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25/04/2024 | FRANCE | N°22/15986

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 4 - chambre 9 - a, 25 avril 2024, 22/15986


Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 9 - A



ARRÊT DU 25 AVRIL 2024



(n° , 7 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 22/15986 - N° Portalis 35L7-V-B7G-CGMLV



Décision déférée à la Cour : Jugement du 17 mai 2022 - Juge des contentieux de la protection de NOGENT SUR MARNE - RG n° 11-22-000120





APPELANTE



La société SOGEFINANCEMENT, soc

iété par acions simplifiée agissan tpoursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés audit siège

N° SIRET : 394 352 272 00022

[Adresse 5]

[Adresse 5]

[Localité...

Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 9 - A

ARRÊT DU 25 AVRIL 2024

(n° , 7 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 22/15986 - N° Portalis 35L7-V-B7G-CGMLV

Décision déférée à la Cour : Jugement du 17 mai 2022 - Juge des contentieux de la protection de NOGENT SUR MARNE - RG n° 11-22-000120

APPELANTE

La société SOGEFINANCEMENT, société par acions simplifiée agissan tpoursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés audit siège

N° SIRET : 394 352 272 00022

[Adresse 5]

[Adresse 5]

[Localité 6]

représentée par Me Sophie MÜH, avocat au barreau de PARIS, toque : D1256

substitué à l'audience par Me Jérémie MANCHUEL, avocat au barreau de PARIS, toque : D1256

INTIMÉS

Madame [T] [K]

née le [Date naissance 2] 1963 en CÔTE D'IVOIRE

[Adresse 4]

[Localité 7]

DÉFAILLANTE

Monsieur [X] [R]

né le [Date naissance 1] 1969 en CÔTE D'IVOIRE

[Adresse 3]

[Localité 7]

DÉFAILLANT

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 28 février 2024, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Mme Laurence ARBELLOT, Conseillère, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Mme Muriel DURAND, Présidente de chambre

Mme Laurence ARBELLOT, Conseillère

Mme Sophie COULIBEUF, Conseillère

Greffière, lors des débats : Mme Camille LEPAGE

ARRÊT :

- DÉFAUT

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Mme Muriel DURAND, Présidente et par Mme Camille LEPAGE, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Suivant offre préalable acceptée le 28 mai 2015, la société Sogefinancement a consenti à M. [T] [K] et à Mme [X] [R] un prêt personnel d'un montant de 20 000 euros, remboursable en 84 mensualités de 281,74 euros chacune sans assurance, au taux d'intérêts débiteur de 4,90 % l'an et au TAEG de 5,20 %.

Suivant avenant du 12 septembre 2016, les parties sont convenues du réaménagement des sommes restant dues en capital, intérêts et indemnités à hauteur de 17 708,48 euros, en prévoyant un remboursement en 120 mensualités de 235,64 euros assurance comprise du 10 novembre 2016 au 10 avril 2025 au TAEG de 5,01 %.

En raison de mensualités impayées, la société Sogefinancement s'est prévalue de la déchéance du terme du contrat.

Saisi le 3 février 2022 par la société Sogefinancement d'une demande tendant à la condamnation solidaire des emprunteurs au paiement du solde restant dû au titre du contrat, le juge des contentieux de la protection du tribunal de proximité de Nogent-sur-Marne, par un jugement réputé contradictoire rendu le 17 mai 2022 auquel il convient de se reporter, a constaté la recevabilité de l'action, a prononcé la déchéance du droit aux intérêts et a condamné solidairement les emprunteurs à payer à la banque la somme de 5 217,83 euros avec intérêts au taux légal à compter du 3 février 2022, sans majoration de cinq points et in solidum aux dépens et a rejeté les autres demandes.

Après avoir examiné la recevabilité de l'action, le juge a considéré que l'avenant de réaménagement constituait un bouleversement de l'économie générale du contrat et aurait dû faire l'objet d'une nouvelle offre de contrat de sorte que la déchéance du droit aux intérêts était encourue sur le fondement de l'article L. 312-16 du code de la consommation. Il a constaté que la fiche d'informations précontractuelles n'était pas produite et que le prêteur ne justifiait pas de son devoir d'explication en contrariété avec les articles L. 312-12 et L. 312-14 dudit code de sorte que la déchéance du droit aux intérêts était également encourue sur ce fondement.

