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24/04/2024 | FRANCE | N°21/07014

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 4 - chambre 8, 24 avril 2024, 21/07014


Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 8



ARRÊT DU 24 AVRIL 2024



(n° 2024/ 89 , 9 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/07014 - N° Portalis 35L7-V-B7F-CDPJU



Décision déférée à la Cour : Jugement du 15 Mars 2021 -Tribunal de Grande Instance de BOBIGNY - RG n° 19/14190





APPELANTS



Monsieur [K] [B]

[Adresse 3]

[Locali

té 6]

né le [Date naissance 1] 1978 à TURQUIE



Madame [T] [B]

[Adresse 3]

[Localité 6]

née le [Date naissance 2] 1978 à TURQUIE



représentés par Me Loren MAQUIN-JOFFRE de la SELARL...

Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 8

ARRÊT DU 24 AVRIL 2024

(n° 2024/ 89 , 9 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/07014 - N° Portalis 35L7-V-B7F-CDPJU

Décision déférée à la Cour : Jugement du 15 Mars 2021 -Tribunal de Grande Instance de BOBIGNY - RG n° 19/14190

APPELANTS

Monsieur [K] [B]

[Adresse 3]

[Localité 6]

né le [Date naissance 1] 1978 à TURQUIE

Madame [T] [B]

[Adresse 3]

[Localité 6]

née le [Date naissance 2] 1978 à TURQUIE

représentés par Me Loren MAQUIN-JOFFRE de la SELARL A.K.P.R., avocat au barreau Du VAL-DE-MARNE

INTIMÉE

S.A. PACIFICA, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 5]

[Localité 4]

Immatriculée au RCS de PARIS sous le numéro : U352 .35 8.8 65

représentée par Me Laure ANGRAND de la SARL MANDIN - ANGRAND AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : P0435

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 29 Janvier 2024, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposé, devant Mme CHAMPEAU-RENAULT, Présidente de chambre, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Mme CHAMPEAU-RENAULT, Présidente de chambre

Mme FAIVRE, Président de chambre

M. SENEL, Conseiller

Greffier, lors des débats : Madame Laure POUPET

ARRÊT : Contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Mme CHAMPEAU-RENAULT, Présidente de chambre et par Mme POUPET, greffière, présente lors de la mise à disposition.

*****

M. et Mme [B] sont propriétaires d'une maison située [Adresse 3]), résidence principale de la famille [B].

M. [B] a souscrit auprès de la SA PACIFICA, par l'intermédiaire de la société de courtage d'assurances CREDIT LYONNAIS, un contrat d'assurances Multirisques Habitation qui a pris effet le 18 septembre 2018.

Le 16 février 2019, la résidence des époux [B] a été incendiée. Une déclaration de sinistre a été effectuée auprès de l'assureur qui a désigné le cabinet MOREL en qualité d'expert. Celui-ci a déposé plusieurs rapports dont le dernier en date du 24 avril 2019.

Sur la base de ces documents, PACIFICA a réglé, respectivement 5 000 euros le 18 février 2019, 5 000 euros le 19 février 2019 et 50 000 euros le 26 mars 2019, soit une somme totale de 60 000 euros, à titre d'avance sur l'indemnisation.

Par courrier du 4 juillet 2019, l'assureur a opposé à son assuré la nullité du contrat d'assurance pour fausse déclaration intentionnelle.

Par acte d'huissier du 3 décembre 2019, les époux [B] ont assigné PACIFICA devant le tribunal de grande instance de Bobigny afin d'obtenir la garantie de leur assureur.

Par jugement du 15 mars 2021, le tribunal judiciaire de Bobigny a :

- prononcé la nullité du contrat d'assurance souscrit le 18 septembre 2018,

- rappelé que les primes payées demeurent acquises à l'assureur à titre de dommages et intérêts,

- condamné les époux [B] à restituer à PACIFICA la somme de 60 000 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 29 octobre 2020,

- rejeté les demandes des époux [B] au titre de l'indemnité d'assurance et des dommages et intérêts,

- rejeté l'ensemble des demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné les époux [B] aux entiers dépens, dont le recouvrement se fera conformément à l'article 699 du code de procédure civile,

- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire.

Par déclaration électronique du 12 avril 2021, enregistrée au greffe le 19 avril 2021, les époux [B] ont interjeté appel de ce jugement intimant PACIFICA en mentionnant dans la déclaration que l'appel tend à la réformation du jugement en ses divers chefs expressément critiqués dans ladite déclaration.

