir l'article L. 313-1 du code de la consommation qui n'est aucunement reproduit aux conditions générales de vente.

Elle invoque des fautes de la banque. Elle soutient que la banque est tenue de vérifier la régularité du contrat principal, qu'elle a commis une faute en n'y procédant pas et en finançant un contrat nul. Elle ajoute qu'elle a commis une faute en délivrant les fonds sans s'assurer que le vendeur avait bien exécuté son obligation, ce qui le prive de sa créance de restitution. Elle dénonce le fait que l'étude de la faisabilité de l'installation n'ait jamais été effectuée, ni même formalisée et que la banque n'a pas attendu l'achèvement complet des travaux avec mise en service de l'installation. Elle dénie le droit à la banque de se prévaloir de l'attestation de fin de travaux préremplie et peu précise pour rendre compte de la complexité de l'opération financée qui portait sur la livraison et l'installation des panneaux photovoltaïques mais aussi sur l'obtention de l'attestation de conformité photovoltaïque du Consuel, l'obtention du contrat d'obligation d'achat ERDF et des frais de raccordement ERDF.

En raison de l'anéantissement des contrats, elle réclame les sommes versées au titre du remboursement du contrat de crédit, et ce jusqu'au jour de la décision à intervenir, outre les mensualités postérieures acquittées dont elle soutient qu'elles doivent lui être remboursées par la banque, avec intérêts au taux légal à compter de l'arrêt à intervenir.

Elle indique que si par extraordinaire la cour décidait de ne pas faire droit à cette dernière demande, elle est fondée à demander la condamnation de la banque à lui payer la somme de 11 950 euros correspondant à la moitié du capital emprunté, à titre de dommages et intérêts, au titre de la négligence fautive de la banque, car les fautes décrites lui causent nécessairement un lourd préjudice, puisqu'elle doit faire face à une situation financière compliquée.

Elle fait état d'un préjudice économique, d'un trouble de jouissance et d'un préjudice moral.

La Selarl [W] [U], mandataire ad hoc de la société France Solaire Energies a été attraite en la cause par acte du 21 mars 2022 délivré à personne morale à la demande de la société BNPPPF. Cet acte contenait la déclaration d'appel ainsi que les conclusions numéro 2 de la société appelante. La Selarl [W] [U] n'a pas constitué avocat, étant précisé que la société BNPPPF lui a signifié son dernier jeu de conclusions par acte remis à domicile le 11 janvier 2024.

Pour un plus ample exposé des faits, moyens et prétentions des parties, il est renvoyé aux écritures de celles-ci conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 12 mars 2024 et l'affaire a été appelée à l'audience du 27 mars 2024.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Il résulte du dernier alinéa de l'article 954 du code de procédure civile que la partie qui ne conclut pas ou qui, sans énoncer de nouveaux moyens, demande la confirmation du jugement est réputée s'en approprier les motifs.

A titre liminaire, la cour constate :

- que n'est pas contestée l'intervention forcée à la présente instance de la Selarl [W] [U], en qualité de mandataire ad hoc de la société France Solaire Energies, ni la disposition du jugement ayant donné acte à la société BNPPPF de son intervention aux droits de la Banque Solfea selon acte de cession de créances du 28 février 2017,

- que le contrat de vente conclu le 11 juillet 2012 entre la société France Solaire Energies et Mme [E] est soumis aux dispositions des articles L. 121-21 et suivants du code de la consommation, dans leur rédaction en vigueur au jour du contrat issue de la loi n° 93-949 du 26 juillet 1993, dès lors qu'il a été conclu dans le cadre d'un démarchage à domicile,

- que le contrat de crédit affecté conclu le même jour entre Mme [E] et la société Banque Solfea est soumis aux dispositions de la loi n° 2010-737 du 1er juillet 2010, de sorte qu'il sera fait application des articles du code de la consommation dans leur rédaction en vigueur après le 1er mai 2011 et leur numérotation antérieure à l'entrée en vigueur de l'ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016,

- qu'il convient de faire application des dispositions du code civil en leur version antérieure à l'entrée en vigueur au 1er octobre 2016 de l'ordonnance du 10 février 2016 portant réforme du droit des contrats.

