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25/04/2024 | FRANCE | N°22/06605

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 8, 25 avril 2024, 22/06605


Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 8



ARRET DU 25 AVRIL 2024



(n° , 2 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 22/06605 - N° Portalis 35L7-V-B7G-CGB3U



Décision déférée à la Cour : Jugement du 10 Juin 2022 -Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire d'EVRY-COURCOURONNES - RG n° F 21/00057





APPELANT



Monsieur [W] [Y]

[Adresse 1]

[Loc

alité 4]



Représenté par Me Nathalie LEHOT-CANOVAS, avocat au barreau d'ESSONNE







INTIMÉE



Société LES TRANSPORTS INTERCOMMUNAUX CENTRE ESSONNE

[Adresse 2]

[Localité 3]



R...

Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 8

ARRET DU 25 AVRIL 2024

(n° , 2 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 22/06605 - N° Portalis 35L7-V-B7G-CGB3U

Décision déférée à la Cour : Jugement du 10 Juin 2022 -Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire d'EVRY-COURCOURONNES - RG n° F 21/00057

APPELANT

Monsieur [W] [Y]

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représenté par Me Nathalie LEHOT-CANOVAS, avocat au barreau d'ESSONNE

INTIMÉE

Société LES TRANSPORTS INTERCOMMUNAUX CENTRE ESSONNE

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représentée par Me Alexis GINHOUX, avocat au barreau de PARIS

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 04 Mars 2024, en audience publique, les avocats ne s'étant pas opposés à la composition non collégiale de la formation, devant Madame Isabelle MONTAGNE, présidente, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, entendu en son rapport, composée de :

Madame Isabelle MONTAGNE, présidente, rédactrice

Madame Sophie GUENIER-LEFEVRE, présidente

Madame Nathalie FRENOY, présidente

Greffier, lors des débats : Mme Nolwenn CADIOU

ARRÊT :

- CONTRADICTOIRE

- mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile,

- signé par Madame Isabelle MONTAGNE, présidente et par Madame Nolwenn CADIOU, greffier à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSÉ DU LITIGE

M. [W] [Y] a été engagé par la société Transports Intercommunaux Centre Essonne (TICE) suivant un contrat de travail à durée indéterminée à compter du 18 janvier 1988 en qualité d'employé de service exploitation, groupe 6, coefficient 125, en référence aux dispositions de la convention collective nationale des transports routiers et activités auxiliaires du transport.

En dernier lieu, il occupait depuis le 1er avril 2014 le poste de 'responsable points arrêts, flotte automobile et entretien'.

Le salarié a occupé pendant toute la durée de la relation contractuelle divers mandats syndicaux et de représentation du personnel. Il a notamment exercé un mandat de conseiller prud'homme au conseil de prud'hommes de Longjumeau à partir de 1997, a été désigné délégué syndical en 2011, a été élu délégué du personnel et membre du Comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT) à l'issue des élections professionnelles du 29 janvier 2016 et a été désigné défenseur syndical au sein de l'entreprise le 16 février 2016.

A compter du 3 décembre 2019, il a été placé en arrêt de travail à la suite d'une attaque cardiaque subie à son domicile le même jour à 8 heures 30, étant précisé que, saisi par le salarié le 11 mai 2021, le pôle social du tribunal judiciaire d'Evry a, par jugement du 17 février 2022, retenu que cet accident survenu alors que celui-ci se trouvait en heures de délégation syndicale devait être qualifié d'accident du travail et être pris en charge au titre de la législation sur les risques professionnels par la caisse primaire d'assurance maladie de l'Essonne.

A l'issue d'une visite de reprise, le médecin du travail a, le 1er juillet 2020, rendu un avis ainsi rédigé :

'Inapte au poste (en 1 visite). Etude de poste et des conditions de travail et entretien avec l'employeur le 30/6/2020. Fiche d'entreprise faite le 10/10/2017.

Serait apte à un poste : sans conduite, sans efforts physiques, sans travail nécessitant une bonne vision, sans stress.

Le salarié peut bénéficier d'une formation compatible avec ses capacités restantes sus-mentionnées'.

Le 27 janvier 2021, le salarié a saisi le conseil de prud'hommes d'Evry-Courcouronnes afin de faire juger qu'il relève du statut cadre depuis le 1er avril 2014 et d'obtenir un rappel de salaire consécutif ainsi que des dommages et intérêts au titre de la discrimination salariale et du harcèlement moral subis.

