Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 3 - Chambre 1
ARRET DU 28 JUIN 2023
(n° 2023/ , 8 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/14324 - N° Portalis 35L7-V-B7F-CEFLY
Décision déférée à la Cour : Jugement du 24 Juin 2021 - Juge aux affaires familiales de CRETEIL - RG n° 20/00257
APPELANT
Monsieur [R] [D]
né le 18 Février 1962 à [Localité 5] (ARMENIE)
[Adresse 3]
[Localité 4]
représenté par Me Frédéric SAMAMA, avocat au barreau de PARIS, toque : D1267
INTIMEE
Madame [U], [G] [X]
née le 18 Février 1974 à [Localité 7]
[Adresse 6]
[Localité 1]
représentée par Me Herveline RIDEAU DE LONGCAMP de l'AARPI MRL AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : L0139
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 18 Avril 2023, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Mme Isabelle PAULMIER-CAYOL, Conseiller, chargée du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Mme Patricia GRASSO, Président
Mme Sophie RODRIGUES, Conseiller
Mme Isabelle PAULMIER-CAYOL, Conseiller
Greffier lors des débats : Mme Emilie POMPON
ARRÊT :
- contradictoire
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Mme Patricia GRASSO, Président, et par Mme Emilie POMPON, Greffier.
***
EXPOSE DU LITIGE :
Mme [U] [X] et M. [R] [D] ont vécu en concubinage.
Par acte authentique du 8 septembre 2004, Mme [U] [X] et M. [R] [D] ont acquis, à concurrence de la moitié indivise chacun, une maison à usage d'habitation [Localité 4] (Val-de-Marne), [Adresse 3], moyennant un prix de 310 000€.
Mme [U] [X] et M. [R] [D], qui se sont séparés, ne sont pas parvenus à s'accorder sur la liquidation et le partage de leur indivision.
Par acte du 23 décembre 2019, Mme [U] [X] a fait assigner M. [R] [D] devant le tribunal de grande instance de Créteil en liquidation et partage de leur indivision.
Par acte d'huissier délivré le 13 mars 2020 à M. [R] [D], Mme [U] [X] a saisi le juge aux affaires familiales de ce même tribunal, compétent en application de l'article L. 213-3 du code de l'organisation judiciaire, s'agissant de la liquidation et du partage d'une indivision entre ex concubins.
Les deux affaires ont fait l'objet d'une jonction le 25 septembre 2020 devant le juge aux affaires familiales.
M. [R] [D] n'ayant pas constitué avocat devant le tribunal judiciaire de Créteil, le juge aux affaires familiales du tribunal judiciaire de Créteil a statué par jugement réputé contradictoire en date du 24 juin 2021, dans les termes suivants :
-ordonne l'ouverture des opérations de comptes, liquidation et partage de l'indivision existant entre Mme [U] [X] et M. [R] [D] sur le bien sis [Localité 4] (Val-de-Marne), [Adresse 3],
-désigne pour y procéder, à défaut d'accord des parties sur le choix du notaire, Maître [H] [L], notaire à [Localité 9] (Val-de-Marne), devant lequel la demanderesse devra produire l'acte authentique de vente du 8 septembre 2004,
-commet tout juge de la 1re chambre pour surveiller ces opérations,
-préalablement au partage et pour y parvenir, autorise à l'issue d'un délai de six mois à compter de la signification de la présente décision, sur les poursuites de la partie la plus diligente et en présence de l'autre partie, ou celle-ci dûment appelée, la licitation, à l'audience des criées du tribunal judiciaire de Créteil, en un seul lot, du bien immobilier, sis [Localité 4] (Val-de-Marne), [Adresse 3], cadastré section J[Cadastre 2], d'une superficie de 4a 27 ca, soit une maison d'habitation sur la mise à prix de 500 000 € avec des facultés de baisse du quart, puis du tiers, puis de la moitié à défaut d'enchères,
-désigne la SCP Molmy Turpin, huissier de justice à [Localité 8] (Val-de-Marne), pour décrire le bien sis [Localité 4] (Val-de-Marne), [Adresse 3], ainsi que les conditions de vente et pour faire procéder à la visite dans la quinzaine précédant la vente, selon les modalités arrêtées dans la mesure du possible en accord avec les occupants, et à défaut d'accord pendant une durée de une heure, du lundi au samedi entre 9 heures et 12 heures avec l'assistance de la force publique et d'un serrurier si nécessaire,
-autorise ce même huissier à se faire assister de tout professionnel qualifié à l'effet de faire dresser tout diagnostic qui s'avérerait nécessaire,
-dit qu'il sera pourvu, en cas d'empêchement de l'huissier commis à son remplacement par simple ordonnance rendue sur requête,
