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02/05/2024 | FRANCE | N°22/15588

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 4 - chambre 9 - a, 02 mai 2024, 22/15588


Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 9 - A



ARRÊT DU 02 MAI 2024



(n° , 6 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 22/15588 - N° Portalis 35L7-V-B7G-CGLJE



Décision déférée à la Cour : Jugement du 30 mai 2022 - Tribunal Judiciaire de PARIS - RG n° 11-22-001800





APPELANT



Monsieur [L] [O]

né le 19 juillet 1984 à [Localité 8] (

73)

[Adresse 2]

[Localité 3]



représenté et assisté de Me Alexandre MEILHAUD, avocat au barreau de PARIS, toque : R191





INTIMÉE



La SAS LILA, société par actions simplifiée ag...

Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 9 - A

ARRÊT DU 02 MAI 2024

(n° , 6 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 22/15588 - N° Portalis 35L7-V-B7G-CGLJE

Décision déférée à la Cour : Jugement du 30 mai 2022 - Tribunal Judiciaire de PARIS - RG n° 11-22-001800

APPELANT

Monsieur [L] [O]

né le 19 juillet 1984 à [Localité 8] (73)

[Adresse 2]

[Localité 3]

représenté et assisté de Me Alexandre MEILHAUD, avocat au barreau de PARIS, toque : R191

INTIMÉE

La SAS LILA, société par actions simplifiée agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domicilié de plein droit audit siège

N° SIRET : 808 069 496 00012

[Adresse 1]

[Localité 5]

représentée par Me Edouard CAHN, avocat au barreau de PARIS

ayant pour avocat plaidant Me Rodolphe CAHN, avocat au barreau de MULHOUSE

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 5 mars 2024, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Mme Sophie COULIBEUF, Conseillère, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Mme Muriel DURAND, Présidente de chambre

Mme Laurence ARBELLOT, Conseillère

Mme Sophie COULIBEUF, Conseillère

Greffière, lors des débats : Mme Camille LEPAGE

ARRÊT :

- CONTRADICTOIRE

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Mme Muriel DURAND, Présidente et par Mme Camille LEPAGE, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Par contrat de location n° TS04C302084 en date du 28 juin 2018, M. [L] [O], qui avait réservé par internet le 14 juin 2018, a loué auprès de la société Lila SAS un véhicule Renault master immatriculé [Immatriculation 6] dans l'agence de [Localité 7], sise [Adresse 4], étant précisé que ce véhicule devait être restitué à l'agence de [Localité 3] Meinau le 30 juin 2018.

Le 29 juin 2018, un accident est survenu sur le trajet entraînant l'arrachage de la capucine et nécessitant l'intervention de l'assistance.

Une expertise a été confiée au cabinet d'expertise EAS qui a estimé les réparations à un montant de 6 780,58 euros.

Suite à cette expertise, la société Lila a établi une facture n° TS04502508 en date du 17 octobre 2018 pour un montant de 5 480,58 euros correspondant aux frais de remise en état, augmenté des frais d'expertise et des frais de dossier, déduction faite du dépôt de garantie et en a réclamé le paiement à M. [O] par courriel du 7 novembre 2018, puis par courrier recommandé avec accusé de réception en date du 19 novembre 2018 et de nouveau par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 13 décembre 2018, et ce sans succès.

Par jugement réputé contradictoire en date du 30 mai 2022, le tribunal judiciaire de Paris, saisi par assignation en date du 10 février 2022, a fait droit à la demande de la société Lila condamnant M. [O] à lui payer une somme de 5 480,58 euros au titre des dégradations du véhicule loué, et ce avec intérêts au taux légal à compter du 10 février 2022, outre une somme de 1 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Aux termes de cette décision, le juge a estimé que M. [O] avait fait une mauvaise appréciation du gabarit du camion loué, et notamment de sa hauteur et a rappelé que les conditions générales du contrat devaient s'appliquer, et que la capucine du toit ayant été arrachée M. [O] devait payer le coût des dégâts.

Le jugement a été signifié le 1er août 2022 à M. [O] par acte remis à étude.

Par déclaration en date du 31 août 2022, M. [O] a interjeté appel de la décision.

Aux termes de ses conclusions d'appelant signifiées par RPVA le 15 janvier 2024, M. [O] sollicite de la cour :

- d'infirmer en toutes ses dispositions la décision du tribunal judiciaire de Paris du 30 mai 2022,

- statuant à nouveau,

- de débouter la société Lila de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions,

- de dire et juger que la franchise contractuelle de 1 800 euros a vocation à être mise en 'uvre,

- de limiter la condamnation prononcée à son encontre à la somme de 300 euros,

- de condamner la société Lila à lui régler la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.

À l'appui de ses prétentions, il affirme que le sinistre trouverait son origine dans l'éclatement d'un pneu du véhicule ayant occasionné les dégâts sur la capucine.