Le salarié a fait l'objet d'un licenciement pour inaptitude et impossibilité de reclassement, notifié le 15 février 2022.

Par jugement mis à disposition le 10 juin 2022, auquel il est renvoyé pour exposé de la procédure antérieure et des demandes initiales des parties, les premiers juges ont débouté M. [Y] de l'intégralité de ses demandes et ont laissé les dépens à sa charge.

Le 1er juillet 2022, M. [Y] a interjeté appel à l'encontre de ce jugement.

Par dernières conclusions remises au greffe et notifiées par la voie électronique le 23 février 2023, auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé des moyens en application de l'article 455 du code de procédure civile, M. [Y] demande à la cour d'infirmer le jugement, statuant à nouveau, de juger qu'il relève du statut cadre depuis le 1er avril 2014, que la moyenne des salaires s'élève à 4 180 euros, de condamner la société intimée à lui verser les sommes de :

* 32 090,70 euros à titre de rappel de salaire,

* 3 209,10 euros au titre des congés payés y afférents,

* 50 000 euros à titre de dommages et intérêts pour discrimination salariale et harcèlement moral,

* 5 000 euros à titre de dommages et intérêts du fait du non-respect de l'obligation de formation,

* 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Par conclusions remises au greffe et notifiées par la voie électronique le 18 novembre 2022, auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé des moyens, la société TICE demande à la cour de confirmer le jugement en toutes ses dispositions, de débouter M. [Y] de ses demandes et de le condamner aux entiers dépens.

Une ordonnance de clôture de la procédure a été rendue le 23 janvier 2024.

MOTIVATION

Sur la qualification de cadre et le rappel de salaire consécutif

Indiquant être classé au niveau 250, le salarié soutient qu'il aurait dû bénéficier du statut cadre depuis au moins 2014 à partir du moment où il a été nommé responsable des points d'arrêts, de la flotte automobile et de l'entretien et sollicite un rappel de salaire consécutif sur la base d'un coefficient 320 correspondant conventionnellement à un poste de chef de garage adjoint.

La société conclut au débouté de ces demandes en relevant que les tâches effectuées par le salarié à son poste correspondaient aux fonctions conventionnellement définies d'agent de maîtrise, qu'il ne relevait pas de la catégorie cadre et que celui-ci ne justifie pas que son poste pouvait s'assimiler à un poste de chef de garage relevant de la catégorie cadre.

Aux termes de l'article 6 du code de procédure civile : 'A l'appui de leurs prétentions, les parties ont la charge d'alléguer les faits propres à les fonder'.

En cas de différend sur la catégorie professionnelle qui doit être attribuée à un salarié, ce dernier doit établir la nature de l'emploi effectivement occupé et la qualification qu'il requiert.

Dans un recueil adopté en 1978, l'Organisation Internationale du Travail a défini le statut de cadre ainsi qu'il suit :

'Toute personne :

a) qui a terminé un enseignement et une formation professionnelle de niveau supérieur ou qui possède une expérience reconnue équivalente, dans un domaine scientifique, technique ou administratif ; et

b) qui exerce, en qualité de salarié, des fonctions à caractère intellectuel prédominant, comportant l'application à un haut degré des facultés de jugement et d'initiative et impliquant un niveau relativement élevé de responsabilité.

Cette notion englobe également toute personne répondant aux caractéristiques a) et b) ci-dessus, qui détient, par délégation de l'employeur et sous son autorité, la responsabilité de prévoir, diriger, contrôler et coordonner les activités d'une partie de l'entreprise ou d'une organisation, avec le pouvoir de commandement correspondant, à l'exclusion des cadres dirigeants ayant une large délégation de l'employeur'.

Il ressort de la fiche de fonction produite aux débats que les missions principales du 'responsable des points d'arrêts, flotte automobile et entretien', rattaché hiérarchiquement au responsable des services production et qualité, sont les suivantes :

- conformité des points d'arrêts : notamment veiller à l'exécution de travaux et au suivi des critères qualité des points d'arrêts et participer aux commissions travaux TICE / TRANSEVRY et être responsable du critère netteté / propreté des points d'arrêts et de l'information aux points d'arrêts,

- gestion de la flotte automobile : négociation des contrats de renouvellement des voitures et des cartes gasoil, suivi des contrats de location et d'entretien, suivi de l'entretien mécanique des véhicules et des consommations de carburant et des petits consommables, visite mensuelle de l'état général des véhicules, gestion des contrats d'assurances et des sinistres, suivi des adaptations spécifiques sur les nouveaux véhicules,

- gestion de l'entretien des locaux : relations avec la société de ménage, gestion des contrats et des factures, contrôle régulier de la qualité des prestations sur l'ensemble des sites.

