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04/04/2024 | FRANCE | N°22/13906

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 4 - chambre 9 - a, 04 avril 2024, 22/13906


Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 9 - A



ARRÊT DU 04 AVRIL 2024



(n° , 9 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 22/13906 - N° Portalis 35L7-V-B7G-CGHFJ - Jonction avec le dossier RG N° 22/15719



Décision déférée à la Cour : Jugement du 20 juin 2022 - Tribunal de proximité de PANTIN - RG n° 11-21-000496





APPELANTS



Monsieur [N] [

U]

né le 13 février 1957 à [Localité 8] (68)

[Adresse 5]

[Localité 3]



représenté par Me Elie LELLOUCHE, avocat au barreau de PARIS, toque : C1021

ayant pour avocat plaidan...

Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 9 - A

ARRÊT DU 04 AVRIL 2024

(n° , 9 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 22/13906 - N° Portalis 35L7-V-B7G-CGHFJ - Jonction avec le dossier RG N° 22/15719

Décision déférée à la Cour : Jugement du 20 juin 2022 - Tribunal de proximité de PANTIN - RG n° 11-21-000496

APPELANTS

Monsieur [N] [U]

né le 13 février 1957 à [Localité 8] (68)

[Adresse 5]

[Localité 3]

représenté par Me Elie LELLOUCHE, avocat au barreau de PARIS, toque : C1021

ayant pour avocat plaidant Me Jérémie BOULAIRE de la SELARL BOULAIRE, avocat au barreau de DOUAI

Madame [H] [W] épouse [U]

née le 2 juillet 1959 à [Localité 7] (68)

[Adresse 5]

[Localité 3]

représentée par Me Elie LELLOUCHE, avocat au barreau de PARIS, toque : C1021

ayant pour avocat plaidant Me Jérémie BOULAIRE de la SELARL BOULAIRE, avocat au barreau de DOUAI

INTIMÉES

La société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE, société anonyme prise en la personne de son représentant légal, venant aux droits de BANQUE SOLFEA aux termes d'une cession de créance en date du 28 février 2017

N° SIRET : 542 097 902 04319

[Adresse 1]

[Localité 4]

représentée par Me Edgard VINCENSINI, avocat au barreau de PARIS, toque : B0496

substitué à l'audience par Me Laurent BONIN, avocat au barreau de PARIS, toque : B0496

La société ECO ENVIRONNEMENT, société par actions simplifiée unipersonnelle prise en la personne de son représentant légal domicilie en cette qualité audit siège

N° SIRET : 504 050 907 00022

[Adresse 2]

[Localité 6]

représentée par Me Delphine MENGEOT, avocat au barreau de PARIS, toque : D1878,

ayant pour avocat plaidant Me Paul ZEITOUN de la SELEURL PZA PAUL ZEITOUN, avocat au barreau de PARIS, toque : D1878

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 13 février 2024, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Mme Muriel DURAND, Présidente de chambre, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Mme Muriel DURAND, Présidente de chambre

Mme Laurence ARBELLOT, Conseillère

Mme Sophie COULIBEUF, Conseillère

Greffière, lors des débats : Mme Camille LEPAGE

ARRÊT :

- CONTRADICTOIRE

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Mme Muriel DURAND, Présidente et par Mme Camille LEPAGE, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Selon acte sous seing privé signé le 11 juin 2012, M. [N] [U] démarché à domicile, a conclu avec la société Eco environnement un contrat de vente portant sur une centrale photovoltaïque au prix TTC de 23 500 euros et il a financé cette acquisition par un crédit de même montant souscrit le même jour auprès de la société Banque Solfea aux droits de laquelle vient désormais la société BNP Paribas Personal Finance.

Le 6 juillet 2012, il a signé une attestation de fin de travaux et demandé le déblocage des fonds. L'attestation de conformité a été signée le 11 juillet 2012 et visée par le consuel. L'installation a été raccordée.

