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29/06/2023 | FRANCE | N°21/05992

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 4 - chambre 9 - a, 29 juin 2023, 21/05992


Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 9 - A



ARRÊT DU 29 JUIN 2023



(n° , 6 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/05992 - N° Portalis 35L7-V-B7F-CDMTL



Décision déférée à la Cour : Jugement du 20 janvier 2021 - Juge des contentieux de la protection d'IVRY SUR SEINE - RG n° 11-20-000306





APPELANTE



La société SOGEFINANCEMENT, soc

iété par actions simplifiée, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés ès-qualités audit siège

N° SIRET : 394 352 272 00022

[Adresse 2]

[Adresse...

Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 9 - A

ARRÊT DU 29 JUIN 2023

(n° , 6 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/05992 - N° Portalis 35L7-V-B7F-CDMTL

Décision déférée à la Cour : Jugement du 20 janvier 2021 - Juge des contentieux de la protection d'IVRY SUR SEINE - RG n° 11-20-000306

APPELANTE

La société SOGEFINANCEMENT, société par actions simplifiée, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés ès-qualités audit siège

N° SIRET : 394 352 272 00022

[Adresse 2]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

représentée et assistée de Me Sophie MÜH, avocat au barreau de PARIS, toque : D1256

INTIMÉE

Madame [O] [L]

née le [Date naissance 3] 1960 à [Localité 4] (CONGO)

[Adresse 1]

[Adresse 1]

représentée par Me Michel TAMBA MBUMBA SALAMBONGO, avocat au barreau de PARIS, toque : C1069

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 23 mai 2023, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Mme Muriel DURAND, Présidente de chambre, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Mme Muriel DURAND, Présidente de chambre

Mme Fabienne TROUILLER, Conseillère

Mme Laurence ARBELLOT, Conseillère

Greffière lors des débats : Mme Camille LEPAGE

ARRÊT :

- CONTRADICTOIRE

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Mme Muriel DURAND, Présidente et par Mme Camille LEPAGE, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Selon offre préalable acceptée le 3 mars 2016, la société Sogefinancement a consenti à Mme [O] [L] un crédit personnel d'un montant en capital de 30 500 euros remboursable en 53 mensualités de 674,95 euros hors assurance incluant les intérêts au taux nominal de 7,30 %, le TAEG s'élevant à 7,61 %, soit une mensualité avec assurance de 694,77 euros.

Le 29 mars 2018, ce crédit a été aménagé pour la somme de 24 818,29 euros devant être remboursée par 108 mensualités de 330,30 euros (assurance comprise) à compter du 10 mai 2018.

Plusieurs échéances n'ayant pas été honorées, la société Sogefinancement a entendu se prévaloir de la déchéance du terme.

Par acte du 28 janvier 2020, la société Sogefinancement a fait assigner Mme [L] devant le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Créteil en paiement du solde du prêt lequel, par jugement contradictoire du 20 janvier 2021, a déclaré l'action forclose et en conséquences les demandes de la société Sogefinancement irrecevables et l'a condamnée aux dépens.

Le tribunal a retenu que le contrat de réaménagement constituait un bouleversement du contrat principal dont il avait modifié l'économie en raison de l'importance du surcoût qu'il représentait du fait de la capitalisation des intérêts de retard et des indemnités légales, qu'il était donc nul et n'avait pas interrompu le délai de forclusion. Il a retenu que le premier impayé non régularisé devait être fixé au 10 janvier 2018, Mme [L] ayant réglé en tout 14 584,02 euros soit l'équivalent de 21 mensualités de 694,77 euros chacune.

Par déclaration réalisée par voie électronique le 29 mars 2021, la société Sogefinancement a interjeté appel de cette décision.

