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02/04/2024 | FRANCE | N°22/14373

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 3 - chambre 5, 02 avril 2024, 22/14373


Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS







COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 3 - Chambre 5



ARRET DU 02 AVRIL 2024



(n° , 5 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 22/14373 - N° Portalis 35L7-V-B7G-CGIIU



Décision déférée à la Cour : Jugement du 10 février 2022 rendu par le tribunal judiciaire de PARIS - RG n° 19/10132





APPELANTE



Madame [I] [S] [L]



[Adresse 2]


[Localité 5] -ALGERIE



représentée par Me Djaafar BENSAOULA, avocat au barreau de PARIS, toque : D1797 substitué par ME BENZERROUKI, avocat au barreau de PARIS





INTIME



PROCUREUR GENE...

Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 3 - Chambre 5

ARRET DU 02 AVRIL 2024

(n° , 5 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 22/14373 - N° Portalis 35L7-V-B7G-CGIIU

Décision déférée à la Cour : Jugement du 10 février 2022 rendu par le tribunal judiciaire de PARIS - RG n° 19/10132

APPELANTE

Madame [I] [S] [L]

[Adresse 2]

[Localité 5] -ALGERIE

représentée par Me Djaafar BENSAOULA, avocat au barreau de PARIS, toque : D1797 substitué par ME BENZERROUKI, avocat au barreau de PARIS

INTIME

PROCUREUR GENERAL - SERVICE NATIONALITE

[Adresse 3]

[Localité 4]

représenté par Mme M.-D. PERRIN, substitut général

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 14 septembre 2023, en audience publique, l'avocat et le ministère public ne s'y étant pas opposés, devant Mme Marie-Catherine GAFFINEL, conseillère, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Hélène FILLIOL, présidente de chambre

Madame Marie-Catherine GAFFINEL, conseillère

Madame Marie LAMBLING, conseillère

Greffier, lors des débats : Mme Mélanie PATE

ARRET :

- Contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Hélène FILLIOL, présidente de chambre et par Madame Mélanie PATE, greffière présente lors de la mise à disposition.

Vu le jugement rendu le 10 février 2022 par le tribunal judiciaire de Paris qui a dit la procédure régulière au regard des dispositions de l'article 1043 du code de procédure civile, jugé que Mme [I] [S] [L] n'est pas admise à faire la preuve qu'elle a, par filiation, la nationalité française, jugé que Mme [I] [S] [L], se disant née le 7 avril 1987 à [Localité 5] (Algérie), est réputée avoir perdu la nationalité française le 4 juillet 2012, ordonné la mention prévue par l'article 28 du code civil et l'a condamnée aux dépens ;

Vu la déclaration d'appel du 30 juillet 2022 de Mme [I] [S] [L] ;

Vu les dernières conclusions notifiées le 6 juin 2023 par Mme [I] [S] [L] qui demande à la cour d'infirmer le jugement, et statuant à nouveau, de dire qu'elle est française ;

Vu les dernières conclusions notifiées le 27 juin 2023 par le ministère public qui demande à la cour, à titre principal, de dire que les formalités de l'article 1040 ont été respectées et que l'appel est recevable, de juger que Mme [I] [S] [L], se disant née le 7 avril 1987 à [Localité 5] (Algérie), n'est pas française, et à titre subsidiaire, de confirmer le jugement de première instance en ce que Mme [I] [L] n'est pas admise à faire la preuve qu'elle a, par filiation, la nationalité française et qu'elle est réputée avoir perdu la nationalité française le 4 juillet 2012, ordonner la mention prévue par l'article 28 du code civil et la condamner aux entiers dépens ;

Vu l'ordonnance de clôture rendue le 29 juin 2023 ;

Vu l'audience du 14 septembre 2023 ;

Vu la demande d'avis à la Cour de cassation le 24 octobre 2023, après avoir sollicité les observations des parties, ainsi libellée :

La section II « de la preuve de la nationalité devant les tribunaux judiciaires » figurant au chapitre VI « du contentieux de la nationalité » du titre I bis « de la nationalité française » prévoit plusieurs articles relatifs à la preuve de la nationalité française.

L'article 30 dispose que « la charge de la preuve, en matière de nationalité, incombe à celui dont la nationalité est en cause mais que toutefois cette charge incombe à celui qui conteste la qualité de Français à un individu titulaire d'un certificat de nationalité française délivré conformément aux articles 31 et suivants du code civil. »

L'article 30-3 prévoit pour sa part que « Lorsqu'un individu réside ou a résidé habituellement à l'étranger, où les ascendants dont il tient par filiation la nationalité sont demeurés fixés pendant plus d'un demi-siècle, cet individu ne sera plus admis à faire la preuve qu'il a, par filiation, la nationalité française si lui-même et celui de ses père et mère qui a été susceptible de la lui transmettre n'ont pas eu la possession d'état de Français et que le tribunal doit dans ce cas constater la perte de la nationalité française dans les termes de l'article 23-6 du code civil en déterminant la date à laquelle la nationalité française a été perdue. » 

La cour de cassation a dit que l'article 30-3 édictait une règle de preuve.

Mme [I] [S] [L] n'étant pas titulaire d'un certificat de nationalité française, il lui appartient de rapporter la preuve de sa nationalité française.

Le ministère public demande à la cour, à titre principal, de dire que Mme [I] [L] n'est pas de nationalité française et à titre subsidiaire qu'elle n'est pas admise à rapporter la preuve de sa nationalité sur le fondement de l'article 30-3 du code civil.