Pour calculer le montant de sommes dues, il a déduit du capital emprunté le montant des sommes versées et a privé le prêteur de la majoration de cinq points du taux d'intérêts légal pour rendre effective et dissuasive la sanction de déchéance du droit aux intérêts.

Suivant déclaration enregistrée le 8 septembre 2022, la société Sogefinancement a relevé appel de cette décision.

Aux termes de ses dernières conclusions remises le 8 novembre 2022, l'appelante demande à la cour :

- de la dire recevable et bien fondée en son appel,

- d'infirmer le jugement en ce qu'il a prononcé la déchéance du droit aux intérêts et limité la créance à la somme de 5 217,83 euros et statuant à nouveau,

- de condamner solidairement les emprunteurs à lui payer la somme de 10 857,26 euros avec intérêts au taux contractuel du jour de l'assignation du 3 février 2022, jusqu'au jour du parfait paiement, y compris l'indemnité légale sur le capital restant dû d'un montant de 890,21 euros outre la somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens dont distraction au profit de Maître Sophie Müh, Avocat au Barreau de Paris, et ce suivant les dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

L'appelante soutient que l'avenant conclu avait pour objet la modification de l'échéancier convenu, qu'il n'emportait pas modification du contrat initial, qu'il ne peut être considéré comme un nouveau contrat de crédit rendant nécessaire la présentation d'une nouvelle offre préalable et qu'il constitue un réaménagement au sens du code de la consommation. Elle ajoute qu'il a été signé en l'absence de toute déchéance du terme et qu'il portait bien sur l'intégralité des sommes dues à sa date au titre du crédit initialement souscrit. Elle précise que le TAEG a été réduit passant de 5,20 % à 5,01 %, que l'avenant précise lui-même qu'il ne porte pas novation au contrat de crédit avec lequel il forme un tout indivisible et n'annule et ne remplace que les stipulations qui lui sont contraires.

S'agissant de la FIPEN, elle indique que les emprunteurs ont apposé leurs signatures en page 9 du contrat et sous la clause mentionnant que chacun "reconnaît avoir reçu de SOCIETE GENERALE, sur la base de la fiche d'information pré contractuelle, les explications lui permettant de déterminer si le contrat de crédit proposé est adapté à ses besoins et à sa situation financière, et d'avoir été informé des conséquences liées à une éventuelles défaillance de sa part dans les remboursements" et qu'elle produit en outre cette fiche en appel de sorte qu'il ne saurait y avoir de débat quant à la remise aux débiteurs et à son contenu.

Elle ajoute que la production de la fiche d'informations précontractuelles européennes normalisées et de la fiche de dialogue, dont il pourra être vérifié que les contenus respectifs sont conformes aux dispositions légales en vigueur et permettaient de conseiller efficacement les emprunteurs, permet de démontrer que le prêteur a rempli son obligation d'explication vis-à-vis des emprunteurs.

Elle estime sa créance fondée en son quantum en ce compris les intérêts contractuellement convenus et l'indemnité de résiliation.

Régulièrement assignés par actes délivrés à étude le 4 novembre 2022, les intimés n'ont pas constitué avocat.

Pour un plus ample exposé des faits, moyens et prétentions de l'appelante, il est renvoyé aux écritures de celle-ci conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 16 janvier 2024 et l'affaire a été appelée à l'audience du 28 février 2024.

MOTIFS DE LA DÉCISION

En application de l'article 472 du code de procédure civile, si le défendeur ne comparaît pas, il est néanmoins statué sur le fond. Le juge ne fait droit à la demande que dans la mesure où il l'estime régulière, recevable et bien fondée.

Il résulte du dernier alinéa de l'article 954 du code de procédure civile que la partie qui ne conclut pas ou qui, sans énoncer de nouveaux moyens, demande la confirmation du jugement est réputée s'en approprier les motifs.

