La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

14/03/2024 | FRANCE | N°22/12035

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 4 - chambre 9 - a, 14 mars 2024, 22/12035


Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 9 - A



ARRÊT DU 14 MARS 2024



(n° , 8 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 22/12035 - N° Portalis 35L7-V-B7G-CGBKS



Décision déférée à la Cour : Jugement du 25 mars 2022 - Juge des contentieux de la protection de NOGENT SUR MARNE - RG n° 11-21-000881





APPELANTE



LA BANQUE POSTALE CONSUMER FINANC

E, anciennement dénommée BANQUE POSTALE FINANCEMENT, société anonyme à directoire et conseil de surveillance agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domic...

Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 9 - A

ARRÊT DU 14 MARS 2024

(n° , 8 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 22/12035 - N° Portalis 35L7-V-B7G-CGBKS

Décision déférée à la Cour : Jugement du 25 mars 2022 - Juge des contentieux de la protection de NOGENT SUR MARNE - RG n° 11-21-000881

APPELANTE

LA BANQUE POSTALE CONSUMER FINANCE, anciennement dénommée BANQUE POSTALE FINANCEMENT, société anonyme à directoire et conseil de surveillance agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés audit siège

N° SIRET : 487 779 035 00046

[Adresse 1]

[Localité 5]

représentée et assistée de Me Sophie MÜH, avocat au barreau de PARIS, toque : D1256

INTIMÉ

Monsieur [V] [R]

né le [Date naissance 3] 1971 à [Localité 7] (MALI)

[Adresse 2]

[Adresse 2]

[Localité 6]

représenté et assisté de Me Marie-Pierre MATHIEU, avocat au barreau de PARIS, toque : B0295

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Partielle numéro 2022/027562 du 20/09/2022 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de PARIS)

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 17 janvier 2024, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Mme Laurence ARBELLOT, Conseillère, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Mme Muriel DURAND, Présidente de chambre

Mme Laurence ARBELLOT, Conseillère

Mme Sophie COULIBEUF, Conseillère

Greffière, lors des débats : Mme Camille LEPAGE

ARRÊT :

- CONTRADICTOIRE

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Mme Muriel DURAND, Présidente et par Mme Camille LEPAGE, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Suivant offre préalable émise et acceptée le 8 juillet 2015, la société Banque Postale Financement a consenti à M. [V] [R] un prêt personnel d'un montant de 15 000 euros, remboursable en 60 mensualités de 272,47 euros chacune hors assurance, au taux d'intérêts annuel de 3,44 % et au TAEG de 3,49 %.

Le 30 septembre 2016, un avenant de réaménagement a été signé entre les parties prévoyant le remboursement de la somme de 12 931,51 euros due à cette date, selon 99 mensualités de 158,30 euros chacune assurance comprise du 20 novembre 2016 au 20 janvier 2025.

Par acte d'huissier délivré le 9 novembre 2021, la société Banque Postale Consumer Finance a fait assigner M. [R] devant le juge des contentieux de la protection du tribunal de proximité de Nogent-sur-Marne aux fins de le voir condamner à lui payer la somme de 7 691 euros avec intérêts au taux contractuel du jour de la mise en demeure du 6 mai 2021, jusqu'au jour du parfait paiement, y compris l'indemnité légale de 589,16 euros au titre du contrat de crédit.

Par jugement réputé contradictoire rendu le 25 mars 2022, auquel il convient de se reporter, le juge a constaté que l'action en paiement était forclose, déclaré irrecevables les demandes, a rejeté les demandes plus amples ou contraires et condamné la société Banque Postale Consumer Finance aux dépens.

Pour statuer ainsi, le juge a retenu que l'avenant de réaménagement avait bouleversé l'économie générale du contrat le rendant plus coûteux, qu'il était ainsi sans effet sur le délai de forclusion et que la détermination du premier impayé non régularisé devait être établie en tenant compte uniquement des mensualités impayées initialement convenues. Il a fixé le premier incident de paiement non régularisé au 30 novembre 2018, de sorte que l'action était irrecevable pour avoir été introduite plus de deux ans après.

Par déclaration enregistrée électroniquement le 27 juin 2022, la société Banque Postale Consumer Finance a formé appel de ce jugement.

