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02/05/2024 | FRANCE | N°22/16701

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 4 - chambre 9 - a, 02 mai 2024, 22/16701


Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 9 - A



ARRÊT DU 02 MAI 2024



(n° , 8 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 22/16701 - N° Portalis 35L7-V-B7G-CGOWC



Décision déférée à la Cour : Jugement du 16 mai 2022 - Juge des contentieux de la protection de JUVISY SUR ORGE - RG n° 11-21-000615





APPELANTE



La société SOGEFINANCEMENT, socié

té par actions simplifiée, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés ès-qualités audit siège

N° SIRET : 394 352 272 00022

[Adresse 5]

[Adresse 5]...

Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 9 - A

ARRÊT DU 02 MAI 2024

(n° , 8 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 22/16701 - N° Portalis 35L7-V-B7G-CGOWC

Décision déférée à la Cour : Jugement du 16 mai 2022 - Juge des contentieux de la protection de JUVISY SUR ORGE - RG n° 11-21-000615

APPELANTE

La société SOGEFINANCEMENT, société par actions simplifiée, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés ès-qualités audit siège

N° SIRET : 394 352 272 00022

[Adresse 5]

[Adresse 5]

[Localité 4]

représentée et assistée de Me Sébastien MENDES GIL de la SELAS CLOIX & MENDES-GIL, avocat au barreau de PARIS, toque : P0173

INTIMÉ

Monsieur [Y] [S]

né le [Date naissance 1] 1969 au BENIN

[Adresse 2]

[Localité 3]

DÉFAILLANT

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 13 mars 2024, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Mme Laurence ARBELLOT, Conseillère, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Mme Muriel DURAND, Présidente de chambre

Mme Laurence ARBELLOT, Conseillère

Mme Sophie COULIBEUF, Conseillère

Greffière, lors des débats : Mme Camille LEPAGE

ARRÊT :

- DÉFAUT

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Mme Muriel DURAND, Présidente et par Mme Camille LEPAGE, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Selon offre de crédit préalable acceptée le 4 janvier 2014, la société Sogefinancement a consenti à M. [Y] [S] un prêt personnel de 17 095 euros remboursable en 84 mensualités de 261,36 euros chacune et une dernière échéance de 514,36 euros hors assurance facultative, au taux débiteur annuel fixe de 7,40 %.

Suivant avenant du 17 novembre 2015, le montant des mensualités a été diminué à 196,86 euros assurance comprise, payables pendant 102 mois du 20 janvier 2016 au 20 juin 2024.

Plusieurs échéances n'ayant pas été honorées, la société Sogefinancement a entendu se prévaloir de la déchéance du terme de ce contrat.

Par acte d'huissier en date du 10 mars 2021, elle a fait assigner M. [S] devant le juge des contentieux de la protection du tribunal de proximité de Juvisy-sur-Orge aux fins de le voir condamner au paiement du solde du contrat.

Par jugement réputé contradictoire du 16 mai 2022 auquel il convient de se reporter, le juge a prononcé la déchéance totale du droit aux intérêts, a condamné M. [S] à payer à la société Sogefinancement la somme de 2 042,08 euros avec intérêts au taux légal à compter du 28 juillet 2020, a rejeté toute autre demande, a dit n'y avoir lieu à appliquer l'article 700 du code de procédure civile et a condamné M. [S] aux dépens.

Le juge a prononcé la déchéance totale du droit du prêteur aux intérêts pour non-respect du corps 8 de la taille des caractères du contrat de crédit et a exclu l'application de toute clause pénale.

Par déclaration réalisée par voie électronique le 27 septembre 2022, la société Sogefinancement a interjeté appel de ce jugement.

Aux termes de ses dernières conclusions signifiées par voie électronique le 23 décembre 2022, la société Sogefinancement demande à la cour :

- d'infirmer le jugement en ce qu'il a prononcé la déchéance totale du droit aux intérêts, en ce qu'il a limité la condamnation, en ce qu'il a rejeté ses autres demandes, plus amples ou contraires en ce compris sa demande en paiement de la somme de 8 948,22 euros représentant les mensualités impayées, le capital restant dû et les intérêts échus, augmentée des intérêts de retard courus au taux conventionnel de 7,40 % l'an sur la somme en principal de 8 942,86 euros à compter du 18 juillet 2020 jusqu'au jour du parfait paiement, sa demande en paiement de la somme de 686,60 euros au titre de l'indemnité légale de 8 % du capital restant dû et sa demande en paiement de la somme de 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, et en ce qu'il a dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et condamné M. [S] aux dépens,