Au vu de la date du contrat, il convient de faire application des dispositions du code de la consommation dans leur rédaction postérieure à l'entrée en vigueur au 1er mai 2011 de la loi n° 2010-737 du 1er juillet 2010 mais antérieure à l'entrée en vigueur de l'ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016 fixée au 1er juillet 2016.

La recevabilité de l'action vérifiée par le premier juge n'est pas contestée de sorte qu'il convient de confirmer le jugement sur ce point.

Sur la déchéance du droit aux intérêts

- Sur l'exigence d'une nouvelle offre de contrat

L'avenant de réaménagement du 12 septembre 2016 a été signé en l'absence de toute déchéance du terme et de toute forclusion. Le montant de 17 708,48 euros mentionné à l'avenant de réaménagement a repris le capital restant dû à la date dudit réaménagement, outre les intérêts et indemnités et a prévu un remboursement en 120 mensualités de 235,64 euros chacune assurance comprise du 10 novembre 2016 au 10 avril 2025 au TAEG de 5,01 %.

Contrairement à ce qu'a considéré le premier juge, cet avenant n'a pas opéré de modification des caractéristiques essentielles du contrat principal et s'est contenté d'abaisser le montant des mensualités et d'allonger la période de remboursement du crédit. C'est la mise en 'uvre même du réaménagement qui conduit à une capitalisation des intérêts et frais, sans renchérissement du coût du crédit ni modification des conditions initiales d'octroi de ce crédit ou de l'équilibre du contrat initial. Il ne s'agit donc pas d'un nouveau contrat nécessitant la formulation par le prêteur d'une offre préalable de sorte que la déchéance du droit aux intérêts n'est pas encourue à ce titre.

- Sur la remise de la fiche d'informations précontractuelles

Le premier juge a relevé que la fiche d'informations (FIPEN) n'était pas produite, ce qui ne permettait pas de vérifier sa remise et sa conformité aux dispositions du code de la consommation et devait entraîner la déchéance du droit aux intérêts.

La société Sogefinancement produit cette fiche en pièce 2-2 sur laquelle n'est pas apposée la signature des candidats à l'emprunt.

Il résulte de l'article L. 311-6 du code de la consommation applicable au cas d'espèce que préalablement à la conclusion du contrat de crédit, le prêteur ou l'intermédiaire de crédit donne à l'emprunteur, par écrit ou sur un autre support durable, les informations nécessaires à la comparaison de différentes offres et permettant à l'emprunteur, compte tenu de ses préférences, d'appréhender clairement l'étendue de son engagement.

Cette fiche d'informations précontractuelles -FIPEN- est exigée à peine de déchéance totale du droit aux intérêts (article L. 311-48), étant précisé qu'il incombe au prêteur de rapporter la preuve de ce qu'il a satisfait à son obligation d'informations et de remise de cette FIPEN.

A cet égard, la clause type, figurant au contrat de prêt, selon laquelle l'emprunteur reconnaît avoir reçu la fiche d'informations précontractuelles normalisées européennes, n'est qu'un indice qu'il incombe au prêteur de corroborer par un ou plusieurs éléments complémentaires.

Il a toutefois été jugé qu'un document qui émane du seul prêteur ne peut utilement corroborer les mentions de cette clause type de l'offre de prêt pour apporter la preuve de l'effectivité de la remise. (Cass. civ. 1, 7 juin 2023, n° 22-15.552).

Dès lors, la production de la FIPEN remplie par le prêteur ne saurait suffire à corroborer cette clause car ce qui doit être prouvé d'emblée par le prêteur est la remise effective à M. [K] et à Mme [R] non représentés en appel de la FIPEN personnalisée.

Il doit dès lors être considéré que la société Sogefinancement qui ne produit que le contrat comportant une clause de reconnaissance et une FIPEN remplie mais non signée par M. [K] et à Mme [R] ne rapporte pas suffisamment la preuve d'avoir respecté l'obligation qui lui incombe.

La déchéance du droit aux intérêts est donc encourue sur ce fondement et le jugement doit être confirmé en ce qu'il l'a prononcée, sans qu'il soit besoin d'examiner d'autres motifs de déchéance.