Sur les fins de non-recevoir

Si la société BNPPPF soulève l'irrecevabilité ou à tout le moins le caractère infondé du grief tiré de la nullité du contrat de vente entraînant la nullité du contrat de crédit sur le fondement d'une irrégularité formelle du bon de commande au regard des dispositions de l'article L. 121-23 du code de la consommation, elle ne formule en réalité aucune fin de non-recevoir à ce titre, ne proposant aucun fondement juridique ni n'expliquant cette irrecevabilité de sorte qu'il ne sera pas statué spécifiquement sur ce point.

Il en est de même de la fin de non-recevoir visant à voir déclarer irrecevables les demandes visant à la voir privée de sa créance de restitution.

Sur la fin de non-recevoir pour défaut de déclaration de la créance au passif de la procédure collective de la société France Solaire Energies

L'appelante invoque l'irrecevabilité des demandes en l'absence de déclaration de créance à la procédure collective de la société France Solaire Energies, estimant que les demandes, introduites tendent indirectement au paiement d'une somme d'argent et que la nullité des contrats implique nécessairement une remise en état antérieur donc la restitution du prix de vente et la dépose des panneaux.

Selon l'article L. 622-21 du code de commerce, le jugement d'ouverture d'une procédure de liquidation judiciaire interrompt ou interdit toute action en justice tendant à la condamnation du débiteur au paiement d'une somme d'argent ou à la résolution d'un contrat pour défaut de paiement d'une somme d'argent. L'article L. 622-22 prévoit que les instances en cours sont interrompues jusqu'à que le créancier poursuivant ait procédé à la déclaration de sa créance.

Si la société France Solaire Energies fait l'objet d'une procédure de liquidation judiciaire clôturée pour insuffisance d'actifs, force est de constater que Mme [E] n'a formé aucune demande de condamnation pécuniaire à l'encontre de celle-ci, mais bien une demande de nullité du contrat de vente et du contrat de crédit prononcée par le premier juge et discutée à hauteur d'appel, peu importe que cette action soit susceptible d'entraîner des restitutions.

L'absence de déclaration de créance au passif de la procédure collective de la société France Solaire Energies par Mme [E] est donc indifférente à la recevabilité de son action à l'encontre de cette société.

Le jugement ayant rejeté cette fin de non-recevoir doit être confirmé.

Sur la fin de non-recevoir soulevée sur le fondement de l'article 1134 du code civil

La société BNPPPF se fonde dans ses écritures sur l'article 1134 du code civil pour invoquer le caractère irrecevable et à tout le moins infondé de la demande de nullité des contrats, faisant état du caractère exceptionnel de la remise en cause d'un contrat par une partie qui ne doit pas agir de mauvaise foi.

Ce faisant, l'appelante n'explique pas en quoi le non-respect des dispositions de l'article 1134 du code civil en leur version applicable en la cause viendrait fonder une irrecevabilité des demandes formulées.

Il s'ensuit qu'aucune irrecevabilité n'est encourue de ce chef et que la fin de non-recevoir formée à ce titre en cause d'appel doit être rejetée.

Sur la demande de nullité du contrat de vente

Sur le moyen tiré du non-respect du formalisme contractuel

L'article L. 121-23 dispose : "Les opérations visées à l'article L. 121-21 doivent faire l'objet d'un contrat dont un exemplaire doit être remis au client au moment de la conclusion de ce contrat et comporter, à peine de nullité, les mentions suivantes :

1° Noms du fournisseur et du démarcheur ;

2° Adresse du fournisseur ;

3° Adresse du lieu de conclusion du contrat ;

4° Désignation précise de la nature et des caractéristiques des biens offerts ou des services proposés ;

