La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

02/05/2024 | FRANCE | N°21/08610

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 16, 02 mai 2024, 21/08610


REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS







COUR D'APPEL DE PARIS



Chambre commerciale internationale

POLE 5 CHAMBRE 16



ARRET DU 02 MAI 2024



(n°43 /2024, 13 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/08610 - N° Portalis 35L7-V-B7F-CDTTX



Décision déférée à la Cour : sentence arbitrale rendue le 1er septembre 2016 à Paris sou l'égide de la Cour internationale d'arbitrage de la Chambre de commerce internationale (ICC Case n° 18/711/CA/ASM).>




DEMANDEURS AU RECOURS :



Société OPPORTUNITY FUND

société de droit des îles Caïmans,

c/o MUFG Alternative Fund Services (Cayman) Limited, MUFG House, ...

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Chambre commerciale internationale

POLE 5 CHAMBRE 16

ARRET DU 02 MAI 2024

(n°43 /2024, 13 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/08610 - N° Portalis 35L7-V-B7F-CDTTX

Décision déférée à la Cour : sentence arbitrale rendue le 1er septembre 2016 à Paris sou l'égide de la Cour internationale d'arbitrage de la Chambre de commerce internationale (ICC Case n° 18/711/CA/ASM).

DEMANDEURS AU RECOURS :

Société OPPORTUNITY FUND

société de droit des îles Caïmans,

c/o MUFG Alternative Fund Services (Cayman) Limited, MUFG House, [Adresse 6]-[Localité 2] (ILES CAÏMANS)

prise en la personne de ses représentants légaux,

Société OPPORTUNITY ASSET MANAGEMENT INC

société de droit des îles Caïmans,

ayant son siège social : [Adresse 4] - [Localité 11] (ILES CAÏMANS),

prise en la personne de ses représentants légaux,

Société OPPORTUNITY EQUITY PARTNERS LTD

société de droit des îles Caïmans,

ayant son siège social : [Adresse 20], [Localité 13] (ILES CAÏMANS),

prise en la personne de ses représentants légaux,

Société OPPORTUNITY ASSET MANAGEMENT LTDA

société de droit brésilien,

ayant son siège social : [Adresse 17] [Localité 16] (BRESIL),

prise en la personne de ses représentants légaux,

Société OPPORTUNITY HDF PARTICIPAÇOES S.A.

anciennement BANCO OPPORTUNITY S.A

société de droit brésilien,

ayant son siège social : [Adresse 7], [Localité 16] (BRESIL),

prise en la personne de ses représentants légaux,

Société PRIME INVESTMENT SERVICES LLC

anciennement OPPORTUNITY PRIME INVESTMENT SERVICES LTD

société de droit du Delaware,

ayant son siège social : [Adresse 19], [Localité 12] (ETATS-UNIS),

prise en la personne de ses représentants légaux,

Société OPPORTUNITY ASSET ADMINISTRADORA DE RECUSOS DE TERCEIROS LTDA

société de droit brésilien,

ayant son siège social : [Adresse 7], [Localité 16] (BRESIL),

prise en la personne de ses représentants légaux,

Société OPPORTUNITY GESTORA DE RECURSOS LTDA

société de droit brésilien,

ayant son siège social : [Adresse 7], [Localité 16] (BRESIL),

prise en la personne de ses représentants légaux,

Société OPPORTUNITY LOGICA RIO CONSULTORIA E PARTICIPACOES LTDA

anciennement OPPORTUNITY LOGICA RIO GESTORA DE RECURSOS LTDA

société de droit brésilien,

ayant son siège social : [Adresse 7], [Localité 16] (BRESIL),

prise en la personne de ses représentants légaux,

Société OPPORTUNITY EQUITY PARTNERS ADMINISTRADORA DE RECURSOS LTDA

société de droit brésilien,

[Adresse 7],[Localité 16], BRAZIL

prise en la personne de ses représentants légaux,

Société OPP I FUNDO DE INVESTIMENTO EM AÇOES

société de droit brésilien,

ayant son siège social : [Adresse 7], [Localité 16] (BRESIL),

prise en la personne de ses représentants légaux,

Société LUXOR FUNDO DE INVESTIMENTO MULTIMERCADO

société de droit brésilien,

ayant son siège social : [Adresse 7], [Localité 16] (BRESIL),

prise en la personne de ses représentants légaux,

Société INTERNATIONAL MARKET INVESTMENTS N.V

Société de droit néerlandais,

ayant son siège social : [Adresse 8], [Localité 1] (PAYS-BAS)

prise en la personne de ses représentants légaux,

Monsieur [V] [F] [T]

né le 03 Octobre 1954 à [Localité 18] (BRESIL)

demeurant : [Adresse 10],[Localité 16] (BRESIL),

Monsieur [H] [S]

né le 17 Mars 1945 à [Localité 15] (BRESIL)

demeurant : [Adresse 9],[Localité 16] (BRESIL),

Ayant pour avocat postulant : Me Luca DE MARIA de la SELARL PELLERIN - DE MARIA - GUERRE, avocat au barreau de PARIS, toque : L0018