La société explique qu'elle a appliqué à partir de 2017 les dispositions de la convention collective nationale des réseaux de transports publics urbains de voyageurs à la place de la convention collective des transports routiers et activités auxiliaires du transport et que dans un souci d'harmonisation du statut collectif, un accord d'entreprise relatif à la classification hiérarchique des emplois a été conclu.

Il ressort de cet accord d'entreprise signé le 21 juin 2017 par des organisations syndicales que la catégorie socio-professionnelle maîtrise inclut l'ensemble des postes de hautes-maîtrises et des postes de maîtrises actuels et que le poste occupé par le salarié de responsable des points d'arrêts et de la flotte automobile relève de la catégorie maîtrise, niveau 2, coefficient 250.

La convention collective des réseaux de transports publics urbains de voyageurs stipule que le personnel de maîtrise des ateliers et services techniques est classé au groupe 4 ainsi qu'il suit :

'Niveaux de connaissances : niveaux V et IV de l'éducation nationale ; les connaissances peuvent être acquises soit par voie scolaire ou par une formation équivalente, soit par l'expérience professionnelle.

Agent de maîtrise qui, d'après des instructions définissant le programme de travail, les délais d'exécution, les moyens à mettre en 'uvre et les exigences techniques de qualité, est responsable du groupe d'agents placés sous son autorité.

Ces responsabilités impliquent l'obligation de :

- accueillir les nouveaux membres du groupe et veiller à leur adaptation ;

- répartir les tâches et les affecter aux exécutants, compte tenu de leurs compétences ;

- donner les ordres d'exécution ;

- contrôler la réalisation (conformité, rendement) ;

- veiller au respect des règles et normes établies (sécurité, présence au travail, règlement intérieur) ;

- faire au personnel toutes observations justifiées par son travail ;

- apprécier les compétences manifestées au travail et aider au perfectionnement individuel ;

- recevoir, expliquer et transmettre les informations professionnelles ascendantes et descendantes intéressant le personnel.

Il est placé sous le contrôle direct d'un agent de qualification supérieure'.

Le salarié indique qu'il exerçait en outre depuis 2014 des fonctions de 'responsable du parc autos' sans contrôle de la direction et produit à ce titre un document intitulé 'fiche de poste gestionnaire de parc automobile' (pièce 101), en relevant qu'il y est mentionné que cet emploi relève d'une fonction de cadre de niveau 5, ainsi qu'un autre document intitulé 'responsable de flotte de véhicules' (pièce 102), en indiquant qu'il 'est assimilé à un chef de garage'. Toutefois, ces documents ne comportent aucune mention de leur auteur, et notamment aucun élément permettant d'en attribuer l'origine à la société TICE, de sorte que leur valeur probante est amoindrie.

Dans ces conditions, la cour ne peut que retenir que les fonctions que le salarié exerçait relevaient de la catégorie agent de maîtrise telle que conventionnellement définie.

Alors que le salarié n'explicite pas en quoi il aurait exercé des fonctions de chef de garage adjoint relevant de la catégorie cadre qu'il revendique, il y a lieu de constater que celui-ci échoue à démontrer que la nature de l'emploi qu'il occupait effectivement et la qualification qu'il requérait relevaient d'une catégorie cadre.

Il convient de débouter le salarié de ses demandes de ces chefs et de confirmer le jugement sur ces points.

Sur le harcèlement moral et la discrimination

Au soutien du harcèlement moral et de la discrimination dont il soutient avoir été l'objet, le salarié indique devoir 'reprendre l'historique de sa situation depuis son engagement afin de faire la lumière sur le traitement qui lui a été réservé toutes ces années au sein de la société TICE' et fait état entre les pages 5 et 37 de ses écritures d'une succession de faits cités chronologiquement, dont les premiers remontent à 1995, invoquant une pression exercée par son supérieur hiérarchique d'alors pour qu'il exerce un 'véritable harcèlement sur son équipe' jusqu'au jugement rendu le 25 février 2022 par le pôle social du tribunal judiciaire d'Evry reconnaissant que l'attaque cardiaque subie alors qu'il était en heures de délégation le 3 décembre 2019 était constitutive d'un accident du travail.