- statuant sur les chefs contestés et sur les demandes des parties,

- de déclarer irrecevable comme prescrit le moyen visant à faire prononcer la déchéance du droit aux intérêts contractuels pour irrégularité du formalisme précontractuel ou contractuel, de dire et juger à tout le moins qu'il n'est pas fondé et le rejeter,

- de constater que la déchéance du terme a été prononcée et subsidiairement, de prononcer la résiliation judiciaire du contrat de crédit au vu des manquements de l'emprunteur dans son obligation de rembourser les échéances du crédit et fixer la date des effets de la résiliation au 17 juillet 2020,

- en conséquence, et en tout état de cause, de le condamner à lui payer la somme de 9 657,57 euros majorée des intérêts au taux contractuel de 7,40 % l'an à compter du 17 novembre 2021 sur la somme de 8 142,86 euros et au taux légal pour le surplus,

- en tout état de cause, de le condamner à la somme de 1 000 euros au titre des frais irrépétibles en application de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens avec distraction au profit de la Selas Cloix et Mendes-Gil en application de l'article 699 du code de procédure civile.

L'appelante estime que le premier juge ne pouvait soulever d'office à son audience du 15 novembre 2021 le moyen tiré de la déchéance du droit aux intérêts, ce moyen étant prescrit depuis le 4 janvier 2019.

Elle fait valoir que la jurisprudence la plus récente des cours d'appel admet que l'établissement de crédit est fondé à se référer au point pica soit 2,81 millimètres de hauteur couramment utilisé par les logiciels de traitement de texte et qu'il n'y a pas lieu de faire prévaloir le point didot soit 3 millimètres de hauteur en l'absence de définition légale ou réglementaire du corps huit renvoyant au point didot. Elle estime qu'elle ne doit pas être déchue de son droit aux intérêts contractuels.

Elle estime sa créance fondée en son principe et réclame le paiement des intérêts contractuellement convenus et de l'indemnité de résiliation.

Aucun avocat ne s'est constitué pour M. [S] à qui la déclaration d'appel et les conclusions ont été signifiées par acte du 28 novembre 2022 délivré à étude. Les dernières conclusions ont été signifiées par acte du 2 janvier 2023 à étude.

Pour un plus ample exposé des faits, moyens et prétentions de l'appelante, il est renvoyé aux écritures de celle-ci conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 16 janvier 2024 et l'affaire a été appelée à l'audience du 13 mars 2024 pour être mise en délibéré au 2 mai 2024.

A l'audience la cour ayant examiné les pièces a relevé que la FIPEN produite n'était pas signée. Elle a fait parvenir le 7 novembre 2023 au conseil de la banque par RPVA un avis rappelant que dans un arrêt du 7 juin 2023 (pourvoi 22-15.552) la première chambre de la cour de cassation avait considéré que la preuve de la remise de la FIPEN ne pouvait se déduire de la clause de reconnaissance et de la seule production de la FIPEN non signée, ce document émanant de la seule banque, souligné que l'intimé ne comparaissait pas et a invité la banque à produire tout justificatif de la remise de cette FIPEN et le cas échéant à faire valoir ses observations sur la déchéance du droit aux intérêts encourue à défaut de preuve de remise, et ce au plus tard le 29 mars 2024.

Le 28 mars 2024, la banque a fait parvenir une note en délibéré aux termes de laquelle elle fait valoir :

- qu'aucun texte ne prévoit que la FIPEN soit signée et que sa seule obligation consiste à remettre cette fiche d'informations,

- que jusqu'à l'arrêt du 7 juin 2023 visé dans l'avis, la Cour de cassation admettait que la remise d'un document constituant un fait juridique, il pouvait être prouvé par tous moyens et notamment par une clause de reconnaissance, et qu'il en était déduit, de manière constante, que la clause combinée à la production de la copie du document permettait à l'établissement de crédit de rapporter la preuve de la remise du document sans qu'il soit nécessaire que ledit document soit signé par l'emprunteur,

- que l'exigence d'un document émanant du débiteur n'est requise qu'en matière de preuve des actes juridiques par l'article 1362 du code civil,

- que l'apposition de la signature de l'emprunteur sur le document ne confère, en outre, pas à la production un caractère plus probant que celui résultant de la signature sous la clause de reconnaissance corroborée par la production d'une copie du document,