Aux termes de ses dernières conclusions déposées par voie électronique le 3 septembre 2021, la société Sogefinancement demande à la cour :

- d'infirmer le jugement,

- de débouter Mme [L] de toutes ses demandes,

- de condamner Mme [L] à lui payer la somme de 23 272,12 euros avec intérêts au taux contractuel du jour de la mise en demeure, soit le 30 juillet 2019, jusqu'au jour du parfait paiement, ainsi que l'indemnité légale d'un montant de 1 823,10 euros,

- de condamner Mme [L] à lui payer la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et les dépens avec distraction au profit de Me Sophie Müh, avocat au Barreau de Paris.

Elle fait principalement valoir que l'article L. 311-52 du code de la consommation dans sa rédaction applicable à la date du crédit (Lagarde) n'a prévu aucun formalisme pour le réaménagement ou le rééchelonnement du contrat, qu'il ne s'agit pas d'un nouveau contrat de crédit puisqu'il n'opère la modification que des modalités de remboursement avant déchéance du terme et permet de rembourser l'intégralité des sommes dues sans toucher à ses conditions d'octroi et ce même si les intérêts échus et les indemnités de retard sont capitalisés et que l'avenant ainsi conclu interrompt la forclusion si bien que le premier impayé non régularisé à prendre en compte est le premier qui intervient postérieurement à cet avenant et qu'il doit être fixé au 10 mai 2019, dès lors qu'il convient d'imputer les règlements effectués par priorité sur les échéances elles-mêmes en commençant par la plus ancienne, Mme [L] ayant payé 12 mensualités après la signature de l'avenant.

Aux termes de ses conclusions notifiées par voie électronique le 24 juin 2021, Mme [L] demande à la cour :

- de confirmer le jugement,

- de dire que l'action de la banque est forclose,

- de débouter la société Sogefinancement de toutes ses demandes et de dire n'y avoir lieu à payer la somme de 23 272,12 euros réclamée non plus que l'indemnité de résiliation, ni à capitalisation des intérêts,

- à titre subsidiaire de lui accorder un moratoire de 12 mois et un délai de paiement de 100 euros par mois et de rejeter toute demande plus ample ou contraire,

- de condamner la société Sogefinancement à lui payer la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens.

Elle fait valoir que l'article L. 311-52 du code de la consommation ne vise que le rééchelonnement des échéances impayées et pas tout le contrat qui suppose la remise d'une nouvelle offre et opère novation, que c'est donc à juste titre que le premier juge a considéré que le rééchelonnement de tout le contrat n'avait pas interrompu le délai de forclusion. Elle considère que dès lors le premier impayé non régularisé remonte au 10 janvier 2018, soit plus de deux ans avant l'introduction de la demande, datée du 28 janvier 2020 et que cette demande est donc irrecevable.

Elle observe que la société Sogefinancement n'a pas entendu diligenter de médiation au mépris des dispositions de l'article 830 du code de procédure civile.

Elle indique se trouver dans une situation précaire, être célibataire et assumer la charge de ses enfants et de sa famille restée en Afrique. Elle fait état de ses ressources et de ses charges.

Pour un plus ample exposé des faits, moyens et prétentions de l'appelante, il est renvoyé aux écritures de celle-ci conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 28 mars 2023 et l'affaire a été appelée à l'audience le 23 mai 2023.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Il convient à titre liminaire d'observer que Mme [L] qui déplore dans ses écritures l'absence de recours à la médiation n'en tire aucune conclusion dans son par ces motifs et dès lors il n'y a pas lieu de statuer sur ce point.

Sur la demande en paiement

Le présent litige est relatif à un crédit souscrit le 3 mars 2016 soumis aux dispositions de la loi n° 2010-737 du 1er juillet 2010 de sorte qu'il doit être fait application des articles du code de la consommation dans leur rédaction en vigueur après le 1er mai 2011 et leur numérotation antérieure à l'ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016 et au décret n° 2016-884 du 29 juin 2016.

Sur la forclusion

En application de l'article L. 311-52 du code de la consommation dans sa rédaction applicable au litige, les actions en paiement engagées à l'occasion de la défaillance de l'emprunteur doivent être formées dans les deux ans de l'événement qui leur a donné naissance à peine de forclusion. Cet événement est caractérisé notamment par le premier incident de paiement non régularisé.

