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07/05/2024 | FRANCE | N°21/12785

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 4 - chambre 4, 07 mai 2024, 21/12785


REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS







COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 4 - Chambre 4



ARRET DU 07 MAI 2024



(n° , 6 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/12785 - N° Portalis 35L7-V-B7F-CEALJ



Décision déférée à la Cour : Jugement du 29 Avril 2021 -Tribunal de proximité de SUCY EN BRIE - RG n° 11- 20 - 000611





APPELANTE



S.A. D'HLM BATIGERE EN ILE DE FRANCE

Immatriculée au RCS de Nanterre sous le numé

ro 582 000 105

[Adresse 1]

[Localité 3]



Représentée par Me Christian PAUTONNIER de la SELARL PAUTONNIER ET ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : L0159 et assistée par Me Agnès R...

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 4

ARRET DU 07 MAI 2024

(n° , 6 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/12785 - N° Portalis 35L7-V-B7F-CEALJ

Décision déférée à la Cour : Jugement du 29 Avril 2021 -Tribunal de proximité de SUCY EN BRIE - RG n° 11- 20 - 000611

APPELANTE

S.A. D'HLM BATIGERE EN ILE DE FRANCE

Immatriculée au RCS de Nanterre sous le numéro 582 000 105

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représentée par Me Christian PAUTONNIER de la SELARL PAUTONNIER ET ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : L0159 et assistée par Me Agnès ROUX, avocat au barreau de PARIS, toque : L0159

INTIMÉ

Monsieur [J] [E]

Né le 11 mai 1984

[Adresse 2]

[Localité 4]

Représenté et assisté par Me Sophie LOPEZ, avocat au barreau de PARIS, toque : P0483

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 19 Décembre 2023, en audience publique, devant la Cour composée de :

Mme Nicolette GUILLAUME, Présidente de chambre

Mme Marie MONGIN, Conseillère

M. Claude CRETON, Président magistrat honoraire

qui en ont délibéré, un rapport a été présenté à l'audience par Madame Marie MONGIN dans les conditions prévues par l'article 804 du code de procédure civile.

Greffière, lors des débats : Mme Gisèle MBOLLO

ARRET :

- Contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, délibéré initialement prévu le 27 février 2024 et prorogé plusieurs fois jusqu'au 07 mai 2024, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile

- signé par Madame Nicolette GUILLAUME , Présidente de chambre et par Madame Aurély ARNELL, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

EXPOSÉ DU LITIGE

Par contrat de bail signé le 11 avril 2007, la SA Batigere en Île-de-France a donné en location à M. [Z] [E] et Mme [P] [V] un bien situé [Adresse 2] à [Localité 4]. Par avenant au contrat de bail passé par acte sous seing privé en date du 24 avril 2010, M. [J] [E] est devenu colocataire dudit logement, puis, M. [Z] [E] et Mme [P] [V] ont donné congé et M. [J] [E] en est resté seul locataire.

M. [J] [E] s'est plaint de subir de nombreux désagréments liés à des problèmes d'insalubrité et de voisinage dans son immeuble.

M. [J] [E] a saisi les services de son assureur et un rapport a été établi le 20 septembre 2018.

Le 29 avril 2019, M. [J] [E] a fait parvenir une lettre de mise en demeure par le biais de son conseil à la SA Batigere en Île-de-France afin d'être relogé dans les plus brefs délais, demande à laquelle il a été répondu par le bailleur le 18 juillet 2019 l'informant que sa demande serait étudiée par le service compétent.