La société fait valoir qu'eu égard à la prescription quinquennale applicable en matière de harcèlement et de discrimination, les faits antérieurs au 27 janvier 2016 sont prescrits, que les faits allégués par le salarié, qu'elle conteste, ne sont pas établis et qu'il doit être débouté de ses demandes de ces chefs.

Sur la prescription des faits

En application des dispositions de l'article 2224 du code civil, l'action en réparation du préjudice résultant d'une discrimination se prescrit par cinq ans à compter de la révélation de la discrimination et les dommages-intérêts réparent l'entier préjudice résultant de la discrimination, pendant toute sa durée. La date de la révélation de la discrimination correspond à la date à laquelle les faits discriminatoires invoqués par le salarié ont cessé de produire leurs effets. Les dommages-intérêts réparent l'entier préjudice résultant de la discrimination, pendant toute sa durée.

De même, en application des dispositions de l'article 2224 du code civil, l'action en réparation du préjudice résultant d'un harcèlement moral se prescrit par cinq ans à compter du jour où le titulaire de ce droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer, c'est-à-dire la date à laquelle les faits de harcèlement invoqués par le salarié ont cessé. L'article 2224 du code civil ne régit que le délai de prescription pour agir en justice mais n'instaure pas de prescription des agissements eux-mêmes. Par conséquent, lorsque l'action est exercée dans le délai de cinq ans, le juge doit examiner tous les faits invoqués par le salarié, quelle que soit leur ancienneté.

Alors que le salarié invoque des faits au soutien de la discrimination et du harcèlement moral survenus pendant la durée de la relation contractuelle et que celle-ci a pris fin le 15 février 2022, il en résulte que le point de départ du délai de prescription de l'action tant en réparation du préjudice résultant de la discrimination que de celle résultant du harcèlement moral a commencé à courir à la date à laquelle les faits discriminatoires et de harcèlement invoqués ont pris fin, soit à compter de la rupture des relations contractuelles, le 15 février 2022, et qu'il convient d'examiner par conséquent tous les faits invoqués par le salarié.

Il s'ensuit que les faits antérieurs au 27 janvier 2016 ne sont pas prescrits.

Sur le harcèlement moral

Aux termes de l'article L. 1152-1 du code du travail, aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.

En vertu de l'article L. 1154-1 du même code, lorsque survient un litige relatif à l'application de l'article L. 1152-1, le salarié concerné établit des faits qui permettent de présumer l'existence d'un harcèlement dans la rédaction applicable au litige (pour les faits antérieurs à l'entrée en vigueur de la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016) ou présente des éléments de fait laissant supposer l'existence d'un harcèlement (pour les faits postérieurs à l'entrée en vigueur de la loi sus-mentionnée), et au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.

Au soutien du harcèlement moral, le salarié invoque en particulier :

- une absence de fourniture de travail,

- un non-remplacement pendant ses absences,

- le non-paiement d'heures supplémentaires,

- l'obligation de participer à l'opération 'bureaux vides' en dépit de ses problèmes de santé,

- un acharnement de sa hiérarchie à son égard,

- le fait d'avoir été écarté de la négociation de la location de six véhicules,

- la remise de bulletins de paie avec retard,

- la fermeture de sa boîte mail pendant son arrêt maladie,

- la non-prise en charge au titre de la législation professionnelle de l'attaque cardiaque dont il a été victime à son domicile le 3 décembre 2019,

- une absence d'évolution professionnelle et une absence de reconnaissance du statut cadre.

Il produit principalement de très nombreux courriers et courriels rédigés par ses soins dans le cadre de son activité syndicale sur la période comprise entre 2015 et 2021 et des écrits émanant de l'employeur, des plannings, tableaux et bulletins de paie, des comptes-rendus de réunions de délégués du personnel, des attestations d'anciens collègues de travail, des lettres de l'inspection du travail adressées à l'employeur.