5° Conditions d'exécution du contrat, notamment les modalités et le délai de livraison des biens, ou d'exécution de la prestation de services ;

6° Prix global à payer et modalités de paiement ; en cas de vente à tempérament ou de vente à crédit, les formes exigées par la réglementation sur la vente à crédit, ainsi que le taux nominal de l'intérêt et le taux effectif global de l'intérêt déterminé dans les conditions prévues à l'article L. 313-1 ;

7° Faculté de renonciation prévue à l'article L. 121-25, ainsi que les conditions d'exercice de cette faculté et, de façon apparente, le texte intégral des articles L. 121-23, L. 121-24, L. 121-25 et L. 121-26".

Selon l'article L. 121-24 du même code, le contrat visé à l'article L. 121-23 doit comprendre un formulaire détachable destiné à faciliter l'exercice de la faculté de renonciation dans les conditions prévues à l'article L. 121-25.

L'article L. 121-25 alinéa 1 du même code prévoit que dans les sept jours, jours fériés compris, à compter de la commande ou de l'engagement d'achat, le client a la faculté d'y renoncer par lettre recommandée avec accusé de réception.

Les articles R. 121-3 et R. 121-5 précisent que le formulaire détachable destiné à faciliter l'exercice de la faculté de renonciation prévu à l'article L. 121-25 fait partie de l'exemplaire du contrat laissé au client. Il doit pouvoir en être facilement séparé.

En application de l'article 9 du code de procédure civile, il incombe à chaque partie de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de sa prétention.

La copie en couleur du bon de commande tel que produit par Mme [E] décrit l'objet de la vente comme suit :

"1 Installation solaire photovoltaïque d'une puissance globale de 2 200 Wc comprenant :

12 Panneaux photovoltaïques certifiés NF EN 61215 Classe II

Système intégré au bâti - Onduleur - Coffret de protection - Disjoncteur - Parafoudre

forfait installation de l'ensemble (à l'exclusion d'éventuelles tranchées)

démarches administratives (mairie, région, EDF, ERDF, Consuel) Assurance RC et PE

la mise en service, le Consuel, et le tirage des câbles entre le compteur et l'onduleur sont inclus

+ Ballon eau chaude thermodynamique

TOTAL TTC 23 900 €".

A hauteur d'appel, Mme [E] conteste les points 4, 5, 6 et 7.

Le coût global de l'installation est précisé pour 23 900 euros TTC sans que le prix unitaire des biens et prestations ou encore celui de l'installation ou de la main d''uvre ne soit exigé à peine de nullité.

Les modalités de financement au moyen d'un crédit souscrit auprès de Solfea sont précisées au bon de commande. Si l'encart relatif au mode de règlement ne mentionne pas le taux nominal du crédit ou le coût total du crédit, le contrat de crédit signé le même jour avec la société Banque Solfea pour financer l'opération comporte le montant emprunté, le nombre et le montant des échéances à rembourser, le taux d'intérêt nominal, le taux annuel effectif global et le coût total du crédit de sorte que Mme [E] a été parfaitement informée dès la signature du contrat des modalités du crédit souscrit.

Les conditions générales de vente précisent que la livraison a lieu à la date déterminée en commun avec le vendeur dans la limite de 200 jours maximum à compter de la signature du contrat. Aucune date n'est mentionnée au contrat pour la livraison. S'agissant du délai de mise en service, il est matériellement impossible à la société venderesse de préciser le délai de réalisation du raccordement, qui dépend d'un tiers, ERDF et donc de la mise en service de l'installation, le vendeur ne pouvant s'engager en termes de délais que sur sa propre prestation.

Le bon de commande mentionne le nombre de panneaux, leur norme, leur puissance globale et détaille les matériels composant l'installation solaire. Il ne comporte pas de mention précise quant à la marque des panneaux ni celle de de l'onduleur. Les autres caractéristiques de l'installation (technologie cristalline, constitution des modules, dimensions, normes et homologations, garanties, déroulement de l'installation intégrée au bâti,) sont détaillées dans la plaquette commerciale remise à Mme [E] au moment de la vente.

