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07/05/2024 | FRANCE | N°23/08455

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 3 - chambre 5, 07 mai 2024, 23/08455


Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS







COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 3 - Chambre 5



ARRET DU 07 MAI 2024



(n° , 4 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 23/08455 - N° Portalis 35L7-V-B7H-CHS26



Décision déférée à la Cour : Jugement du 02 mars 2023 rendu par le tribunal judiciaire de PARIS - RG n° 20/13276





APPELANTE



Madame [V] [H] épouse [R] née le 30 juillet 1971 à [

Localité 3] (Mali),



[Adresse 4]

[Localité 3]

MALI



représentée par Me Samba BA, avocat au barreau de SEINE-SAINT-DENIS, toque : 115







INTIME



LE MINISTERE PUBLIC pr...

Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 3 - Chambre 5

ARRET DU 07 MAI 2024

(n° , 4 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 23/08455 - N° Portalis 35L7-V-B7H-CHS26

Décision déférée à la Cour : Jugement du 02 mars 2023 rendu par le tribunal judiciaire de PARIS - RG n° 20/13276

APPELANTE

Madame [V] [H] épouse [R] née le 30 juillet 1971 à [Localité 3] (Mali),

[Adresse 4]

[Localité 3]

MALI

représentée par Me Samba BA, avocat au barreau de SEINE-SAINT-DENIS, toque : 115

INTIME

LE MINISTERE PUBLIC pris en la personne de MADAME LE PROCUREUR GENERAL - SERVICE NATIONALITE

[Adresse 1]

[Localité 2]

représenté à l'audience par Mme Brigitte AUGIER de MOUSSAC, substitut général

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 14 mars 2024, en audience publique, l'avocat de l'appelante et le ministère public ne s'y étant pas opposés, devant Mme Marie-Catherine GAFFINEL, conseillère, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :

Mme Hélène FILLIOL, présidente de chambre

Mme Marie-Catherine GAFFINEL, conseillère

Mme Marie LAMBLING, conseillère

Greffier, lors des débats : Mme Mélanie PATE

ARRET :

- contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Mme Hélène FILLIOL, présidente de chambre et par Mme Mélanie PATE, greffière, présente lors de la mise à disposition.

Vu le jugement contradictoire du 2 mars 2023 du tribunal judiciaire de Paris qui a dit la procédure régulière au regard des dispositions de l'article 1043 du code de procédure civile, dit sans objet la demande de Mme [V] [H] relative à la recevabilité de sa demande, débouté Mme [V] [H] de la demande d'enregistrement de sa déclaration de nationalité française souscrite le 26 septembre 2019 sous le numéro 2019DX19778, jugé que Mme [V] [H], se disant née le 30 juillet 1971 à [Localité 3] (Mali), n'est pas de nationalité française, ordonné la mention prévue à l'article 28 du code civil en marge des actes concernés, rejeté la demande formée par Mme [V] [H] au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et condamné Mme [V] [H] aux dépens ;

Vu la déclaration d'appel du 4 mai 2023 de Mme [V] [H] ;

Vu les conclusions notifiées par la voie électronique le 7 novembre 2023 par Mme [V] [H] qui demande à la cour d'infirmer le jugement en toutes ses dispositions, déclarer qu'elle est de nationalité française et condamner le ministère public aux dépens dont distraction au profit de Maître BA et condamner l'État à lui verser la somme de 2500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Vu les conclusions notifiées le 31 octobre 2023 par le ministère public qui demande à la cour de dire la procédure régulière au regard des dispositions de l'article 1040 du code de procédure civile, confirmer le jugement, ordonner la mention prévue par l'article 28 du code civil et condamner Mme [V] [H] aux entiers dépens ;

Vu l'ordonnance de clôture en date du 9 janvier 2024 ;

Vu la transmission le 21 mars 2024 par Mme [V] [H] de la loi malienne, sollicitée par la cour à l'audience ;

MOTIFS

Il est justifié de l'accomplissement de la formalité prévue par l'article 1040 du code de procédure civile dans sa version applicable à la présente procédure, par la production du récépissé délivré le 26 octobre 2023 par le ministère de la Justice.

Invoquant l'article 21-2 du code civil dans sa rédaction issue de la loi n°2006-91 du 24 juillet 2006, Mme [V] [H] revendique être française pour avoir contracté mariage le 26 avril 2012 devant le consulat de France de [Localité 3] avec M. [K] [R], de nationalité française.

Conformément à l'article 30 du code civil, la charge de la preuve en matière de nationalité incombe à celui qui revendique la qualité de français lorsqu'il n'est pas déjà titulaire d'un certificat de nationalité délivré à son nom en vertu des articles 31 et suivants du code civil.

Mme [V] [H] n'est pas titulaire d'un certificat de nationalité. Il lui appartient donc d'apporter la preuve qu'elle remplit les conditions prévues à l'article 21-2 du code civil de la nationalité française au moyen d'actes d'état civil fiables et probants au sens de l'article 47 du code civil selon lequel « tout acte de l'état civil des Français et des étrangers fait en pays étranger et rédigé dans les formes usitées dans ce pays fait foi, sauf si d'autres actes ou pièces détenus, des données extérieures ou des éléments tirés de l'acte lui-même établissent, le cas échéant après toutes vérifications utiles, que cet acte est irrégulier, falsifié ou que les faits qui y sont déclarés ne correspondent pas à la réalité. Celle-ci est appréciée au regard de la loi française ».