Lorsque les modalités de règlement des échéances impayées ont fait l'objet d'un réaménagement ou d'un rééchelonnement, le point de départ du délai de forclusion est le premier incident non régularisé intervenu après le premier aménagement ou rééchelonnement conclu entre les intéressés.

Constitue un réaménagement au sens de ce texte, le contrat qui a pour seul objet de réaménager les modalités de remboursement d'une somme antérieurement prêtée, pour permettre, par l'allongement de la période de remboursement et l'abaissement du montant de l'échéance mensuelle, d'apurer le passif échu, pour autant qu'il ne se substitue pas au contrat de crédit initial dont la déchéance du terme n'a pas été prononcée, qu'il n'en modifie pas les caractéristiques principales telles le montant initial du prêt et le taux d'intérêt et qu'il porte sur l'intégralité des sommes restant dues à la date de sa conclusion.

En application de l'article 125 du code de procédure civile, il appartient au juge saisi d'une demande en paiement de vérifier d'office même en dehors de toute contestation sur ce point et même en cas de non-comparution du défendeur que l'action du prêteur s'inscrit bien dans le délai prévu à l'article L. 311-52 du code de la consommation.

Il résulte des pièces produites que cet avenant qui fait expressément référence à l'offre initiale a bien porté sur la totalité des sommes dues à savoir le capital restant dû, les mensualités impayées, l'assurance, les intérêts de retard et les indemnités de retard soit une somme totale de 24 818,29 euros. Seul le TAEG a été modifié par l'effet même du réaménagement.

Cet avenant répond donc bien aux prescriptions de l'article L. 311-52 du code de la consommation et seul le premier incident de paiement non régularisé postérieur à l'avenant doit être pris en compte pour déterminer la forclusion.

Il résulte des pièces produites que Mme [L] a réglé 12 mensualités après l'avenant si bien qu'il doit être considéré que le premier impayé non régularisé est celui du mois de mai 2019. Dès lors, la société Sogefinancement qui a assigné le 28 janvier 2020 n'est pas forclose en son action et le jugement doit être infirmé.

Sur le montant des sommes dues

En application de l'article L. 311-24 du code de la consommation (devenu L. 312-39) en cas de défaillance de l'emprunteur, le prêteur peut exiger le remboursement immédiat du capital restant dû, majoré des intérêts échus mais non payés. Jusqu'à la date du règlement effectif, les sommes restant dues produisent les intérêts de retard à un taux égal à celui du prêt. En outre, le prêteur peut demander à l'emprunteur défaillant une indemnité qui, dépendant de la durée restant à courir du contrat et sans préjudice de l'application des articles 1152 et 1231 (de l'article 1231-5 du code civil), est fixée suivant un barème déterminé par décret.

L'article D. 311-6 devenu D. 312-16 du même code dispose que le prêteur peut demander une indemnité égale à 8 % du capital restant dû à la date de défaillance. Aucune autre pénalité notamment de retard ne peut être exigée par le prêteur.

La société Sogefinancement produit en outre l'offre de contrat de crédit qui comporte une clause de déchéance du terme, l'avenant de réaménagement, l'historique de prêt, les tableaux d'amortissement , la fiche d'informations précontractuelles européennes normalisées, la fiche de dialogue revenus et charges, les bulletins de salaire des mois de décembre 2015, janvier et février 2016, l'avis d'imposition de 2015, un justificatif de domicile, un justificatif d'identité, le justificatif de consultation du fichier des incidents de paiement du 3 mars 2016 soit avant la date de déblocage des fonds, la notice d'assurance et la fiche de synthèse des garanties, la fiche d'explications et de mise en garde « regroupements de crédits » prévue par les articles R. 313-12 à R. 313-14 (devenus R. 314-18 à R. 314-21), la mise en demeure avant déchéance du terme du 1er juillet 2019 enjoignant à Mme [L] de régler l'arriéré de 726,95 euros sous 15 jours à peine de déchéance du terme et celle notifiant la déchéance du terme du 30 juillet 2019 portant mise en demeure de payer le solde du crédit et un décompte de créance.