Par application de l'article 4 du code de procédure civile selon lequel l'objet du litige est déterminé par les prétentions respectives des parties, le juge doit examiner les demandes dans l'ordre fixé par les parties.

Toutefois, ce principe revient en l'espèce à admettre que Mme [I] [L] doit dans un premier temps rapporter la preuve de sa nationalité puis justifier qu'elle est admise à rapporter la preuve de sa nationalité.

Dans ses conditions, et dès lors que l'objet de litige est la nationalité de Mme [I] [L], le juge peut-il, en considérant que l'article 30-3 du code civil édicte une règle de preuve, décider d'examiner en premier lieu si les conditions posées par l'article 30-3 du code civil sont réunies avant de statuer sur la nationalité de l'intéressé '

Vu l'avis de la Cour cassation rendu le 14 février 2024 ;

Vu le bulletin adressé le 12 mars 2024 aux parties les invitant à formuler leurs observations à la suite de l'avis rendu par la Cour de cassation avant le 21 mars 2024 et prorogeant le délibéré au 2 avril 2024 ;

Vu l'absence d'observation de l'appelante :

Vu la note transmise le 19 mars 2024 par le ministère public demandant un délai supplémentaire jusqu'au 26 mars et l'absence d'observation transmise ultérieurement ;

MOTIFS 

Il est justifié de l'accomplissement de la formalité prévue par l'article 1043 du code de procédure civile dans sa version applicable à la présente procédure, par la production du récépissé délivré le 30 septembre 2022 par le ministère de la Justice.

Invoquant les articles 17, 18, 30-3 et 32-1 du code civil, Mme [I] [L] soutient qu'elle est française par filiation pour être née le 7 avril 1987 à [Localité 5] (Algérie), de Mme [N] [H], elle-même française pour être la fille d'[T] [H], français d'une part, pour être né dans un département français d'Algérie d'un père, [W] [H], qui y est lui-même né et d'autre part, pour avoir conservé la nationalité française à l'indépendance de l'Algérie pour être né de [M] [Z], qui relèverait du statut de droit commun en raison de son origine métropolitaine.

Aux termes de l'avis de la Cour de cassation, c'est sans méconnaître l'objet du litige que le juge saisi de l'action déclaratoire, retenant que la présomption irréfragable de perte de la nationalité française, prévue à l'article 30-3 du code civil, interdit au demandeur de rapporter la preuve contraire qui lui incombe conformément à l'article 30, alinéa 1, du même code, décide d'examiner, à titre liminaire, si les conditions d'application du premier texte sont satisfaites.

L'article 30-3 du code civil dispose que : « Lorsqu'un individu réside ou a résidé habituellement à l'étranger, où les ascendants dont il tient par filiation la nationalité sont demeurés fixés pendant plus d'un demi-siècle, cet individu ne sera plus admis à faire la preuve qu'il a, par filiation, la nationalité française si lui-même et celui de ses père et mère qui a été susceptible de la lui transmettre n'ont pas eu la possession d'état de Français ».

Le tribunal doit dans ce cas constater la perte de la nationalité française dans les termes de l'article 23-6 du code civil en déterminant la date à laquelle la nationalité française a été perdue.

L'article 30-3 du code civil interdit, dès lors que les conditions qu'il pose sont réunies, de rapporter la preuve de la transmission de la nationalité française par filiation, en rendant irréfragable la présomption de perte de celle-ci par désuétude. Édictant une règle de preuve, l'obstacle qu'il met à l'administration de celle-ci ne constitue pas une fin de non-recevoir au sens de l'article 122 du code de procédure civile, de sorte qu'aucune régularisation sur le fondement de l'article 126 du même code ne peut intervenir.

Il n'est pas établi ni même allégué que Mme [I] [S] [L] réside en France ou a résidé en France.

Pour justifier de la résidence de Mme [N] [H] dont elle dit tenir la nationalité française, elle produit, en original, une carte SNCF couple/famille au nom de [L] comportant une adresse manuscrite -[Adresse 1] - portant un tampon du 24 juillet 1986 ainsi que la copie d'un extrait de compte Crédit Lyonnais au 1er février 1990. Mais, comme le souligne justement le ministère public, d'une part, la carte SNCF a été enregistrée au nom de [X] [L], Mme [N] [L], née le 12 octobre 1963 étant mentionnée comme enfant. D'autre part, le relevé de comptes bancaires de 1990 est adressé à M. [T] [L] et non à Mme [N] [H]. Non seulement il ne ressort pas de ces pièces que Mme [N] [H] a vécu en France. Mais en tout état cause, l'existence d'une adresse en France, à une date ponctuelle, ne suffit pas établir la résidence en France. L'appelante échoue en conséquence à établir que sa mère a résidé en France.

En outre, l'appelante ne justifie, ni pour elle-même, ni pour sa mère, d'aucun élément de possession d'état de française durant la période du 12 octobre 1963 au 13 octobre 2013.

Mme [I] [S] [L] est donc réputée avoir perdu, le 13 octobre 2013, sa nationalité française. Le jugement est donc confirmé.

Mme [I] [S] [L], succombant à l'instance, est condamnée aux dépens.

PAR CES MOTIFS

Dit que la formalité prévue à l'article 1040 du code de procédure civile a été accomplie et que la procédure est régulière,

Confirme le jugement,

Ordonne l'inscription de la mention prévue à l'article 18 du code civil,

Condamne Mme [I] [S] [L] aux dépens.

LA GREFFIERE LA PRESIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 3 - chambre 5
Numéro d'arrêt : 22/14373
Date de la décision : 02/04/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 08/04/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-04-02;22.14373 ?
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