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28/05/2024 | FRANCE | N°23/07928

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 1- a, 28 mai 2024, 23/07928


COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 6 - Chambre 1- A

N° RG 23/07928 - N° Portalis 35L7-V-B7H-CIU2J



Nature de l'acte de saisine : Déclaration d'appel valant inscription au rôle

Date de l'acte de saisine : 20 décembre 2023

Date de saisine : 27 décembre 2023



Nature de l'affaire : Demande d'indemnités liées à la rupture du contrat de travail CDI ou CDD, son exécution ou inexécution

Décision attaquée : n° rendue par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de Bobigny le 

05 décembre 2023



Ap

pelante :

S.A.R.L. Lingua Institut, représentée par Me Marc Desmichelle, avocat au barreau de Paris





Intimée :

Madame [W] [D]-[I], repré...

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 1- A

N° RG 23/07928 - N° Portalis 35L7-V-B7H-CIU2J

Nature de l'acte de saisine : Déclaration d'appel valant inscription au rôle

Date de l'acte de saisine : 20 décembre 2023

Date de saisine : 27 décembre 2023

Nature de l'affaire : Demande d'indemnités liées à la rupture du contrat de travail CDI ou CDD, son exécution ou inexécution

Décision attaquée : n° rendue par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de Bobigny le 

05 décembre 2023

Appelante :

S.A.R.L. Lingua Institut, représentée par Me Marc Desmichelle, avocat au barreau de Paris

Intimée :

Madame [W] [D]-[I], représentée par Me Paul Beaussillon, avocat au barreau de Paris - N° du dossier E0003POX

ORDONNANCE SUR INCIDENT

DEVANT LE MAGISTRAT CHARGÉ DE LA MISE EN ÉTAT

(3 pages)

Nous, Christine Da Luz, magistrate en charge de la mise en état,

Assistée de Sila POLAT, greffier,

EXPOSÉ DU LITIGE

Par déclaration du 20 décembre 2023, la SARL Lingua institut a interjeté appel du jugement prononcé par le conseil de prud'hommes de Bobigny dans le litige l'opposant à Mme [W] [D]-[I].

En l'état de ses ultimes écritures transmises par voie électronique le 02 mai 2024, Mme [D]-[I] a demandé au conseiller de la mise en état de :

- radier l'affaire du rôle en l'absence d'exécution du jugement,

- condamner Lingua institut à payer à Mme [D] la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner Lingua institut aux dépens.

Au soutien de ses prétentions, Mme [D]-[I] expose que :

- le jugement est exécutoire de plein droit par provision en application de l'article R. 1454-28 du code du travail;

- l'absence, dans le dispositif du jugement, de la moyenne de salaire fixée n'est pas un obstacle à l'exécution provisoire du jugement (Cass. Soc., 17 juillet 1996, n° 94-19.589; Cass. soc, 7 janv. 1998, n° 97-40.266)

- le virement Carpa réalisé par la société, d'un montant de 2 296,15 euros nets, soit 3 073,23 euros bruts,

« correspondant à 9 mois de salaire sur la base des trois derniers mois de salaire » retenait la moyenne des 

3 derniers mois de salaire effectivement perçus par Mme [D]-[I] avant son licenciement, et non la moyenne de salaire résultant de la requalification en CDI à temps plein de son CDD, dont la durée du travail avait été réduite à la portion congrue après la saisine du conseil de prud'hommes et avant le licenciement intervenu en cours de procédure;

- La moyenne de salaire, telle qu'indiquée dans ses conclusions par Mme [D], et correspondant au rappel de salaire objet des condamnations prononcées par le conseil de prud'hommes de Bobigny « du 1er juin 2017 jusqu'à la date du licenciement » s'élève à la somme de 2 132,10 euros par mois pour 151,67 heures. Le montant de l'exécution provisoire de droit s'élève à la somme de 19 188,9 euros (2 132,10 x 9 mois);

- la société ne démontre pas les conséquences manifestement excessives qu'aurait l'exécution du jugement:

elle indique que « Le centre de [Localité 2], au sein duquel travaillait Mme [D] a dû être fermé en juillet 2023 en raison de difficultés économiques », alors même que seule l'adresse du centre à [Localité 2] a changé et que la société conserve des locaux sis « [Adresse 1] », ainsi que le mentionne son site internet,

elle a gagné un appel d'offre important, ce qui a été relevé dans le magazine décideurs.

En l'état de ses ultimes conclusions du 06 mai 2024, la SAS Lingua Institut a demandé au conseiller de la mise en état de :

- juger que la société Lingua Institut avait procédé à l'exécution provisoire du jugement rendu par le conseil de prud'hommes de Bobigny le 05 décembre 2023,

subsidiairement :

- juger que la société Lingua Institut est dans l'impossibilité de procéder à l'exécution provisoire du jugement rendu par le conseil de prud'hommes de Bobigny le 05 décembre 2023,

infiniment subsidiairement,

- juger que l'exécution provisoire par la société Lingua Institut du jugement rendu par conseil de prud'hommes de Bobigny le 05 décembre 2023 entraînerait des conséquences manifestement excessives;

en tout état de cause,

- débouter Mme [D] de sa demande de radiation de l'affaire du rôle,

- débouter Mme [D] de l'intégralité de ses demandes,

- condamner Mme [D] à verser à la société Lingua Institut la somme de 1500 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner Mme [D] aux entiers dépens et autoriser Me Marc Desmichelle à les recouvrer directement conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Au soutien de ses prétentions la société Lingua Institut expose que :