- que la FIPEN soit ou non signée laisse à l'emprunteur la faculté de rapporter la preuve contraire que le document qui lui a été remis n'est pas celui que le prêteur a produit, en produisant le cas échéant l'exemplaire qui lui a été remis,

- que l'arrêt du 7 juin 2023 apparaît en contradiction avec une position jusqu'alors clairement établie, qu'il ne peut qu'être analysé qu'en un arrêt d'espèce voire d'égarement isolé et ne saurait être suivi, étant rappelé que la loi a une valeur normative supérieure et que jusqu'alors la présente cour statuait différemment,

- que changer de jurisprudence conduirait à heurter gravement le principe de sécurité juridique et que cette règle ne peut au mieux valoir que pour l'avenir et ne saurait être appliquée rétroactivement car la banque n'était pas en mesure de prévoir cette exigence nouvelle,

- qu'il y a donc lieu de ne pas prononcer de déchéance du droit aux intérêts de ce chef.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Selon l'article 472 du code de procédure civile, lorsque le défendeur ne comparaît pas, il est néanmoins statué sur le fond, le juge ne fait droit à la demande que s'il l'estime régulière, recevable et bien fondée.

Il résulte de l'article 954 dernier alinéa du code de procédure civile que la partie qui ne conclut pas ou qui, sans énoncer de nouveaux moyens, demande la confirmation du jugement est réputée s'en approprier les motifs.

Le présent litige est relatif à un prêt personnel souscrit le 4 janvier 2014 soumis aux dispositions de la loi n° 2010-737 du 1er juillet 2010 de sorte qu'il doit être fait application des articles du code de la consommation dans leur rédaction en vigueur après le 1er mai 2011 et leur numérotation antérieure à l'ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016 et au décret n° 2016-884 du 29 juin 2016.

Sur la forclusion

Aux termes de l'article R. 311-52 du code de la consommation, en vigueur du 1er mai 2011 au 1er juillet 2016, les actions en paiement engagées devant lui à l'occasion de la défaillance de l'emprunteur doivent être formées dans les deux ans de l'événement qui leur a donné naissance à peine de forclusion. Cet événement est caractérisé par :

- le non-paiement des sommes dues à la suite de la résiliation du contrat ou de son terme ;

- ou le premier incident de paiement non régularisé ;

- ou le dépassement non régularisé du montant total du crédit consenti dans le cadre d'un contrat de crédit renouvelable ;

- ou le dépassement, au sens du 13° de l'article L. 311-1, non régularisé à l'issue du délai prévu à l'article L. 312-93.

Il est admis que les modalités de règlement des échéances impayées ont fait l'objet d'un réaménagement ou d'un rééchelonnement, le point de départ du délai de forclusion est le premier incident non régularisé intervenu après le premier aménagement ou rééchelonnement conclu entre les intéressés.

Constitue un réaménagement au sens de ce texte, le contrat qui a pour seul objet de réaménager les modalités de remboursement d'une somme antérieurement prêtée, pour permettre, par l'allongement de la période de remboursement et l'abaissement du montant de l'échéance mensuelle, d'apurer le passif échu, pour autant qu'il ne se substitue pas au contrat de crédit initial dont la déchéance du terme n'a pas été prononcée, qu'il n'en modifie pas les caractéristiques principales telles le montant initial du prêt et le taux d'intérêt et qu'il porte sur l'intégralité des sommes restant dues à la date de sa conclusion.

En application de l'article 125 du code de procédure civile, il appartient au juge saisi d'une demande en paiement de vérifier d'office même en dehors de toute contestation sur ce point et même en cas de non-comparution du défendeur que l'action du prêteur s'inscrit bien dans ce délai.

Par avenant du 17 novembre 2015 répondant aux exigences des textes susvisés, le montant des mensualités a été diminué à 196,86 euros assurance comprise, payables pendant 102 mois du 20 janvier 2016 au 20 juin 2024. L'historique de compte atteste de ce que les échéances sont demeurées impayées à compter du 20 janvier 2020.

La société Sogefinancement ayant assigné le 10 mars 2021 soit dans le délai de deux années, elle est recevable en son action.

Sur la déchéance du droit aux intérêts

1- Sur la prescription du moyen

La société Sogefinancement soutient que le juge du fond ne pouvait soulever d'office le 15 novembre 2021 le moyen tiré de la déchéance du droit aux intérêts contractuels au regard du délai de prescription quinquennale ayant commencé à courir à la date d'acceptation de l'offre et devant se terminer au 4 janvier 2019.

La prescription est sans effet sur l'invocation d'un moyen qui tend non pas à l'octroi d'un avantage, mais seulement à mettre en échec une prétention adverse.