Il estime par ailleurs que compte tenu des stipulations du contrat et de la façon dont le sinistre s'est déroulé, il ne pourrait être redevable que de la franchise accident de 1 800 euros, étant précisé qu'il a versé un dépôt de garantie de 1 500 euros qui ne lui a pas été restitué par la société Lila.

Par conclusions déposées par RPVA le 14 décembre 2022, la société Lila demande à la cour que soit :

- déclaré irrecevable et pour le moins mal fondé l'appel formé par M. [O] à l'encontre du jugement rendu par le tribunal judiciaire de Paris le 30 mai 2022,

- confirmé en toutes ses dispositions le jugement du 30 mai 2022 rendu par le tribunal judiciaire de Paris,

- condamné en conséquence M. [O] à payer à la société Lila une somme de 5 480,58 euros au titre des dégradations du véhicule loué, avec intérêts au taux légal à compter du 10 février 2022,

- condamné M. [O] à payer à la société Lila une somme de 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour la procédure de première instance et de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour la procédure d'appel, outre les dépens.

Elle expose que la version de M. [O], ne reposant par ailleurs sur aucun élément, est totalement impossible puisque l'éclatement d'un pneu ne peut générer des dégâts au sommet de la fourgonnette où se situe la capucine. Elle affirme que le document établi par le dépanneur ne peut avoir une quelconque force probante puisque celui-ci n'est intervenu qu'après le sinistre et n'a fait que reprendre les déclarations de M. [O].

Elle estime que la capucine n'a pu être détériorée qu'en raison d'un choc de cette dernière avec un objet.

Elle ajoute que M. [O] a pu préparer sa version avant de remplir la déclaration circonstanciée d'accident le 9 juillet 2018, soit plus de 10 jours après l'accident.

Elle conclut à l'existence d'une faute ou d'une négligence particulièrement grave de M. [O] qui a continué à rouler alors même que la capucine était endommagée, entraînant son arrachement.

Elle estime donc applicable l'article III.2 des conditions générales de vente, de sorte qu'il appartient à M. [O] de l'indemniser totalement des dommages subis par le véhicule.

Elle considère enfin qu'il n'y a pas lieu d'appliquer la franchise.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 16 janvier 2024.

L'affaire a été appelée à l'audience du 5 mars 2024 et mise à disposition au greffe au 2 mai 2024.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la demande en paiement

L'article 1103 du code civil dispose que : "les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits".

L'article 1353 du code civil dispose que "Celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver. Réciproquement, celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a pro-duit l'extinction de son obligation".

L'article 9 du code de procédure civile prévoit que "Il incombe à chaque partie de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de sa prétention".

L'article III.2 des conditions générales du contrat de location stipule :

"III.2. Ce qui n'est pas assuré : Sauf force majeure, les dommages restent intégralement à votre charge, sans qu'il puisse être fait application des dispositions applicables à la franchise, dans la limite de la valeur du véhicule augmentée des frais et coûts liés à son immobilisation dans les cas suivants : (')

- de la mauvaise appréciation du gabarit (hauteur, largeur, etc.) du véhicule tant en ses parties hautes que basses (parties hautes du véhicule : celles situées au-dessus de la ligne de pare-brise et parties basses : celles situées en dessous du bas de portes/pare -chocs). Les hauteurs de nos véhicules sont disponibles en agences ;(')

- de la négligence ou de la faute manifestement excessive (s) de votre part dans la conduite ou la garde du véhicule (y.c. des systèmes de verrouillage et de démarrage /arrêt) et notamment l'absence de respect des règles et critères impératifs de conduite imposés par la loi ou la réglementation applicable lors de la circulation du véhicule'", il ressort des développements précédents qu'aucune faute ne peut être imputée à M. [O] que ce soit au niveau de la mauvaise appréciation du gabarit ou de la négligence/faute.

En l'espèce, il n'est pas contesté que M. [O] et son épouse ont eu un accident sur le trajet entre Paris et [Localité 3], lors de leur déménagement, le 29 juin 2018 à 19h49, à [Localité 9] (51 430), entraînant la mise en place d'une assistance (courriel du service d'assistance de Mondial Assistance du 29 juin 2018 à 20h10) et des dommages sur la partie haute du véhicule.

Les avis des parties divergent cependant sur l'origine de l'accident.

Si M. [O] invoque l'éclatement d'un pneu et donc un cas de force majeure, la société Lila estime quant à elle que c'est une mauvaise appréciation de la hauteur de l'utilitaire associée à une faute du conducteur qui a repris la route avec une capucine endommagée, qui a entrainé les dégâts.

Force est de relever qu'aucune expertise judiciaire, ou simplement contradictoire, n'a été réalisée pour déterminer les causes exactes de l'accident.

Si le premier juge a estimé que l'accident serait dû à une mauvaise appréciation du gabarit et en particulier de la hauteur de l'utilitaire par l'usager, la cour observe que, selon le contrat de location du 28 juin 2018, le véhicule utilitaire Renault Master immatriculé EV 393 RQ était de contenance de 22 m³, d'une hauteur totale de 2,30 m et pouvait supporter une charge utile de 1,190 t, alors que sur le procès-verbal d'état du véhicule daté du même jour, la hauteur du véhicule a été notée manuscritement comme étant de 3 m.