-dit qu'une indemnité d'occupation de 2 200 € par mois et due par M. [R] [D] à l'indivision à compter du 1er novembre 2016 et jusqu'au partage ou jusqu'à son départ des lieux,
-renvoie l'affaire à l'audience du juge commis du 5 avril 2022 à 14 heures 30 pour justification du versement des émoluments du notaire et point sur l'état d'avancement des opérations ordonnées,
-invite les parties sous peine de radiation et le notaire à renseigner le juge commis un mois avant cette date sur l'état d'avancement des opérations,
-condamne M. [R] [D] à verser à Mme [U] [X] la somme de 2 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile,
-ordonne l'emploi des dépens en frais privilégiés de partage et de licitation et dit qu'ils seront partagés par les copartageants dans la proportion de leurs parts dans l'indivision.
M. [R] [D] a interjeté appel de ce jugement par déclaration du 23 juillet 2021. L'acte d'appel vise tous les chefs du jugement à l'exception de ses trois premiers chefs ayant ordonné l'ouverture des opérations de comptes liquidation partage, désigné Maître [H] [L], notaire à défaut d'autre choix des parties pour procéder à ces opérations, et commis tout juge de la 1ère chambre pour les surveiller.
Aux termes de ses uniques conclusions notifiées le 22 octobre 2021, M. [R] [D], appelant, demande à la cour de :
-infirmer le jugement rendu le 24 juin 2021 rendu par le tribunal judiciaire de Créteil en ce qu'il a :
« *préalablement au partage et pour y parvenir, autorisé à l'issue d'un délai de six mois à compter de la signification de la présente décision, sur les poursuites de la partie la plus diligente et en présence de l'autre partie, ou celle-ci dûment appelée, la licitation, à l'audience des criées du tribunal judiciaire de Créteil, en un seul lot, du bien immobilier, sis [Localité 4] (Val-de-Marne), [Adresse 3], cadastré section J[Cadastre 2], d'une superficie de 4a 27 ca, soit une maison d'habitation sur la mise à prix de 500 000 € avec des facultés de baisse du quart, puis du tiers, puis de la moitié à défaut d'enchères,
*désigné la SCP Molmy Turpin, huissier de justice à [Localité 8] (Val-de-Marne), pour décrire le bien sis [Localité 4] (Val-de-Marne), [Adresse 3], ainsi que les conditions de vente et pour faire procéder à la visite dans la quinzaine précédant la vente, selon les modalités arrêtées dans la mesure du possible en accord avec les occupants, et à défaut d'accord pendant une durée de une heure, du lundi au samedi entre 9 heures et 12 heures avec l'assistance de la force publique et d'un serrurier si nécessaire,
*autorisé ce même huissier à se faire assister de tout professionnel qualifié à l'effet de faire dresser tout diagnostic qui s'avérerait nécessaire,
*dit qu'il sera pourvu, en cas d'empêchement de l'huissier commis à son remplacement par simple ordonnance rendue sur requête,
*dit qu'une indemnité d'occupation de 2 200 € par mois est due par M. [R] [D] à l'indivision à compter du 1er novembre 2016 et jusqu'au partage ou jusqu'à son départ des lieux,
*renvoyé l'affaire à l'audience du juge commis du 5 avril 2022 à 14 heures 30 pour justification du versement des émoluments du notaire et point sur l'état d'avancement des opérations ordonnées,
*invité les parties sous peine de radiation et le notaire à renseigner le juge commis un mois avant cette date sur l'état d'avancement des opérations,
*condamné M. [R] [D] à verser à Mme [U] [X] la somme de 2 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile,
*ordonné l'emploi des dépens en frais privilégiés de partage et de licitation et dit qu'ils seront partagés par les copartageants dans la proportion de leurs parts dans l'indivision. »
et statuant à nouveau :
-surseoir à la licitation du bien au profit de M. [R] [D] pour une durée de 24 mois,
-débouter Mme [U] [X] de sa demande de condamnation de M. [R] [D] à verser une indemnité d'occupation de 2 200 € par mois depuis le 1er novembre 2016,
-débouter Mme [U] [X] de l'intégralité de ses demandes,
à titre subsidiaire :
-réduire à de plus justes proportions le montant et la durée de l'indemnité d'occupation dont M. [R] [D] est susceptible d'être débiteur,
en tout état de cause :
- condamner Mme [U] [X] à payer à M. [R] [D] la somme de 1 500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner Mme [U] [X] aux entiers dépens.