Ayant pour avocats plaidants : Me Yas BANIFATEMI et Thomas PARIGOT, du cabinet GAILLARD BANIFATEMI SHELBAYA DISPUTES, avocats au barreau de PARIS, toque : R257

DEFENDERESSES AU RECOURS :

Société TELECOM ITALIA S.P.A.

société de droit italien,

ayant son siège social : [Adresse 21], [Localité 5] (ITALIE)

prise en la personne de ses représentants légaux,

Société TELECOM ITALIA FINANCE S.A.

société anonyme de droit luxembourgeois,

ayant son siège social : [Adresse 3], [Localité 14] (GRAND DUCHE DU LUXEMBOURG)

prise en la personne de ses représentants légaux,

Ayant pour avocat postulant : Me Benjamin MOISAN de la SELARL BAECHLIN MOISAN Associés, avocat au barreau de PARIS, toque : L34

Ayant pour avocats plaidants : Mez Jean-Yves GARAUD et Me Guillaume DE RANCOURT, du cabinet CLEARY GOTTIEB STEEN 1 HAMILTON LLP, avocats au barreau de PARIS, toque : J021

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 08 Janvier 2024, en audience publique, devant la Cour composée de :

M. Daniel BARLOW, Président de chambre

Mme Fabienne SCHALLER, Présidente de chambre

Mme Laure ALDEBERT, Conseillère

qui en ont délibéré.

Un rapport a été présenté à l'audience par M. Daniel BARLOW dans les conditions prévues par l'article 804 du code de procédure civile.

Greffier, lors des débats : Mme Najma EL FARISSI

ARRET :

- contradictoire

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Daniel BARLOW, président de chambre et par Najma EL FARISSI, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

* *

*

I/ FAITS ET PROCEDURE

1. La cour est saisie d'un recours en annulation contre une sentence finale rendue à Paris le 1er septembre 2016 sous l'égide de la Cour internationale d'arbitrage de la Chambre de commerce internationale de Paris (ci-après la « CCI »), dans un litige opposant :

- d'un côté, un ensemble d'entités dites « Opportunity » et leurs fondateurs, MM. [V] [T] et [H] [S] (ci-après « Opportunity » ou les « demandeurs »),

- de l'autre, les sociétés Telecom Italia S.P.A. et Telecom Italia International NV, devenue Telecom Italia Finance SA (ci-après « Telecom Italia » ou les « défenderesses »).

2. La procédure arbitrale trouve son origine dans la conclusion et l'exécution d'un protocole d'accord transactionnel signé par les parties le 28 avril 2005 en vue de mettre un terme aux différends nés de leur participation commune à un consortium établi en vue de favoriser leurs investissements sur le marché des télécommunications brésilien.

3. Dans les années 1990, le Brésil a décidé la privatisation de certaines de ses entreprises publiques, en particulier dans le secteur des télécommunications. Dans ce contexte, M. [T] a fondé un consortium afin de soumissionner pour l'obtention du marché public de la téléphonie fixe de la Région II du Brésil. Ce consortium comprenait Opportunity et plusieurs investisseurs associés, ainsi que Citibank et des fonds de pension d'entreprises publiques brésiliennes. Il a par la suite été rejoint par Telecom Italia.

4. Le 29 juillet 1998, le consortium a été adjudicataire de la société de télécommunications Tele Centro Sul Participações SA, renommée Brasil Telecom Participações SA (« BTP »), qui a pris le contrôle de l'opérateur Brasil Telecom, lequel contrôlait le marché de la téléphonie fixe dans la Région II du Brésil. Cet investissement a été réalisé par l'intermédiaire de la société Solpart Participações SA (« Solpart »). Pour ce faire, le consortium s'est doté d'un pacte d'actionnaires désigné sous la dénomination « pacte d'actionnaires de Solpart ».

5. Les relations entre les partenaires du consortium se sont rapidement dégradées au sujet de la direction stratégique et du contrôle de Brasil Telecom.

6. Un premier désaccord s'est fait jour lors de l'acquisition par Brasil Telecom de la société Companhia Riograndese de Telecomunicações (ci-après « CRT »), appartenant à la société Telefónica, Opportunity accusant Telecom Italia d'avoir privilégié ses propres intérêts au détriment de Brasil Telecom en s'alliant à Telefónica pour faire augmenter le prix de CRT.

