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13/06/2023 | FRANCE | N°21/12096

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 16, 13 juin 2023, 21/12096


Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS





COUR D'APPEL DE PARIS



POLE 5 - CHAMBRE 16



ARRET DU 13 JUIN 2023



(n° 57 /2023, 10 pages)





Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/12096 - N° Portalis 35L7-V-B7F-CD6OM



Décision déférée à la Cour : sentence du 28 mai 2021 rendue par M. Jean-Pierre Azaïs, président, M. [G] [V], arbitre, et M. [T] [D], arbitre, la Commission d'arbitrage de la confédération généra

le des sociétés coopératives ouvrières de production





DEMANDEUR AU RECOURS :



Monsieur [M] [R]

né le 21 Février 1980 à [Localité 7]

demeurant : [Adr...

Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

POLE 5 - CHAMBRE 16

ARRET DU 13 JUIN 2023

(n° 57 /2023, 10 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/12096 - N° Portalis 35L7-V-B7F-CD6OM

Décision déférée à la Cour : sentence du 28 mai 2021 rendue par M. Jean-Pierre Azaïs, président, M. [G] [V], arbitre, et M. [T] [D], arbitre, la Commission d'arbitrage de la confédération générale des sociétés coopératives ouvrières de production

DEMANDEUR AU RECOURS :

Monsieur [M] [R]

né le 21 Février 1980 à [Localité 7]

demeurant : [Adresse 2]

Ayant pour avocat postulant : Me Frédéric LALLEMENT de la SELARL BDL Avocats, avocat au barreau de PARIS, toque : P0480

Ayant pour avocat plaidant : Me Clémence LEPINE substituant Me WIZMANE, de la SELARL W AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : E223

DEFENDERESSES AU RECOURS :

Madame [S] [U]

née le 07 Août 1989 à [Localité 5]

demeurant : [Adresse 4]

Madame [C] [P]

née le 2 Janvier 1987 à [Localité 6]

demeurant : [Adresse 3]

S.C.O.P. S.A.R.L. GRAINE DE SCOP

société coopérative de production à responsabilité limitée

ayant son siège social : [Adresse 1]

prise en la personne de ses représentants légaux

Ayant pour avocats postulants et plaidants : Me Alexandra BELLET et Me Jeanne MARCHAND de la SELARL BLUEVOX LAWYERS, avocat au barreau de PARIS, toque D 1061

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 20 avril 2023, en audience publique, les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant M. François MELIN, conseiller, faisant fonction de président lors des débats en étant chargé du rapport et Mme Marie-Catherine GAFFINEL, conseillère.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour,composée de :

M. François MELIN, conseiller, faisant fonction de président Mme Marie-Catherine GAFFINEL, conseillère

Mme ALDEBERT, conseillère

Greffier, lors des débats : Mme Mélanie PATE

ARRET :

- contradictoire

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Marie-Catherine GAFFINEL, conseillère et par Madame Najma EL FARISSI, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

* *

*

La société Graine de Scop a été créée par Mme [C] [P], Mme [S] [U] et M. [M] [R]. Les statuts ont été signés le 10 novembre 2017. Chacun d'entre eux a été désigné en qualité de gérant (art. 20 des statuts).

Le 13 décembre 2017, M. [R] s'est porté caution, à hauteur d'une somme de 48 000 euros, au bénéfice du Crédit coopératif, qui a consenti un prêt d'un montant de 400 000 euros à la société.

Mme [P] et Mme [U] ont signé un contrat de travail avec la société, respectivement le 1er février 2019 et le 25 avril 2019.

M. [R] a été exclu de sa qualité d'associé par une décision de l'assemblée générale de la société Graine de Scop du 24 juin 2019.

M. [R] a saisi la Commission d'arbitrage de la confédération des sociétés coopératives ouvrières de production, en demandant notamment qu'il soit jugé que son exclusion de la société est contraire aux statuts et qu'il a été révoqué de son mandant de gérant de manière abusive et vexatoire, en demandant par ailleurs la condamnation de la société à lui payer différentes sommes au titre du remboursement de ses parts, d'un préjudice matériel, d'un préjudice moral et de frais avancés au profit de la société et en demandant que Mme [P] et Mme [U] soient condamnées solidairement à le garantir en cas de mise en jeu du cautionnement.