Par acte en date du 20 juillet 2021, M. [U] et Mme [H] [W] épouse [U] ont fait assigner la société Eco environnement et la société BNP Paribas Personal Finance devant le juge des contentieux de la protection de Pantin en annulation pour dol, remboursement des sommes versées et condamnation à des dommages et intérêts, lequel, par jugement contradictoire du 20 juin 2022, a déclaré M. et Mme [U] irrecevables en leurs demandes, les a condamnés sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile à payer à la société Eco et à la société BNP Paribas Personal Finance une somme de 1 000 euros chacun et aux dépens et a rejeté toute autre demande.

Il a rappelé les dispositions de l'ancien article 1304 du code civil dans sa version applicable au litige et de l'article 2224 du même code prévoyant une prescription de cinq ans et relevé que la demande intervenait neuf ans après la signature des contrats, que M. et Mme [U] ne produisaient pas la première facture d'électricité qui marquait le point de départ du délai de cinq ans pour agir en nullité pour dol pour absence de rentabilité et ne démontraient pas avoir agi dans ce délai. Il a ajouté que le vendeur ne s'était pas engagé sur une production d'électricité, que M. et Mme [U] ne rapportaient pas la preuve de ce que leur installation ne fonctionnait pas ni qu'elle n'atteignait pas le niveau de rentabilité attendu.

Il a considéré que la société Eco environnement ne démontrait pas que l'action de M. et Mme [U] avait été introduite avec une particulière mauvaise foi et a rejeté sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive.

Par déclaration en date du 20 juillet 2022, M. et Mme [U] ont interjeté appel de cette décision.

Aux termes de leurs dernières conclusions récapitulatives notifiées par voie électronique le 28 mars 2023, ils demandent à la cour :

- de déclarer leurs demandes recevables et bien fondées,

- de prononcer la nullité du contrat de vente et en conséquence la nullité du contrat de prêt affecté,

- de constater que la société BNP Paribas Personal Finance, venant aux droits de la société Banque Solfea a commis une faute dans le déblocage des fonds et doit être privée de sa créance de restitution du capital emprunté, et de la condamner à procéder au remboursement de l'ensemble des sommes versées par eux au titre de l'exécution normale du contrat de prêt litigieux,

- de condamner les sociétés Eco environnement et BNP Paribas Personal Finance solidairement à leur verser l'intégralité des sommes de :

- 23 500 euros correspondant à l'intégralité du prix de vente de l'installation,

- 11 060 euros correspondant aux intérêts conventionnels et frais payés par eux à la banque en exécution du prêt souscrit,

- 5 000 euros au titre de leur préjudice moral,

- 6 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- de débouter les sociétés Eco environnement et BNP Paribas Personal Finance de l'intégralité de leurs prétentions, fins et conclusions contraires,

- de condamner les sociétés Eco environnement et BNP Paribas Personal Finance solidairement à supporter les dépens de l'instance.

Ils font valoir que dès lors qu'ils sont mariés, Mme [U] a intérêt et qualité à agir même si elle n'a signé aucun des deux contrats.

Ils soulignent que leur action n'est pas guidée par une intention de nuire et ne peut donc pas être qualifiée d'abusive.

Ils soutiennent que leur action est recevable car son point de départ ne peut être fixé avant la date à laquelle ils ont eu connaissance effective du fait générateur soit qu'ils aient été en mesure de déceler eux même l'irrégularité sans l'intervention d'un tiers, soit que l'irrégularité ressorte "de la seule lecture" de l'acte, c'est-à-dire sans devoir procéder à des calculs ou des analyses. Ils soutiennent que faute d'avoir été alertés par la banque sur les irrégularités de l'acte, ils ne pouvaient les déceler et que dès lors que des mentions sont absentes du bon de commande, ils ne pouvaient à la seule lecture des contrats découvrir les causes de nullité. Ils ajoutent que le fait même que la banque ait l'obligation de vérifier la régularité du bon de commande et, le cas échéant, d'informer et d'alerter le consommateur avant le déblocage des fonds quant à la présence d'une irrégularité n'a de sens que dans un système où l'ignorance légitime du consommateur est présumée. Ils font encore valoir que le principe de l'égalité des armes, composante du droit à un procès équitable, implique pour le juge de s'assurer que chacune des parties soit en mesure d'agir et de se défendre dans les mêmes conditions, notamment au regard d'une éventuelle prescription et qu'il existe donc un risque que le consommateur perde ses droits sans jamais en avoir eu connaissance. Ils estiment que dès lors que le contrat est toujours en cours d'exécution, la prescription ne peut être acquise.

