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24/04/2024 | FRANCE | N°21/10165

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 4 - chambre 8, 24 avril 2024, 21/10165


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 4 - Chambre 8



ARRÊT DU 24 AVRIL 2024



(n° 2024/ 91 , 14 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/10165 - N° Portalis 35L7-V-B7F-CDYRN



Décision déférée à la Cour : Jugement du 13 Avril 2021 -TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de CRETEIL RG n° 18/07526





APPELANTE



S.C.I. ROYAL MEUBLES IMMOBILIER, agissant poursuites et diligences de sa g

érante, Mme [D] [X], demeurant audit siège,

[Adresse 2]

[Localité 4]



Représentée par Me Véronique DE LA TAILLE de la SELARL RECAMIER AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, t...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 8

ARRÊT DU 24 AVRIL 2024

(n° 2024/ 91 , 14 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/10165 - N° Portalis 35L7-V-B7F-CDYRN

Décision déférée à la Cour : Jugement du 13 Avril 2021 -TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de CRETEIL RG n° 18/07526

APPELANTE

S.C.I. ROYAL MEUBLES IMMOBILIER, agissant poursuites et diligences de sa gérante, Mme [D] [X], demeurant audit siège,

[Adresse 2]

[Localité 4]

Représentée par Me Véronique DE LA TAILLE de la SELARL RECAMIER AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : K0148, plaidant par Me Xavier GRIFFITHS, membre de la SAS GRIFFITHS DUTEIL, avocat au barreau de LISIEUX,

INTIMÉE

S.A. MMA IARD

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représentée par Me Jean-Marie COSTE FLORET de la SCP SOULIE COSTE-FLORET & AUTRES, avocat au barreau de PARIS, toque : P0267

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 30 Janvier 2024, en audience publique, devant la Cour composée de :

Mme CHAMPEAU-RENAULT, Présidente de chambre

Mme FAIVRE, Conseillère

M. SENEL, Conseiller

qui en ont délibéré, un rapport a été présenté à l'audience par Monsieur [B], dans les conditions prévues par l'article 804 du code de procédure civile.

Greffier, lors des débats : Madame POUPET

ARRÊT : Contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par, Mme CHAMPEAU-RENAULT, Présidente de chambre et par Mme POUPET, greffière, présente lors de la mise à disposition.

******

La SARL ROYAL MEUBLES, créée le 30 décembre 1997, exerce une activité de distribution de mobiliers, meubles de cuisine et de cheminées. Elle est détenue par deux associés, M. [J] [O] et Mme [D] [X], qui, en 2004, ont également créé la SCI ROYAL MEUBLES IMMOBILIER.

Les deux sociétés sont gérées par Mme [D] [X].

Le 26 août 2009, la SCI ROYAL MEUBLES IMMOBILIER a souscrit un contrat de crédit-bail d'une durée de douze années avec la société FRUCTICOMI, désormais NATIXIS LEASE IMMO aux fins d'acquérir des locaux commerciaux situés à Brie-Comte-Robert (77) pour un montant de 902 373 euros HT.

Une sous-location de même durée a été signée le même jour entre la SCI ROYAL MEUBLES IMMOBILIER et la SARL ROYAL MEUBLES, moyennant un loyer annuel de 108 000 euros hors TVA, payable par trimestre.

Le 13 novembre 2009, FRUCTICOMI a souscrit par l'intermédiaire de son courtier CO-ASSUR, un contrat d'assurance multirisque immeuble « Tous Sauf » n° 113 511'506 auprès de la société COVEA RISKS, aux droits de laquelle se trouve aujourd'hui la société MMA IARD, à effet du 28 août 2009 aux termes duquel la SCI ROYAL MEUBLES bénéficiait de la qualité d'assuré additionnel.

Une expertise ayant fait apparaître une valeur à neuf du bâtiment après travaux à 1 722 000 euros, le contrat d'assurance multirisque immeuble « Tous Sauf » a donc été remplacé par une nouvelle police n° 113 511 507, attachée à un avenant du 5 févier 2010 à effet au 1er janvier 2010.

La SARL ROYAL MEUBLES, qui était déjà assurée auprès de COVEA RISKS par l'intermédiaire du courtier MARC BARRET ASSURANCES (devenu par la suite MARNE-LA-VALLÉE ASSURANCES) depuis 2006 pour les risques liés à son activité, a souscrit un nouveau contrat multirisque professionnel COVEA RISKS PRO n° 124056529 X à effet du 28 août 2009 auprès du même assureur, afin de la garantir contre les dommages matériels causés à ses biens et les préjudices immatériels en résultant.

Ainsi, chacune des deux sociétés SCI ROYAL MEUBLES IMMOBILIER et SARL ROYAL MEUBLES est assurée auprès de COVEA RISKS au titre d'un contrat distinct.

Le vendredi 27 août 2010, après congés annuels, la gérante a constaté l'inondation des locaux.

Le 6 septembre 2010, la SCI ROYAL MEUBLES IMMOBILIER et la SARL ROYAL MEUBLES ont déclaré le sinistre à leur assureur respectif.

Après expertise, la compagnie COVEA RISKS a procédé au règlement d'une indemnité de 132 305,91 euros, au titre des dommages matériels à la SARL ROYAL MEUBLES au titre du contrat d'assurance multirisque professionnel COVEA RISKS PRO n° 124056529.

Le 6 juin 2011, un second dégât des eaux est survenu. Des marchandises et meubles d'exposition ont été endommagés.

Après avoir missionné le cabinet DUOTEC pour un rapport de reconnaissance, la compagnie COVEA RISKS a versé le 13 juillet 2011 à la SARL ROYAL MEUBLES, son assurée, une première provision de 60 000 euros à valoir sur les dommages matériels et la perte d'exploitation consécutive à ce second sinistre.

Une seconde provision de 60 000 euros a été réglée sur ce sinistre, le 30 novembre 2011.

Le 21 juillet 2011, la SCI et la SARL ROYAL MEUBLES ont déclaré à leur courtier CO ASSUR un troisième sinistre survenu le 19 juillet 2011.