Par conclusions récapitulatives n° 2 notifiées par voie électronique le 15 décembre 2023, les époux [B] demandent à la cour, au visa des articles L. 113-2 et L. 113-8 du code des assurances, 565, 566 et 700 du code de procédure civile et 1221 et 1342-2 du code civil, de :

- déclarer mal fondée PACIFICA en toutes ses contestations et demandes incidentes et l'en débouter ;

- INFIRMER le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Bobigny le 15 mars 2021 en toutes ses dispositions ;

Statuant à nouveau,

- dire et juger que la fausse déclaration faite par les époux [B] à leur assureur n'est pas intentionnelle ;

- dire et juger en conséquence que PACIFICA doit sa garantie aux époux [B] au titre de la police souscrite et de l'incendie qu'a subi leur maison ;

En conséquence,

À titre principal,

- condamner PACIFICA à leur payer la somme de 334 932,40 euros avec intérêts au taux légal à compter de l'assignation introductive d'instance ;

- ordonner la capitalisation des intérêts dus depuis plus d'un an dans les conditions de l'article 1343-2 du code civil ;

À titre subsidiaire,

- désigner un expert judiciaire dont la mission principale sera d'évaluer les dommages aux biens immobiliers au coût de reconstruction à l'identique sans qu'il y ait lieu de déduire la vétusté ;

À titre infiniment subsidiaire,

- ordonner l'exécution forcée en nature de la clause contractuelle prévoyant procédure de fixation de l'indemnité ;

- condamner PACIFICA à leur payer la somme de 10 000 euros par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et mettre à sa charge les entiers dépens d'instance et d'appel.

Par conclusions récapitulatives d'intimée n° 5 notifiées par voie électronique le 15 décembre 2023, PACIFICA demande à la cour, au visa des articles 9 du code de procédure civile, 1130 et suivants et 1353 du code civil, L. 113-8 du code des assurances, de :

- la recevoir en ses écritures et l'y dire bien fondée ;

- CONFIRMER le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Bobigny le 15 mars 2021 ;

À défaut, statuant à nouveau,

- dire et juger que M. [B] a procédé à de fausses déclarations auprès de la compagnie PACIFICA au moment de la souscription du contrat d'assurance Habitation, s'agissant de l'absence de résiliation par l'assureur de son précédent contrat ;

- dire et juger que ses fausses déclarations avaient pour objet de modifier l'appréciation du risque pour PACIFICA ;

- condamner solidairement les époux [B], ou l'un à défaut de l'autre, à payer à PACIFICA la somme de 35 311,47 euros correspondant aux frais engagés par elle dans le cadre du sinistre frauduleusement déclaré ;

- prononcer par conséquent la nullité du contrat d'assurance Habitation souscrit ;

- dire et juger que les primes payées demeurent acquises à PACIFICA à titre de dommages et intérêts ;

- dire et juger que les époux [B] n'ont pu obtenir la garantie de PACIFICA qu'en cachant par man'uvre la résiliation de son précédent contrat d'assurance par la compagnie GENERALI pour non-paiement de primes ;

- prononcer par conséquent la nullité du contrat d'assurance Habitation souscrit par M. [B] auprès de PACIFICA ;

- dire et juger que les primes payées demeurent acquises à PACIFICA qui a droit au paiement de toutes les primes échues à titre de dommages et intérêts ;

- condamner les époux [B] à rembourser à PACIFICA les sommes qu'ils ont perçues indument à titre d'avance soit 60 000 euros avec intérêts de droit à compter de la signification des présentes écritures ;

- condamner les époux [B] à rembourser à PACIFICA les sommes qu'elle a versé indûment au titre de ce contrat à savoir 28 273,20 euros au titre des mesures conservatoires et 1 692,94 euros pour le relogement d'urgence ;

À titre subsidiaire,

- juger que les époux [B] ont communiqué de fausses factures afin de déterminer PACIFICA à leur payer une indemnité d'assurance indue ;

- prononcer la déchéance du droit à garantie de [K] et [T] [B] pour le sinistre de leur habitation déclaré le 16 février 2019 ;

- condamner solidairement les époux [B], ou l'un à défaut de l'autre, à restituer à la compagnie PACIFICA la somme de 60 000 euros indûment perçue à titre de provision ;

- condamner solidairement les époux [B], ou l'un à défaut de l'autre, à payer à PACIFICA la somme de  --- correspondant (ainsi écrit dans les conclusions) aux frais engagés par elle dans le cadre du sinistre frauduleusement déclaré ;

À titre encore plus subsidiaire,

- dire et juger que les factures produites par les époux [B] pour justifier de l'étendue de leur préjudice sont manifestement insincères ;