Le bon de commande comporte en son verso au bas de conditions générales de vente, un bordereau de rétractation séparé des conditions générales de vente par une ligne discontinue. Mme [E] ne produisant pas l'original du bon de commande, mais une simple copie constituée de deux pages séparées, il ne peut être vérifié que ce bordereau ne peut être facilement détaché sans amputer le contrat d'éléments importants à savoir la signature des parties, étant rappelé que les dispositions de l'article L. 121-24 du code de la consommation ne sont pas requises à peine de nullité.

La désignation du matériel vendu et les modalités d'exécution de la prestation sont donc insuffisantes et ne permettaient pas à l'acquéreur de comparer utilement la proposition de la société France Solaire Energies notamment en termes de prix avec des offres concurrentes en particulier pendant le délai de rétractation et de vérifier que tous les éléments nécessaires au fonctionnement de l'installation avaient bien été livrés et installés, avant de signer l'attestation de fin de travaux.

C'est donc à bon droit que le premier juge a retenu que la nullité du contrat principal était encourue au titre de ces irrégularités.

Il est admis que la nullité formelle résultant du texte précité est une nullité relative à laquelle la partie qui en est bénéficiaire peut renoncer par des actes volontaires explicites dès lors qu'elle avait connaissance des causes de nullité par application des dispositions de l'article 1338 du code civil dans sa version applicable au litige.

À défaut d'acte de confirmation ou ratification, il suffit que l'obligation soit exécutée volontairement après l'époque à laquelle l'obligation pouvait être valablement confirmée ou ratifiée. La confirmation, ratification, ou exécution volontaire dans les formes et à l'époque déterminées par la loi, emporte la renonciation aux moyens et exceptions que l'on pouvait opposer contre cet acte, sans préjudice néanmoins du droit des tiers.

Le contrat de vente est assorti d'un formulaire d'annulation de la commande conforme dont Mme [E] n'a pas souhaité user.

Il est en outre avéré que le 9 août 2012, elle a attesté que les travaux, qui ne couvrent pas le raccordement et les autorisations administratives, objets du financement, étaient terminés sans émettre aucune réserve tout en demandant à la banque de payer la somme de 23 900 euros à l'ordre de la société France solaire énergies.

Elle s'est ensuite acquittée des échéances du crédit en conformité avec l'échéancier prévu, a utilisé l'installation, ne faisant état d'aucun dysfonctionnement de l'équipement corroborant ainsi la pleine acceptation de l'installation mise en fonction et reconnaissant par ailleurs percevoir des revenus énergétiques.

Mme [E] a ainsi manifesté la volonté de percevoir les avantages attendus de l'ensemble contractuel, confirmé même après introduction de l'instance.

Les conditions générales de vente du contrat reproduisent le texte intégral des articles L. 121-23, L. 121-24, L. 121-25 et L. 121-26 du code de la consommation tel qu'exigé par les textes susvisés.

Pour autant, depuis un arrêt rendu le 24 janvier 2024 (pourvoi n° 22-15.199), la première chambre civile de la Cour de cassation juge désormais que la reproduction, même lisible, des dispositions du code de la consommation prescrivant le formalisme applicable à un contrat conclu hors établissement ne permet pas au consommateur d'avoir une connaissance effective du vice résultant de l'inobservation de ces dispositions et de caractériser la confirmation tacite du contrat, en l'absence de circonstances, qu'il appartient au juge de relever, permettant de justifier d'une telle connaissance et pouvant résulter, en particulier, de l'envoi par le professionnel d'une demande de confirmation, conformément aux dispositions de l'article 1183 du code civil, dans sa rédaction issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, applicable, en vertu de l'article 9 de cette ordonnance aux contrats conclus dès son entrée en vigueur.