Ils font valoir que le contrat est nul dès lors qu'il contrevient aux dispositions des articles L. 121-1 du code de la consommation qui définissent un certain nombre de pratiques commerciales comme étant déloyales, trompeuses, ou encore agressives et soutiennent qu'un contrat conclu à la suite d'une pratique agressive est nul et de nul effet en application de l'article L. 132-10 du même code. Ils soutiennent que le contrat est nul en raison du dol commis par la société Eco environnement, la promesse de rentabilité résultant des documents contractuels auxquels sont assimilés les documents publicitaires dès lors que, suffisamment précis et détaillés, ils ont eu une influence sur le consentement du cocontractant et affirment que de tels documents leur ont été montrés mais ne leur ont pas été laissés à dessein. Ils soulignent que les parties ont aménagé un report total de la première échéance du prêt d'une durée de 11 mois et que cette clause n'a de sens que parce que l'opération a été présentée et vendue comme prétendument autofinancée dans la mesure où les clients devaient ainsi commencer à payer les premières échéances de leur crédit après avoir pu constater un premier retour sur investissement. Ils ajoutent que la promesse de rentabilité procède de la nature même de la chose vendue car il relève de l'évidence que personne n'a jamais acheté une installation de type photovoltaïque à des fins purement écologiques ou esthétiques. Ils font état de ce que la documentation commerciale qui leur a été remise fait état de la rentabilité et du rendement, que les gains réalisés sont plus de 5 fois moindres que les sommes qu'ils doivent effectivement rembourser auprès de l'établissement bancaire, que pour rembourser la totalité de leur crédit et commencer seulement à faire des économies, ils devront attendre plus de 62 ans de production, soit bien plus que la durée de fonctionnement de leur installation, que le vendeur ne pouvait ignorer que l'installation litigieuse ne produirait jamais les valeurs annoncées, notamment grâce à une étude officielle sur l'ensoleillement en France et la production photovoltaïque moyenne par région réalisée à l'initiative de l'Union Européenne et qu'il devait donc analyser et présenter la rentabilité de son produit et en informer exactement et sincèrement son client, ce qu'il n'a pas fait.

Ils soutiennent encore que le contrat est nul pour violation des dispositions impératives du code de la consommation prévues par ses articles L. 121-23 et suivants, le bon de commande ne comportant ni le nom, ni l'adresse du fournisseur, ni la désignation précise des caractéristiques des biens et services, ni le délai et les modalités de livraison des biens et des prestations de services non plus que les modalités de financement. Ils ajoutent que le bon de rétractation ne respecte pas le formalisme prévu à l'article R. 121-5 du code de la consommation. Ils contestent toute confirmation, arguant du caractère d'ordre public de la nullité insusceptible de confirmation et relèvent que même si une telle confirmation était juridiquement possible, il faudrait qu'ils en aient eu connaissance et la volonté de réparer et qu'aucune de ces conditions n'est remplie.

Ils rappellent que la nullité du contrat de vente entraîne celle du contrat de crédit par application de l'article L. 311-32 devenu L. 312-55 du code de la consommation.