Aux termes de ses dernières conclusions notifiées le 30 janvier 2023, Mme [U] [X], intimée, demande à la cour de :
-confirmer en toutes ses dispositions le jugement rendu par le juge aux affaires familiales près le tribunal judiciaire de Créteil le 24 juin 2021,
-débouter M. [R] [D] de l'intégralité de ses demandes, fins et conclusions et notamment de sa prétendue créance de 150 000 € au titre du financement du bien indivis,
y ajoutant :
-condamner M. [R] [D] à verser à Mme [U] [X] la somme de 6 500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, et aux entiers dépens,
-condamner M. [R] [D] aux entiers dépens d'appel.
Pour un plus ample exposé des moyens développés par les parties au soutien de leurs prétentions, il sera renvoyé à leurs écritures susvisées conformément à l'article 455 du code de procédure civile.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 28 mars 2023.
L'affaire a été appelée à l'audience du 18 avril 2023.
MOTIFS DE LA DECISION
Sur la demande de M. [R] [D] de surseoir à la licitation du bien indivis et tendant au débouté de la demande de licitation
A l'appui de sa demande de surseoir à la licitation du bien indivis pendant une durée de 24 mois présentée au visa de l'article 820 du code civil, M. [R] [D] fait valoir que l'intérêt des parties serait préservé par une vente de gré à gré ou une licitation entre coïndivisaires, soulignant que le montant de la mise à prix fixé par le jugement est très inférieur au montant de la valeur vénale du bien indivis.
Après avoir relevé que M. [R] [D] n'avait pas formé appel du chef du jugement ayant ordonné l'ouverture des opérations de compte liquidation partage, Mme [U] [X] soutient que l'ouverture de ces opérations a été définitivement ordonnée, la licitation n'en constituant qu'une modalité qui concerne les biens indivis qui ne peuvent pas être commodément partagés en nature et que l'article 820 du code civil ne permet que de surseoir au partage et non à la licitation.
Elle souligne l'inertie de M. [R] [D] qui n'a jamais répondu à ses demandes de proposition de partage amiable, n'a pas mis à profit le délai de 6 mois accordé par le tribunal et n'est pas en mesure de payer la soulte.
Si le chef du jugement ayant ordonné l'ouverture des opérations de comptes liquidation partage n'était pas visé par l'acte d'appel, le chef du jugement ayant ordonné la licitation l'est expressément de sorte que celui-ci a été dévolu à la cour ; M. [R] [D] demande en outre dans ses écritures l'infirmation du chef du jugement ayant ordonné la licitation et que la cour statuant à nouveau déboute Mme [U] [X] de toutes ses demandes, ce qui inclut la demande de cette dernière tendant à la licitation du bien indivis ; l'appelant fait valoir à l'appui de sa demande de débouté que la vente par adjudication de l'immeuble est contraire à l'intérêt des parties dans la mesure où il n'est pas établi que le bien soit vendu à sa valeur réelle.
L'ouverture des opérations de comptes liquidation partage ne rend pas la licitation inéluctable ; celle-ci ne peut être ordonnée que si certaines conditions sont remplies.
Selon les termes de l'article 1686 du code civil, « si une chose commune à plusieurs ne peut être partagée commodément et sans perte ;
Ou si, dans un partage fait de gré à gré de biens communs, il s'en trouve quelques uns qu'aucun des co-partageant ne puisse ou ne veuille prendre,
La vente s'en fait aux enchères, et le prix est partagé entre les copropriétaires. ».