Saisi par M. [J] [E] par acte d'huissier de justice délivré le 21 février 2020, le tribunal de proximité de Sucy-en-Brie, par jugement contradictoire rendu le 29 avril 2021, a :

- condamné la SA Batigere en Île-de-France à déduire à compter du 19 février 2019 du loyer payé par M. [J] [E] la somme mensuelle de 41 euros au titre du préjudice de jouissance liée à la privation de l'accès à son balcon ;

- condamné la SA Batigere en Île-de-France à payer à M. [J] [E] la somme de 3 000 euros en réparation de ses autres troubles de jouissance, avec intérêts au taux légal à compter du présent jugement ;

- débouté M. [J] [E] de sa demande de relogement dans le mois suivant la décision à intervenir, puis sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;

- débouté les parties de toutes autres demandes différentes, plus amples ou contraires au présent dispositif ;

- rappelé que le décret du 11 décembre 2019 a instauré l'exécution provisoire de droit à compter du 1er janvier 2020 ;

- condamné la SA Batigere en Île-de-France à payer la somme de 850 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile :

- condamné la SA Batigere en Île-de-France aux entiers dépens.

Par déclaration reçue au greffe le 7 juillet 2021, la SA Batigere en Île-de-France a interjeté appel de ce jugement sauf en ce qu'il déboute M. [J] [E] de sa demande de relogement dans le mois suivant la décision à intervenir, puis sous astreinte de 50 euros par jour de retard et rappelle que le décret du 11 décembre 2019 a instauré l'exécution provisoire de droit à compter du 1er janvier 2020.

Dans ses dernières conclusions déposées le 13 novembre 2023, la SA Batigere en Île-de-France demande à la cour de :

- la déclarer recevable et bien fondée en son appel ;

- y faisant droit,

- infirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions, sauf en ce qu'il a débouté M. [J] [E] de sa demande de relogement dans le mois suivant la décision à intervenir, puis sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;

- infirmer le jugement entrepris en ce qu'il l'a condamné à déduire à compter du 19 février 2019 du loyer payé par M. [J] [E], la somme de 41 euros à titre du préjudice de jouissance lié à la privation de l'accès à son balcon ;

- infirmer le jugement entrepris en ce qu'il l'a condamné à payer à M. [J] [E] la somme de 3 000 euros en réparation de ses autres troubles de jouissance, avec intérêt au taux légal à compter du présent jugement ;

- et statuant à nouveau :

- constater à défaut dire que la compensation de l'absence d'utilisation du balcon est justement opérée par une déduction du montant du loyer y afférent et que la réduction de loyer à hauteur de 7, 72 euros par mois est parfaitement adaptée ;

- constater à défaut dire que la preuve de troubles de jouissance n'est pas rapportée tandis qu'aucun manquement ne lui est imputable ;

- en conséquence :

- débouter M. [J] [E] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions ;

- condamner M. [J] [E] à lui payer la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner M. [J] [E] aux entiers dépens.

Dans ses dernières conclusions déposées le 14 novembre 2023, M. [J] [E] demande à la cour de :

- à titre principal :

- le dire recevable et bien fondé en ses demandes, fins et conclusions ;

- confirmer le jugement du tribunal de proximité de Sucy-en-Brie du 29 avril 2021 en ce qu'il a retenu la responsabilité de la SA Batigere en Île-de-France au titre :

- du manquement à son obligation de résultat de délivrer un logement décent en raison de la présence récurrente de nuisibles ;

- des dysfonctionnements affectant le chauffe-eau ;

- du manquement à son obligation d'assurer la jouissance paisible du bien compte tenu des troubles de voisinage, de l'impossibilité d'accéder au balcon et du non respect de la place de parking ;

- confirmer le jugement du tribunal de proximité de Sucy-en-Brie du 29 avril 2021 en ce qu'il a condamné la SA Batigere en Île-de-France à déduire à compter du 19 février 2019 du loyer qu'il paye la somme de 41 euros au titre du préjudice de jouissance lié à la privation de l'accès à son balcon ;

- infirmer le jugement du tribunal de proximité de Sucy-en-Brie du 29 avril 2021 en ce qu'il a condamné la SA Batigere en Île-de-France à lui payer la somme de 3 000 euros en réparation de ses autres troubles de jouissance ;