CO ASSUR n'a cependant pas déclaré le sinistre à COVEA RISKS.

L'assurée y indique que l'eau se serait infiltrée par les plafonds, puis serait sortie du sol dans le local d'exposition attenant.

La SCI ROYAL MEUBLES IMMOBILIER indique que d'autres dégâts des eaux sont intervenus les 26 août 2011, 16 décembre 2011, 8 juin 2013, 19 juin 2013, 16 octobre 2013, 31 août 2015, 2 juin 2016 et le 13 décembre 2016.

Elle soutient les avoir tous déclarés à son courtier, tandis que la compagnie d'assurance expose que tous les sinistres ne lui ont pas été déclarés ou que certains l'ont été sans aucun justificatif.

Sur la base des deux premiers sinistres déclarés, le cabinet POLY EXPERT, mandaté par COVEA RISKS, a évalué le 2 janvier 2012, les dommages de la manière suivante :

- Pour les travaux : un total de 135 740 euros au titre des travaux, dépose-repose cheminées,

complément carrelage et BET ;

- Pour la perte de loyers : un total de 94.175 euros,

- Pour les pertes indirectes de 10 % : un total de 22 928 euros

- Une franchise de 632,00 euros soit un total de 252 211 euros.

Sur la base du rapport d'expertise de POLY EXPERT, la compagnie d'assurance COVEA RISKS a versé à son assuré la SCI ROYAL MEUBLES IMMOBILIER au titre de la police « tout sauf» n°113511507, les sommes suivantes :

- le 11 mai 2011 : 50 000 euros d'acompte

- le 7 juin 2011 : 30 000 euros d'acompte complémentaire

- le 1er août 2011 : 130 000 euros d'acompte complémentaire

- le 1er mars 2012 : 7 757 euros au titre du solde de l'indemnité immédiate (travaux 115 619 euros + perte de loyers 82 974 euros - franchise de 632 euros + Pertes Indirectes 10 % : 19 796 euros - acompte de 210 000 euros)

- le 11 avril 2012 : 8 743,50 euros d'indemnité différée

- le 18 septembre 2014 : 24 019,45 euros complémentaires au titre de l'indemnité différée.

soit la somme globale de 250.519,95 euros, dont 94 175 euros de pertes de loyers dus par la SCI ROYAL MEUBLES IMMOBILIER au titre du crédit bail, dont 82 974 euros ont été réglés en immédiat et 11 201 euros ont été réglés en différé.

Le 2 janvier 2012, la société NATIXIS LEASE IMMOBILIER a fait délivrer à la SCI ROYAL MEUBLES IMMOBILIER un commandement de payer visant la clause résolutoire insérée au bail, d'avoir à payer la somme de 176 103,56 euros TTC.

Selon ordonnance du 3 mai 2012, le juge des référés du tribunal judiciaire de Paris, saisi par la SCI RMI, M. [O] et Mme [X], a notamment constaté l'acquisition de la clause résolutoire insérée au bail à la date du 3 février 2012, ordonné, à défaut de restitution volontaire des lieux dans le mois de la signification de l'ordonnance, l'expulsion de la SCI ROYAL MEUBLES IMMOBILIER et de tout occupant de son chef dont la SARL ROYAL MEUBLES des lieux situés à Brie-Comte-Robert (Seine-et-Marne), Zone industrielle de la HAIE Passart 2 rue Galilée [...] avec le concours, en tant que de besoin, de la force publique et d'un serrurier, fixé à titre provisionnel l'indemnité d'occupation due par la SCI RMI à compter de la résiliation du bail et jusqu'à la libération effective des lieux par la remise des clefs, à une somme égale au montant du loyer contractuel, outre les taxes, charges et accessoires, et condamné par provision la SCI RMI à payer à la société FRUCTICOMI la somme de 140 000,05 euros au titre du solde des loyers, charges, accessoires et indemnités d'occupation arriérés au 2 avril 2012 inclus, avec les intérêts au taux légal à compter de l'ordonnance et les indemnités d'occupation postérieures, avec possibilité de bénéficier de délais de paiement de ces sommes en plusieurs versements.

Par arrêt du 29 janvier 2013, la cour d'appel de Paris, saisie par la SCI RMI, a confirmé cette ordonnance en toutes ses dispositions, sauf en ce qui concerne le quantum de la condamnation à titre provisionnel, et statuant à nouveau de ce seul chef, a réévalué la provision due par la SCI RMI sur loyers, charges et indemnités d'occupation arrêtés au 2 août 2011, en la portant à la somme de 201 487,18 euros.

Le 15 décembre 2011, compte tenu des désaccords entre la société COVEA RISKS et la SARL ROYAL MEUBLES, ne permettant pas de solder les sinistres, la compagnie COVEA RISKS, en sa qualité d'assureur de la SARL ROYAL MEUBLES, a saisi le président du tribunal de commerce de Paris, afin de voir ordonner une expertise judiciaire pour déterminer les causes et circonstances des différents sinistres, et donner son avis sur les dommages et préjudices, tant matériels qu'immatériels.

La SCI ROYAL MEUBLES IMMOBILIER est intervenue volontairement à la procédure.

Il a été fait droit à la demande par ordonnance de référé du 29 février 2012.

Le rapport d'expertise a été déposé le 15 février 2015.

Sur les causes des sinistres, l'expert considère qu'ils sont dus « à un sous-dimensionnement des chéneaux et à un défaut de conception des clausoirs de bas de pente qui engendrent des venues d'eaux irrémédiables depuis l'égout de toiture ». Il est incontestable selon lui que « ces défauts de dimensionnement existent depuis l'origine du bâtiment, que les sinistres répétés sont totalement inhérents à son mode constructif et qu'inévitablement, les occupants précédents de ROYAL MEUBLE ont été confrontés aux mêmes conséquences ».

Il évalue le coût des travaux de mise en conformité de l'immeuble à un total de 51 077,72 euros HT.