C'est ainsi que, défendant à une action en paiement du solde d'un crédit à la consommation, l'emprunteur peut opposer tout moyen tendant à faire rejeter tout ou partie des prétentions du créancier par application d'une disposition du code de la consommation prévoyant la déchéance du droit aux intérêts, sans se voir opposer la prescription, pour autant qu'il n'entende pas en obtenir un autre avantage tel le remboursement d'intérêts indûment acquittés.

Dans le rôle qui lui est conféré tant par l'article L. 141-4 (devenu R. 632-1) du code de la consommation que par le droit européen, le juge peut relever d'office, sans être enfermé dans un quelconque délai, toute irrégularité qui heurte une disposition d'ordre public de ce code.

En l'espèce, le moyen soulevé d'office par le premier juge et susceptible de priver le prêteur de son droit aux intérêts contractuels n'a pas pour effet de conférer à l'emprunteur un avantage autre qu'une minoration de la créance dont la société Sogefinancement poursuit le paiement.

Loin de constituer un remboursement des intérêts acquittés par le jeu d'une compensation qui supposerait une condamnation -qui n'est pas demandée- de l'organisme de crédit à payer une dette réciproque, ces moyens ne peuvent avoir pour seul effet que de modifier l'imputation des paiements faits par l'emprunteur.

En conséquence, il convient d'écarter la fin de non-recevoir soulevée par la banque.

2- Sur le respect de la taille des caractères

Le premier juge a privé le prêteur de son droit aux intérêts motif pris que la vérification conduite sur plusieurs paragraphes du contrat de prêt personnel montrait que la prescription légale du corps 8 de la taille des caractères n'avait pas été respectée.

Aux termes de l'article R. 311-5 du code de la consommation, le contrat doit être rédigé en caractères dont la hauteur ne peut être inférieure au corps huit et ce à peine de déchéance totale du droit aux intérêts conformément aux dispositions de l'article L. 311-48 du code de la consommation.

Le corps huit correspond à "3'mm en points Didot" et il est admis qu'on mesure le corps d'une lettre de la tête des lettres montantes, l, d, b, à la queue des lettres descendantes, g, p, q. Le blanc que l'on remarque d'une ligne à l'autre provient du talus existant entre les lettres qui ne montent ni ne descendent. Il suffit, pour s'assurer du respect de cette prescription réglementaire, de diviser la hauteur en millimètres d'un paragraphe (mesuré du haut des lettres montantes de la première ligne au bas des lettres descendantes de la dernière ligne) par le nombre de lignes qu'il contient. Le quotient ainsi obtenu doit être au moins égal à trois millimètres.

S'il est exact qu'aucune disposition légale ou réglementaire ne définit précisément le corps 8 ou n'exclut le point "Pica", pour autant, lorsque le législateur français a légiféré le 24 mars 1978 dans le domaine du droit de la consommation, il s'est référé implicitement à la norme typographique française et donc au point Didot. Il ne peut être laissé aux seuls établissements bancaires le soin de déterminer quel point et quelle police permettrait de considérer que l'offre de prêt est suffisamment lisible alors qu'il s'agit d'appliquer des textes d'ordre public ayant trait à la protection des consommateurs. Le corps huit correspond à 3 mm en points Didot.

En l'espèce, il convient de relever que la vérification effectuée démontre que le contrat est conforme à l'article R. 311-5 précité.

Il n'y a donc pas lieu à déchéance du droit aux intérêts pour ce motif.

3- Sur la remise de la fiche d'informations précontractuelles

Il résulte de l'article L. 311-6 du code de la consommation applicable au cas d'espèce que préalablement à la conclusion du contrat de crédit, le prêteur ou l'intermédiaire de crédit donne à l'emprunteur, par écrit ou sur un autre support durable, les informations nécessaires à la comparaison de différentes offres et permettant à l'emprunteur, compte tenu de ses préférences, d'appréhender clairement l'étendue de son engagement.

Cette fiche d'informations précontractuelles -FIPEN- est exigée à peine de déchéance totale du droit aux intérêts (article L. 311-48), étant précisé qu'il incombe au prêteur de rapporter la preuve de ce qu'il a satisfait à son obligation d'informations et de remise de cette FIPEN.

A cet égard, la clause type, figurant au contrat de prêt, selon laquelle l'emprunteur reconnaît avoir reçu la fiche d'informations précontractuelles normalisées européennes, n'est qu'un indice qu'il incombe au prêteur de corroborer par un ou plusieurs éléments complémentaires.