Il ressort de l'examen de ces pièces que :

- par avenant du 6 novembre 1995, le salarié a été promu responsable du poste de contrôle de la régulation, statut maîtrise ;

- il s'est plaint régulièrement à l'employeur de l'absence de fourniture de travail, comme par exemple par lettre datée du 24 juin 2016 (pièce 110 : 'En février 1996, ma direction m'a rétrogradé sans aucun motif et m'a enlevé le véhicule qui était à ma disposition, je suis resté au poste central de la régulation en qualité de simple régulateur', 'pendant près de 10 ans je suis resté au siège de TICE sans aucun poste de travail') ;

- par avenant du 31 août 2001, il a été nommé responsable des contrôles départ qualité ;

- par lettre datée du 17 octobre 2003, il a été rattaché au pôle qualité ;

- par avenant du 19 mars 2007, il est devenu 'contrôleur qualité - espaces transports' à compter du 26 mars 2007 ;

- par avenant à compter du 1er avril 2012, il a été nommé 'responsable des points d'arrêts' classé groupe 3, coefficient 165 et par avenant à compter du 1er avril 2014, responsable des points d'arrêts, flotte automobile et entretien ;

- il s'est plaint d'une rétrogradation notamment en ces termes : 'En décembre 2016, j'ai été élu conseiller prud'homme sur le conseil de Longjumeau, la sanction de la direction a été de me retirer du poste de la régulation en me laissant en salle de réunion ou en salle CE sans aucun travail' (pièce 110) ;

- par courriel du 29 juillet 2016, le syndicat UNSA UD 91 a saisi M. [H] en sa qualité de directeur de la société, en lui demandant de respecter l'obligation de sécurité de la société en veillant à mettre fin à la situation d'ostracisme et de mise à l'écart de M. [Y] du fait de l'exercice de ses mandats syndicaux (pièce 116) ;

- par lettre datée du 8 septembre 2016, M. [H], répondant à la demande formée le 3 août 2016 par le salarié de paiement de 66,8 heures supplémentaires, lui a reproché d'avoir effectué des heures supplémentaires sans autorisation ou consigne en ce sens et lui a indiqué considérer que ses heures supplémentaires ne sont pas opposables à l'entreprise (pièce 3) ;

- par lettre datée du 20 octobre 2017, M. [Z] [S], directeur d'exploitation, a répondu à une lettre du salarié exprimant divers griefs à son égard, en lui indiquant ressentir 'une volonté d'acharnement' de sa part et 'une volonté de nuire à la direction et tout particulièrement à notre directeur', lui demandant de mettre fin à ses agissements (pièce 127) ;

- le salarié s'est régulièrement plaint de ne pas être remplacé à son poste de travail pendant ses congés, ses RTT, ses récupérations d'heures supplémentaires, lui occasionnant une surcharge de travail (cf notamment pièces 110 et aussi 42 constituée par une lettre datée du 2 août 2019 : 'Je prends acte que contrairement aux affirmations récurrentes de la société, aucun remplacement n'est prévu en mon absence et que celui-ci n'a donc jamais été effectif. Vous indiquez dans votre courrier un éventuel recrutement pour octobre 2019 ce qui démontre à nouveau votre acharnement à mon encontre. En effet, alors même que je vous alerte sur la charge de travail m'incombant en particulier à mon retour dans l'entreprise en raison de l'absence de continuité dans le traitement de mes missions, vous ignorez mon alerte et minimisez les conséquences sur ma santé. Cela fait plusieurs années que je vous dénonce cet état de fait et la pression psychologique que fait peser sur moi l'idée de revenir dans la société pour y trouver une charge de travail non traitée et ayant accumulé un retard important') et cette question a fait l'objet d'échanges lors de réunions des délégués du personnel, notamment le 18 janvier 2018 (pièce 133) ;

- par lettre datée du 18 septembre 2019 adressée à M. [I] [X], alors directeur de la société, le salarié a relaté les conditions de déroulement d'une réunion des organisations syndicales du 10 septembre 2019 en prêtant à M. [X] les propos suivants : 'c'est vrai avec toutes les JDS (heures de délégation) que vous avez vous devez être bien reposé' et en lui reprochant de s'en être pris à lui lorsqu'il prenait la parole, d'avoir continué à s'acharner sur lui le 17 septembre lors de la réunion sur le vote électronique en lui hurlant dessus car il était contre cette modalité de vote et avoir 'claqué très fortement la paume de' sa 'main sur la table en criant' qu'il annulait la réunion et qu'il avait 'siffloté' en secouant sa main avec mépris, et lui a demandé de cesser cet acharnement à son égard et de venir le voir lorsqu'il déjeunait avec des amis (pièce 41) ;

- le 28 octobre 2019, M. [J] [M], M. [E] [O] et M. [W] [Y] en leur qualité d'élus au CHSCT ont adressé une alerte au directeur de la société TICE pour cause de danger grave et imminent constitué notamment par un 'acharnement et une pression morale de la part de M. [X]' (pièce 95).