Le 13 décembre 2017, la SCI ROYAL MEUBLES IMMOBILIER a conclu un protocole d'accord transactionnel avec la société NATIXIS LEASE IMMO, le courtier la société CO-ASSUR CONSEIL ASSURANCES COURTAGE, la société ROYAL MEUBLES, Madame [D] [X], Monsieur [J] [Y] [O] mais la MMA IARD n'était pas partie à cet accord. Ce protocole reprend le chiffrage retenu par l'expert judiciaire au titre des travaux réparatoires de fond évalués à 21 673,84 euros HT et au titre des travaux de remise en état à la somme de 29 403,88 euros HT.

NATIXIS LEASE IMMO et la SCI ROYAL MEUBLES IMMOBILIER ont signé le même jour un acte authentique de vente de l'immeuble en cause au terme duquel l'immeuble a été revendu à la SCI LIN IMMO BIE.

Les parties sont demeurées en désaccord sur les demandes indemnitaires présentées par la SCI ROYAL MEUBLES IMMOBILIER.

C'est dans ce contexte que la SCI ROYAL MEUBLES IMMOBILIER a, par acte d'huissier délivré le 30 août 2018, fait assigner devant le tribunal judiciaire de Créteil la société COVEA RISKS ès qualités d'assureur de NATIXIS LEASE IMMO et de la SCI ROYAL MEUBLES IMMOBILIER au titre de la police « tout sauf » n° 113511507 souscrite par NATIXIS LEASE IMMO afin d'indemnisation de ses préjudices (solde du 1er sinistre, travaux de remise en état du bâtiment, perte de loyers, honoraires d'expert d'assuré).

Par jugement du 13 avril 2021, le tribunal judiciaire de Créteil a :

- Déclaré irrecevable comme prescrite l'action de la SCI ROYAL MEUBLES IMMOBILIER à l'encontre de la SA MMA IARD en ce qu'elle porte sur les sinistres survenus jusqu'au 7 octobre 2013,

- Déclaré la SCI ROYAL MEUBLES IMMOBILIER irrecevable comme dépourvue de droit d'agir pour le surplus de ses demandes (la SCI ROYAL MEUBLES IMMOBILIER étant devenue occupant sans droit ni titre à compter de la résiliation du contrat de crédit-bail à effet au 3 février 2012),

- Dit n'y avoir lieu au prononcé de l'exécution provisoire,

- Condamné la SCI ROYAL MEUBLES IMMOBILIER aux dépens,

- Condamné la SCI ROYAL MEUBLES IMMOBILIER à payer à la SA MMA IARD la somme de 4 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,

- Accordé aux avocats qui en ont fait la demande le bénéfice des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile,

- Rejeté toutes autres demandes, plus amples au contraires, des parties.

Par déclaration électronique du 31 mai 2021, enregistrée au greffe le 4 juin 2021, la SCI ROYAL MEUBLES IMMOBILIER a interjeté appel de ce jugement en mentionnant que l'appel est limité aux chefs de jugement exposés dans ladite déclaration.

Par conclusions récapitulatives n° 2 notifiées par voie électronique le 14 décembre 2023, la SCI ROYAL MEUBLES IMMOBILIER (RMI) demande à la cour, infirmant le jugement en toutes ses dispositions et statuant à nouveau, de :

- la déclarer recevable en son action car celle-ci n'est pas prescrite,

- la déclarer recevable pour avoir dûment qualité à agir en qualité d'assuré et de tiers lésé,

- condamner la compagnie d'assurances MMA IARD, au titre du contrat ou à titre de remboursement à tiers lésé, à lui payer :

- le solde d'indemnisation sur le premier sinistre de 1 691,05 euros,

- le complément d'indemnisation au titre de la perte de loyers entre le 1er septembre 2010 et le 6 juin 2011 de 2 428 euros,

- 873 600 euros au titre de la perte de loyers du 6 juin 2011 au 13 décembre 2017,

- 87 360 euros au titre des pertes indirectes.

- condamner la société MMA IARD au paiement des intérêts et des intérêts capitalisés depuis le 13 février 2017,

- la débouter de toutes ses demandes,

- réformer le jugement sur les condamnations au titre des frais irrépétibles et dépens et, statuant à nouveau, condamner la société MMA IARD à lui payer une indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile de 50 000 euros, outre les entiers dépens de première instance et d'appel.

Par conclusions récapitulatives d'intimée notifiées par voie électronique le 6 décembre 2023, la société MMA IARD, venant aux droits de COVEA RISKS, demande à la cour au visa notamment des articles :

- 122 et 123, 700, 32.1 du code de procédure civile,

- L. 114- 1 et L. 114-2 du code des assurances,

- 2239 et 2241 du code civil, 1134, 1147 et 1315 anciens du code civil,

- des conditions générales et particulières de la police cadre multirisque immeuble Natixis Lease COVEA RISK n° 3 511 507 ; du rapport final de l'expert judicaire [F] du 15 février 2015, de :

- la RECEVOIR en ses écritures et la dire bien fondée ; Y faisant droit :

- CONFIRMER le jugement entrepris ;

En conséquence,

- DEBOUTER purement et simplement la société SCI ROYAL MEUBLES IMMOBILIER de l'intégralité de ses demandes formées à l'encontre de la société MMA IARD ;

A titre subsidiaire, si la cour infirme ledit jugement :

- JUGER l'action de la SCI ROYAL MEUBLES IMMOBILIER à l'encontre de la société MMA IARD intervenue au-delà du délai de prescription applicable, irrecevable comme prescrite ;

- JUGER l'action de la SCI ROYAL MEUBLES IMMOBILIER à l'encontre de la société MMA IARD irrecevable pour défaut d'intérêt et de qualité à agir ;

Par conséquent, DEBOUTER la SCI ROYAL MEUBLES IMMOBILIER de toutes ses demandes formulées à l'encontre de la société MMA IARD ;

Si la cour n'y fait pas droit :

A titre très subsidiaire :

- JUGER que les prétendus dégâts des eaux postérieurs au 3 février 2012 ne sont pas garantis par la police d'assurance « Tout Sauf » n° 113 511 507, la SCI ROYAL MEUBLES IMMOBILIER ayant perdu la qualité d'assuré ;