Il a toutefois été jugé qu'un document qui émane du seul prêteur ne peut utilement corroborer les mentions de cette clause type de l'offre de prêt pour apporter la preuve de l'effectivité de la remise. (Cass. civ. 1, 7 juin 2023, n° 22-15.552).

Dès lors, la production de la FIPEN remplie par le prêteur ne saurait suffire à corroborer cette clause car ce qui doit être prouvé d'emblée par le prêteur est la remise effective à M. [S], non représenté en appel, de la FIPEN personnalisée.

Il doit dès lors être considéré que la société Sogefinancement qui ne produit que le contrat comportant une clause de reconnaissance et une FIPEN remplie mais non signée par M. [S] ne rapporte pas suffisamment la preuve d'avoir respecté l'obligation qui lui incombe, sans qu'elle puisse valablement opposer que la signature de cette pièce n'est pas exigée par les textes ou que le fait que l'appréciation des éléments de preuves apportés ait pu être différente est de nature à heurter un principe de sécurité juridique.

La déchéance du droit aux intérêts est donc encourue sur ce fondement et le jugement doit être confirmé en ce qu'il l'a prononcée.

Sur le montant des sommes dues

Le premier juge a constaté la régularité de la déchéance du terme du contrat et l'exigibilité des sommes dues, ce point n'étant pas remis en cause.

Aux termes de l'article L. 311-48 du code de la consommation, lorsque le prêteur est déchu du droit aux intérêts, l'emprunteur n'est tenu qu'au seul remboursement du capital suivant l'échéancier prévu, ainsi que, le cas échéant, au paiement des intérêts dont le prêteur n'a pas été déchu. Les sommes déjà perçues par le prêteur au titre des intérêts, qui sont productives d'intérêts au taux de l'intérêt légal à compter du jour de leur versement, sont restituées par le prêteur ou imputées sur le capital restant dû.

Il y a donc lieu de déduire de la totalité des sommes empruntées soit 17 095 euros la totalité des sommes payées admises par la banque soit 15 052,92 euros soit un solde de 2 042,08 euros, le jugement étant confirmé. La privation du droit aux intérêts exclut que le prêteur puisse prétendre à toute autre somme et en particulier à l'indemnité de résiliation.

Le prêteur, bien que déchu de son droit aux intérêts, demeure fondé à solliciter le paiement des intérêts au taux légal, en vertu de l'article 1153 devenu 1231-6 du code civil, sur le capital restant dû, majoré de plein droit deux mois après le caractère exécutoire de la décision de justice en application de l'article L. 313-3 du code monétaire et financier.

Ces dispositions légales doivent cependant être écartées s'il en résulte pour le prêteur la perception de montants équivalents ou proches de ceux qu'il aurait perçus si la déchéance du droit aux intérêts n'avait pas été prononcée, sauf à faire perdre à cette sanction ses caractères de dissuasion et d'efficacité (CJUE 27 mars 2014, affaire C-565/12, Le Crédit Lyonnais SA / Fesih Kalhan).

En l'espèce, le crédit personnel a été accordé à un taux d'intérêt annuel fixe de 7,40 %. Dès lors, les montants susceptibles d'être effectivement perçus par le prêteur au titre des intérêts au taux légal apparaissent significativement inférieurs à celui résultant du taux contractuel sauf en cas de majoration de cinq points. Il convient en conséquence de ne pas faire application de l'article 1231-6 du code civil dans son intégralité et de n'écarter que l'application de l'article L. 313-3 du code monétaire et financier. Il y a donc de confirmer le jugement en ce qu'il a dit que la condamnation porterait intérêts au taux légal à compter du 28 juillet 2020 sans majoration.

Sur les autres demandes

Le jugement doit être confirmé en ce qu'il a condamné M. [S] aux dépens de première instance et a rejeté la demande de la société Sogefinancement sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile. La société Sogefinancement qui succombe conservera la charge de ses dépens d'appel et de ses frais irrépétibles.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Statuant par arrêt rendu par défaut et en dernier ressort,

Confirme le jugement ;

Y ajoutant,

Rejette la fin de non-recevoir ;

Laisse les dépens d'appel à la charge de la société Sogefinancement ;

Rejette toute demande plus ample ou contraire.

La greffière La présidente


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 4 - chambre 9 - a
Numéro d'arrêt : 22/16701
Date de la décision : 02/05/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 08/05/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-05-02;22.16701 ?
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