Dans une attestation datée du 21 septembre 2016, M. [IY] [R], responsable espaces transport, indique avoir : 'vu M. [Y] discuter avec son responsable de service de sa surcharge de travail qui l'obligeait à faire des heures supplémentaires, se plaignant de ne pas être remplacé lors de ses congés'.

Dans une attestation datée du 21 septembre 2016, M. [KV] [L], coordinateur qualité, indique avoir : 'entendu M. [Y] expliquer à sa hiérarchie sa surcharge de travail l'obligeant à faire des heures supplémentaires et confirme avoir vu M. [Y] remettre des plannings de ces heures de travail'.

Dans une attestation datée du 20 mars 2021, M. [F] [C], responsable du PCRS et de la gestion de crise, indique : 'Lors d'un entretien que M. [W] [Y] a eu avec le direction de TICE, M. [P] [H] le 5 janvier 2017 (j'assistais [W]), [W] a dû apporter ses explications et précisions, malgré un rapport existant de la situation, sur les insultes qu'un cadre de l'entreprise lui avait proféré. Depuis ce moment-là, je me souviens que les rapports sont restés tendus entre [W] et la direction. Bien que le directeur de TICE ait changé entre-temps, les rapports sont restés tendus notamment à cause des absences dues aux mandats de [W] [Y], mais aussi aux congés et à ses RTT, qui ne le rendaient pas disponible pour accomplir le travail attendu par la direction.

A plusieurs reprises, durant les réunions des IRP, [W] a exprimé la nécessité d'avoir un adjoint ou un renfort dans son service pour gérer en son absence la gestion du parc automobile de TICE et les points d'arrêts du réseau de bus. [W] [Y] a exprimé aussi à plusieurs reprises que le travail s'accumulait et qu'il devait gérer cela à son retour en entreprise'.

Dans une attestation établie le 29 novembre 2021, Mme [V] [K] épouse [N] indique avoir été salariée de TICE de septembre 1998 à octobre 2021 et avoir pu constater et assister durant ces 23 années à un certain nombre de faits subis par M. [Y], citant le fait qu'il ait dû déménager son bureau et s'installer dans lieu exigu d'à peine '2 mètres de long sur 1,5 mètre de large', 'il s'agissait plutôt d'un placard qu'un bureau, il n'y avait ni ventilation, ni fenêtre', se situant à côté du sien ; elle indique que : 'durant cette période, M. [Y] n'avait pas de travail malgré les réclamations de ce dernier, il était clairement mis au placard. Par ailleurs, la direction ne lui octroyait que 20 ou 30 % de prime d'objectifs annuels car elle estimait qu'il ne travaillait pas pour TICE entre ses heures de délégation et de conseiller prud'homale (sic)', 'M. [H] disait haut et fort dans les couloirs du dépôt de [Localité 5] qu'il voulait casser certaines organisations syndicales dont celle de M. [Y] car il n'arrivait pas à obtenir ce qu'il souhaitait lors des négociations des accords', 'pendant le confinement et après, M. [Y] me demandait de lui transmettre son bulletin de paie par mail', 'M. [B], le DRH et Mme [A], la responsable paie m'ont demandé de ne plus rien transmettre à M. [Y] comme ses bulletins de paie car cela donnait à M. [Y] l'occasion de rédiger un mail afin de contester ce qui lui était dû et étant donné son statut de représentant du personnel, son dossier aux prud'hommes et les échanges conflictuels'.

Hormis les faits d'absence d'évolution professionnelle, démentis par les différents avenants au contrat de travail produits aux débats et ceux d'absence de reconnaissance du statut cadre non retenus par la cour, il convient de considérer que le salarié présente ainsi à l'appui de sa demande des éléments de fait suffisamment précis et qui, pris dans leur ensemble, laissent présumer l'existence d'un harcèlement moral à son égard.

La société à qui il revient la charge d'apporter des éléments justifiant que les faits invoqués par le salarié au soutien du harcèlement moral ne constituent pas des agissements d'un tel harcèlement fait valoir tout d'abord qu'aucun texte n'impose à l'employeur de remplacer un salarié en son absence, qu'il n'a jamais été émis la moindre remarque dans l'hypothèse d'un retard dans son travail et que M. [D] prenait en charge les affaires courantes pendant ses absences ainsi que M. [R]. Ce faisant, la société ne justifie par aucune pièce que ces deux salariés intervenaient réellement pour suppléer les absences du salarié et que le salarié ne rencontrait ainsi pas une surcharge de travail durant ses absences l'obligeant à effectuer des heures supplémentaires générées par l'accomplissement de sa charge de travail.