Aux termes de ses dernières conclusions enregistrées le 11 janvier 2023, elle demande à la cour :

- de la dire recevable et bien fondée en son appel,

- d'infirmer le jugement du 25 mars 2022 en ce qu'il l'a déclarée irrecevable en ses demandes comme étant forclose à agir et statuant à nouveau,

- de condamner M. [R] à lui payer la somme de 7 691,66 euros avec intérêts au taux contractuel, du jour de la mise en demeure du 6 mai 2021, jusqu'au jour du parfait paiement, y compris l'indemnité légale d'un montant de 589,16 euros,

- de débouter M. [R] de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions,

- de condamner M. [R] à lui verser la somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens dont distraction au profit de son avocat, et ce suivant les dispositions de l'article 699 du code de procédurecivile.

L'appelante soutient que son action en paiement n'est pas forclose étant donné que les parties se sont rapprochées pour convenir de nouvelles mensualités de remboursement sans que le capital prêté n'en soit modifié et en l'absence de toute déchéance du terme, que l'avenant du 30 septembre 2016 a eu pour conséquence d'interrompre le délai de forclusion, que M. [R] devait alors régler des mensualités de 158,30 euros chacune à compter du 20 octobre 2016 et qu'il a payé la somme de 7 534,84 euros, correspondant à 47 mensualités, de sorte que la première mensualité impayée est celle du 20 octobre 2020.

Elle fait valoir que la déchéance du droit aux intérêts contractuels n'est pas encourue puisque la contestation de la régularité de l'offre est prescrite au regard du délai de prescription quinquennale ayant commencé à courir à la date de validation de l'offre pour s'achever le 8 juillet 2020 de sorte que M. [R] ne pouvait contester pour la première fois cette régularité par conclusions déposées le 21 décembre 2022.

Elle estime avoir respecté ses obligations en indiquant que le bordereau de rétractation ne se trouve que sur l'exemplaire de l'emprunteur et qu'elle ne peut donc pas le produire, en consultant régulièrement le fichier des incidents de remboursements des crédits aux particuliers et en réaménageant régulièrement le prêt.

Elle indique disposer d'une créance déterminée et justifiée qui est corroborée par l'historique de compte et que l'indemnité contractuelle n'est pas excessive, a été acceptée librement par les parties et est plafonnée légalement à 8 % du capital restant dû à la déchéance du terme.

Elle souligne enfin que la demande de délais de paiement formulée par M. [R] doit être rejetée car il ne soumet aucune proposition précise en n'indiquant pas quelle mensualité il serait en mesure de régler, qu'il ne justifie pas de sa situation et a déjà bénéficié des plus larges délais de paiement.

Aux termes de ses dernières conclusions enregistrées le 21 décembre 2022, M. [R] demande à la cour :

- de confirmer le jugement,

- à titre subsidiaire, de débouter la société Banque Postale Consumer Finance de ses demandes, fins et conclusions, son décompte étant imprécis, contradictoire et invérifiable,

- à titre infiniment subsidiaire, de prononcer la déchéance des intérêts contractuels en absence de bordereau de rétractation, d'irrégularité de la consultation du fichier FICP et d'avenant non conforme,

- de déclarer qu'il n'est tenu qu'au seul remboursement du capital suivant l'échéancier prévu et que les sommes perçues au titre des intérêts, qui sont productives d'intérêts au taux de l'intérêt légal à compter du jour de leur versement, sont restituées par le prêteur ou imputées sur le capital restant dû,

- d'enjoindre à la société Banque Postale Consumer Finance de produire un décompte conforme aux dispositions de l'article L. 311-48 du code de la consommation applicable au contrat,

- de lui accorder 24 mois de délais pour toute somme qu'il pourrait rester devoir à la société Banque Postale Consumer Finance,

- en tout état de cause, de condamner la société Banque Postale Consumer Finance au paiement de la somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article 700-2 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.

Il soutient que l'action de la banque est forclose car le réaménagement du prêt est sans effet sur le délai de forclusion puisqu'il portait sur la totalité du prêt, sans déchéance du terme préalable et sur les échéances échues et à échoir et qu'il modifiait l'économie du contrat en le rendant plus coûteux, sans qu'il ait fait l'objet d'une offre régulière et d'une information précise.

Il fait valoir que la banque ne justifie pas de sa créance dans la mesure où les montants indiqués comme payés ou restant dus diffèrent d'un document à l'autre, ce qui rend incompréhensibles et invérifiables les montants réclamés.