Par une sentence du 28 mai 2021 rendue par M. [L] [H], président, M. [G] [V], arbitre, et M. [T] [D], arbitre, la Commission d'arbitrage de la confédération générale des sociétés coopératives ouvrières de production a :

- débouté M. [R] de l'ensemble de ses demandes ;

- condamné M. [R] à payer à la société Graine de Scop la somme de 1.357,80 euros ;

- débouté cette société de l'ensemble de ses autres demandes ;

- débouté Mme [U] et Mme [P] de l'ensemble de leurs demandes ;

- dit n'y avoir lieu à l'application de l'article 700 du code de procédure civile

Par une déclaration du 26 juin 2021, M. [R] a formé appel, l'article 43 des statuts de la société qui stipule une clause compromissoire prévoyant que les sentences arbitrales sont susceptibles d'appel devant la cour d'appel de Paris.

Parallèlement à son action devant la commission d'arbitrage, M. [R] a saisi le conseil de prud'hommes de Boulogne-Billancourt, en demandant que soit prononcée la résiliation de son contrat de travail aux torts exclusifs de la société.

Par un jugement de départage du 10 septembre 2021, le conseil :

'' a rejeté l'exception d'incompétence soulevée par la société Graine de Scop ;

'' s'est déclaré compétent pour connaître l'ensemble des demandes formées par M. [R] ;

'' a requalifié la relation de travail entre la société Graine de Scop et M. [R] en un contrat de travail à durée indéterminée à compter du 21 février 2018 ;

'' a fixé le salaire mensuel brut moyen de M. [R] à la somme de 1.688,52 euros ;

'' a dit que la rupture de la collaboration entre la société Graine de Scop et M. [R] intervenue le 24 juin 2019 s'analyse en un licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

'' a condamné la société Graine de Scop à verser à M. [R] les sommes suivantes : 3.377,04 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis, 337,70 euros au titre des congés payés afférents, 562,84 euros à titre d'indemnité légale de licenciement, et 3.3777,04 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

'' a dit que les créances salariales ainsi que la somme allouée à titre d'indemnité de licenciement produiront intérêts au taux légal à compter de la présentation à l'employeur de la lettre le convoquant devant le bureau de conciliation et d'orientation, et que les créances indemnitaires produits intérêts au taux légal à compter du présent jugement conformément aux dispositions des articles 1231-6 et 1231-7 du code civil ;

'' a ordonné la capitalisation des intérêts ;

'' a ordonné à la société Graine de Scop de remettre à M. [R] un certificat de travail, un reçu pour solde de tout compte, un bulletin de salaire récapitulatif et une attestation Pôle emploi dans le mois de la notification du présent jugement ;

'' a dit n'y avoir lieu au prononcé d'une astreinte ;

'' a débouté les parties de toutes leurs autres demandes ;

'' a condamné la société Graine de Scop à verser à M. [R] la somme de 1.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

'' a condamné la société Graine de Scop aux dépens ;

'' a ordonné l'exécution provisoire.

Par des conclusions notifiées le 8 mars 2023, M. [M] [R] demande à la cour de :

- infirmer la sentence arbitrale du 28 mai 2021 sauf en ce qu'elle a débouté la société Graine de Scop de l'ensemble de ses autres demandes ainsi que Mme [U] et Mme [P] de l'ensemble de leurs demandes ;

Statuant à nouveau :

- juger que l'exclusion de M. [R] en qualité d'associé de la société Graine de Scop est contraire à l'article 16.5 des statuts et/ou qu'il a été révoqué de son mandat de gérant en violation des statuts et de manière abusive et vexatoire ;

- condamner la société Graine de Scop à lui payer les sommes de 3.250 euros au titre du remboursement du prix des parts sociales ; 40.000 euros au titre du préjudice matériel ; 15.000 euros au titre du préjudice moral ; 507.44 euros au titre des frais avancés au profit de la société Graine de Scop ;

- juger que Mme [U] et Mme [P] devront solidairement le garantir intégralement en cas de mise en jeu du cautionnement par le Crédit coopératif qu'il a consenti dans la limite de 48.000 euros ;

- condamner in solidum la société Graine de Scop, Mme [U] et Mme [P] à payer la somme 5.000 au titre de la première et instance et à la somme de 5.000 euros au titre des frais de procédure pour les frais engagés par M. [R] au titre de l'appel ainsi qu'aux entiers dépens ;

- débouter la société Graine de Scop, Mme [U] et Mme [P] de l'ensemble de leurs demandes reconventionnelles.