La société fait en outre valoir que les heures supplémentaires ont fait l'objet d'un accord entre les parties le 18 décembre 2018. Cette affirmation est justifiée par un procès-verbal de conciliation établi par le conseil de prud'hommes d'Evry-Courcouronnes le 18 décembre 2018 dans un litige opposant M. [Y] à la société TICE portant sur une demande de rappel d'heures supplémentaires.

Puis la société indique que :

- l'opération 'bureaux vides' consistant à aller pendant une demi-journée par mois sur le réseau pour inciter les clients à la validation, résulte d'une obligation prévue par le règlement intérieur et pèse sur l'ensemble des salariés et le salarié n'a pas saisi la médecine du travail pour faire valoir son état de santé ;

- les procès-verbaux des réunions des délégués du personnel sont étrangères à tout harcèlement ;

- sa fiche de poste ne mentionne pas la négociation de nouveaux contrats et l'employeur dans le cadre de son pouvoir de direction est en droit de confier une tâche spécifique à un salarié ;

- depuis son arrêt de travail, les salaires lui ont été systématiquement versés en temps et en heure et même si parfois les bulletins de paie sont remis avec un léger retard, il ne supporte aucun préjudice salarial ;

- aucune instruction n'a été donnée pour fermer sa boîte mail pendant son arrêt maladie ;

- il a remis des arrêts de travail pour maladie à la suite de l'accident du 3 décembre 2019, il ne peut lui être fait grief d'une absence de déclaration d'accident du travail, celui-ci ayant attendu pendant sept mois avant de lui demander d'établir une telle déclaration et il n'existe pas de lien entre son accident cardiaque et ses conditions de travail.

Enfin la société soutient qu'il a connu une évolution professionnelle au sein de l'entreprise et a refusé une promotion de responsable des services généraux. Cependant, cette dernière allégation ne ressort pas de la lecture de la lettre datée du 20 novembre 2019 du salarié visée par la société (pièce salarié 70).

Force est de constater que l'employeur n'apporte aucune justification à l'absence de fourniture de travail au salarié pendant une longue période, l'absence de remplacement pendant ses absences générant une surcharge de travail à l'origine de l'accomplissement d'heures supplémentaires, ensuite contestées par la direction, et l'absence de remise régulière de bulletins de salaire pendant son arrêt de travail, de même qu'il est taisant sur ses conditions de travail dégradées ainsi qu'il résulte du témoignage de Mme [K] évoquant l'installation du salarié dans un local exigu s'apparentant à une placardisation concomitamment à son élection en qualité de conseiller prud'homme, et les tensions relationnelles persistantes entre la direction et le salarié.

Il convient de considérer que le harcèlement moral est établi.

Sur la discrimination

Aux termes de l'article L. 1132-1 du code du travail : 'Aucune personne ne peut être écartée d'une procédure de recrutement ou de nomination ou de l'accès à un stage ou à une période de formation en entreprise, aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l'objet d'une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, telle que définie à l'article 1er de la loi n° 2008-496 du 27 mai 2008 portant diverses dispositions d'adaptation au droit communautaire dans le domaine de la lutte contre les discriminations, notamment en matière de rémunération, au sens de l'article L. 3221-3, de mesures d'intéressement ou de distribution d'actions, de formation, de reclassement, d'affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle, d'horaires de travail, d'évaluation de la performance, de mutation ou de renouvellement de contrat en raison de son origine, de son sexe, de ses m'urs, de son orientation sexuelle, de son identité de genre, de son âge, de sa situation de famille ou de sa grossesse, de ses caractéristiques génétiques, de la particulière vulnérabilité résultant de sa situation économique, apparente ou connue de son auteur, de son appartenance ou de sa non-appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie, une nation ou une prétendue race, de ses opinions politiques, de ses activités syndicales ou mutualistes, de son exercice d'un mandat électif, de ses convictions religieuses, de son apparence physique, de son nom de famille, de son lieu de résidence ou de sa domiciliation bancaire, ou en raison de son état de santé, de sa perte d'autonomie ou de son handicap, de sa capacité à s'exprimer dans une langue autre que le français, de sa qualité de lanceur d'alerte, de facilitateur ou de personne en lien avec un lanceur d'alerte, au sens, respectivement, du I de l'article 6 et des 1° et 2° de l'article 6-1 de la loi n° 2016-1691 du 9 décembre 2016 relative à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique'.