Il demande que le prêteur soit déchu de son droit à intérêts car il n'est pas justifié de la remise d'un bordereau de rétractation conforme aux dispositions du code de la consommation, d'une consultation du FICP régulière et antérieure à l'octroi du crédit et de vérifications de ses capacités de remboursement au moment de la signature de l'avenant ce qui a eu pour conséquence d'augmenter le coût du contrat.

Il indique qu'il n'y a pas lieu à indemnité contractuelle de résiliation car le montant n'est pas justifié, d'autant plus que la banque a perçu des intérêts contractuels conséquents et des cotisations d'assurance également conséquentes.

Il se prévaut de l'article 1343-5 du code civil pour obtenir des délais pour s'acquitter de sa dette en faisant valoir qu'il est de bonne foi et qu'il n'avait jusqu'alors jamais eu recours à des prêts à la consommation.

Pour un plus ample exposé des faits, moyens et prétentions des parties, il est renvoyé aux écritures de celles-ci conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 14 novembre 2023 et l'affaire a été appelée à l'audience le 17 janvier 2024.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Au vu de la date du contrat, c'est à juste titre que le premier juge a fait application des dispositions du code de la consommation dans leur rédaction postérieure à l'entrée en vigueur au 1er mai 2011 de la loi n° 2010-737 du 1er juillet 2010 mais antérieure à l'entrée en vigueur de l'ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016 fixée au 1er juillet 2016.

Sur la recevabilité de l'action au regard du délai de forclusion

Aux termes de l'article L. 311-52 du code de la consommation en sa version applicable au litige, les actions en paiement engagées à l'occasion de la défaillance de l'emprunteur doivent être formées dans les deux ans de l'événement qui leur a donné naissance à peine de forclusion.

Lorsque les modalités de règlement des échéances impayées ont fait l'objet d'un réaménagement ou d'un rééchelonnement, le point de départ du délai de forclusion est le premier incident non régularisé intervenu après le premier aménagement ou rééchelonnement conclu entre les intéressés.

Constitue un réaménagement au sens de ce texte, le contrat qui a pour seul objet de réaménager les modalités de remboursement d'une somme antérieurement prêtée, pour permettre, par l'allongement de la période de remboursement et l'abaissement du montant de l'échéance mensuelle, d'apurer le passif échu, pour autant qu'il ne se substitue pas au contrat de crédit initial dont la déchéance du terme n'a pas été prononcée, qu'il n'en modifie pas les caractéristiques principales telles le montant initial du prêt et le taux d'intérêt et qu'il porte sur l'intégralité des sommes restant dues à la date de sa conclusion.

En l'espèce, l'historique de compte communiqué atteste que l'emprunteur a rencontré des difficultés dans le paiement des échéances du crédit dès le mois de mars 2016.

L'avenant de réaménagement du 30 septembre 2016 a été signé en l'absence de toute déchéance du terme et de toute forclusion. Le montant de 12 038,13 euros mentionné à l'avenant de réaménagement a repris le capital restant dû à la date dudit réaménagement, outre les impayés, les intérêts de retard et indemnités et a prévu un remboursement en 99 mensualités de 158,30 euros chacune avec assurance sans aucune modification du taux d'intérêts pratiqué ni du TAEG.

Contrairement à ce qu'a considéré le premier juge, cet avenant n'a pas opéré de modification des caractéristiques essentielles du contrat principal et s'est contenté d'abaisser le montant des mensualités et d'allonger la période de remboursement du crédit. C'est la mise en 'uvre même du réaménagement qui conduit à une capitalisation des intérêts et frais, sans renchérissement du coût du crédit ni modification des conditions initiales d'octroi de ce crédit ou de l'équilibre du contrat initial.

Cet avenant entre ainsi dans les prévisions de l'article susvisé de sorte qu'il a eu pour effet de reporter le point de départ du délai de forclusion au premier incident de paiement non régularisé postérieur à son adoption.

À compter de la date d'effet de l'avenant au 20 novembre 2016, M. [R] a payé la somme totale de 7 534,84 euros, correspondant à 47 mensualités, de sorte que la première mensualité impayée est celle du 30 octobre 2020 et que la banque disposait jusqu'au 30 octobre 2022 pour initier son action.

En assignant l'emprunteur par acte du 9 novembre 2021, elle a donc agi dans le délai de deux années et doit donc être déclarée recevable.

Le jugement est donc infirmé sur ce point.