- infirmer le jugement entrepris en ce qu'il l'a débouté de sa demande de relogement sous astreinte ;

- et statuant à nouveau :

- condamner la SA Batigere en Île-de-France à lui payer la somme de 10 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de ses autres troubles de jouissance ;

- ordonner à la SA Batigere en Île-de-France de procéder à son relogement dans le mois suivant la décision à intervenir, puis sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;

- en tout état de cause :

- condamner la SA Batigere en Île-de-France à lui payer la somme de 4 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner la SA Batigere en Île-de-France aux entiers dépens de première instance et d'appel sur le fondement de l'article 699 du code de procédure civile, dont distraction au profit de Maître Sophie Lopez, avocat au Barreau de Paris, qui en assurera le recouvrement conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 16 novembre 2023, M. [E] a donné congé du logement pour le 30 novembre suivant.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 21 novembre 2023.

SUR CE,

Considérant que la société bailleresse fait en premier lieu valoir que M. [E] n'occupe pas ou de façon très ponctuelle, le logement litigieux ce qui est confirmé par les déclarations de la s'ur de M. [E] à l'occasion de la plainte déposée par elle le 9 mars 2015 à l'encontre de voisins, aux termes desquelles, elle indiquait : «Je vis seule avec mes deux enfants âgés de 10 et 13 ans, dans l'appartement de mon frère M. [J] [E]...» ;

Considérant s'agissant de l'indemnisation du préjudice causé par la présence de nuisibles dans le logement, que la bailleresse sans être contestée fait valoir qu'elle fait effectuer annuellement un traitement de désinsectisation dans l'ensemble de l'immeuble, voire plus en cas de demandes expresses, mais que M. [E] est souvent absent lors du passage de l'entreprise devant effectuer ces traitements alors que les locataires sont informés par un affichage dans le hall d'entrée de l'immeuble à proximité des boites aux lettres ;

Que M. [E] reconnaît avoir été absent lors des passages de l'entreprise de désinsectisation, n'ayant pas vu l'information de la bailleresse ou n'ayant pas souhaité prendre un jour de congé pour cela ; que dans ces conditions il doit être considéré comme responsable des désordres dont il se plaint et ne peut utilement réclamer l'indemnisation d'un préjudice de jouissance à ce titre ;

Que le jugement sera infirmé de ce chef ;

Considérant s'agissant des désordres affectant le chauffe-eau, que la bailleresse justifie d'interventions sur ce chauffe-eau et la plomberie en mai 2017, le 23 novembre 2018, le 2 juillet 2019 le plombier constatant le bon fonctionnement de cet appareil et le 6 novembre 2020 par le changement chauffe-eau ; qu'il ne saurait donc être reproché une faute au bailleur qui a fait le nécessaire pour répondre aux demandes du locataire, observations étant faite que M. [E] ne justifie pas de la réalité des désordres qu'il allègue et notamment d'avoir été privé d'eau chaude pendant les périodes de grand froid ;

Que les nombreuses réclamations de M. [E] alors que l'expert désigné par sa compagnie d'assurance dans son rapport du 20 septembre 2018 n'évoque pas ces dysfonctionnements du chauffe-eau, sont de nature à rendre plausible l'affirmation du bailleur selon laquelle les réclamations de M. [E] n'étaient pas toujours fondées ;

Que M. [E] sera également débouté de cette demande et le jugement infirmé ;

Considérant s'agissant des travaux de confortation des balcons, que la bailleresse a déduit des loyers une somme correspondant à la surface dont est privé le locataire au prix du mètre carré du loyer, soit la somme mensuelle de 7,72 euros, alors pourtant qu'il ne constitue pas une surface habitable ;

Que cette indemnisation du préjudice de jouissance apparaît juste au regard du prix du loyer qui est de 6 euros par mètre carré, et de la superficie du balcon ;