Selon l'article 20-2 du code civil, l'étranger ou apatride qui contracte mariage avec un conjoint de nationalité française peut, après un délai de quatre ans à compter du mariage, acquérir la nationalité française par déclaration à condition qu'à la date de cette déclaration la communauté de vie tant affective que matérielle n'ait pas cessé entre les époux depuis le mariage et que le conjoint français ait conservé sa nationalité.

Le délai de communauté de vie est porté à cinq ans lorsque l'étranger, au moment de la déclaration, soit ne justifie pas avoir résidé de manière ininterrompue et régulière pendant au moins trois ans en France à compter du mariage, soit n'est pas en mesure d'apporter la preuve que son conjoint français a été inscrit pendant la durée de leur communauté de vie à l'étranger au registre des Français établis hors de France. En outre, le mariage célébré à l'étranger doit avoir fait l'objet d'une transcription préalable sur les registres de l'état civil français.

Mme [V] [H] produit en original :

- le volet 3 (original remis au déclarant) de son acte de naissance n°1072heg19 dressé le 17 juin 2019 par M. [P] [I], maire délégué signataire, en vertu d'un jugement du tribunal de grande instance CII 1594 du 29 avril 2019 aux termes duquel Mme [V] [H] est née le 30 juillet 1971 à [Localité 3] de [S] [H], domicilié à [Localité 3], instituteur de nationalité malienne et de [J] [D], domiciliée à [Localité 3], ménagère;

- un « jugement supplétif d'acte de naissance n°1594 » du tribunal de grande instance de la commune V du district de Bamako rendu le 29 avril 2019, délivré le 23 juin 2023 par le greffier en chef, indiquant que Mme [V] [H] domiciliée à [Localité 3] est née le 30 juillet 1971 à [Localité 3] de [S] [H], instituteur et de [J] [D], ménagère ;

Toutefois, comme le soutient le ministère public, Mme [V] [H] échoue à rapporter la preuve d'un état civil certain au sens de l'article 47 du code civil, le jugement supplétif d'acte de naissance qu'elle produit étant inopposable en France.

En effet, selon l'article 31 de l'accord de coopération en matière de justice entre la France et le Mali du 9 mars 1962, en matière civile et commerciale, les décisions contentieuses et gracieuses rendues par des juridictions siégeant sur le territoire de la République du Mali doivent, pour avoir l'autorité de la chose jugée en France, « remplir les conditions prévues par la législation de cet État » et parmi ces conditions, figure la conformité à la conception française de l'ordre public international laquelle exige que le jugement soit motivé.

En l'espèce, si la cour retient que le jugement produit est une expédition conforme à la minute, dès lors que Maître [U], greffier en chef indique avoir remis le jugement à Mme [V] [H] le 23 juin 2023, il n'en demeure pas moins, comme le soulève justement le ministère public, qu'il est dépourvu de toute motivation. En effet, le simple visa de la requête de Mme [V] [H] « tendant à l'établissement d'un jugement supplétif d'acte de naissance et les motifs y énoncés, à savoir l'inexistence de l'acte ou sa perte », la référence à l'audition de témoins non identifiés et la mention selon laquelle « il résulte de l'enquête à laquelle il a été procédé la preuve des faits énoncés en ladite requête » ne satisfont pas à l'exigence de motivation, Mme [V] [H] ne produisant pas la requête visée dans le jugement, pourtant susceptible de suppléer la motivation défaillante.

Or, lorsqu'un acte d'état civil étranger assure la publicité d'une décision de justice, il devient indissociable de celle-ci. Ainsi, toute mention figurant dans l'acte d'état civil en exécution d'une décision de justice étrangère ne peut faire foi au sens de l'article 47 du code civil qu'à la condition que cette décision remplisse les conditions pour sa régularité internationale.

Dans ces conditions, le jugement supplétif d'acte de naissance est inopposable en France.

En conséquence, l'acte de naissance n°1072heg19, établi en exécution de cette décision, n'a pas de valeur probante au sens de l'article 47 du code civil.

Or, nul ne peut se voir reconnaître la nationalité française s'il ne justifie pas d'une identité certaine, attestée par des actes d'état civil fiables au sens de cet article.

Le jugement qui a constaté l'extranéité de Mme [V] [H] est confirmé et la demande de cette dernière au titre de l'article 700 est rejetée.

PAR CES MOTIFS

Dit que la formalité prévue à l'article 1040 du code de procédure civile a été accomplie et que la procédure est régulière,

Confirme le jugement,

Ordonne la mention prévue à l'article 28 du code civil,

Rejette la demande de Mme [V] [H] au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne Mme [V] [H] aux dépens.

LA GREFFIERE LA PRESIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 3 - chambre 5
Numéro d'arrêt : 23/08455
Date de la décision : 07/05/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 21/05/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-05-07;23.08455 ?
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