En tout état de cause, JUGER que la société MMA IARD a respecté ses obligations de garantie au titre de la police d'assurance « Tout Sauf » n° 113 511 507 ;

- JUGER l'absence de preuve du préjudice allégué par la SCI ROYAL MEUBLES IMMOBILIER alors qu'elle a librement renoncé à poursuivre son locataire la SARL ROYAL MEUBLES en paiement des loyers dus au titre du contrat de bail ;

Par conséquent, REJETER l'intégralité des demandes formulées par la SCI ROYAL MEUBLES IMMOBILIER à l'encontre de la société MMA IARD ;

A titre infiniment subsidiaire : JUGER que les honoraires d'expert d'assuré garantis ne sont justifiés ni dans leur principe, aucun paiement n'étant prouvé, ni dans leur quantum;

- CONSTATER que, outre l'obligation de garantie des honoraires d'expert d'assuré, la société MMA IARD a respecté ses obligations de garantie au titre de la police d'assurance « Tout Sauf » n° 3 511 507 ;

- DIRE ET JUGER l'absence de preuve des autres préjudices allégués par la SCI ROYAL MEUBLES IMMOBILIER ;

- REJETER l'intégralité des autres demandes formulées par la SCI ROYAL MEUBLES IMMOBILIER à l'encontre de la société MMA IARD ;

En tout état de cause :

- CONDAMNER la SCI ROYAL MEUBLES IMMOBILIER à verser à la société MMA IARD la somme de 30 000 euros au titre l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens ;

- CONDAMNER la SCI ROYAL MEUBLES IMMOBILIER à verser à la société MMA IARD la somme de 5 000 euros au titre de l'article 32-1 du code de procédure civile. 

Il convient de se reporter aux conclusions ci-dessus visées pour plus ample exposé des prétentions et moyens des parties conformément à l'article 455 du code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture a été prononcée le 18 décembre 2023.

MOTIFS DE LA DÉCISION

La SCI RMI soutient que le jugement doit être intégralement infirmé dès lors, notamment, que':

- sur les sinistres survenus les 31 août 2015, 2 juin 2016 et 13 décembre 2016, à la date d'envoi de la lettre recommandée, la prescription n'était pas acquise de telle sorte que cette lettre a valablement interrompu la prescription ;

- la clause concernant la prescription, stipulée à l'article 20 des conditions générales du contrat d'assurance « multirisques tout sauf », bénéficiant tant à FRUCTICOMI qu'à l'assurée additionnelle qu'est la SCI RMI, n'est pas conforme aux exigences de l'article R. 112-1 du code des assurances et de la jurisprudence afférente de la Cour de cassation ; elle est ainsi inopposable à la demande de la SCI RMI, moyen sur lesquel la MMA reste silencieuse ;

- à titre subsidiaire, l'examen combiné des déclarations de sinistres et des règlements opérés conduit à la même solution, en ce que la prescription a été interrompue et/ou suspendue ;

- le tribunal a été induit en erreur par les développements présentés par MMA IARD qui soutient que la SCI RMI 'n'est plus propriétaire du bien immobilier assuré par COVÉA RISKS depuis le 13 décembre 2007' et que, compte tenu de la résiliation du bail par le juge des référés le 3 février 2012, elle aurait perdu la qualité de preneur et qu'ayant acquiescé dans le protocole transactionnel ayant constaté cette situation, occupante désormais sans droit, ni titre, elle aurait aussi perdu la qualité d'assuré ;

- dans le protocole transactionnel, le montant des sommes prises en compte dans le cadre de la transaction exclut le règlement de l'indemnité de résiliation contractuellement prévue chiffrée à 1 299 412,18 euros qui ne figure à l'exposé de l'article 1 que pour valoir reconnaissance de la situation juridique exposée, l'indemnité de résiliation ayant été supprimée, ce qui signifie que le protocole a mis à néant la résiliation ;

- le protocole transactionnel aboutit à un règlement complet des sommes dues avec intérêts au crédit-bailleur et à compter de la levée de l'option, le prix de cession est calculé en application du contrat démontant ainsi que le contrat de crédit-bail a été intégralement accompli ;

- c'est donc à tord que le jugement a déclaré la SCI RMI dépourvue du droit d'agir en ne retenant qu'une situation transitoire et provisoire dont la transaction opérée avec le crédit-bailleur, qui a supprimé les effets faisant reprendre intégralement le cours du bail;

- l'ensemble des loyers impayés depuis l'origine ont été réglés avec les accessoires et le prix de cession par le crédit-bailleur au crédit-preneur a été calculé en tenant compte des dispositions contractuelles pour fixer le prix résiduel de la valeur du bien au moment de l'option d'achat ;

- la garantie est due à la SCI RMI au titre du contrat d'assurance et la SCI RMI a bien qualité à agir ;

- il n'est nulle part indiqué que la renonciation à toute instance ou action bénéficierait à des tiers quels qu'ils soient alors qu'il est évident que cette renonciation à recours bénéficie aux parties signataires du protocole et, en l'espèce, au crédit-bailleur ; il n'existe pas de rapport juridique entre CO-ASSUR et la société MMA IARD, ce dernier n'étant pas agent général et n'ayant été que le courtier de FRUCTICOMI, à l'époque, et le gestionnaire des risques ayant d'ailleurs transmis à COVÉA RISKS les déclarations de sinistre ;

- contrairement aux affirmations de l'assureur, la SCI RMI a rappelé, le 13 février 2017, interrompant ainsi l'éventuelle prescription biennale qui pouvait intervenir le 15 février de la même année, que l'ensemble des indemnités qui étaient dues au titre des différents sinistres s'élevait à 1 209 448,08 euros sur lesquels l'assureur avait payé 252 211 euros, ayant versé ces sommes conformément aux dispositions contractuelles au souscripteur, étant précisé qu'elles ont été imputées au compte de la SCI RMI dans l'ensemble des relations financières entre le crédit-bailleur et le crédit-preneur ;