En l'espèce aucun élément ne permet de dire que nonobstant la reproduction des articles applicables aux contrats conclus hors établissement, Mme [E] a eu connaissance du vice affectant l'obligation critiquée et a eu l'intention de le réparer, aucun acte ultérieur ne révélant sa volonté univoque de ratifier le contrat en toute connaissance de cause.

Partant, c'est à bon droit que le premier juge a retenu que la nullité relative encourue ne se trouvait pas couverte par le comportement de Mme [E], a prononcé la nullité du contrat de vente sur la base d'une irrégularité formelle et constaté la nullité du contrat de crédit. Le jugement doit être confirmé sur ce point.

La cour constate que la décision déférée n'a pas ordonné de restitution du matériel ou la remise en état des lieux et que Mme [E] ne formule aucune demande à ce titre à hauteur d'appel. En revanche, le rejet de la demande tendant à voir condamner la société BNPPPF à la reprise du matériel et à la remise en état des lieux n'est pas contesté et doit être confirmé, le premier juge ayant justement noté que la banque n'était pas partie au contrat principal. De même, la société BNPPPF n'a pas qualité pour demander à ce qu'il soit enjoint à Mme [E] d'avoir à opérer la dépose du matériel et son transport à ses frais dans les locaux de la procédure collective, au regard de sa qualité de tiers par rapport au contrat de vente. Cette demande doit être rejetée.

Sur la nullité pour dol

Le contrat étant annulé pour irrégularité formelle soulevée en premier lieu par Mme [E], la demande de nullité pour dol est devenue sans objet dans la mesure où elle n'impute à la banque aucune complicité dans les faits qu'elle dénonce et où elle ne lui reproche que des fautes en lien avec le financement d'un contrat affecté d'irrégularités formelles, ou la libération des fonds avant l'achèvement de l'installation sur la base d'une attestation incomplète ou encore le non-respect du délai de 7 jours.

Sur la demande d'annulation du contrat de crédit

Mme [E] soulève la nullité du contrat de crédit pour non-respect du délai de 7 jours prévu à l'article L. 311-13 puisque selon elle le contrat a été signé le 11 juillet 2012 et l'agrément donné le 27 juillet 2012.

Le contrat de crédit étant annulé en conséquence de l'annulation du contrat principal sur le fondement de l'article L. 311-32 du code de la consommation, il n'y a pas lieu de statuer sur cette demande devenue sans objet.

Sur la responsabilité de la société banque Solfea

Il est admis que la résolution ou l'annulation d'un contrat de crédit affecté, en conséquence de celle du contrat constatant la vente ou la prestation de services qu'il finance, emporte pour l'emprunteur l'obligation de restituer au prêteur le capital prêté. Cependant, le prêteur qui a versé les fonds sans s'être assuré, comme il y était tenu, de la régularité formelle du contrat principal ou de sa complète exécution, peut être privé en tout ou partie de sa créance de restitution, dès lors que l'emprunteur justifie avoir subi un préjudice en lien avec cette faute.

Mme [E] invoque une faute de la société banque Solfea pour avoir consenti un crédit et débloqué les fonds sur la base d'un bon de commande atteint d'irrégularités, sans aucune vérification.

Le premier juge a constaté que le prêteur avait libéré les fonds sans s'assurer de la validité formelle du bon de commande, Si la banque n'est tenue de déceler que les irrégularités flagrantes, force est de constater que son attention aurait dû être attirée par le fait qu'aucun délai de livraison n'était mentionné au recto du bon de commande.

Il convient donc de confirmer la faute commise à ce titre.

Mme [E] impute également au prêteur une faute dans le déblocage des fonds intervenu avant l'achèvement complet des travaux allant jusqu'au raccordement de l'installation, sur la base d'une attestation ne présumant pas de l'exécution complète des prestations à la charge du vendeur.

Selon l'article L. 311-31 du code de la consommation dans sa rédaction applicable au litige, les obligations de l'emprunteur ne prennent effet qu'à compter de la livraison du bien ou de la fourniture de la prestation. En cas de contrat de vente ou de prestation de services à exécution successive, elles prennent effet à compter du début de la livraison ou de la fourniture et cessent en cas d'interruption de celle-ci.

