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27/06/2023 | FRANCE | N°22/13248

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 3 - chambre 5, 27 juin 2023, 22/13248


Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 3 - Chambre 5



ARRET DU 27 JUIN 2023



(n° , 5 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 22/13248 - N° Portalis 35L7-V-B7G-CGFQG



Décision déférée à la Cour : Jugement du 10 Juin 2022 rendu par le tribunal judiciaire de MEAUX - RG n° 19/00017





APPELANT



Monsieur [F] [S]



[Adresse 2]

[Localité 6

]



représenté par Me Bénédicte FLORY de l'AARPI DIXHUIT BOETIE, avocat postulant du barreau de PARIS, toque : A0756

assisté de Me Mary PLARD, avocat plaidant du barreau de PARIS, toque : A...

Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 3 - Chambre 5

ARRET DU 27 JUIN 2023

(n° , 5 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 22/13248 - N° Portalis 35L7-V-B7G-CGFQG

Décision déférée à la Cour : Jugement du 10 Juin 2022 rendu par le tribunal judiciaire de MEAUX - RG n° 19/00017

APPELANT

Monsieur [F] [S]

[Adresse 2]

[Localité 6]

représenté par Me Bénédicte FLORY de l'AARPI DIXHUIT BOETIE, avocat postulant du barreau de PARIS, toque : A0756

assisté de Me Mary PLARD, avocat plaidant du barreau de PARIS, toque : A756

INTIME

Madame [X] [Y] née le 3 novembre 1992 à [Localité 5], agissant ès-qualités de représentante légale de son fils [E] [Y] né le 04 mars 2017 à [Localité 7] (Val-de-Marne)

[Adresse 1]

[Localité 5]

représenté par Me Melanie ALBATANGELO, avocat au barreau de MEAUX

(bénéficie d'une AIDE JURIDICTIONNELLE TOTALE numéro 2022/028609 du 14/10/2022 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de PARIS)

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 16 mai 2023, en chambre du conseil, les avocats des parties et le ministère public ne s'y étant pas opposés, devant M. François MELIN, conseiller, faisant fonction de président lors des débats et Mme Marie-Catherine GAFFINEL, conseillère, chargés du rapport

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Mme Hélène FILLIOL, présidente de chambre

M. François MELIN, conseiller,

Mme Marie-Catherine GAFFINEL, conseillère

Greffier, lors des débats : Mme Mélanie PATE

LE MINISTÈRE PUBLIC pris en la personne de MONSIEUR LE PROCUREUR GÉNÉRAL près la cour d'appel de Paris - SERVICE CIVIL

[Adresse 3]

[Localité 4]

représenté à l'audience par Madame Anne BOUCHET-GENTON, substitut général

ARRET :

- contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Mme Hélène FILLIOL, présidente de chambre et par Mme Mélanie PATE, greffière présente lors de la mise à disposition.

Le 4 mars 2017, à [Localité 7], Mme [X] [Y], née le 3 novembre 1992 à [Localité 5], a donné naissance à l'enfant [E] [Y], sans filiation paternelle établie.

Le 21 décembre 2018, Mme [Y] a assigné M. [F] [S] devant le tribunal de grande instance de Meaux afin de voir juger qu'il est le père de l'enfant.

Par un jugement rendu le 13 novembre 2020, le tribunal judiciaire de Meaux a déclaré l'action de Mme [Y] recevable et a ordonné l'examen des empreintes génétiques de cette dernière, de M. [F] [S] et de l'enfant [E] [Y] afin d'établir ou non la paternité de M. [S] à l'égard de l'enfant.

L'expert a déposé son rapport le 26 juillet 2021, lequel conclut à la vraisemblance de la paternité de M. [S].

Le 9 août 2021, M. [F] [S] a reconnu l'enfant devant l'officier d'état civil de la mairie d'[Localité 6].

Par un jugement rendu le 10 juin 2022, le tribunal judiciaire de Meaux a condamné M. [F] [S] à payer à Mme [X] [Y] représentant son fils mineur une somme de 5 000 € en réparation du préjudice moral de celui-ci, condamné M. [F] [S] à payer à Mme [X] [Y] représentant son fils mineur une somme de 3 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile et condamné M. [F] [S] aux dépens de l'instance.

Le tribunal a retenu que M. [F] [S] a commis une faute car il n'a pas exercé les devoirs découlant de son rôle de père après l'avoir reconnu, faute d'avoir entrepris des démarches pour le rencontrer et de verser une contribution pour son entretien et son éducation, et car il n'a pas par ailleurs transmis spontanément sa nouvelle adresse, ce qui traduit une volonté dilatoire de ne pas voir sa paternité établie et est à l'origine d'un préjudice moral pour l'enfant qui était privé de filiation paternelle.

Le 11 juillet 2022, M. [F] [S] a formé appel.

Par ses conclusions notifiées le 13 janvier 2023, M. [F] [S] demande à la cour de réformer partiellement la décision entreprise en ce qu'elle l'a condamné à payer à Mme [Y] ès qualité de représentante légale de son fils mineur [E], la somme de 5 000 euros au titre de dommages et intérêts et celle de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, en conséquence, débouter Mme [X] [Y], ès qualité de représentante légale de son fils [E], de sa demande indemnitaire, la débouter de sa demande sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, et juger que chacune des parties conservera la charge des dépens dont elle a fait l'avance dans le cadre de la présente instance.