7. Un autre différend est survenu concernant la proposition de Brasil Telecom de participer à une vente aux enchères le 24 janvier 2001 en vue d'acquérir une licence de téléphonie mobile dans la Région II du Brésil, Opportunity faisant grief à Telecom Italia d'avoir fait obstacle à l'enchère de Brasil Telecom au profit de l'une de ses filiales, TIM Participações SA.

8. À la suite de cette opération, Telecom Italia s'est trouvée détentrice de plus de 20 % du capital et des droits de vote d'un prestataire de téléphonie fixe, ce que la réglementation brésilienne ne permettait pas. Telecom Italia a en conséquence cédé une partie de ses parts dans Brasil Telecom à d'autres membres du consortium, avec la garantie d'une option de rachat de ses actions une fois l'obstacle réglementaire résolu.

9. Telecom Italia ayant souhaité racheter ses parts en 2003, Opportunity a engagé une procédure d'arbitrage à Londres afin d'obtenir une décision l'empêchant d'exercer son droit d'option. Telecom Italia a saisi le tribunal de commerce de Rio de Janeiro afin d'obtenir une ordonnance provisoire à l'encontre d'Opportunity pour faire respecter l'option de rachat convenue.

10. L'autorité brésilienne de régulation du secteur des télécommunications (ANATEL) a émis une opinion favorable à l'opération le 16 janvier 2004, en prévoyant une période de 18 mois pour le règlement des conflits des parties au sujet des chevauchements des licences. L'autorité de la concurrence brésilienne (CADE) a de son côté ordonné à Telecom Italia de ne pas réintégrer le groupe de contrôle de Brasil Telecom, le 17 mars 2004, avant d'inverser sa décision le 30 juin 2004.

11. Dans ce contexte, Opportunity accuse Telecom Italia d'avoir mobilisé, par corruption et trafic d'influence, des forces politiques du gouvernement brésilien (la « macro-corruption ») ainsi que différents agents, membres de police, juges et journalistes (la « micro-corruption ») pour mettre en 'uvre une stratégie d'extorsion à son encontre afin d'obtenir le contrôle de Brasil Telecom. Elle considère notamment que Telecom Italia a orchestré à l'encontre de M. [T] une opération de police, « l'opération Chacal », provoqué des procédures abusives, saboté les relations d'Opportunity avec ses partenaires et manipulé plusieurs médias brésiliens afin qu'ils mènent une campagne diffamatoire à son encontre et à l'encontre de M. [T].

12. Telecom Italia conteste ces faits et accuse Opportunity d'avoir diligenté une vaste opération de surveillance illégale de ses activités, le « projet Tokyo », qui a conduit la police brésilienne à enquêter sur les agissements illégaux d'Opportunity. Telecom affirme par ailleurs qu'Opportunity a elle-même saboté ses relations avec ses partenaires commerciaux et que les juges qui ont eu à se prononcer sur les actions de M. [T] ont constaté son absence de crédibilité.

13. Aux termes de discussions longues et conflictuelles et après échanges de différents projets, les parties ont conclu, le 28 avril 2005, une série d'accords transactionnels, dont l'Opportunity Settlement Agreement (« OSA »), aux termes duquel, Opportunity et Telecom Italia sont convenues de résoudre leurs différends moyennant le paiement à Opportunity par Telecom Italia de la somme de 65 millions de dollars.

14. Le 23 mai 2012, Opportunity a engagé une procédure d'arbitrage contre Telecom Italia devant la CCI de Paris, sur le fondement de la clause compromissoire prévue à l'article 9.11 de l'OSA, alléguant, d'une part, que l'OSA a été obtenu par des faits de violence et de dol exercés par Telecom Italia et, d'autre part, que cet accord n'a pas été respecté par Telecom Italia.

15. Par sentence finale rendue à Paris le 1er septembre 2016, le tribunal arbitral a statué en ces termes :

« Pour les motifs exposés ci-dessus, le Tribunal :

(1) Rejette l'exception d'incompétence et d'irrecevabilité soulevée par les Défenderesses ;

(2) Rejette l'exception de prescription soulevée par les Défenderesses ;

(3) Rejette l'ensemble des réclamations formées par les Demandeurs ;

(4) Rejette l'ensemble des demandes reconventionnelles des Défenderesses ;

(5) Décide que chacune des Parties doit supporter ses propres frais de justice et honoraires d'experts ;

(6) Décide que chacune des Parties doit supporter la moitié des frais administratifs de la CCI et les frais et dépenses du Tribunal fixés par la Cour de la CCI dans sa séance du 4 août 2016 ;

(7) Rejette toutes autres requêtes et réclamations. »

16. Opportunity a formé un recours en annulation contre cette sentence, le 5 décembre 2016, objet de la présente instance.