- faire application de la clause de déchéance de garantie ;

- dire et juger que les modalités d'évaluation de l'indemnité d'assurance sont fixées par le contrat, à savoir de gré-à-gré ou, à défaut, par voie d'expertise ;

- dire et juger que l'indemnité d'assurance est évaluée vétusté déduite ;

- dire et juger que les époux [B] ne démontrent pas la commission d'une faute par PACIFICA à laquelle serait imputable un préjudice distinct subi par lui ;

- débouter en conséquence les époux [B] de l'ensemble de ses demandes indemnitaires formulées à l'égard de PACIFICA ;

À titre infiniment subsidiaire,

- donner pour mission à l'expert qui serait désigné d'évaluer les dommages aux biens immobiliers au coût de reconstruction à l'identique, vétusté déduite ;

En tout état de cause,

- débouter les époux [B] de toutes demandes plus amples ou contraires ;

- condamner les époux [B] à payer à PACIFICA la somme de 5 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner les époux [B] aux entiers dépens de premières instance et d'appel et dire qu'ils pourront être directement recouvrés par la SARL MANDIN-ANGRAND avocats, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Pour plus ample exposé des faits, prétentions et moyens des parties, il convient de se reporter aux conclusions ci-dessus visées conformément à l'article 455 du code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture a été prononcée le 18 décembre 2023.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la demande de nullité du contrat d'assurance au titre de l'article L. 113-8 du code des assurances

Au visa des articles 1103, 1104 du code civil et L.113-8 du code des assurances, le tribunal a considéré que l'assuré a intentionnellement effectué une fausse déclaration dans le but de tromper son assureur et que cette fausse déclaration a changé l'opinion du risque pour l'assureur, que dès lors, la nullité était encourue ; qu'il a ajouté s'agissant de la confirmation, que l'exécution volontaire du contrat ne vaut confirmation que lorsqu'elle a été effectuée en connaissance de cause, ce qui n'était pas le cas de l'assureur.

L'assuré sollicite l'infirmation du jugement. Il invoque l'absence de caractère intentionnel de la fausse déclaration, l'assureur ne rapportant pas la preuve de sa mauvaise foi. De plus, le formalisme rigoureux posé par la jurisprudence n'a pas été respecté : en effet, l'assuré a répondu de manière non manuscrite au questionnaire ; or les réponses non manuscrites sont acceptées, à condition que l'assuré ait signé la déclaration de risque et apposé de sa main la mention « Lu et approuvé », ce qui n'est pas le cas en l'espèce. Ensuite, l'assuré n'était pas capable au moment de la souscription du contrat : l'appréciation de l'intention de tromper relève du pouvoir souverain des juges du fond, lesquels prennent en considération plusieurs critères, dont les capacités de l'assuré ou encore la clarté du questionnaire. Enfin, il n'est pas démontré de changement de l'objet du risque ou de diminution de l'opinion du risque par l'assureur.

En réplique, l'intimée sollicite la confirmation du jugement faisant essentiellement valoir qu'au moment de la souscription de son contrat d'assurance, M. [B] a affirmé ne pas avoir été résilié par son précédent assureur. Il a bien, en toute connaissance de cause, souscrit la police d'assurance en fournissant l'ensemble des éléments nécessaires à l'évaluation du risque. Cette fausse déclaration intentionnelle a changé l'opinion du risque pour l'assureur qui n'a pu se rendre compte de la portée de l'engagement qu'il prenait en contractant avec un assuré qui n'avait pas payé ses précédentes primes. Ensuite, si l'assuré soulève un problème de capacité, à savoir l'insanité d'esprit dont il est victime, cette dernière ne peut être démontrée que par celui qui s'en prévaut. En tout état de cause, les pièces communiquées aux débats par les consorts [B] pour justifier de cette prétendue insanité d'esprit ne rapportent aucunement cette preuve.

Sur ce,

S'il appartient à l'assuré qui réclame l'exécution du contrat d'assurance d'établir l'existence du sinistre, objet du contrat, il incombe à l'assureur qui invoque une déchéance de garantie ou la nullité du contrat de démontrer la réunion des conditions de fait de cette déchéance.

Le 2° de l'article L. 113-2 du code des assurance prévoit que l'assuré doit « répondre exactement aux questions posées par l'assureur, notamment dans le formulaire de déclaration du risque par lequel l'assureur l'interroge lors de la conclusion du contrat, sur les circonstances qui sont de nature à faire apprécier par l'assureur les risques qu'il prend en charge ».