L'article 1377 du code de procédure civile dispose que le tribunal ordonne, dans les conditions qu'il détermine, la vente par adjudication des biens qui ne peuvent être facilement partagés ou attribués. La vente est faite, pour les immeubles, selon les règles prévues aux articles 1271 à 1281 et, pour les meubles, dans les formes prévues aux articles R. 221-33 à R. 221-38 et R. 221-39 du code des procédures civiles d'exécution.
En l'espèce, le bien indivis étant une maison d'habitation constituée d'un unique logement, il n'est pas commodément partageable. Il est par ailleurs justifié que Mme [U] [X] a proposé par courriers des 5 novembre 2016 et 12 septembre 2017 à M. [R] [D] qui occupe le bien indivis que celui-ci lui rachète ses parts sans qu'il n'apparaisse que ce dernier ait répondu favorablement à cette proposition, ni engagé des démarches pour vendre le bien indivis.
Il suit que les conditions sont remplies pour que soit ordonnée la licitation du bien indivis.
Au vu des avis de valeur produits par les parties qui sont compris dans une fourchette allant de 750 000 à 850 000 €, le montant de la mise à prix fixé par le jugement à la somme de 500 000 € avec faculté de baisse du quart, puis du tiers, puis de la moitié à défaut d'enchères est parfaitement adapté ; en effet, la mise à prix correspond à un montant plancher qui doit être attractif afin qu'un grand nombre d'enchérisseurs portent les enchères.
Partant, les chefs du jugement ayant ordonné la licitation du bien indivis, fixé le montant de la mise prix et organisé certaines des modalités pratiques sont confirmés.
Il est rappelé qu'en vertu de l'article 842 du code civil, à tout moment, les copartageants peuvent abandonner les voies judiciaires et poursuivre le partage amiable si les conditions en sont réunies. Ainsi, la confirmation du jugement en ce qu'il a ordonné la vente aux enchères du bien indivis et a fixé le montant de la mise à prix n'empêche pas les parties de s'entendre pour vendre le bien à l'amiable dans l'hypothèse d'une offre dont les conditions leur agréeraient.
En application de l'article 820 du code civil, à la demande d'un indivisaire, le tribunal peut surseoir au partage pour deux années au plus si sa réalisation immédiate risque de porter atteinte à la valeur des biens indivis ou si l'un des indivisaires ne peut reprendre l'entreprise agricole, commerciale, industrielle, artisanale ou libérale dépendant de la succession qu'à l'expiration de ce délai. Ce sursis peut s'appliquer à l'ensemble des biens indivis ou à certains d'entre eux seulement.
En vertu de ce texte, s'il peut judiciairement être sursis au partage, il ne peut être sursis à la licitation.
Cependant, ce texte ne prive pas le juge qui ordonne la licitation d'accorder en application de l'article 510 du code de procédure civile un délai de grâce ; le premier juge a fait usage du pouvoir qu'il tient de cet article et a donc accordé à M. [R] [D] un délai de grâce, en ayant autorisé la licitation du bien indivis seulement à l'issue d'un délai de six mois courant à compter de la signification du jugement. La demande de M. [R] [D] tendant à surseoir à la licitation du bien indivis s'analyse comme une demande tendant à l'octroi d'un nouveau délai de grâce.
Depuis le prononcé du jugement près deux ans se sont écoulés sans que le bien n'ait été vendu aux enchères et qu'il n'ait été justifié que M. [R] [D] avait effectué des diligences en vue de parvenir à une vente de gré à gré du bien et entrepris de démarches en vue de son relogement. Il résulte que sa demande tendant à surseoir à la licitation présente un caractère purement dilatoire contraire à la fonction du délai de grâce.
Alors que nul ne peut être contraint à demeurer dans l'indivision et que M. [R] [D] a déjà bénéficié de larges délais, il n'y a pas lieu d'accorder un nouveau délai de grâce à ce dernier qui se voit en conséquence débouté de sa demande tendant à surseoir à la licitation du bien indivis.