- outre le fait que la MMA IARD ne conteste pas avoir versé une somme de 250 519,95 euros au titre des indemnités relevant du premier sinistre, elle rappelle elle-même que le 26 janvier 2012 le cabinet POLYEXPERT avait fixé le montant de l'indemnité dûe par COVÉA RISKS à 252 211 euros comprenant seulement 94 175 euros au titre de la perte de loyers ; ces sommes ont été versées à FRUCTICOMI qui les a pris en compte ; il en résulte une dette dérisoire à ce sujet de 1 691,05 euros au titre du premier sinistre qui revient à la SCI RMI puisque le crédit-bailleur a été intégralement réglé ;

- en reprenant le calcul du rapport d'expertise de POLYEXPERT du 26 janvier 2012, entériné par COVEA RISKS, mais en prenant en compte une inexploitation totale des locaux, l'indemnisation s'établit à 11 200 euros (constitué du loyer principal et du loyer de l'avenant retenus par POLYEXPERT) pour le loyer mensuel x 78 mois, soit 873 600 euros, somme qui devra être allouée à la SCI RMI au titre de la perte de loyers, augmentée des intérêts courant depuis la mise en demeure du 13 février 2017, capitalisés jusqu'à règlement définitif ;

- contractuellement, toute indemnité, telle que calculée, entraîne en outre le bénéfice du règlement de 10 % au titre des pertes indirectes forfaitairement, soit la somme de 87 360 euros.

La société MMA réplique que le jugement doit être confirmé dès lors, notamment, que :

- elle est recevable à opposer la prescription de l'action concernant plusieurs des sinistres, dès lors que le contrat a été souscrit par NATIXIS et non par la SCI qui n'en est que bénéficiaire ab initio, peu important alors que les conditions générales du contrat ne respectent pas les exigences de l'article R. 112-1 du code des assurances ;

- la suspension de prescription biennale ne profite qu'au demandeur de la mesure d'expertise ce qui signifie qu'elle ne profite ni à l'entreprise assignée en référé expertise vis-à-vis de son assureur ni à l'intervenant volontaire ;

- la prescription biennale est opposable au souscripteur comme à l'assuré ;

- le délai biennal reprend son cours à compter de la date de désignation de l'expert, en l'espèce le 9 septembre 2010 au moment de la déclaration du premier sinistre, et ce sans que l'expertise amiable qui a suivi ensuite son cours, ne suspende le délai de prescription;.

- l'action concernant les quatre premiers sinistres est prescrite puisque l'appelante ne justifie pas avoir interrompu le délai biennal de prescription jusqu'à son action judiciaire du 30 août 2018 ; la SCI RMI est intervenue volontairement dans l'instance pour la première fois par voie de conclusions du 28 décembre 2011 uniquement dans le but de faire éventuellement valoir ses droits dans le cadre de sa relation à l'égard de son locataire preneur, la SARL ROYAL MEUBLES et non dans le cadre de sa relation contractuelle avec la société COVEA RISKS selon police cadre multirisques immeuble Natixis-Lease COVEA RISKS n° 113 511 507 ; la SCI RMI ne formule aucune demande et laisse entendre uniquement qu'elle entend être réglée par la SARL ROYAL MEUBLES des loyers impayés ;

- ce n'est que le 14 novembre 2013 que la SCI a assigné la société COVEA RISKS en sa qualité d'assureur de la SCI RMI selon la police cadre multirisques immeuble Natixis-Lease COVEA RISKS n° 113 511 507, devant le président du tribunal de commerce de Paris aux fins de lui voir rendre commune et opposable les opérations d'expertise confiées à M. [F], soit plus de deux ans après les quatre sinistres nés entre le 27 août 2010 et 26 août 2011 ; or l'action était déjà prescrite ;

- il ressort de l'arrêt de la cour d'appel de Paris du 29 janvier 2013 (rectifié le 26 février 2013), confirmant l'ordonnance rendue par le juge des référés (sauf en ce qui concerne le quantum de la condamnation provisionnelle), que la SCI RMI et la SARL ROYAL MEUBLES ont été sans droit ni titre à compter du 3 février 2012, date de résiliation du contrat de crédit-bail ; la SCI a ainsi perdu ainsi sa qualité de crédit-preneur du bâtiment au contrat de crédit-bail ; à partir de cette date, celles-ci sont devenues débitrices d'une indemnité d'occupation et non d'un loyer ;

- la SCI n'a plus qualité à agir pour tout sinistre postérieur au 3 février 2012 et ne peut donc solliciter le bénéfice de la garantie résultant de la police « Tout Sauf » n° 113 511 507 à ce titre ;

- la SCI a fait preuve d'une particulière mauvaise foi tout au long de cette affaire, justifiant qu'elle soit condamnée à la somme de 5 000 euros pour procédure abusive.

1) Sur l'action en règlement des sinistres

a. Sur la recevabilité

Sur la prescription

Vu les articles 122 et 123 du code de procédure civile, R. 112-1, L. 114- 1 alinéa 1er, L. 114-2 et L. 112-6 du code des assurances, et 2239 du code civil ;

L'action intentée le 30 août 2018 par la SCI à l'encontre de son assureur la société MMA IARD porte sur les onze sinistres suivants :

* n° 1 : 27 août 2010

* n° 2 : 6 juin 2011

* n° 3 : 19 juillet 2011

* n° 4 : 26 août 2011

* n° 5 : 16 décembre 2011

* n° 6 : 8 juin 2013

* n° 7 : 19 juin 2013

* n° 8 : 16 octobre 2013

* n° 9 : 31 août 2015

* n° 10 : 2 juin 2016

* n° 11 : 13 décembre 2016.

Le tribunal a déclaré irrecevable comme prescrite l'action de la SCI ROYAL MEUBLES IMMOBILIER à l'encontre de la SA MMA IARD en ce qu'elle porte sur les sinistres survenus jusqu'au 7 octobre 2013, la prescription n'étant en revanche pas acquise pour les sinistres survenus les 31 août 2015, 2 juin 2016 et 13 décembre 2016 (sinistres n° 9, 10 et 11 )

Il convient de prendre acte du fait que la société MMA ne conteste pas en cause d'appel l'absence de prescription des sinistres n° 9 (31 août 2015) et 10 (2 juin 2016).