17. Le 22 octobre 2017, Opportunity a engagé un recours en révision contre cette même sentence auprès de la Cour internationale d'arbitrage de la CCI, en invoquant des fraudes procédurales commises par Telecom Italia.

18. Le 5 mars 2018, Opportunity a obtenu la récusation de la présidente du tribunal arbitral, Mme [P] [N]. Le jour suivant, le co-arbitre nommé par Opportunity, M. [R] [O], a présenté sa démission. Opportunity a désigné M. [K] [U] en qualité de co-arbitre. Mme [M] [D] a été désignée nouvelle présidente du tribunal arbitral.

19. Le 15 novembre 2018, à la demande de Telecom Italia, la cour d'appel a sursis à statuer sur le recours en annulation jusqu'à ce que le tribunal arbitral rende une sentence dans le recours en révision.

20. Le 24 août 2020, le tribunal arbitral a rendu la sentence sur la révision aux termes de laquelle il a rejeté à l'unanimité la demande de révision.

21. Opportunity a déposé un recours en annulation contre la sentence sur la révision le 3 décembre 2020 (procédure enregistrée sous le n° de RG 20/17575).

22. Le 15 juin 2021, le premier recours en annulation a été réattribué à la chambre internationale de la cour d'appel (procédure enregistrée sous le présent numéro de RG).

23. La clôture a été prononcée le 5 décembre 2023 et l'affaire appelée à l'audience de plaidoiries du 8 janvier 2024.

24. Par conclusions d'incident du 8 janvier 2024, les demandeurs ont sollicité la révocation de l'ordonnance de clôture, à laquelle les défendeurs se sont opposés par conclusions en date du même jour.

II/ PRETENTIONS DES PARTIES

A. Conclusions de procédure

25. Dans leurs conclusions de procédure afin de révocation de l'ordonnance de clôture, les entités Opportunity, M. [T] et M. [S] demandent à la cour, au visa de l'article 6 § 1 de la CESDH et des dispositions des articles 15, 16 et 803 du code de procédure civile, de bien vouloir :

- Révoquer l'ordonnance de clôture prononcée le 5 décembre 2024 ;

- Débouter Telecom Italia de toute demande contraire.

26. Dans leurs conclusions de procédure du même jour, les sociétés Telecom Italia demandent à la cour, au visa de l'article 803 du code de procédure civile, de bien vouloir débouter les sociétés Opportunity de leur demande de révocation de l'ordonnance de clôture.

B. Conclusions au fond

27. Dans leurs conclusions récapitulatives notifiées par voie électronique le 5 novembre 2023, les entités Opportunity, M. [T] et M. [S] demandent à la cour, au visa des articles 1518 et suivants, notamment l'article 1520 2°, 4° et 5°, et de l'article 700 du code de procédure civile, de bien vouloir :

- prononcer l'annulation de la sentence rendue le 1er septembre 2016 dans l'affaire CCI n° 18711/CA/ASM ;

- condamner Telecom Italia International N.V. et Telecom Italia S.p.A. au paiement de la somme de 300 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ; et

- condamner Telecom Italia International N.V. et Telecom Italia S.p.A. aux entiers dépens.

28. Dans leurs conclusions récapitulatives notifiées par voie électronique le 30 novembre 2023, les sociétés Telecom Italia demandent à la cour de bien vouloir :

- dire et juger les demanderesses mal fondées en leur recours en annulation de la première sentence rendue à Paris le 1er septembre 2016 ;

- en conséquence, rejeter le recours en annulation et débouter les demanderesses de toutes leurs demandes ;

- en tout état de cause, condamner les demanderesses à payer la somme de 350 000 euros aux défenderesses par application de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner les demanderesses aux entiers dépens, dont distraction au profit de la Selarl Baechlin Moisan par application de l'article 699 du code de procédure civile.