- le conseil de prud'hommes n'a pas fixé la moyenne de salaire de Mme [D], qui n'a pas saisi le conseil de prud'hommes d'une requête en omission ; de plus, la société Lingua Institut a réglé, dans le cadre de l'exécution provisoire de droit prévue à l'article R. 1454-28 du code du travail, la somme de 3073,23 euros bruts,

- les chances de réformation du jugement entrepris sont importantes aux termes des conclusions de l'appelante,

- l'exécution du jugement aurait des conséquences manifestement excessives et placerait la société en situation de cessation des paiements en ce que :

la société essuie des pertes importantes depuis plusieurs années, son chiffre d'affaire ayant baissé de 42% depuis la crise sanitaire,

son compte bancaire a un solde de -35.706,41 euros au 1er avril 2024 (pièces 25 à 27)

la hauteur des demandes de Mme [D] (19188,90 euros) est supérieure aux capitaux propres de l'entreprise,

Les parties ont été convoquées le 22 février 2024 pour une audience devant se tenir le 07 mai 2024 à 9h00.

Il convient de se reporter aux conclusions susvisées pour un plus ample exposé des faits et de la procédure antérieure, et pour l'exposé des moyens des parties devant le conseiller de la mise en état.

À l'issue des débats, les parties ont été informées de la date de délibéré fixée au 28 mai 2024.

MOTIFS

Selon les dispositions de l'article 524 du code de procédure civile, lorsque l'exécution provisoire est de droit ou a été ordonnée, le conseiller de la mise en état peut, en cas d'appel, ordonner la radiation du rôle de l'affaire à la demande de l'intimé et après avoir recueilli les observations des parties, lorsque l'appelant ne justifie pas avoir exécuté la décision frappée d'appel ou procédé à la consignation autorisée dans les conditions prévues à l'article 521, à moins qu'il lui apparaisse que l'exécution serait de nature à entraîner des conséquences manifestement excessives ou que l'appelant est dans l'impossibilité d'exécuter la décision.

Il est constant que le jugement précité est exécutoire à titre provisoire en application de l'article R. 1454-28 du code du travail.

L'article R 1454-28, 3° du code du travail dispose qu'est de droit exécutoire à titre provisoire le jugement qui ordonne le paiement de sommes au titre des rémunérations et indemnités mentionnées au 2° de l'article R. 1454-14, dans la limite de neuf mois de salaire calculés sur la moyenne des trois derniers mois de salaire. Cette moyenne est mentionnée dans le jugement.

En l'espèce, la SARL Lingua Institut a été condamnée à payer à Mme [D] la somme de 51 186 euros à titre de rappels de salaire à temps plein du 1er juin 2017 jusqu'à la date du licenciement, soit le 21 septembre 2021. Cependant, la moyenne des trois derniers mois de salaire n'est pas mentionnée par le jugement du conseil de prud'hommes ce qui constitue une difficulté d'exécution qui n'a pas pour effet de priver la décision de son caractère exécutoire de droit par provision.

Dans ce cadre, la société Lingua Institut a versé la somme de 3 073,23 euros bruts en se fondant non pas sur le potentiel salaire à temps plein mais sur les trois derniers mois de salaires versés à la salariée.

Néanmoins, il apparait au regard des comptes annuels de 2020 (pièce 22), de 2021 (pièce 23) et de 2022 (pièce 24) ainsi que des relevés de compte bancaire de février (pièce 25), mars (pièce 26) et avril (pièce 27) 2024, que la société rencontre des difficultés financières depuis plusieurs années. Plus précisément, il ressort du compte de résultat du rapport du commissaire aux comptes sur les comptes annuels de 2022 que la société enregistre une perte s'élevant à 41 644.47 euros en 2022 et une perte à hauteur de 54 026,47 euros en 2021 (pièce 24). En outre, les relevés bancaires 2024 communiqués au dossier attestent d'un découvert constant allant jusqu'à 35 706,41 euros au mois d'avril (pièce 27).

Ainsi, l'exécution de la condamnation du jugement du conseil de prud'hommes serait de nature à entraîner des conséquences manifestement excessives pour la société Lingua Institut et dès lors la demande de radiation sera rejetée.

Il n'apparaît pas inéquitable que chaque partie conserve à charge ses propres frais irrépétibles et les demandes de condamnation formées de ce chef seront rejetées.

Les dépens seront réservés jusqu'à fin de cause.

PAR CES MOTIFS

Nous Christine Da Luz, présidente de chambre statuant en matière de mise en état, publiquement, contradictoirement, par ordonnance insusceptible de déféré.

REJETONS la demande aux fins de radiation.

DISONS que chaque partie conservera à charge ses propres frais irrépétibles et rejetons les demandes de condamnation formées de ce chef.

RÉSERVONS les dépens jusqu'à fin de cause.

Paris, le 28 mai 2024

Le greffier La magistrate en charge de la mise en état

Copie au dossier et aux avocats : Me Paul Beaussillon et Me Marc Desmichelle


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 1- a
Numéro d'arrêt : 23/07928
Date de la décision : 28/05/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 04/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-05-28;23.07928 ?
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