La MMA maintient en revanche sa fin de non-recevoir tirée de la prescription de l'action (p. 15 à 22) pour les sinistres n° 1 à 8, et fait valoir pour le sinistre n° 11, que l'appelante ne communique aucun élément de preuve permettant d'apprécier l'existence du prétendu sinistre du 13 décembre 2016, si ce n'est un simple e-mail qu'elle aurait adressé à son courtier (CO ASSUR).

La SCI réplique en substance ( p. 10 à14, et p. 23) que la prescription ne lui est pas opposable, le contrat ne respectant pas les dispositions de l'article R. 112-1 du code des assurances, que certains paiements sont interruptifs de prescription et que la mesure d'expertise judiciaire a suspendu la prescription.

L'assureur qui n'a pas respecté les dispositions de l'article R. 112-1 susvisé, ne peut pas opposer la prescription biennale à son assuré et ne peut pas prétendre à l'application de la prescription de droit commun.

Pour satisfaire à l'obligation d'information concernant la prescription, faute de quoi le délai de prescription de l'article L. 114-1 précité est inopposable à l'assuré, le contrat ne doit pas se borner à faire référence aux articles L. 114-1 et L. 114-2 du code des assurances, mais doit en rappeler les termes, ainsi que les causes d'interruption de la prescription biennale, ainsi que les causes ordinaires d'interruption de la prescription et les différents points de départ du délai de prescription biennale.

En l'espèce, les conditions générales du contrat d'assurance COVEA Risks « multirisques 'tous dommages sauf et responsabilité civile propriétaire d'immeuble' », bénéficiant tant à NATIXIS LEASE (venant aux droits de FRUCTICOMI ) qu'à l'assurée additionnelle la SCI RMI, stipulent en page 13, à l'article 20 « Prescriptions », que « toute action dérivant du présent contrat est prescrite par deux ans. Ce délai commence à courir du jour de l'événement qui donne naissance à cette action, dans les conditions déterminées par les articles L. 114-1 et L. 114-2 du Code des Assurances ; toutefois, pour les contrats qui garantissent des risques situés dans les départements du HAUT-RHIN, du BAS-RHIN et de la MOSELLE, il ne commence à courir qu'à compter du 31 décembre suivant cet événement ».

La clause précitée, contenue dans les conditions générales du contrat, se borne à faire référence aux dispositions des articles L. 114-1 et L. 114-2 du code des assurances, sans énumérer les causes ordinaires et complémentaires d'interruption de la prescription biennale à l'époque de la souscription de la nouvelle police en 2010, ni même les différents points de départ du délai de prescription.

Il s'en déduit que la prescription biennale n'est pas opposable à la SCI, laquelle est recevable à soutenir ce moyen en sa qualité d'assurée additionnelle du contrat souscrit par FRUCTICOMI devenue NATIXIS LEASE, contrairement à ce que soutient la société MMA.

Dès lors que la prescription biennale n'est pas opposable à la SCI, et que la prescription de droit commun n'a pas vocation à se substituer à la prescription biennale déchue, les moyens invoqués au titre de l'interruption ou de la suspension de la prescription, sont surabondants. Il n'y a donc pas lieu de les examiner.

Le moyen d'irrecevabilité tiré de la prescription soulevé par la MMA à l'encontre des demandes d'indemnisation concernant l'ensemble des sinistres à l'exception de celui survenu le 31 août 2015 et de celui survenu le 2 juin 2016, est en conséquence rejeté.

Le jugement est ainsi infirmé en ce qu'il a déclaré irrecevable comme prescrite l'action de la SCI RMI à l'encontre de la SA MMA IARD en ce qu'elle porte sur les sinistres survenus jusqu'au 7 octobre 2013.

Sur le défaut de qualité à agir

Le tribunal a déclaré la SCI ROYAL MEUBLES IMMOBILIER irrecevable comme dépourvue

de droit d'agir pour le surplus de ses demandes.

Contrairement à ce qu'affirme la SCI, le tribunal a procédé à une exacte appréciation des faits de la cause sur ce point.

Par ordonnance du 3 mai 2012 intervenue entre la SA FRUCTICOMI et la SCI ROYAL MEUBLES IMMOBILIER, le juge des référés du tribunal de grande instance de Paris a notamment :

- constaté l'acquisition de la clause résolutoire insérée au bail à la date du 3 février 2012 ;

- ordonné l'expulsion de la SCI ROYAL MEUBLES IMMOBILIER et de tout occupant de son chef dont la SARL ROYAL MEUBLES des lieux situés à [Localité 5],

- fixé à titre provisionnel, une indemnité d'occupation due par la SCI à compter de la résiliation du bail et jusqu'à la libération effective des lieux par la remise des clés ;

- condamné par provision la SCI ROYAL MEUBLES IMMOBILIER à payer à la société FRUCTICOMI la somme de 140 000,05 euros au titre du solde des loyers, charges, accessoires et indemnités d'occupation arriérés au 2 avril 2012 inclus, avec intérêts.

Par arrêt rendu le 29 janvier 2013 (rectifié le 26 février 2013), la cour d'appel de Paris a confirmé cette décision, sauf à porter le montant de la condamnation provisionnelle à la somme de 201 487,18 euros, représentant les loyers, charges et indemnités d'occupation arrêtés au 2 août 2011.

Selon protocole d'accord du 13 décembre 2017 intervenu entre d'une part, la société NATIXIS LEASE IMMO (nouvelle dénomination de FRUCTICOMI, le crédit-bailleur) et la société CO-ASSUR Conseil Assurances Courtage (le courtier), et d'autre part, la SCI ROYAL MEUBLES IMMOBILIER (le crédit-preneur), la SARL ROYAL MEUBLES (le sous-locataire), Madame [U] [X] et Monsieur [J] [O] (les associés et cautions), il a été notamment convenu :

Article premier (p.13) :

« La SCI ROYAL MEUBLES IMMOBILIER reconnaît expressément que le contrat de crédit-bail immobilier du 26 août 2009, modifié par avenant notarié du 4 décembre 2009, se trouve résilié à effet du 3 février 2012, et acquiesce sans réserve, expressément et irrévocablement aux dispositions de l'ordonnance rendue par le juge des référés du tribunal de grande instance de Paris [...]confirmée par l'arrêt de la cour d'appel de Paris du 29 janvier 2013 [...], notamment en ce que la résiliation du contrat de crédit-bail du 26 août 2009 modifié par avenant du 4 décembre 2009, a été constatée [...] ».