Que le jugement qui a fixé cette indemnisation à la somme de 41 euros sera infirmé de ce chef ;

Considérant quant à la demande de M. [E] relative aux troubles qu'il subit du fait d'une locataire voisine et de l'occupation sans droit ni titre d'un logement de l'immeuble, que la bailleresse fait valoir, qu'à l'exception d'un courrier de M. [E] en 2018, les plaintes envers cette voisine ont cessé après 2016, la voisine ayant été pénalement condamnée en 2015 pour des faits dont avaient été victimes les s'ur et nièces de M. [E] ;

Que sur ce point encore, M. [E] échoue à démontrer la persistance des troubles provenant de cette voisine du 1er étage dont les victimes ont été indemnisées par le juge pénal ;

Que, quant aux personnes occupant sans droit ni titre un logement dans l'immeuble, la bailleresse a engagé en 2016 une procédure ayant abouti à un jugement le 29 mars 2019 et à l'expulsion de ces occupants quelques mois après cette décision, c'est donc à bon droit que le jugement entrepris n'a pas fait droit à la demande de réparation de ce préjudice de jouissance ;

Considérant que M. [E] réclame la réparation de son préjudice de jouissance en raison de la suroccupation du parking de l'immeuble lequel est insuffisamment protégé des intrusions de tiers ;

Qu'il doit être relevé que M. [E] verse aux débats ( pièce n°21) un contrat en date du 28 octobre 2015 par lequel la société Batigere en Ile-de-France lui donne en location une place déterminée de parking de sorte que c'est à tort que celle-ci affirme qu'aucune place ne lui est attribuée ;

Que cependant, la bailleresse a pris des mesures en faisant installer une barrière, laquelle a été vandalisée, puis des «stop park» qui ont subi le même sort ; qu'elle fait valoir que dans sa lettre du 18 juillet 2019, «elle indiquait à Monsieur [J] [E] que la mise en place d'un système de sécurisation plus performant était à l'étude» ;

Considérant que dans ses conclusions en date du 13 novembre 2023 la bailleresse considère avoir «tout mis en 'uvre pour effectuer les réparations requises» sans préciser si un système plus performant a pu être trouvé ;

Considérant qu'à défaut de preuve de la fréquence des difficultés que rencontre M. [E] pour stationner sa voiture, il lui sera alloué en réparation de son préjudice de jouissance la somme de 300 euros ;

Considérant que le jugement entrepris a rejeté la demande de relogement formulée par M. [E], que la cour constate que M. [E] ayant pris l'initiative de résilier le bail par lettre recommandée avec accusé de réception reçue par la bailleresse le 19 juin 2023, cette demande est sans objet ;

Considérant quant aux mesures accessoires que M. [E] dont l'essentiel de ses demandes sont rejetées, sera condamné aux dépens de première instance et d'appel ainsi, qu'en équité, à verser à la société Batigere en Île-de-France la somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant publiquement par mise à disposition au greffe de l'arrêt contradictoire,

- Infirme le jugement entrepris sauf en ce qu'il a débouté M. [J] [E] de sa demande d'indemnisation d'un préjudice jouissance en raison de l'occupation sans droit ni titre d'un logement de l'immeuble et de sa demande de relogement,

Statuant à nouveau et y ajoutant,

- Condamne la société Batigere Île de France à verser à M. [J] [E] la somme de 300 euros en réparation de son préjudice de jouissance du fait des difficultés rencontrées pour accéder à sa place de parking,

- Déboute M. [J] [E] de ses autres demandes, plus amples ou contraires,

- Condamne M. [J] [E] à verser à la société Batigere Île de France la somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- Condamne M. [J] [E] aux dépens de première instance et d'appel.

Le greffier, La présidente,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 4 - chambre 4
Numéro d'arrêt : 21/12785
Date de la décision : 07/05/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 23/05/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-05-07;21.12785 ?
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