Il en résulte que la société Sogefinancement se prévaut de manière légitime de la déchéance du terme du contrat et de l'exigibilité des sommes dues et qu'elle est fondée à obtenir paiement des sommes dues à la date de déchéance du terme soit :

- 990,90 euros au titre des échéances impayées

- 22 263,37 euros au titre du capital restant dû après imputation de l'échéance du mois de juillet 2019

- 17,85 euros au titre des intérêts échus

soit un total de 23 272,12 euros majorée des intérêts au taux de 7,30 % à compter du 30 juillet 2019 sur la seule somme de 23 254,27 euros.

Elle est en outre fondée à obtenir une indemnité de résiliation de 8 % laquelle, sollicitée à hauteur de 1 823,10 euros, apparaît excessive d'autant que dans le cadre du réaménagement des indemnités de même nature ont déjà été prises en compte et doit être réduite à la somme de 50 euros et produire intérêts au taux légal à compter du 30 juillet 2019.

La cour condamne donc Mme [L] à payer ces sommes à la société Sogefinancement.

Sur la demande de délais de paiement

Mme [L] justifie gagner 1 888,47 euros par mois avant impôt, supporter un loyer de 677,50 euros et être endettée. Toutefois le plan d'apurement de son loyer prenait fin en 2021. Le montant de 100 euros qu'elle propose conduirait sans compter les intérêts à apurer la dette en 222 mois soit plus de 18 ans, ce qui n'est pas réaliste.

Il y a donc lieu de ne lui accorder des délais que sur une période de 12 mois, par 11 mensualités de 150 euros par mois s'imputant prioritairement sur le capital, la première avant le 10 du mois suivant avec une clause de déchéance du terme, le solde lors de la 12ème mensualité et ce afin de lui permettre d'avoir recours à une procédure plus appropriée à son état d'endettement.

Sur les autres demandes

Le jugement doit être infirmé en ce qu'il a condamné la société Sogefinancement au dépens de première instance et confirmé en ce qu'il a rejeté la demande de la société Sogefinancement sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile. Mme [L] qui succombe doit supporter les dépens de première instance et d'appel. En revanche, chacune des parties doit supporter la charge de ses frais irrépétibles.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Statuant par arrêt contradictoire et en dernier ressort,

Infirme le jugement sauf en ce qu'il a rejeté la demande sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

Statuant à nouveau et y ajoutant,

Condamne Mme [O] [L] à payer à la société Sogefinancement les sommes de 23 272,12 euros majorée des intérêts au taux de 7,30 % à compter du 30 juillet 2019 sur la seule somme de 23 254,27 euros au titre du solde du prêt et de 50 euros majorée des intérêts au taux légal à compter du 30 juillet 2019 au titre de l'indemnité légale de résiliation ;

Autorise Mme [O] [L] à s'acquitter de ces sommes en 11 mensualités de 150 euros s'imputant prioritairement sur le capital, le 10 de chaque mois au plus tard et pour la première fois le 10 du mois suivant celui de la signification de la présente décision, le solde lors de la 12ème mensualité ;

Dit qu'à défaut de paiement d'une seule mensualité à bonne date et faute d'avoir régularisé dans les 15 jours d'une mise en demeure, la totalité de la somme sera due ;

Condamne Mme [O] [L] aux dépens de première instance et d'appel ces derniers avec distraction au profit de Maître Sophie Müh, avocat au Barreau de Paris avocat, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile ;

Rejette toute demande plus ample ou contraire.

La greffière La présidente


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 4 - chambre 9 - a
Numéro d'arrêt : 21/05992
Date de la décision : 29/06/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-06-29;21.05992 ?
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