III/ MOTIFS DE LA DECISION

A. Sur la demande de révocation de l'ordonnance de clôture

29. Opportunity sollicite la révocation de l'ordonnance de clôture en faisant valoir que :

- elle a versé aux débats, le 4 décembre 2023, un rapport de police particulièrement utile à l'information de la cour ;

- compte tenu de sa date d'émission, la traduction de ce document en langue française n'a pu être obtenue et produite que le 8 décembre 2023, soit après le prononcé de la clôture ;

- il a déjà été jugé qu'une pièce versée aux débats après la clôture pouvait être déclarée recevable dès lors que l'autre partie avait eu l'occasion de présenter ses observations la concernant ;

- le rapport est en lien direct avec les faits dénoncés par Opportunity et vient conforter sa position ;

- sa traduction est indissociable du document et ne contient aucune information complémentaire, c'est un complément qui ne pouvait être communiqué avant le prononcé de la clôture ;

- Telecom Italia ne mentionne à aucun moment qu'il lui serait nécessaire d'y répondre ou de communiquer des pièces dans un délai incompatible avec la date de l'audience des plaidoiries ;

- la communication de la traduction, qui ne pouvait être communiquée avant la clôture, constitue une cause grave propre à justifier la révocation de l'ordonnance de clôture en ce qu'elle apporte un complément indispensable à la compréhension d'une pièce utile aux débats.

30. Telecom Italia s'oppose à cette demande en soutenant qu'Opportunity ne fait valoir aucune cause grave et encore moins une cause grave qui se serait révélée postérieurement à l'ordonnance de clôture.

SUR CE :

31. En vertu de l'article 802 du code de procédure civile, aucune conclusion ne peut être déposée ni aucune pièce produite aux débats après l'ordonnance de clôture, à peine d'irrecevabilité prononcée d'office, ce principe ne souffrant des aménagements que pour les demandes en intervention volontaire, les conclusions relatives aux loyers, arrérages, intérêts et autres accessoires échus et débours faits jusqu'à l'ouverture des débats, les demandes de révocation de l'ordonnance de clôture et les conclusions qui tendent à la reprise de l'instance.

32. L'article 803 du même code subordonne la révocation de l'ordonnance de clôture à la survenance d'une cause grave postérieure à son prononcé.

33. En l'espèce, les demandeurs au recours sollicitent la révocation de l'ordonnance de clôture afin de verser aux débats la traduction d'une pièce produite en langue portugaise la veille du prononcé de cette ordonnance.

34. L'examen du dossier fait toutefois apparaître que cette dernière pièce n'est pas citée par les demandeurs dans leurs conclusions récapitulatives, qui ont été signifiées avant à sa production.

35. Interrogés sur ce point, les intéressés ont indiqué qu'ils n'entendaient pas conclure sur ce document dans l'hypothèse où sa traduction serait admise aux débats.

36. Ainsi, alors même que la clôture a fait l'objet de plusieurs reports à leur demande, ils ne justifient d'aucune cause grave propre à motiver la révocation de l'ordonnance de clôture.

37. La demande qu'ils soutiennent en ce sens doit dès lors être rejetée.

B. Sur le fond

38. Les demandeurs au recours invoquent trois moyens d'annulation, le premier tiré de l'irrégularité de la constitution du tribunal arbitral, le deuxième de la contrariété de la reconnaissance ou de l'exécution de la sentence avec l'ordre public international, le troisième du non-respect du principe de la contradiction et de l'égalité des armes.

Sur le premier moyen tiré de l'irrégularité de la constitution du tribunal arbitral :

39. Opportunity conteste la régularité de la constitution du tribunal arbitral en faisant valoir que :

- à l'occasion du recours en révision, Opportunity a découvert des liens d'affaires étroits et continus entre Telecom Italia et le cabinet d'avocats au sein duquel la présidente du tribunal arbitral est associée ;

- ces liens, qui ont abouti à la récusation de la présidente par la CCI, étaient déjà établis, mais non révélés, au cours de l'arbitrage litigieux ;

- le cabinet Gide travaille pour Vivendi et ses filiales de manière constante depuis au moins 2013, cette relation d'affaires s'étant prolongée jusqu'à ce jour ;

- la présidente a souligné l'importance que ce client revêt pour son cabinet, en réservant le droit de celui-ci à développer cette relation dans le futur ;

- Vivendi est devenu l'actionnaire principal de Telecom Italia dès le 24 juin 2015, les liens entre les sociétés se renforçant alors que le délibéré était en cours ;

- la participation significative de Vivendi à la hauteur de 24,68% dans le capital social de Telecom Italia lors de la reddition de la sentence finale, conférait à Vivendi, même en l'absence de lien de contrôle, un intérêt économique significatif dans le résultat du litige et lui donne ainsi le statut de tiers intéressé à l'arbitrage ;

- au vu de l'absence d'affirmation contraire de la présidente du tribunal arbitral, celle-ci avait connaissance des liens existants entre le cabinet Gide, Vivendi et Telecom Italia ou doit être présumée en avoir eu connaissance ;