Sur la créance revendiquée par M. [R] [D] au titre du financement des dépenses d'entretien, de conservation du bien indivis et des améliorations qui y ont été apportées
Il est rappelé qu'en vertu de l'alinéa 3 de l'article 954 du code de procédure civil, la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif des conclusions des parties et n'examine les moyens au soutien de ces prétentions que s'ils ont été invoqués dans la discussion.
Si M. [R] [D] indique avoir fait un apport lors de l'acquisition du bien indivis allant au delà de sa part dans l'indivision et avoir remboursé seul l'intégralité des échéances l'emprunt immobilier nécessaire au financement de celui-ci, engagé des dépenses pour son entretien et sa conservation et y avoir apporté des améliorations, force est de constater qu'il ne formule aucun chef de demande à ce titre dans le dispositif de ses conclusions. La cour n'étant pas saisie par M. [R] [D] de prétentions sur ces points, elle ne statuera donc pas.
Sur l'indemnité d'occupation
M. [R] [D] fait valoir qu'il « ne saurait être condamné à payer une indemnité d'occupation de 2 200 € par mois à compter du mois de novembre 2016 alors que lors de sa saisine, Mme [U] [X] l'estimait à 1 800 € par mois ».
M. [R] [D] fait une mauvaise lecture du jugement ; en effet, dans la reprise que fait le premier juge des prétentions de Mme [U] [X] concernant l'indemnité d'occupation, il est indiqué que cette dernière «soutient que la valeur locative s'élève à 3 600 € par mois et que l'indemnité d'occupation que lui doit M. [R] [D] est dès lors de 1 800 € par mois ». Se prononçant sur cette demande, le premier juge a considéré qu' « une indemnité d'occupation de 2 200 € par mois (2 750 x 0,8) est ainsi due par M. [R] [D] à l'indivision à compter du 1er novembre 2016 jusqu'au partage ou jusqu'à son départ des lieux », ayant pris le soin de mettre en caractère gras le groupe nominal ''l'indivision'', rejetant ainsi implicitement une prétention portant sur une créance personnelle de Mme [U] [X] à l'égard de M. [R] [D]. Statuant sur cette demande, le chef du dispositif du jugement est ainsi libellé : « Dit qu'une indemnité d'occupation de 2 200 € est due par M. [R] [D] à l'indivision à compter du 1er novembre 2016 et jusqu'au partage ou jusqu'à son départ des lieux ». Il en résulte que les parties ayant des droits égaux sur le bien indivis, M. [R] [D] a droit à la moitié du montant de l'indemnité d'occupation. Par ailleurs, aucune condamnation en paiement d'une indemnité d'occupation n'a été prononcée à l'encontre de M. [R] [D], les créances des parties sur l'indivision et respectivement celles de l'indivision à leur encontre devant être liquidées et acquittées dans le cadre du partage de l'indivision qui se fera sur le prix de vente du bien indivis.
L'article 815-9 du code civil dispose que chaque indivisaire peut user et jouir des biens indivis conformément à leur destination, dans la mesure compatible avec le droit des autres indivisaires et avec l'effet des actes régulièrement passés au cours de l'indivision. A défaut d'accord entre les intéressés, l'exercice de ce droit est réglé, à titre provisoire, par le président du tribunal. L'indivisaire qui use ou jouit privativement de la chose indivise est, sauf convention contraire, redevable d'une indemnité.
M. [R] [D] soutient qu'il ne peut être redevable d'une indemnité d'occupation pendant la période où il était sous contrôle judiciaire assorti d'une interdiction de se rendre et de résider [Localité 4], soit du mois d'avril 2019 au mois de décembre 2020.
Le prononcé d'une telle mesure judiciaire limitative de liberté à l'encontre de M. [R] [D] ainsi que sa durée ne sont pas contestés.
Mme [U] [X] soutient pour sa part que la conservation exclusive des clés du bien indivis, même sans occupation effective du bien immobilier, suffit à caractériser la jouissance privative dès lors que l'autre coïndivisaire est privé de l'accès à ce bien.