Sur le montant des sommes dues

La société Sogefinancement produit par ailleurs à l'appui de sa demande l'offre de crédit contenant une clause de déchéance du terme dotée d'un bordereau de rétractation et son avenant, la fiche ressources et charges non signée et les éléments de solvabilité remis par les emprunteurs, le justificatif de consultation du fichier des incidents de paiement, la notice et les synthèses des garanties des contrats d'assurances, les tableaux d'amortissement, l'historique de prêt, un décompte de créance.

Elle communique également copie d'un courrier recommandé avec avis de réception adressé à M. [K] le 10 septembre 2020 mettant en demeure les deux emprunteurs de régler sous quinze jours la somme de 767,58 euros sous peine de voir engager des poursuites judiciaires et de rendre exigible l'intégralité des sommes dues. Elle produit deux courriers recommandés avec avis de réception adressé aux intéressés le 8 octobre 2020 les mettant en demeure de régler immédiatement la somme de 12 297,57 euros correspondant aux échéances impayées, au capital restant dû à la date de déchéance du contrat, à la pénalité légale et aux intérêts de retard.

C'est donc de manière légitime que la société Sogefinancement se prévaut de la déchéance du terme du contrat et de l'exigibilité des sommes dues.

Aux termes de l'article L. 311-48 du code de la consommation, lorsque le prêteur est déchu du droit aux intérêts, l'emprunteur n'est tenu qu'au seul remboursement du capital suivant l'échéancier prévu, ainsi que, le cas échéant, au paiement des intérêts dont le prêteur n'a pas été déchu. Les sommes déjà perçues par le prêteur au titre des intérêts, qui sont productives d'intérêts au taux de l'intérêt légal à compter du jour de leur versement, sont restituées par le prêteur ou imputées sur le capital restant dû.

C'est à juste titre que le premier juge a déduit des sommes empruntées pour 20 000 euros la totalité des sommes payées à hauteur de 14 782,17 euros, soit un solde de 5 217,83 euros, sans application d'une indemnité de résiliation.

Le jugement déféré doit donc être confirmé.

Le prêteur, bien que déchu de son droit aux intérêts, demeure fondé à solliciter le paiement des intérêts au taux légal, en vertu de l'article 1153 devenu 1231-6 du code civil, sur le capital restant dû, majoré de plein droit deux mois après le caractère exécutoire de la décision de justice en application de l'article L. 313-3 du code monétaire et financier.

Ces dispositions légales doivent cependant être écartées s'il en résulte pour le prêteur la perception de montants équivalents ou proches de ceux qu'il aurait perçus si la déchéance du droit aux intérêts n'avait pas été prononcée, sauf à faire perdre à cette sanction ses caractères de dissuasion et d'efficacité (CJUE 27 mars 2014, affaire C-565/12, Le Crédit Lyonnais SA / Fesih Kalhan).

En l'espèce, le crédit personnel a été accordé à un taux d'intérêt annuel fixe de 4,90 %. Dès lors, les montants susceptibles d'être effectivement perçus par le prêteur au titre des intérêts au taux légal apparaissent significativement inférieurs à celui résultant du taux contractuel sauf en cas de majoration de cinq points. Il convient en conséquence de ne pas faire application de l'article 1231-6 du code civil dans son intégralité et de n'écarter que l'application de l'article L. 313-3 du code monétaire et financier. Il y a donc lieu de confirmer le jugement en ce qu'il a écarté l'application de la majoration de cinq points du taux légal et dit que la condamnation portera intérêts au taux légal non majoré à compter du 3 février 2022.

Sur les autres demandes

Le jugement doit être confirmé en ce qu'il a condamné M. [K] et à Mme [R] in solidum aux dépens de première instance et a rejeté la demande de la société Sogefinancement sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile. La société Sogefinancement qui succombe conservera la charge de ses dépens d'appel et de ses frais irrépétibles.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Statuant par arrêt par défaut et en dernier ressort,

Confirme le jugement en toutes ses dispositions ;

Y ajoutant,

Laisse les dépens d'appel à la charge de la société Sogefinancement ;

Rejette toute demande plus ample ou contraire.

La greffière La présidente


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 4 - chambre 9 - a
Numéro d'arrêt : 22/15986
Date de la décision : 25/04/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 01/05/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-04-25;22.15986 ?
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