Les dispositions de l'article L. 311-51 du même code en leur version applicable au litige prévoient que le prêteur est responsable de plein droit à l'égard de l'emprunteur de la bonne exécution des obligations relatives à la formation du contrat de crédit, que ces obligations soient à exécuter par le prêteur qui a conclu ce contrat ou par des intermédiaires de crédit intervenant dans le processus de formation du contrat de crédit, sans préjudice de son droit de recours contre ceux-ci.

Il incombe donc au prêteur de vérifier que l'attestation de fin de travaux suffit à déterminer que la prestation promise a été entièrement achevée.

En revanche, il n'appartient pas au prêteur de s'assurer par lui-même de l'exécution des prestations et il ne saurait être garant de l'exécution du contrat principal.

Il est rappelé que le contrat de crédit souscrit prévoit expressément que les fonds sont mis à disposition à la livraison du bien au bénéficiaire mentionné dans l'attestation de fin de travaux.

Le 9 août 2012, M. [E] a attesté que les travaux, objets du financement visé ci-dessus (qui ne couvrent pas le raccordement au réseau éventuel et autorisations administratives éventuelles) sont terminés et sont conformes au devis et a demandé à la société Banque Solfea de payer la somme de 23 900 euros à l'ordre de la société France solaire SARL.

Le certificat de livraison permet d'identifier sans ambiguïté l'opération financée au moyen du contrat de crédit signé par Mme [E] le 11 juillet 2012, étant observé que le numéro de dossier figurant à l'attestation est bien le numéro figurant au contrat de crédit.

Il est rappelé que les opérations de raccordement au réseau électrique et de mise en service de l'installation échappent à la compétence de la société France Solaire Energies à qui il incombait de formaliser le dossier et d'effectuer les différentes démarches administratives et il ne saurait être reproché à la banque de n'avoir pas opéré de contrôle quant à des autorisations données par des organismes tiers, ni quant à la réalisation effective du raccordement au réseau électrique relevant d'ERDF, structure également tierce par rapport à l'ensemble contractuel.

Cette attestation est donc suffisante pour rapporter la preuve de l'exécution du contrat principal sans qu'aucune faute ne soit établie à l'encontre de l'organisme financeur dans la libération des fonds.

La seule faute commise par la banque concerne un défaut de vérification de la régularité formelle du bon de commande.

Mme [E] fait état de plusieurs préjudices qu'elle indique être en lien avec les fautes de la banque devant la priver de son droit à restitution du capital emprunté, au remboursement des sommes versées ou encore devant conduire à sa condamnation à des dommages et intérêts.

Elle fait état d'un préjudice financier et d'un trouble de jouissance qu'elle évalue à la somme de 5 000 euros en ce qu'elle a été contrainte de régler les échéances du crédit sans en avoir été informée par la société Banque Solfea compte tenu de ses obligations en sa qualité de dispensateur de crédit, sans y avoir consenti pleinement grâce au concours de la banque qui a sciemment et fautivement octroyé un crédit accessoire à un contrat nul, et en subissant le remboursement d'un crédit à un taux d'intérêts d'emprunt exorbitant imposé par la banque. Elle estime que ces charges financières ont eu pour conséquence de réduire son niveau de vie et d'obérer sa trésorerie disponible avec renoncement à divers projets (congés, loisirs notamment). Elle fait également état d'un préjudice moral qu'elle évalue à 3 000 euros dès lors qu'elle s'estime victime de man'uvres frauduleuses, qu'elle a dû subir les désagréments liés à la réalisation d'importants travaux pour l'installation solaire, qu'elle a dû supporter une installation aussi inutile qu'inesthétique, le bruit permanent d'un onduleur électrique et le temps perdu en démarches administratives, ainsi que l'angoisse d'avoir à supporter de très longues années le remboursement d'un crédit ruineux.