Sur la régularité de l'offre et sur l'information précontractuelle

Si l'appelante soutient dans le corps de ses écritures que la contestation de la régularité de l'offre est prescrite au regard du délai de prescription quinquennale, elle ne forme pas pour autant une fin de non-recevoir dans le dispositif de ses écritures de sorte que la cour n'est pas tenue de statuer spécifiquement sur ce point au regard des dispositions de l'article 954 du code de procédure civile.

Sur la consultation du FICP

M. [R] estime qu'il n'est pas justifié d'une consultation du FICP régulière et antérieure à l'octroi du crédit. Il soutient que la fiche indique que cette consultation aurait été faite le 27 juillet 2015, sans qu'il soit indiqué l'heure de la consultation, et que la réponse aurait été apportée le même jour, sans qu'il soit précisé l'heure de la réponse, de sorte qu'il est impossible de vérifier l'antériorité de la vérification à l'octroi du prêt. Il soutient par ailleurs que le 27 juillet 2015 correspond au transfert des fonds sur son compte.

L'article L. 311-9 du code de la consommation en sa version applicable au contrat impose au prêteur avant de conclure le contrat de crédit de consulter le fichier prévu à l'article L. 333-4, dans les conditions prévues par l'arrêté mentionné à l'article L. 333-5.

Il résulte de l'article L. 311-48 du même code que lorsque le prêteur n'a pas respecté les obligations fixées aux articles L. 311-8 et L. 311-9, il est déchu du droit aux intérêts, en totalité ou dans la proportion fixée par le juge.

Aucun formalisme n'est exigé quant à la justification de la consultation du fichier des incidents de remboursement des crédits aux particuliers par les organismes prêteurs, l'article 13 de l'arrêté du 26 octobre 2010 relatif au fichier national des incidents de remboursement des crédits aux particuliers prévoit, dans sa rédaction applicable au litige, qu'en application de l'article L. 333-5 du code de la consommation, afin de pouvoir justifier qu'ils ont consulté le fichier, les établissements et organismes mentionnés à l'article 1er doivent, dans les cas de consultations aux fins mentionnées au I de l'article 2, conserver des preuves de cette consultation, de son motif et de son résultat, sur un support durable. En effet, la Banque de France ne délivrait pas de récépissé de la consultation de son fichier.

Pour démontrer avoir satisfait à son obligation de consultation préalable du fichier des incidents de remboursement des crédits aux particuliers, l'appelante communique un document qui mentionne :

"- Établissement code interbancaire : 16178

- Dénomination : La Banque Postale Financement a effectué une consultation obligatoire du FICP pour la clé BdF [Numéro identifiant 4] le 27.07.2015

Pour M. [V] [R] né le [Date naissance 3]/1971 à Mali

Dans le cadre d'un renouvellement de crédit Pour un crédit type CONSOMMATION

À laquelle il a été répondu le 2015-07-27".

La cour constate que le résultat de cette consultation n'y figure pas de sorte que ce document ne répond pas aux prescriptions de l'article susvisé et que la déchéance du droit aux intérêts est encourue de ce seul chef, sans qu'il soit besoin d'examiner plus en avant les autres moyens soulevés.

Sur le bien-fondé de la demande en paiement

L'appelante produit en outre à l'appui de sa demande l'offre de crédit et son avenant, la fiche ressources et charges et les éléments de solvabilité de l'emprunteur, la fiche d'informations précontractuelles européennes normalisées, fiche conseil en assurance et la notice d'assurance, les tableaux d'amortissement, l'historique de prêt, un décompte de créance.

Elle communique également copie d'un courrier recommandé avec avis de réception adressé à M. [R] le 19 février 2021 le mettant en demeure de régler sous quinze jours de la somme de 1 054,88 euros correspondant à six échéances impayées outre indemnité et intérêts de retard, sous peine de voir prononcer la déchéance du terme du contrat. Elle justifie également avoir pris acte de la déchéance du terme du contrat suivant courrier recommandé avec avis de réception adressé le 6 mai 2021, mettant en demeure M. [R] de régler sous quarante-huit heures la somme totale de 8 209,44 euros en capital, échéances impayées, pénalité légale et intérêts.

C'est donc de manière légitime que la société Banque Postale Consumer Finance se prévaut de la déchéance du terme du contrat et de l'exigibilité des sommes dues.