Ils font état de la faute de la banque qui a participé au dol en mettant à la disposition des démarcheurs ses imprimés types et permettant ainsi d'inonder le marché de crédits particulièrement rémunérateurs, dont le coût est souvent supérieur d'ailleurs à celui des biens financés. Ils ajoutent que la banque a aussi commis une faute en débloquant les fonds sur la base d'un contrat nul et sans s'assurer de la bonne exécution des travaux conformément aux engagements contractuels et sur la base d'une attestation de fin de travaux insuffisante. Ils estiment que ces fautes doivent la priver de sa créance de restitution.

Ils rappellent que l'annulation des contrats entraîne la remise en l'état antérieur des parties entraînant l'obligation pour le vendeur de procéder à l'enlèvement de l'installation litigieuse et à la remise en état de l'immeuble à ses frais et la restitution des frais engagés et des intérêts payés. Ils ajoutent que du fait de la privation de sa créance de restitution, ils n'ont pas à rembourser le capital emprunté. Ils réclament également l'indemnisation de leurs préjudices.

Aux termes de ses conclusions notifiées par voie électronique le 17 janvier 2023, la société Eco environnement demande à la cour :

- de la déclarer recevable et bien fondée en toutes ses demandes,

- de rejeter les demandes, fins et conclusions de M. et Mme [U] à son encontre,

- à titre principal, de confirmer le jugement en ce qu'il a déclaré M. et Mme [U] irrecevables en leurs demandes sur le fondement de la prescription, de déclarer que l'action en nullité formelle exercée contre le contrat conclu le 11 juin 2012 est prescrite depuis le 11 juin 2017, que l'action en nullité pour vice de consentement formée à l'encontre du contrat conclu le 11 juin 2012 est prescrite, au plus tard, cinq ans après le raccordement,

- à titre subsidiaire, et si la cour venait à infirmer le jugement, de juger qu'elle a respecté les dispositions des articles L. 111-1 et L. 121-23 et suivants du code de la consommation, de juger qu'en signant le bon de commande aux termes duquel étaient indiquées les conditions de forme des contrats conclus à distance imposées par le code de la consommation, en ayant lu et approuvé le bon de commande (conditions générales de vente incluses), M. et Mme [U] ne pouvaient ignorer les prétendus vices de forme affectant le bon de commande souscrit, de juger qu'en laissant libre accès à leur domicile aux techniciens, qu'en acceptant sans réserve les travaux effectués, qu'en laissant le contrat se poursuivre et qu'en procédant au remboursement des échéances du prêt souscrit auprès de la banque, ces derniers ont manifesté leur volonté de confirmer l'acte prétendument nul, de juger que par tous les actes volontaires d'exécution du contrat accomplis postérieurement à leur signature, M. et Mme [U] ont manifesté leur volonté de confirmer le bon de commande prétendument nul, de juger que M. et Mme [U] succombent totalement dans l'administration de la preuve du dol qu'ils invoquent, de juger l'absence de dol affectant le consentement des demandeurs lors de la conclusion du contrat et en conséquence, de débouter M. et Mme [U] de leurs demandes tendant à faire prononcer l'annulation du contrat conclu auprès de la société Eco environnement,

- à titre subsidiaire, si la cour déclarait le contrat nul, de juger qu'elle a parfaitement accompli toutes ses obligations contractuelles, que M. et Mme [U] sont défaillants dans l'administration de la preuve d'une faute de sa part et d'un préjudice dont ils seraient victime et en conséquence de les débouter de l'intégralité de leurs demandes indemnitaires et notamment du versement de la somme de 5 000 euros au titre d'un prétendu préjudice moral,

- en tout état de cause, d'infirmer le jugement en ce qu'il a rejeté sa demande de condamnation de M. et Mme [U] au versement de dommages et intérêts pour procédure abusive et statuant à nouveau,

- de condamner solidairement M. et Mme [U] à lui payer la somme de 5 000 euros à titre de dommages et intérêts en raison du caractère parfaitement abusif de l'action initiée par ces derniers,

- de condamner solidairement M. et Mme [U] à lui payer la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- de condamner M. et Mme [U] in solidum aux entiers dépens de première instance et d'appel.