- l'importance de Vivendi pour le cabinet Gide est caractérisée non seulement par la régularité des services rendus par Gide à Vivendi, mais encore par la déclaration de la présidente selon laquelle, malgré les liens existants entre Vivendi et une partie à un arbitrage, son cabinet entendait privilégier ses relations avec Vivendi en continuant à lui rendre des services à l'avenir ;

- ces liens sont de nature à provoquer dans l'esprit des parties un doute raisonnable quant à l'indépendance et l'impartialité de la présidente du tribunal arbitral ;

- ce doute raisonnable a été reconnu par la CCI, qui a fait droit à la demande de récusation de la présidente dans le contexte du recours en révision contre la sentence au motif que les liens étaient d'une « importance suffisante pour entraîner de manière objective une situation de conflit » ;

- le tribunal arbitral était dès lors irrégulièrement constitué et la sentence finale devra être annulée sur le fondement de l'article 1520, 2°, du code de procédure civile.

40. Telecom Italia réplique que :

- aucun des éléments présentés par Opportunity n'est de nature à susciter dans l'esprit d'un observateur raisonnable un doute quant à l'indépendance et l'impartialité de la présidente du tribunal arbitral ;

- le juge doit, pour déterminer si l'arbitre est en situation de conflit d'intérêts apprécier les circonstances particulières de l'espèce de manière concrète et objective ;

- en l'espèce, une appréciation objective conduit à constater que, pendant l'arbitrage, Vivendi n'exerçait sur Telecom Italia aucun contrôle de droit ou de fait, de sorte que Vivendi ne peut pas être considéré comme tiers intéressé à l'arbitrage ;

- au sens du droit italien, Vivendi n'a exercé le contrôle et la direction de Telecom Italia qu'à partir de 2017, soit après la reddition de la sentence ;

- l'absence de contrôle de Vivendi sur Telecom Italia est d'autant plus manifeste qu'à l'époque de l'arbitrage les deux sociétés entretenaient des relations particulièrement conflictuelles et hostiles ;

- la décision de la cour de la CCI s'est prononcée sur l'apparence d'indépendance et d'impartialité de la présidente pour l'avenir, les éléments retenus pour motiver sa récusation étant postérieurs à la sentence ;

- même en admettant que Vivendi soit un tiers intéressé à l'arbitrage, les bases objectives permettant à un tiers de douter raisonnablement de l'indépendance et de l'impartialité de la présidente font défaut ;

- en effet, les liens entre Gide et Vivendi étaient particulièrement ténus, le cabinet Gide n'ayant reçu en 2017 que 16 473 euros au total de la part de Vivendi et de ses filiales, soit 0,0092 % de son chiffre d'affaires annuel ;

- ces liens étaient par ailleurs doublement indirects, dès lors qu'ils ne visent pas la présidente mais son cabinet et ne concernent pas la partie Telecom Italia mais une société tierce ;

- la présidente n'a jamais été personnellement impliquée dans les affaires traitées par son cabinet pour Vivendi ou ses filiales et n'a pas eu accès à des informations confidentielles qui auraient pu affecter son jugement dans l'arbitrage ;

- elle n'a pas manqué à son obligation de révélation, n'ayant eu connaissance des liens dénoncés qu'en 2017 ;

- le moyen tiré de l'irrégularité de la constitution du tribunal est donc infondé.

SUR CE :

41. L'article 1520, 2°, du code de procédure civile ouvre le recours en annulation lorsque le tribunal a été irrégulièrement constitué.

42. Il appartient au juge de la régularité de la sentence arbitrale d'apprécier à ce titre l'indépendance et l'impartialité de l'arbitre, en relevant toute circonstance de nature à affecter son jugement et à provoquer dans l'esprit des parties un doute raisonnable sur ces qualités, qui sont de l'essence même de la fonction arbitrale.

43. L'appréciation de l'indépendance procède d'une approche objective consistant à caractériser des faits précis et vérifiables, extérieurs à l'arbitre et susceptibles d'affecter sa liberté de jugement, tels que des liens personnels, professionnels ou économiques avec l'une des parties.

44. L'impartialité de l'arbitre suppose quant à elle l'absence de préjugés ou de partis pris susceptibles d'affecter son jugement, lesquels peuvent résulter de multiples facteurs tels que la nationalité de l'arbitre, son environnement social, culturel ou juridique.