Aux termes de l'article L. 311-48 du code de la consommation, lorsque le prêteur est déchu du droit aux intérêts, l'emprunteur n'est tenu qu'au seul remboursement du capital suivant l'échéancier prévu, ainsi que, le cas échéant, au paiement des intérêts dont le prêteur n'a pas été déchu. Les sommes déjà perçues par le prêteur au titre des intérêts, qui sont productives d'intérêts au taux de l'intérêt légal à compter du jour de leur versement, sont restituées par le prêteur ou imputées sur le capital restant dû.

L'historique de compte détaillé au décompte permet de confirmer, ce qui n'est au demeurant pas contesté, que M. [R] a versé une somme totale de 2 868,04 euros avant intervention de l'avenant, puis une somme de 7 534,84 euros dès la mise en 'uvre de l'avenant, soit une somme totale de 10 402,88 euros. Il y a donc lieu de la déduire de la somme empruntée de 15 000 euros soit un solde de 4 597,12 euros.

M. [R] doit être condamné au paiement de cette somme.

Cette déchéance du droit aux intérêts interdit au prêteur de percevoir d'autre somme que le capital déduction faite des sommes versées de sorte que la demande au titre d'une indemnité de résiliation doit être rejetée.

Le prêteur, bien que déchu de son droit aux intérêts, demeure fondé à solliciter le paiement des intérêts au taux légal, en vertu de l'article 1153 devenu 1231-6 du code civil, sur le capital restant dû, majoré de plein droit deux mois après le caractère exécutoire de la décision de justice en application de l'article L. 313-3 du code monétaire et financier.

Ces dispositions légales doivent cependant être écartées s'il en résulte pour le prêteur la perception de montants équivalents ou proches de ceux qu'il aurait perçus si la déchéance du droit aux intérêts n'avait pas été prononcée, sauf à faire perdre à cette sanction ses caractères de dissuasion et d'efficacité (CJUE 27 mars 2014, affaire C-565/12, Le Crédit Lyonnais SA / Fesih Kalhan).

En l'espèce, le crédit personnel a été accordé à un taux d'intérêt annuel fixe de 3,44 %. Dès lors, les montants susceptibles d'être effectivement perçus par le prêteur au titre des intérêts au taux légal apparaissent significativement inférieurs à celui résultant du taux contractuel sauf en cas de majoration de cinq points. Il convient en conséquence de ne pas faire application de l'article 1231-6 du code civil dans son intégralité et de n'écarter que l'application de l'article L. 313-3 du code monétaire et financier. Il convient de dire que la somme de 4 597,12 euros que M. [R] est condamné à payer doit porter intérêts au taux légal non majoré à compter du 6 mai 2021.

Sur la demande de délais de paiement

Les pièces produites par M. [R] n'ont pas été actualisées et remontent à novembre 2022 s'agissant de son bulletin de salaire et de sa quittance de loyer de 749 euros outre un avis d'imposition 2022 sur les revenus de 2021. Il justifie être père de quatre enfants dont l'aînée est devenue majeure.

Ces éléments sont insuffisants à l'octroi de délais de paiement, M. [R] ayant déjà bénéficié de fait de larges délais pour s'acquitter des sommes dues. La demande doit être rejetée.

Sur les autres demandes

Le jugement doit être infirmé quant au sort des dépens de première instance et M. [R] condamné à les prendre en charge. Il doit être confirmé en ce qu'il a rejeté la demande sur le fondement de l'article 700 du code de procédure La société Banque Postale Consumer Finance qui succombe conservera la charge de ses dépens d'appel. L'équité commande de ne pas faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Statuant par arrêt contradictoire et en dernier ressort,

Infirme le jugement sauf quant au rejet de la demande de frais irrépétibles ;

Statuant à nouveau et y ajoutant,

Déclare la société Banque Postale Consumer Finance recevable en sa demande ;

Prononce la déchéance du droit aux intérêts ;

Condamne M. [V] [R] à payer à la société Banque Postale Consumer Finance la somme de 4 597,12 euros avec intérêts au taux légal non majoré à compter du 6 mai 2021 ;

Ecarte la majoration de l'article L. 313-3 du code monétaire et financier ;

Condamne M. [V] [R] aux dépens de première instance et la société Banque Postale Consumer Finance aux dépens d'appel ;

Rejette toute demande plus ample ou contraire.

La greffière La présidente


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 4 - chambre 9 - a
Numéro d'arrêt : 22/12035
Date de la décision : 14/03/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 28/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-03-14;22.12035 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award