Elle fait valoir qu'en application de l'article 2224 du code civil, la prescription de l'action en nullité est de cinq ans et commence à courir du jour de l'acte prétendument irrégulier et que s'agissant du dol invoqué, elle commence à courir à compter de la première facture de revente et que tous ces évènements se sont produits plus de cinq ans avant la délivrance de l'assignation.

A titre subsidiaire, elle soutient que le bon de commande contient toutes les informations relatives aux caractéristiques essentielles des biens achetés, délais de livraison, prix unitaire et les modalités de financement, nom et l'adresse du fournisseur et que le bordereau de rétractation est conforme. Elle ajoute que le contrat mentionnant les articles relatifs aux irrégularités invoquées, M. et Mme [U] étaient en mesure de les connaître et ont clairement entendu les couvrir en ne se rétractant pas, en permettant la réalisation des travaux, en les recevant sans réserve, en faisant raccorder l'installation et en revendant l'électricité, en sollicitant le déblocage des fonds et en remboursant le crédit.

Toujours à titre subsidiaire, elle conteste tout dol et affirme ne jamais avoir promis un autofinancement ni ne s'être engagée sur la rentabilité financière. Elle conteste donc aussi que son comportement ait été la cause d'un quelconque préjudice moral pour M. et Mme [U].

Elle soutient que M. et Mme [U] ont intenté une action en justice dans le but d'échapper à leurs engagements et sont donc animés d'une volonté malhonnête et opportuniste, ce qui caractérise leur mauvaise foi et ont détourné une procédure judiciaire pour se libérer d'un investissement qu'ils regrettent ce qui caractérise une procédure dilatoire et abusive et qu'elle subit un préjudice, cette action ayant désorganisé son entreprise et altéré ses relations avec la société BNP Paribas Personal Finance.

Aux termes de ses conclusions notifiées par voie électronique le 23 décembre 2022, la société BNP Paribas Personal Finance demande à la cour :

- de confirmer le jugement, en conséquence de déclarer irrecevables les demandes de M. et Mme [U] en annulation du contrat principal pour violation des dispositions impératives du code de la consommation et pour dol, en annulation du contrat de crédit sur le fondement de l'article L. 311-32 du code de la consommation, en responsabilité contre la banque et de déclarer irrecevables les demandes de Mme [U],

- subsidiairement, de débouter M. et Mme [U] de l'intégralité de leurs demandes et de leur demande d'annulation du contrat de vente, ses causes éventuelles ayant été couvertes par M. et Mme [U] et d'annulation du contrat de crédit affecté et en conséquence, de condamner M. [U] à poursuivre auprès d'elle l'exécution du contrat de crédit souscrit avec la société banque Solfea, et subsidiairement, en cas d'annulation du contrat de crédit affecté, de condamner M. [U] à lui restituer l'intégralité du capital restant dû à la date du jugement, soit la somme de 23 500 euros, sous déduction des échéances déjà payées, avec intérêts au taux légal à compter de la remise des fonds et de débouter M. et Mme [U] de l'ensemble de leurs demandes indemnitaires et de leur demande tendant à priver la banque de son droit à restitution du capital prêté ; de débouter M. et Mme [U] de leur demande tendant à la condamnation de la banque à titre de dommages et intérêts au paiement de la somme de 11 060 euros correspondant aux intérêts du prêt et aux frais bancaires et de leur demande de condamnation de la banque au paiement de la somme de 5 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation d'un prétendu préjudice moral non caractérisé et non imputable à la banque,

- à titre très subsidiaire, si une faute de la société Banque Solfea était retenue, de débouter M. et Mme [U] de toutes leurs demandes de dommages et intérêts faute de caractérisation d'un préjudice en lien avec les fautes de la banque alléguées,