45. En l'espèce, il résulte des débats et des pièces versées au dossier que :

- la procédure arbitrale à l'origine de la sentence objet du présent recours a débuté le 21 mai 2012 et s'est achevée le 1er septembre 2016 ;

- à la faveur du recours en révision engagé contre cette sentence par Opportunity le 22 octobre 2017, Telecom Italia a révélé dans ses écritures être soumise à la direction et à la coordination de Vivendi SA au sens de l'article 2497 du code civil italien ;

- Opportunity ayant invité les membres du tribunal arbitral à prendre en considération cette circonstance pour déterminer si une mise à jour de leurs déclarations d'indépendance et d'impartialité était nécessaire, la présidente de ce tribunal a, par déclaration du 21 décembre 2017, fait connaître aux parties n'avoir « jamais agi ni en tant que conseil ni en tant qu'arbitre dans une affaire impliquant Vivendi SA ou ses filiales » ;

- cette même déclaration révèle, s'agissant du cabinet au sein duquel la présidente exerçait en qualité d'associé, que :

' l'équipe financière de Gide intervient comme conseil habituel des banques dans le cadre des émissions obligataires de Vivendi ;

' Gide a représenté et conseille Canal+ et ses filiales (membre du même groupe de sociétés que Vivendi) ;

' Vivendi ou des membres du même groupe de sociétés figurent également dans la base de données de Gide en tant que client ou partie adverse dans des affaires étrangères au litige, dont la plupart sont inactives depuis 2013 ;

' Gide a représenté différentes chaînes dans des discussions ou des contentieux avec Canal+ ou Canal+ Distribution ou Canal Sat (le dernier dossier a été clôturé en 2015) ;

' Gide a représenté d'anciens actionnaires d'une société dans le cadre d'une action intentée par Vivendi au sujet d'un contrat de représentation et de garantie pour la cession de cette société, dossier clos en janvier 2017 ;

' le bureau de Varsovie de Gide a représenté Canal+ devant l'Office polonais de la concurrence et des droits des consommateurs (dossier clôturé en 2017).

- la présidente précise n'être impliquée dans aucune de ces affaires, tout en relevant que d'autres travaux pour ou contre Vivendi SA ou les membres de ses groupes des sociétés pourraient être réalisés par des associés de Gide ;

- par décision du 5 mars 2018, la Cour internationale d'arbitrage de la CCI a fait droit à la demande de récusation de la présidente formée par Opportunity.

46. Cette dernière décision retient notamment que :

« l'association de Vivendi avec Telecom Italia est d'une importance suffisante pour provoquer objectivement une situation de conflit empêchant [la présidente] de continuer à présider le tribunal arbitral. Toutefois, la Cour estime qu'il n'est pas pertinent de qualifier les intimés de filiales de Vivendi ou non. Il n'en demeure pas moins que Vivendi exerçait un contrôle pertinent sur Telecom Italia. C'est ce qui ressort clairement des faits suivants (considérés collectivement) :

(i) Telecom Italia est soumise à la gestion et à la coordination de Vivendi conformément à l'article 2497 du Code civil italien ;

(ii) Vivendi est le premier actionnaire unique avec une participation de 23,943 % dans le capital de Telecom Italia ;

(iii) La Commission nationale pour la Societa e la Borsa (Commissione Nazionale per le Societa e la Borsa) italienne, un organisme indépendant et officiel, a constaté en septembre 2017 que Vivendi exerçait un contrôle de facto sur Telecom Italia. À cet égard, la Cour a également noté que, selon les intimés, la décision a fait l'objet d'un appel ; et

(iv) Vivendi a nommé 10 des 15 membres du conseil d'administration de Telecom Italia en mai 2017.

47. Elle ajoute que :

« si l'importance (ou l'insignifiance) des revenus générés par un client pour un cabinet n'est pas, en soi, un facteur déterminant de la matérialité d'une relation entre Vivendi et les défenderesses, les faits pertinents sont les suivants :

(i) entre 2013 et 2017, le cabinet d'avocats de [la présidente] (Gide) a régulièrement travaillé pour Vivendi ; et

(ii) Gide s'est clairement réservé le droit de continuer à agir pour le compte de Vivendi et de ses sociétés affiliées (même pendant la procédure de révision et pendant la durée de la procédure), ce qui, indépendamment des revenus générés par Gide, montre que cette dernière considère que sa relation avec Vivendi est d'une importance et d'une valeur significatives.

['] l'ensemble de ce qui précède apparaît comme un lien suffisamment étroit entre Vivendi et les défendeurs, et de tels faits soulèvent un doute « raisonnable » quant à l'indépendance et à l'impartialité de [la présidente] au sens de l'article 14 du Règlement, qui n'exige pas de constater que le président serait partial ou dépourvu d'indépendance, d'autant plus que Gide s'est réservé le droit de continuer à agir pour le compte de Vivendi et de ses sociétés affiliées dans le cadre de la demande de révision et à l'avenir ».