Article 2 (p.14) :

« Sous réserve du strict respect des conditions visées au présent protocole, le crédit-bailleur accepte:

- de ne pas se prévaloir, à tout le moins jusqu'au 31 décembre 2017 inclus, de la résiliation du contrat de crédit-bail immobilier du 26 août 2009, intervenue de plein droit à effet du 3 février 2012,

- de n'entreprendre, jusqu'au 31 décembre 2017 inclus, aucune mesure d'exécution, de recouvrement ou d'expulsion à l'encontre de la SCI ROYAL MEUBLES IMMOBILIER ou des occupants de son chef, ainsi qu'à l'encontre des associés et des cautions ».

Article 3 (p.15) :

« La société NATIXIS LEASE IMMO accepte, à titre dérogatoire, de permettre à la SCI ROYAL MEUBLES IMMOBILIER de lever l'option d'achat et de se porter acquéreur de l'immeuble, sous réserve du strict respect des conditions ci-après listées : [...] »

Article 4 (p.17 et 18) :

« Sous réserve du strict respect des conditions visées au présent protocole et notamment à l'article 3 ci-dessus, la société NATIXIS LEASE IMMO renoncera définitivement :

- à se prévaloir de la résiliation du contrat de crédit-bail immobilier du 26 août 2009,

[...]

En revanche, à défaut du strict respect de l'une quelconque des conditions visées au présent protocole [...] l'accord émis par la société NATIXIS LEASE IMMO, au présent article, sera définitivement et irrévocablement caduc.

Dans ce cas, le contrat de crédit-bail immobilier sera définitivement et irrévocablement résilié à effet du 3 février 2012, la société NATIXIS LEASE IMMO se prévalant alors de l'intégralité de ses droits à l'égard de la SCI ROYAL MEUBLES IMMOBILIER et le cas échéant des occupants de son chef, des cautions et des associés [...]».

Comme l'a exactement relevé le tribunal, la SCI ROYAL MEUBLES IMMOBILIER a confirmé que l'acte authentique de levée d'option d'achat a été passé, ce qui entérine définitivement le protocole transactionnel.

Aux termes de ce protocole transactionnel qui a autorité de chose jugée entre les signataires, la SCI ROYAL MEUBLES IMMOBILIER, qui acquiesce à l'ordonnance de référé confirmée par l'arrêt de la cour d'appel de Paris du 29 janvier 2013, reconnaît la résiliation du contrat de crédit-bail à effet au 3 février 2012, ce qui signifie qu'elle est devenue occupant sans droit ni titre à compter de cette date.

La SCI reconnaît par ailleurs en page 24 de ses écritures avoir perdu momentanément sa qualité d'assurée dans les rapports juridiques entre le crédit-bailleur et le crédit-preneur, et que, si le crédit-bailleur en a supprimé les effets par le protocole, c'est au terme des articles 2 et 3 dudit protocole, uniquement à titre dérogatoire dans les relations entre le crédit-bailleur et le crédit-preneur, pour permettre à la SCI de lever l'option d'achat et de se porter acquéreur de l'immeuble.

Il en résulte que le crédit-bail a effectivement été résilié à la date du 3 février 2012 et qu'en conséquence la SCI ne pouvait plus être considérée à l'égard de l'assureur, comme étant son assurée. Elle n'a par conséquent pas d'intérêt à agir pour les sinistres survenus postérieurement au 3 février 2012 et solliciter le bénéfice de la police d'assurance multirisque immeuble Tous Sauf n° 113 511 507 souscrite par FRUCTICOMI aux droits de laquelle vient NATIXIS LEASE IMMO et qui bénéficiait à la SCI RMI en sa qualité de preneur.

La SCI RMI ne peut davantage se prévaloir de la qualité de tiers lésé, qui ne saurait être cumulative avec celle d'assuré, en l'absence d'action en responsabilité civile.

La SCI RMI est en conséquence irrecevable pour défaut de qualité à agir pour les sinistres n° 6 à 11, survenus après le 3 février 2012.

Sur la fin de non-recevoir tirée d'une clause de renonciation à recours stipulée dans le protocole d'accord transactionnel

Subsidiairement invoquée par la société MMA, si la cour ne confirme pas les motifs qui ont conduit le tribunal à rejeter les demandes de la SCI, et nonobstant sa qualité de tiers à la transaction contenant une clause de renonciation à recours, le bénéfice de cette clause, qui est stipulée dans le protocole d'accord transactionnel, est contestée par la SCI.

L'article 7 du protocole stipule en page 19 que « les parties conviennent expressément que le présent protocole constitue une transaction au sens des articles 2044 et suivants du Code Civil, qu'il a autorité de la chose jugée, ne pouvant être révoqué ni pour cause de lésion, ni pour erreur de droit et qu'il emporte renonciation à toute instance ou action présente ou à venir se rapportant aux présentes.'

Compte tenu de l'effet relatif des contrats, la MMA ne peut invoquer le bénéfice de cette clause alors qu'elle n'est pas partie au présent protocole, contrairement à ce qu'elle soutient et peu important que le courtier CO-ASSUR soit aussi bénéficiaire de la renonciation à recours en l'absence de rapport juridique entre CO-ASSUR et la société MMA IARD.

La fin de non-recevoir soulevée à ce titre est ainsi rejetée.

Il se déduit de l'ensemble de ces éléments que la SCI est bien fondée en sa demande d'indemnisation concernant les sinistres n° 1 à 5.

b. Sur le bien-fondé des demandes concernant les sinistres n° 1 (27 août 2010) à 5 (16 décembre 2011)

Sur la perte de loyers

En application de l'article 6.2.11 (p. 12) des conditions particulières, consacré aux pertes de loyer et à la perte d'usage « la compagnie garantit les pertes de loyers et la perte d'usage à concurrence de 3 années à compter de la date du sinistre.