Par ses conclusions notifiées le 26 décembre 2022, Mme [X] [Y], en sa qualité de représentante légale de son fils [E], demande à la cour d'infirmer le jugement en ce qu'il a condamné M. [F] [S] à lui payer la somme de 5 000 euros de dommages intérêts en réparation du préjudice moral, statuant à nouveau, condamner M. [F] [S] à payer à la somme de 10 000 euros de dommages et intérêts en réparation du préjudice moral subi, confirmer le jugement pour le surplus, condamner, en cause d'appel, M. [F] [S] à payer à la Selarl Albatangelo Vergonjeanne la somme de 3 000 euros en application des dispositions des articles 700 du code de procédure civile et 37 de la loi du 10 juillet 1991 et condamner, en cause d'appel, M. [F] [S] aux entiers dépens.

Par un avis du 30 mars 2023, le ministère public demande à la cour de confirmer en toutes ses dispositions le jugement du tribunal judiciaire de Meaux en date du 18 juin 2022.

Par une ordonnance du conseiller de la mise en état en date du 30 mars 2023, la clôture a été prononcée.

MOTIFS

Sur la demande de dommages et intérêts

Moyens des parties

M. [F] [S] indique qu'il a dû attendre l'action en recherche de paternité pour que le lien de filiation puisse être vérifié puisqu'il ne pouvait pas lui-même recourir à une expertise biologique hors de toute autorisation judiciaire, que suite au dépôt du rapport d'expertise, il a spontanément reconnu l'enfant. Il soutient que le jugement est critiquable. En premier lieu, aucune faute ne peut lui être imputé, dès lors qu'il ne pouvait pas tisser des liens avec l'enfant en présence d'une procédure judiciaire en cours et eu égard à l'attitude agressive de sa mère, et dès lors qu'il a par la suite demandé la mise en place d'un droit de visite médiatisé et a versé une contribution en dehors de toute condamnation. Il ajoute qu'il ne peut pas lui être reproché de ne pas avoir fourni sa nouvelle adresse, puisqu'il n'avait reçu aucune demande de régularisation, et que par ailleurs le fait de ne pas avoir reconnu spontanément l'enfant n'est pas fautif. En deuxième lieu, il indique qu'on cherche en vain la nature du préjudice de l'enfant puisque c'est sa mère qui a tardé à engager la procédure, et ce d'autant plus que la conception d'un enfant en dehors de tout projet parental avec le père est sans doute encore plus dommageable. En troisième lieu, la demande de dommages et intérêts est préjudiciable à l'intérêt de l'enfant car elle va entretenir le conflit entre les parents et faire obstacle à l'établissement d'un lien avec son père. Il considère que cette demande vise en réalité à réparer le préjudice de la mère, qui s'estime blessée.

Mme [X] [Y], en sa qualité de représentante légale de l'enfant [E] [Y], soutient que M. [F] [S] a eu une attitude fautive depuis le début de la procédure, qu'il l'a en effet présentée comme une femme peu sérieuse, qu'il n'a pas déféré aux convocations de l'expert jusqu'à ce qu'elle ne demande qu'une astreinte soit ordonnée, qu'il a reconnu l'enfant une fois connues les conclusions de l'expertise afin de faire échec à la demande de contribution à l'entretien et à l'éducation de l'enfant, qu'il connaissait pourtant sa paternité, qu'il a ainsi eu une attitude dilatoire pour échapper à ses obligations, qu'il a attendu près d'un an après la reconnaissance pour contribuer à l'entretien et à l'éducation de l'enfant et qu'il se désintéresse totalement de celui-ci. Mme [X] [Y] ajoute que l'enfant a subi un important préjudice moral, puisqu'il grandit sans son père qui l'a pourtant reconnu.

Le ministère public demande la confirmation du jugement.

Règle applicable

L'article 1240 du code civil dispose que « tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer »

Réponse de la cour

En premier lieu, si Mme [X] [Y] indique que M. [F] [S] l'a présentée comme une femme peu sérieuse, cette allégation est sans lien avec le préjudice moral que son fils aurait, selon elle, subi.

En deuxième lieu, elle ne peut pas utilement reprocher à M. [F] [S] de ne pas avoir immédiatement déféré à la convocation par l'expert, alors qu'il s'est en définitive soumis aux opérations d'expertise, ce qu'il ne pouvait pas être au demeurant contraint à faire.

En troisième lieu, Mme [X] [Y] ne peut pas non plus lui reprocher d'avoir tardé à contribuer volontairement à l'entretien et à l'éducation de l'enfant, alors qu'une procédure judiciaire était en cours à ce sujet et qu'il n'est par ailleurs pas contesté qu'il a ensuite payé la contribution dans les conditions prévues par le jugement du tribunal judiciaire de Créteil du 15 décembre 2022.

En quatrième lieu, Mme [X] [Y] ne démontre pas que l'absence de lien établi par M. [F] [S] à l'égard de l'enfant est fautif, alors que l'établissement de la filiation est intervenu suite à une action judiciaire et que le jugement du tribunal judiciaire de Créteil du 15 décembre 2022 a uniquement prévu que le droit de visite et d'hébergement est réservé.

Ainsi, Mme [X] [Y] ne démontre pas l'existence d'une faute imputable à M. [F] [S], de sorte que sa demande de dommages et intérêts ne peut qu'être rejetée.

Le jugement rendu le 10 juin 2022 par le tribunal judiciaire de Meaux est en conséquence infirmé, en toutes ses dispositions.

Sur la demande formée au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991

Mme [X] [Y] succombant, sa demande formée au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 est rejetée.

Sur les dépens

Chaque partie conservera la charge de ses dépens.

PAR CES MOTIFS

Infirme le jugement en toutes ses dispositions ;

Statuant à nouveau,

Déboute Mme [X] [Y] de toutes ses demandes ;

Juge que chaque partie conserve la charge de ses dépens.

LA GREFFIERE LA PRESIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 3 - chambre 5
Numéro d'arrêt : 22/13248
Date de la décision : 27/06/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-06-27;22.13248 ?
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