Il convient de constater qu'en contrepartie du crédit contracté, Mme [E] bénéficie d'une installation qui est fonctionnelle, laquelle produit de l'électricité et dont elle retire toujours avantage et que la preuve de l'existence de man'uvres frauduleuses n'est absolument pas démontrée. Elle ne démontre avoir supporté aucun autre frais en dehors de ceux spécifiquement prévus à l'ensemble contractuel. Les désagréments liés à l'installation photovoltaïque en tant que telle ne peuvent être imputés qu'à la société prestataire en charge de la réalisation des travaux.

Les préjudices allégués sont donc sans lien avec la faute de la banque.

Aux termes de ses dernières écritures, Mme [E] n'invoque plus aucune autre faute de la banque susceptible d'entraîner la mise en jeu de sa responsabilité.

Il convient en conséquence d'infirmer le jugement en ce qu'il a dit que Mme [E] était déchargée de son obligation de remboursement du capital restant dû, en ce qu'il a condamné la société BNPPPF à rembourser à Mme [E] les sommes versées au titre du contrat de crédit soit la somme de 21 352,91 euros correspondant aux mensualités perçues à la date du 5 avril 2019.

Mme [E] est tenue au remboursement du capital prêté à hauteur de 23 500 euros moins les sommes versées par elle à hauteur de 19 731,17 euros selon les calculs de la banque non contestés par Mme [E] et non de 21 352,91 euros comme indiqué par erreur dans le jugement attaqué.

Il convient de rappeler que l'intimée reste redevable de plein droit du remboursement des sommes qu'elle a perçues en exécution du jugement qui est infirmé.

La cour rappelle que le présent arrêt infirmatif constitue le titre ouvrant droit à la restitution des sommes versées en exécution du jugement, et que les sommes devant être restituées portent intérêts au taux légal à compter de la notification ou de la signification, valant mise en demeure, de la décision ouvrant droit à restitution.

Sur les autres demandes

Les dispositions relatives aux dépens et à l'article 700 du code de procédure civile sont confirmées. Mme [E] qui succombe pour partie en appel doit être tenue aux dépens et est condamnée à verser à la société BNPPPF une somme de 1 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Statuant en dernier ressort, après débats en audience publique, par arrêt réputé contradictoire, mis à disposition au greffe,

Constate l'intervention forcée à la présente instance de la Selarl [W] [U], en qualité de mandataire ad hoc de la société France Solaire Energies ;

Rejette la fin de non-recevoir ;

Confirme le jugement sauf en ce qu'il a dit que Mme [B] [E] est déchargée de son obligation de remboursement du capital restant dû à compter de ce jour à la société BNP Paribas personal finance, en ce qu'il a condamné la société BNP Paribas personal finance à rembourser à Mme [E] les sommes versées au titre du contrat de crédit, en ce qu'il a condamné la société BNP Paribas personal finance à lui payer la somme de 21 352,91 euros correspondant aux mensualités perçues à la date du 5 avril 2019 ;

Statuant dans cette limite et y ajoutant,

Déboute Mme [B] [E] de ses demandes ;

Dit que Mme [B] [E] est tenue de rembourser à la société BNP Paribas personal finance venant aux droits de la société Solfinéa anciennement dénommée Banque Solfea le montant du capital emprunté par suite de l'anéantissement du contrat de crédit, soit la somme de 23 500 euros moins les sommes versées par elle à hauteur de 19 731,17 euros ;

Déboute les parties de toute autre demande ;

Condamne Mme [B] [E] à payer à la société BNP Paribas personal finance venant aux droits de la société Solfinéa anciennement dénommée Banque Solfea la somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne Mme [B] [E] aux dépens d'appel avec distraction au profit de la Selas Cloix et Mendes-Gil.

La greffière La présidente


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 4 - chambre 9 - a
Numéro d'arrêt : 19/17350
Date de la décision : 30/05/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 05/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-05-30;19.17350 ?
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