Il ne peut dès lors être conclu que M. [O] a mal évalué la hauteur du véhicule qu'il louait alors que les conditions générales de vente évoquent dans l'article III 2 : "les hauteurs de nos véhicules sont disponibles en agences" et que force est de constater qu'il a bénéficié d'informations contradictoires dans les documents qui lui ont été remis par l'agence de location ou à tout le moins qu'on lui a donné de mauvais renseignements sur la taille du véhicule.

En revanche, la cour dispose des éléments suivants pour établir l'origine de l'accident :

- selon le document produit par M. [O] (pièce n° 4), du garage où a été remorqué le véhicule, le diagnostic de l'accident est "éclatement roue arrière gauche + illisible et capucine illisible suite éclatement",

- le descriptif de "l'incident déclaré" selon l'assurance est : "accident choc avant capucine retournée". Il y est indiqué également que le véhicule a été rapatrié au garage suite aux dommages,

- la déclaration circonstanciée d'accident de M. [O] du 9 juillet 2018 où il relate avoir entendu comme une explosion puis senti le véhicule s'affaisser et se déporter vers la gauche et nomme un témoin qui a vu un éclat et un objet être projetés puis le véhicule se déporter,

- le rapport d'expertise du cabinet EAS en date du 3 octobre 2018 selon lequel "les dommages relevés au niveau du latéral gauche du véhicule sont imputables à un choc contre corps fixe".

L'éclatement d'un pneu est corroboré par le document émanant du garage et n'est contredit par aucune des autres pièces qui restent taisantes sur le sujet. M. [O] soutient qu'il en est à l'origine de l'accident tandis que la société Lila le conteste.

Pour autant il n'est pas établi de manière suffisamment probante que cet éclatement aurait été à l'origine du retournement de la capucine, aucun élément technique n'étant apporté sur ce point. Il n'est d'ailleurs pas davantage démontré que le retournement de la capucine aurait pu entraîner un éclatement du pneu.

D'autre part, aucune des pièces sus visées n'évoque le heurt du sommet du véhicule ce qui aurait été le cas si par suite d'une erreur de gabarit, M. [O] avait tenté de passer sous un pont ou un tunnel ou bâtiment trop bas. Tous en revanche font état d'un choc situé sur le côté gauche du véhicule, en partie basse, ce qui est parfaitement contraire à la thèse de la société Lila d'une mauvaise appréciation du gabarit du véhicule. Il reste cependant que ce choc a existé et qu'il n'est pas donné d'explication à ce sujet.

Ce qui n'est en revanche pas contesté, c'est la reprise de la route par M. [O] avec le véhicule sans avoir fait réparer la capucine.

Or, alors que le service assistance de la société de location avait été averti, il ne résulte d'aucune pièce du dossier que M. [O] aurait été mis en garde sur les conséquences d'une reprise de trajet avec une capucine retournée, en particulier sur un risque plus ou moins sérieux d'arrachement, voire aurait été empêché de repartir.

Il résulte de ce qui précède que si la société Lila échoue à démontrer que M. [O] a commis une faute en appréciant mal le gabarit de son véhicule, ce dernier n'établit pas non plus la force majeure. Il doit donc être considéré que M. [O] peut bénéficier de la franchise prévue à l'article III.1.2. du contrat.

Le jugement sera donc infirmé.

M. [O] sera donc condamné au paiement d'une somme de 300 euros correspondant à la différence entre le montant de la franchise (1 800 euros) et le montant du dépôt de garantie non restitué (1 500 euros), et ce avec intérêts légal à compter du présent arrêt.

Sur les demandes accessoires

M. [O] succombant sera condamné aux dépens de première instance et d'appel.

En considérations d'équité, il ne sera pas fait application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile. Le jugement de première instance sera donc infirmé de ce chef.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Statuant par arrêt contradictoire,

Infirme le jugement en toutes ses dispositions sauf en ce qu'il a condamné M. [L] [O] aux dépens ;

Statuant à nouveau,

Dit que la franchise de 1 800 euros prévue à l'article III.1.2. du contrat doit s'appliquer à l'accident survenu le 29 juin 2018 ;

Dit que la somme de 1 500 euros versée par M. [L] [O] au titre du dépôt de garantie doit être déduite de cette franchise ;

En conséquence,

Condamne M. [L] [O] à payer à la société Lila SAS la somme de 300 euros au titre de la franchise pour la location du véhicule Renault Master immatriculé EV 393 RQ, et ce avec intérêts au taux légal à compter du présent arrêt ;

Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile en première instance comme en appel ;

Déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires ;

Condamne M. [L] [O] aux dépens d'appel.

La greffière La présidente


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 4 - chambre 9 - a
Numéro d'arrêt : 22/15588
Date de la décision : 02/05/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 08/05/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-05-02;22.15588 ?
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