Par des conclusions notifiées le 20 février 2023, la société Graine de Scop, Mme [P] et Mme [U] demandent à la cour de :

- juger la société recevable dans ses demandes, fins et conclusions ;

- confirmer la décision rendue par le tribunal arbitral en ce qu'elle a débouté M. [R] de l'ensemble de ses demandes et condamné celui-ci à payer à la société la somme de 1.357,80 €.

- infirmer la décision rendue par le tribunal arbitral en ce qu'elle a débouté la société de l'ensemble de ses autres demandes, débouté Mme [U] et Mme [P] de l'ensemble de leurs demandes et dit n'y avoir lieu à l'application de l'article 700 du code de procédure civile ;

Statuant à nouveau,

- juger que M. [R] a été exclu à la suite d'une décision motivée prise en assemblée générale extraordinaire, conformément à la procédure prévue par les statuts, à défaut pour Mme [P] et Mme [U], malgré leurs tentatives, d'avoir réussi à trouver un arrangement amiable aux difficultés rencontrées avec M. [R] du fait des fautes de gestion préjudiciables à la société ;

- juger que M . [R] n'était en aucun cas fondé à exiger le remboursement de son compte courant d'associés avant l'échéance de la convention de blocage et qu'en tout état de cause, la somme lui a été remboursée à la date prévue par les statuts, ce qui n'est pas contestée, M. [R] abandonnant toute demande à ce titre ;

- juger que M. [R] est mal fondé à solliciter le remboursement de ses parts sociales avant le délai de 5 ans prévu par les statuts pour rembourser les parts sociales d'un associé exclu et qu'en tout état de cause, la valeur de ses parts sociales s'établit à 0, qu'il a donc déjà été remboursée et que sa demande est infondée ;

- juger que M. [R] doit rembourser la somme de 1.357,80 € correspondant au virement d'une somme non justifiée par celui-ci à son profit ;

- juger que M. [R] doit rembourser la somme de 472,60 € au titre de courses non payées ;

- juger que M. [R] n'a subi aucun préjudice matériel ;

- juger que M. [R] n'a subi aucun préjudice moral ;

- juger que M. [R] ne peut prétendre au remboursement de la somme de 507,40 € au titre des frais avancés au profit de la société, la totalité des frais avancés lui ayant été remboursés et qu'aucune quittance n'est jamais fournie au titre d'avance de frais ;

- juger que M. [R] devra continuer à être solidairement tenu au titre de la caution à hauteur de 48.000 € et que Mme [U] et Mme [P] ne devront pas solidairement le garantir intégralement en cas de mise en jeu du cautionnement qu'il a consenti à hauteur de 48.000 € ;

- juger que la société a subi un préjudice financier et moral du fait des agissements graves de M. [R] durant l'exécution et après son exclusion ;

En conséquence,

- débouter M. [R] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions ;

Et, à titre reconventionnel,

- condamner M. [R] au paiement des sommes de 1.357,80 euros au titre de la restitution de la somme qu'il s'est librement octroyé ; 472,60 euros au titre des courses non payées ; 5.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

MOTIFS

Sur la tenue de l'audience devant la commission d'arbitrage

M. [R] soutient qu'au cours de l'audience tenue par visio-conférences devant la commission d'arbitrage, l'un des arbitres était en liaison par téléphone uniquement et un autre s'est endormi, de sorte que les conditions prévues par l'article 6-1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme n'ont pas été respectées.

Toutefois, la cour relève que M. [R] ne formule aucune demande à ce titre dans le dispositif de ses conclusions.

Sur les demandes d'indemnisation au titre de l'exclusion de M. [R]

Moyens des parties

M. [R] soutient que son exclusion a été décidée avant même la tenue de l'assemblée générale ainsi que cela résulte notamment de messages électroniques du 22 mai 2019, qu'un salarié a d'ailleurs été recruté dès le lendemain de son exclusion pour le remplacer alors pourtant que contrairement aux allégations des intimées, il continuait à travailler après le 22 mai 2019. M. [R] ajoute que son exclusion est injustifiée puisque les statuts prévoient qu'une exclusion ne peut être prononcée qu'en cas de préjudice matériel et moral subi par la société et qu'un tel préjudice n'existe pas en l'espèce. Il précise que les faits qui lui sont imputés par le rapport de gérance ne sont pas établis, que s'il était en désaccord avec ses associées, il était pleinement actif au sein de la société, que les intimées produisent un tableau récapitulatif de ses prétendues absences qui ne sont pourtant pas établies, qu'il était très apprécié des clients. M. [R] demande en conséquence la condamnation de la société à lui payer la somme de 40.000 euros au titre du préjudice matériel et celle de 15.000 euros au titre du préjudice moral.