La jouissance privative d'un bien immobilier à usage d'habitation ne se traduit pas uniquement par son occupation. Alors que M. [R] [D] ne conteste pas que son domicile a été fixé à l'adresse du bien indivis avant et après la période couverte par cette mesure judiciaire, il ne fournit aucune pièce relative au bien dans lequel il aurait été logé pendant la durée de son contrôle judiciaire. Il ne justifie pas d'avantage avoir libéré le bien indivis de ses affaires personnelles et des meubles meublant le garnissant lui appartenant pendant la durée de cette mesure et avoir remis à Mme [U] [X] le jeu de clés qu'il détenait donnant accès au bien indivis permettant à cette dernière de pouvoir à son tour jouir du bien indivis. Il résulte en conséquence que Mme [U] [X] n'a pas été mise en mesure de jouir du bien indivis pendant la période où M. [R] [D] a été placé sous contrôle judiciaire, s'agissant de surcroît d'une mesure de sûreté rendue nécessaire par les agissements ou le comportement de M. [R] [D] mais dont Mme [U] [X] n'a pas à pâtir.
Partant, M. [R] [D] ne saurait prétendre pendant la durée de son contrôle judiciaire à une exemption de l'indemnité au titre de la jouissance privative du bien indivis.
Le premier juge, en l'absence d'avis sur la valeur locative du bien indivis ou d'éléments de comparaison produits par Mme [U] [X], à partir de l'estimation par l'agence Century de sa valeur vénale dans une fourchette comprise entre 800 000 € et 850 000 €, a retenu que sa valeur locative devait s'apprécier à hauteur de 4 % de sa valeur vénale moyenne, soit à un montant annuel de 33 000 € qui, rapporté au mois, aboutit à une somme de 2 750 € à laquelle il a appliqué un coefficient de précarité de 20 %, et a donc fixé le montant de l'indemnité d'occupation due par M. [R] [D] à l'indivision à la somme mensuelle de 2 200 €.
Cette méthode d'estimation de la valeur locative d'un bien immobilier en fonction d'un pourcentage de 4 % de sa valeur vénale est de pratique courante chez les professionnels de l'immobilier et son utilisation par le premier juge n'est pas en soi critiquable, M. [R] [D] d'ailleurs ne le fait pas, mais demande « de limiter » ou de réduire « le montant de l'indemnité d'occupation dont (il) est susceptible d'être débiteur », fournissant à l'appui d'autres estimations de la valeur vénale du bien indivis dont certaines proposent des estimations inférieures à celle qui a été produite par Mme [U] [X].
Au vu de ces éléments, réformant le jugement entrepris, il y a lieu de fixer le montant de l'indemnité due par M. [R] [D] au titre de sa jouissance privative du bien indivis à la somme mensuelle de 2 000 € à compter 1er novembre 2016 jusqu'au partage ou son départ des lieux.
Sur les demandes accessoires
N'ayant pas comparu devant le premier juge, M. [R] [D] ne l'a pas mis en mesure d'apprécier les éléments qu'il a fournis à la cour sur la valeur du bien indivis et sur son impossibilité juridique de l'occuper pendant la période de son contrôle judiciaire ; or le jugement n'a été réformé que sur ces points qui auraient pu faire l'objet d'un débat contradictoire en première instance si M. [R] [D] avait comparu ; en conséquence, il supportera les dépens d'appel et se verra condamné à payer à Mme [U] [X] la somme de 1 500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
Déboute M. [R] [D] de sa demande tendant à surseoir à la licitation du bien ;
Dit n'y avoir lieu d'accorder à M. [R] [D] un nouveau délai de grâce ;
Statuant dans les limites de l'appel,
Réforme le chef du jugement en ce qu'il a fixé à la somme de 2 200 € par mois le montant de l'indemnité d'occupation due par M. [R] [D] à l'indivision à compter du 1er novembre 2016 jusqu'au partage ou jusqu'à son départ des lieux ;
Statuant à nouveau de ce chef :
Fixe à la somme de 2 000 € le montant de l'indemnité d'occupation due par M. [R] [D] à l'indivision à compter du 1er novembre 2016 jusqu'au partage ou jusqu'à son départ des lieux ;
Confirme pour le surplus le jugement en tous ses chefs dévolus à la cour ;
Y ajoutant :
Met à la charge de M. [R] [D] les dépens d'appel ;
Condamne M. [R] [D] à payer à Mme [U] [X] la somme de 1 500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Le Greffier, Le Président,