L'article L. 113-8 du code des assurances énonce que « le contrat d'assurance est nul en cas de réticence ou de fausse déclaration intentionnelle de la part de l'assuré, quand cette réticence ou cette fausse déclaration change l'objet du risque ou en diminue l'opinion pour l'assureur, alors même que le risque omis ou dénaturé par l'assuré a été sans influence sur le sinistre ».

Il résulte de ces deux derniers textes que l'assureur ne peut se prévaloir de la réticence ou de la fausse déclaration intentionnelle de l'assuré que si celles-ci procèdent des réponses qu'il a apportées aux questions qui lui ont été posées.

La preuve d'une déclaration mensongère faite à l'assureur par l'assuré peut, en tant que fait juridique, être rapportée par tout moyen.

En présence d'affirmation et en l'absence de question au sein de la déclaration de risque, l'assureur ne peut se prévaloir de déclarations par lui pré-imprimées qu'à la condition que celles-ci soient précises et individualisées, en sorte qu'elles correspondent nécessairement à des questions qu'il a posées au souscripteur.

Pour solliciter la nullité du contrat d'assurance pour réticence ou fausse déclaration intentionnelle de la part de l'assuré, l'assureur doit rapporter la preuve de ce qu'en réponse à une question précise qu'il a posée, l'assuré a omis de déclarer ou a fait une fausse déclaration dans le but de le tromper, dans l'intention de provoquer chez lui une appréciation erronée du risque.

En l'espèce, PACIFICA soutient que M. [B] a commis de fausses déclarations intentionnelles.

La déclaration pré-imprimée du 18 septembre 2018, est revêtue de la signature électronique de M [B], et est ainsi rédigée :

'Au cours des trente six derniers mois votre contrat Habitation a-t-il fait l'objet d'une résiliation par votre assureur ' Réponse : NON.

Il est ajouté ensuite que le déclarant certifie la sincérité et l'exactitude des réponses ci-dessus qui résulte bien du questionnement du représentant de l'assureur, préalablement à la souscription du contrat et que : « Je suis informé que toute réticence ou déclarations intentionnellement fausses entraine la nullité de mon contrat en application de l'article L113-8 du code des assurances »

La déclaration a bien été signée électroniquement et l'application de la sanction prévue à l'article L. 113-8 n'est pas subordonnée à l'apposition de la mention 'Lu et approuvé'.

Contrairement à ce que les époux [B] font valoir, cette déclaration est précise et individualisée, en ce qu'elle fait état d'une résiliation par l'assureur précédent et se limite aux trois dernières années précédant la souscription du contrat. Elle correspond nécessairement à une question préalablement posé par l'assureur à M. [B], de sorte qu'il peut s'en prévaloir pour arguer de la nullité du contrat d'assurance au titre de l'article L. 113-8 du code des assurances.

En l'espèce, l'assuré a déclaré dans sa demande d'adhésion à un contrat d'assurance Habitation souscrit auprès de PACIFICA ne pas avoir été résilié par son ancien assureur. Or le vendredi 24 mai 2019 PACIFICA a été informée par la compagnie GENERALI que le précédent contrat avait été résilié pour non-paiement de cotisation le 18 juillet 2018. Il s'agissait donc bien d'une fausse déclaration.

Concernant le caractère intentionnel de cette fausse déclaration, la nullité pour fausse déclaration intentionnelle du risque exige la preuve de la mauvaise foi du souscripteur et il appartient à l'assureur de rapporter la preuve de la mauvaise foi de l'assuré.

Par courriel du 24 mai 2019, l'ancien assureur de M. [B], GENERALI, a fait savoir à la compagnie PACIFICA que le contrat de M. [B] avait bien été résilié le 18 juillet 2018 pour non-paiement de primes. M. [B] ne conteste ni l'existence de cette résiliation, ni en avoir eu connaissance avant de remplir le questionnaire du 18 septembre 2018.

Il en résulte qu'en déclarant que son contrat habitation n'avait pas fait l'objet de résiliation par son assureur au cours des 36 derniers mois alors que cela avait été le cas seulement deux mois auparavant, M. [B] a intentionnellement effectué une fausse déclaration dans le but de tromper son assureur.

L'assuré se prévaut cependant sur le fondement de l'article 414-1 du code civil d'une insanité d'esprit pour écarter sa mauvaise foi. Il soutient que la fausse déclaration n'est pas intentionnelle dans la mesure où depuis le 13 mars 2017 il était dépendant aux opiacés et au tabac (trois paquets par jour) insomniaque chronique, et épuisé physiquement et moralement, et que cet état de dépendance exclut le caractère volontaire ou intentionnel de la fausse déclaration.