Cette garantie a pour objet de verser au BAILLEUR les loyers en cas d'impossibilité pour le PRENEUR, LOCATAIRE ou OCCUPANT d'utiliser temporairement tout ou partie des biens loués.

Elle s'exerce donc tant au profit du BAILLEUR au titre des « pertes de loyers » qu'au profit du PRENEUR, LOCATAIRE ou OCCUPANT au titre de la « perte d'usage »  [...] 

En tout état de cause, sont garantis au minimum le montant des loyers dus par le PRENEUR au CREDIT-BAILLEUR ou le montant des loyers dus par les SOUS- LOCATAIRES au PRENEUR. »

La SCI réclame un solde d'indemnisation sur le premier sinistre, un complément d'indemnisation au titre des pertes de loyers entre le 1er septembre 2010 et le 6 juin 2011, puis l'indemnisation des loyers perdus par la suite (soit jusqu'au sinistre du 16 décembre 2011,au regard de la période de recevabilité arrêtée par la cour), outre les intérêts, capitalisés.

Cependant, en page 18 de ses conclusions, l'assurée reconnaît que le crédit-bailleur a été intégralement payé par la MMA pour les loyers impayés, et qu'il n'est donc plus, malgré sa qualité d'assuré souscripteur de la police, susceptible de réclamer une quelconque indemnisation, ce qui est confirmé par la planche comptable simplifiée produite par l'assureur (pièce 4) indiquant pour chaque dégât des eaux les sommes versées au crédit-bailleur.

Il convient en conséquence de débouter la SCI de ses demandes, sans qu'il soit nécessaire de suivre les parties dans le détail de leur argumentation.

Sur les pertes indirectes : 10 % de l'indemnité

Le jugement vise le versement fait le 1er mars 2012 par COVEA RISKS à son assuré, la SCI, de la somme de 19 796 euros soit 10 % pour les pertes indirectes.

En cause d'appel, la SCI sollicite en application du contrat d'assurance, la somme de 87 360 euros sur ce fondement, outre les intérêts, capitalisés.

C'est vainement que l'assureur soulève l'irrecevabilité de cette demande au regard de son caractère nouveau en cause d'appel, dès lors que cette prétention tend manifestement à une même fin que celles soumises au premier juge, à savoir obtenir une indemnisation en application du contrat d'assurance.

En revanche, en l'absence de versement d'une indemnité, aucune indemnité pour pertes indirectes n'est due. Cette demande est ainsi rejetée.

Sur le coût des travaux

Devant le tribunal, la SCI RMI avait formulé une demande de paiement du coût des travaux chiffrés par l'expert judiciaire dans son rapport du 15 février 2015.

En cause d'appel, elle explique que les travaux n'ont pas été réalisés et que le bâtiment a été

vendu en l'état, de telle sorte qu'elle renonce à cette demande.

Il convient d'en prendre acte.

2) Sur l'action en responsabilité pour procédure abusive

Vu les articles 32-1 du code de procédure civile, 1382 ancien et 1240 nouveau du code civil ;

Le tribunal a débouté la société MMA de sa demande d'indemnisation pour procédure abusive.

Compte tenu de la solution retenue par la cour, l'action ne parait ni dilatoire ni abusive, étant en outre relevé que la MMA ne fait valoir aucun préjudice réparable au soutien de sa demande.

Le jugement est confirmé sur ce point.

3) Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile

Le tribunal a condamné la SCI ROYAL MEUBLES IMMOBILIER à payer à la SA MMA IARD la somme de 4 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile, outre les dépens dont distraction, et il a rejeté les demandes de la SCI RMI formulées à ce titre.

Compte tenu de l'issue du litige, ces chefs de jugement sont confirmés et la SCI RMI, partie perdante, sera condamnée en cause d'appel aux dépens et à payer à la société MMA IARD, en application de l'article 700 du code de procédure civile, une indemnité qui sera, en équité, fixée à la somme de 5 000 euros. La SCI RMI sera déboutée de ses demandes formulées à ce titre.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Statuant en dernier ressort, contradictoirement et publiquement par mise à disposition de la décision au greffe,

Confirme le jugement en ce qu'il a débouté la société MMA de sa demande pour procédure abusive, condamné la SCI ROYAL MEUBLES IMMOBILIER à payer à la SA MMA IARD la somme de 4 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile, outre les dépens dont distraction, et rejeté les demandes de la SCI ROYAL MEUBLES IMMOBILIER formulées à ce titre ;

L'infirme sur le surplus des dispositions soumises à la cour ;

Statuant à nouveau des chefs infirmés et y ajoutant,

Rejette le moyen d'irrecevabilité tiré de la prescription soulevé par la société MMA IARD à l'encontre des demandes d'indemnisation formulées par la SCI ROYAL MEUBLES IMMOBILIER concernant l'ensemble des sinistres à l'exception de celui survenu le 31 août 2015 et de celui survenu le 2 juin 2016 ;

Déclare la SCI ROYAL MEUBLES IMMOBILIER irrecevable pour défaut de qualité à agir pour les sinistres n° 6 à 11, survenus après le 3 février 2012 ;

Rejette la fin de non-recevoir tirée de la clause de renonciation à recours stipulée dans le protocole d'accord transactionnel ;

Déclare la SCI ROYAL MEUBLES IMMOBILIER recevable mais mal fondée en ses demandes concernant l'indemnisation des sinistres n° 1 à 5 ; l'en déboute ;

Déboute la SCI ROYAL MEUBLES IMMOBILIER de sa demande au titre des pertes indirectes;

Condamne la SCI ROYAL MEUBLES IMMOBILIER aux dépens ;

Condamne la SCI ROYAL MEUBLES IMMOBILIER à payer à la société MMA IARD la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Déboute la SCI ROYAL MEUBLES IMMOBILIER de sa demande formée de ce chef ainsi qu'au titre des dépens.

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 4 - chambre 8
Numéro d'arrêt : 21/10165
Date de la décision : 24/04/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 30/04/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-04-24;21.10165 ?
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