- en tout état de cause de débouter M. et Mme [U] de leur demande au titre des frais irrépétibles et des dépens, et de les condamner in solidum au paiement de la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens et d'admettre Me Edgard Vincensini, avocat, au bénéfice des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Elle fait valoir que l'action en nullité des contrats intentée par M. et Mme [U] est prescrite, que M. [U] était en mesure de vérifier la régularité du bon de commande à partir du jour où il lui a été remis et ce d'autant que les articles L. 121-23 et suivants du code de la consommation y étaient reproduits et que s'agissant du dol, le point de départ est la date de réception de la première facture de revente. Elle ajoute que Mme [U] n'est signataire ni du bon de commande, ni du contrat de crédit, qu'elle n'a donc ni qualité ni intérêt à agir en nullité du contrat de vente et du contrat de crédit affecté, ni en responsabilité envers la banque.

A titre subsidiaire, elle fait valoir que le dol invoqué n'est pas établi, qu'aucun des documents produit ne démontre une promesse de rentabilité financière et qu'il n'est pas davantage prouvé que la rentabilité financière ait été la cause déterminante de l'engagement pris. Elle ajoute s'agissant des causes de nullité formelle qu'elle s'en rapporte sur ce point mais qu'en tout état de cause, la lecture du bon de commande permettait de les déceler et que le comportement du co-contractant démontre une volonté de les couvrir. Elle rappelle que si le contrat de vente n'est pas nul le contrat de crédit ne l'est pas non plus.

Très subsidiairement en cas de nullité des contrats, elle conteste toute faute commise par la société Banque Solfea, tout préjudice en lien avec les fautes invoquées et relève que si le contrat de crédit est annulé les intérêts ne sont plus dus.

Pour un plus ample exposé des faits, moyens et prétentions des parties, il est renvoyé aux écritures de celles-ci conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 12 décembre 2023 et l'affaire a été appelée à l'audience du 13 février 2024.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la recevabilité de la demande de Mme [U]

Mme [U] n'a signé ni le contrat de vente ni le contrat de crédit. Le seul fait d'être mariée avec M. [U] seul signataire ne rend pas ses demandes recevables dès lors que les époux [U] ne donnent aucun élément sur leur régime matrimonial ni ne démontrent qu'ils sont tous deux propriétaires de la maison sur laquelle l'installation photovoltaïque a été posée.

Elle doit donc être déclarée irrecevable en toutes ses demandes faute de qualité et d'intérêt pour agir en application de l'article 122 du code de procédure civile, le jugement étant confirmé en ce qu'il a déclaré sa demande irrecevable.

Sur la recevabilité de la demande de M. [U]

En application de l'article 1304 du code civil dans sa rédaction ancienne applicable au litige, dans tous les cas où l'action en nullité ou en rescision d'une convention n'est pas limitée à un moindre temps par une loi particulière, cette action dure cinq ans.

Selon l'article 2224 du même code, les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer.

En application de l'article L. 110-4 du code de commerce, les obligations nées à l'occasion de leur commerce entre commerçants ou entre commerçants et non-commerçants se prescrivent par cinq ans si elles ne sont pas soumises à des prescriptions spéciales plus courtes.

En l'espèce, le contrat dont l'annulation est demandée a été conclu le 11 juin 2012 et M. [U] a engagé l'instance par une assignation délivrée le 20 juillet 2021.

Toute l'argumentation de M. [U] qui se garde d'ailleurs de donner une date concrète de point de départ de la prescription qui pourrait lui être opposée, vise en fait à voir repousser le point de départ du délai de prescription de son action en nullité formelle du contrat à la date à laquelle il a pu avoir connaissance effective des conséquences juridiques des irrégularités de pure forme. Le suivre dans cette voie reviendrait à rendre imprescriptible une action en nullité purement formelle puisque seule la date à laquelle il les invoque pourrait alors être retenue comme point de départ de la prescription.