L'article 414-1 du code civil dispose que « pour faire un acte valable, il faut être sain d'esprit ».

Cependant, aucun des symptômes présentés par M. [B] aux termes des certificats médicaux produits aux débats ne caractérise, la charge de la preuve lui incombant, une quelconque insanité d'esprit constitutive d'une altération de son discernement au jour de la souscription du contrat.

L'assuré, en occultant un élément essentiel, a rompu l'équilibre général du contrat et changé l'opinion du risque pour l'assureur qui n'a pu se rendre compte de la portée exacte de l'engagement qu'il prenait en contractant avec un assuré qui n'avait pas payé ses précédentes primes ce qui pouvait être une source de difficultés multiples. La sanction de la fausse déclaration intentionnelle n'est pas subordonnée à la démonstration d'un lien avec le sinistre à l'occasion de laquelle elle est découverte.

Les époux [B] soutiennent ensuite que PACIFICA a renoncé à se prévaloir de cette nullité. Ils affirment à cet égard que PACIFICA a procédé au règlement de différentes provisions en toute connaissance de cause, si bien qu'elle ne pourrait plus se prévaloir de ce moyen.

Le jugement sera également confirmé, par des motifs pertinents que la cour adopte, en ce qu'il a considéré que PACIFICA n'a pas exécuté volontairement le contrat en connaissance de cause et n'a donc pas renoncé à se prévaloir de la nullité, le dernier paiement de PACIFICA étant intervenu au mois de mars 2019, alors que le courriel de la compagnie GENERALI l'informant de la résiliation antérieure est daté du 24 mai 2019.

Dès lors, la nullité pour fausse déclaration intentionnelle est encourue. Le jugement sera confirmé sur ce point.

Sur les effets de la nullité

À titre liminaire, la cour observe que, la nullité du contrat d'assurance étant prononcée, les moyens relatifs à cette même nullité fondée sur l'article L. 121-15 du code des assurances, relatifs à l'exécution du contrat d'assurance et relatifs à la déchéance de garantie ou au dol sont devenus sans objet. L'appelant sera débouté de toutes ses demandes de condamnation au titre de l'indemnité d'assurance. Le jugement sera, sur ces points, confirmé.

Il résulte ensuite des articles 1178 et suivants du code civil, dans leur rédaction postérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, que l'annulation d'un contrat entraîne celle des tous les actes subséquents en lien de dépendance directe avec le contrat rétroactivement anéanti.

La nullité provoque, en vertu de l'alinéa 3 de l'article 1178 du code civil, la restitution des prestations que les parties ont exécutées.

PACIFICA demande à la cour de condamner solidairement les époux [B], ou l'un à défaut de l'autre, à lui rembourser les sommes qu'ils ont perçues indûment à titre d'avance soit 60 000 euros avec intérêts de droit à compter de la signification des présentes écritures ce à quoi les époux [B] s'opposent.

Il s'agit bien de sommes engagés en vertu du contrat d'assurance dont la restitution peut être demandée au titre des restitutions consécutives à leur nullité.

Par ailleurs, conformément aux termes contractuels, les primes payées demeurent acquises à PACIFICA qui a droit au paiement de toutes les primes échues à titre de dommages et intérêts.

Le jugement sera confirmé sur ces points.

Il n'y a pas lieu de répondre aux autres demandes formées subsidiairement.

Sur la demande de dommages et intérêts

Le tribunal a jugé à bon droit que la demande d'indemnisation de l'assuré ayant été rejetée, les époux [B] échouent à démontrer l'existence d'une faute contractuelle de la part de l'assureur.

Le jugement sera confirmé.

Sur les autres demandes

Le jugement sera confirmé en ce qu'il a condamné les époux [B] aux dépens, qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

En cause d'appel, les époux [B] qui succombent seront condamnés aux dépens qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile et au paiement à PACIFICA d'une indemnité de 1 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile. Il seront déboutés de leur propre demande de ce chef.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Statuant en dernier ressort, contradictoirement et publiquement par mise à disposition de la décision au greffe,

CONFIRME le jugement en toutes ses dispositions soumises à la cour ;

Y ajoutant,

Condamne les époux [B] aux dépens qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile par la SARL MANDIN-ANGRAND avocats, et au paiement à la compagnie PACIFICA d'une indemnité de 1500 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

Déboute les époux [B] de leur propre demande de ce chef ;

Rejette toutes autres demandes.

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 4 - chambre 8
Numéro d'arrêt : 21/07014
Date de la décision : 24/04/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 30/04/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-04-24;21.07014 ?
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