En application de l'article L. 1134-1 du même code, lorsque survient un litige en raison d'une méconnaissance de ces dispositions, il appartient au salarié qui se prétend lésé par une mesure discriminatoire de présenter au juge des éléments de fait laissant supposer l'existence d'une discrimination directe ou indirecte au vu desquels il incombe à l'employeur de prouver que les mesures prises sont justifiées par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination.

Le salarié soutient avoir été l'objet d'une discrimination en raison de ses mandats se manifestant par les éléments sus-mentionnés. Il rappelle que lors de sa nomination en qualité de délégué syndical, il a été rétrogradé au poste de régulateur et au moment où il a été élu conseiller prud'homme, il a été placardisé et qu'il n'a obtenu un poste de responsable qu'en 2014, à partir du moment où il a informé le directeur de la société de sa décision de saisir la Haute autorité de lutte contre les discriminations et pour l'égalité (HALDE).

Il indique que des salariés entrés dans la société après lui, au même niveau que lui, ont 'bien plus évolué que lui' et que d'autres salariés ont bénéficié de promotions sans être diplômés. Il cite M. [T], M. [G] et M. [U].

Il ressort des développements précédents que le salarié présente des éléments de fait laissant présumer l'existence d'une discrimination en raison de ses mandats.

Comme déjà relevé, la société ne justifie par aucun élément l'absence de fourniture de travail et l'absence de remplacement pendant les absences notamment syndicales du salarié, générant une surcharge de travail à l'origine de l'accomplissement d'heures supplémentaires, ensuite contestées par la direction et l'absence de remise régulière de bulletins de salaire pendant son arrêt de travail.

Il y a lieu de retenir que la discrimination en raison des mandats exercés par le salarié est établie.

Sur la réparation du préjudice

Le préjudice subi par le salarié en raison du harcèlement moral et de la discrimination syndicale dont il a été l'objet sera réparé, au regard de l'intensité et de la durée des faits retenus, par l'octroi de dommages et intérêts à hauteur de 25 000 euros que la société sera condamnée à lui payer.

Le jugement sera infirmé sur ce point.

Sur le manquement à l'obligation de formation

Le salarié fait valoir que l'employeur a manqué à son obligation de formation à son détriment, relevant que malgré ses demandes, il n'a jamais fait l'objet de formation dans le cadre de ses fonctions au sein de la société.

La société réplique que le salarié n'établit pas son préjudice.

Toute demande d'indemnisation suppose, pour être accueillie, la démonstration d'une faute, d'un préjudice et d'un lien de causalité entre eux.

Si le salarié justifie avoir demandé une formation par courriel du 27 octobre 2015 et indique qu'il ne lui a pas été apporté de suite, il ne justifie cependant par aucune démonstration le préjudice résultant de ce manquement de l'employeur.

Il convient de le débouter de cette demande et de confirmer le jugement sur ce point.

Sur les dépens et les frais irrépétibles

Eu égard à la solution du litige, le jugement sera infirmé en ce qu'il statue sur les dépens et les frais irrépétibles.

La société sera condamnée aux dépens de première instance et d'appel ainsi qu'à payer au salarié la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour,

INFIRME le jugement en ce qu'il déboute M. [W] [Y] de sa demande de dommages et intérêts pour harcèlement moral et discrimination et en ce qu'il statue sur les dépens et les frais irrépétibles,

Statuant à nouveau sur les chefs infirmés et y ajoutant,

DIT que M. [W] [Y] a subi un harcèlement moral et une discrimination syndicale,

CONDAMNE la société Transports Intercommunaux Centre Essonne (TICE) à payer à M. [W] [Y] la somme de 25 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi du fait du harcèlement moral et de la discrimination syndicale,

CONDAMNE la société Transports Intercommunaux Centre Essonne (TICE) aux entiers dépens,

CONDAMNE la société Transports Intercommunaux Centre Essonne (TICE) à payer à M. [W] [Y] la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

CONFIRME le jugement pour le surplus des dispositions,

DÉBOUTE les parties des autres demandes.

LE GREFFIER LA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 8
Numéro d'arrêt : 22/06605
Date de la décision : 25/04/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 01/05/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-04-25;22.06605 ?
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