En l'espèce le fait permettant d'agir en nullité est l'absence des mentions obligatoires sur le bon de commande et c'est donc la date de signature de ce bon de commande qui doit être retenue comme point de départ de prescription puisque cette absence y était parfaitement visible, et non la connaissance juridique des conséquences de cette absence. Plus de cinq années s'étant écoulées entre la date de signature du contrat et celle de l'action en nullité formelle, cette action est prescrite et M. [U] est irrecevable à solliciter l'annulation du contrat sur le fondement des articles L. 121-23 et suivants du code de la consommation alors applicables.

S'agissant de la demande en nullité pour dol, commis par le vendeur ou la banque c'est à la date à laquelle le dol a été découvert et non là encore la connaissance de ses conséquences juridiques à savoir le fait que le dol est en droit une cause de nullité du contrat, que doit être fixé le point du délai du délai de prescription. Dès lors que M. [U] invoque des man'uvres et tromperies destinées à lui faire croire que l'installation serait autofinancée et rentable financièrement, le point de départ de la prescription doit être fixée à la date de la première facture de revente et en aucun cas à la date de l'expertise amiable sur investissement qu'ils ont fait réaliser en 2019. Il résulte des pièces qui sont produites devant la cour qu'il a établi sa première facture le 15 juin 2015 qui portait sur une production sur une année du 2 mai 2013 au 3 mai 2014 sur 1 749 kwh soit une somme de 597,28 euros. Il s'est écoulé plus de cinq ans entre cette facture et son action en nullité pour dol et dès lors cette action est également prescrite et il est donc également irrecevable.

S'agissant des pratiques commerciales déloyales dénoncées, à les supposer établies, elles seraient antérieures à la signature du contrat voire auraient participé du dol invoqué et cette action est donc également prescrite.

Sur les demandes relatives à la faute de la banque dans le déblocage des fonds, le fait générateur est celle du déblocage des fonds réalisé à la demande de M. [U] en 2012 et le tableau d'amortissement démontre un premier remboursement le 11 juillet 2013. Il s'est écoulé plus de cinq ans avant la demande en justice et l'action pour faute dans le déblocage des fonds est aussi prescrite et en conséquence irrecevable.

Le jugement doit donc être confirmé en ce qu'il a déclaré les demandes de M. [U] irrecevables.

Sur la demande de dommages et intérêts pour procédure abusive

Il n'est pas établi que la présente procédure ait causé à la société Eco environnement et à la société BNP Paribas Personal Finance un préjudice distinct des frais irrépétibles engagés pour défendre à cette action. Cette demande doit donc être rejetée et le jugement confirmé sur ce point.

Sur les frais irrépétibles et les dépens

Le jugement doit être confirmé en ses dispositions relatives aux dépens et frais irrépétibles de première instance.

M. et Mme [U] qui succombent doivent être condamnés in solidum aux dépens et solidairement à payer les frais irrépétibles engagés par les intimés et il convient de les condamner in solidum à payer sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile à la société Eco environnement la somme de 3 000 euros et à la société BNP Paribas Personal Finance la somme de 3 000 euros , étant observé qu'ils évaluent eux même le coût des frais irrépétibles d'une telle procédure d'appel à la somme de 6 000 euros qu'ils réclamaient sur ce même fondement.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Statuant publiquement en dernier ressort par arrêt contradictoire,

Confirme le jugement en toutes ses dispositions ;

Condamne M. [N] [U] et Mme [H] [W] épouse [U] in solidum à payer à la société Eco environnement la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne M. [N] [U] et Mme [H] [W] épouse [U] in solidum à payer à la société BNP Paribas Personal Finance la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne M. [N] [U] et Mme [H] [W] épouse [U] in solidum aux dépens d'appel avec distraction au profit de Me Edgard Vincensini, avocat, en application de l'article 699 du code de procédure civile ;

Rejette toute demande plus ample ou contraire.

La greffière La présidente


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 4 - chambre 9 - a
Numéro d'arrêt : 22/13906
Date de la décision : 04/04/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 10/04/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-04-04;22.13906 ?
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