48. Si les conditions et motifs de cette récusation ne font pas débat entre les parties, celles-ci s'opposent sur la prise en considération des liens existant entre Vivendi et Telecom Italia, et l'importance de Vivendi comme client du cabinet Gide, ainsi que sur les conséquences à tirer de ces éléments quant à la régularité de la procédure arbitrale et de la sentence objet du présent recours.

49. La cour retient à cet égard, s'agissant des liens entre les deux sociétés, que :

- les pièces versées aux débats établissent une prise de participation substantielle de Vivendi dans le capital social de Telecom Italia dès 2015 ;

- par communiqué de presse du 25 juin 2015, Vivendi annonçait ainsi devenir « l'actionnaire de référence » de Telecom Italia, indiquant détenir 14,9 % des actions ordinaires de cette société et précisant « avoir l'intention d'accompagner Telecom Italia sur le long terme » ;

- selon un communiqué de presse du 17 novembre 2015, cette détention était portée à 20,12 %, et devait atteindre 24,9 % en mars 2016, alors que la procédure arbitrale litigieuse était encore pendante ;

- en décembre 2015, Vivendi nommait quatre membres au conseil d'administration de Telecom Italia, le président de son directoire étant nommé vice-président du conseil d'administration de Telecom Italia le 27 avril 2016.

50. Indépendamment de l'existence d'une relation de contrôle au sens juridique du terme, l'importance de cette prise de participation combinée à l'implication directe de Vivendi dans la gouvernance de Telecom Italia, contemporaine de la procédure arbitrale litigieuse, démontrent l'existence d'un intérêt manifeste de Vivendi quant à l'issue de cette procédure, dont l'enjeu financier ne pouvait être considéré comme indifférent à cette société, au regard des demandes formées contre Telecom Italia, qui portaient sur plusieurs milliards de dollars.

51. Il résulte par ailleurs de la déclaration faite par la présidente du tribunal arbitral lors de la procédure de révision et des constats opérés par la CCI à l'occasion de la procédure de récusation précitée que le cabinet d'avocats au sein duquel la présidente exerçait en qualité d'associée est intervenu à différentes reprises comme conseil de la société Vivendi et de ses filiales avant comme pendant la période de l'arbitrage objet du présent recours.

52. Si Telecom Italia relève la modicité des honoraires correspondant à ces prestations au regard du chiffre d'affaires global de ce cabinet, le caractère récurrent de ces interventions, qui ne se limitaient pas à la société Vivendi mais s'étendaient à l'ensemble du groupe contrôlé par cette société, comme les enjeux attachés, pour ce cabinet, à un client d'une telle envergure attestent l'importance et le caractère significatif de cette relation, que confirme le choix fait par ce cabinet, au moment de la demande de récusation visant son associée, de privilégier la poursuite de ce courant d'affaires nonobstant l'existence de la procédure arbitrale ' la cour relevant ici que si cette volonté n'a été exprimée qu'en 2017, lors du recours en révision, les conditions économiques de cette collaboration étaient déjà scellées et solidement établies durant de la procédure arbitrale objet du présent recours.

53. Or, l'existence de tels liens entre un tiers intéressé à la procédure arbitrale et le cabinet d'avocats au sein duquel l'arbitre exerce en qualité d'associé est de nature à porter atteinte à son indépendance.

54. Il apparaît en effet que, si l'intégrité de la présidente du tribunal arbitral ne saurait en l'espèce être mise en cause, ces liens n'en caractérisent pas moins une situation objective de conflit d'intérêts propre à provoquer dans l'esprit des parties un doute raisonnable quant à l'indépendance de l'arbitre.

55. Il y a lieu, dans ces conditions, de faire droit au moyen d'annulation tiré de l'irrégularité de la constitution du tribunal arbitral et de prononcer l'annulation de la sentence de ce chef.

C. Sur les frais et dépens

56. Les sociétés Telecom Italia, qui succombent en leurs présentations, seront condamnées aux dépens, la demande qu'elles forment sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile étant rejetée.

57. Elles seront en outre condamnées in solidum à payer aux défenderesses la somme de 100 000 euros au titre du même article.

IV/ DISPOSITIF

Par ces motifs, la cour :

1) Annule la sentence rendue le 1er septembre 2016 dans l'affaire CCI n° 18711/CA/ASM ;

2) Condamne in solidum Telecom Italia International N.V. et Telecom Italia S.p.A. à payer aux défendeurs au recours la somme globale de cent mille euros (100 000,00 €) en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

3) Condamne Telecom Italia International N.V. et Telecom Italia S.p.A. aux entiers dépens.

LA GREFFIERE, LE PRESIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 5 - chambre 16
Numéro d'arrêt : 21/08610
Date de la décision : 02/05/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 08/05/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-05-02;21.08610 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award