Les intimées font valoir que l'exclusion de M. [R] de la société était justifiée compte tenu des préjudices financier et moral subis en raison de ses manquements, de ses agissements et de ses fautes de gestion, ainsi que le démontre le rapport de gestion.

Réponse de la cour

Le « rapport de gérance pour la délibération tendant à l'expulsion de M. [R] » impute à ce dernier les faits suivants : une divulgation de discussions entre associés ; un virement bancaire sans justificatif ; une erreur dans l'établissement de contrats ; une erreur dans l'établissement d'une rupture conventionnelle ; une absence de réponse aux candidats ; la responsabilité de la radiation de la société du centre de médecine du travail.

Le procès-verbal de l'assemblée générale du 24 juin 2019 indique, au titre de la première résolution, qu' « après avoir entendu la lecture du rapport de gérance pour la délibération sur l'exclusion de M. [M] [R] et après avoir entendu les arguments et observations de M. [R], l'assemblée générale se prononce sur l'exclusion de M. [R] du sociétariat de Graine de Scop. La résolution est adoptée : 4 voix pour et 1 voix contre. M. [R] conteste cette décision ».

Dans ce cadre, il appartient à la cour de vérifier que l'exclusion de M. [R] n'est pas abusive , étant précisé que l'article 16.5 des statuts relatifs à la perte de la qualité d'associé par l'expulsion stipule que « l'Assemblée Générale, statuant dans les conditions de majorité prévues pour les décisions extraordinaires, peut toujours exclure un associé qui aura causé un préjudice matériel ou moral à la société Société ».

Cette exclusion repose notamment, en premier lieu, sur l'existence d'un virement bancaire d'un montant de 1 357, 80 euros opéré par M. [R] du compte de la société vers son compte personnel. M. [R] admet la réalité de ce virement, qu'il considère comme dû et correspondre à son salaire du mois de mai 2019, versement qui, selon lui, a été confirmé par le jugement du conseil de prud'hommes du 10 septembre 2021. Toutefois, si ce jugement a requalifié la relation de travail entre la société et M. [R] en un contrat de travail à durée indéterminée à compter du 21 février 2018, M. [R] ne peut pas utilement s'en prévaloir pour justifier avoir lui-même procédé à un virement, correspondant à un salaire, du compte bancaire de la société vers le sien au titre du mois de mai 2019 puisqu'il ne bénéficiait pas alors d'un contrat de travail. Le grief adressé à M. [R] est donc justifié, étant relevé que la sentence a condamné à juste titre M. [R] à rembourser cette somme à la société.

L'exclusion repose, en second lieu, sur des erreurs dans l'établissement d'un contrat de travail de salariés de la société en février 2018, erreur faisant encourir un risque de requalification d'un contrat à durée déterminée en contrat à durée indéterminée. Dans ses conclusions, M. [R] conteste de manière générale les griefs qui lui sont adressés et se réfère à son courrier, non daté, établi suite à la tenue de l'assemblée générale qui a décidé de son exclusion (pièce 13). Or, dans ce courrier (page 3), M. [R] indique qu'il n'y a eu aucun préjudice pour la société mais ne conteste pas l'existence même de l'erreur.

L'exclusion a été motivée, en troisième lieu, par une erreur dans l'établissement d'une rupture conventionnelle avec un salarié. Or, dans ce même courrier (pièce n° 13), M. [R] ne conteste pas cette erreur mais précise que « les erreurs arrivent, c'est humain ».

Ainsi, les intimées établissent la réalité des trois principaux griefs imputés à M. [R] par le rapport de gérance. Ces griefs, qui sont à l'origine d'un préjudice matériel au sens de l'article 16.5 des statuts, conduisent à retenir que l'exclusion de M. [R] n'a pas été abusive.

En conséquence, M. [R] ne peut pas utilement demander la condamnation de la société à lui payer la somme de 40.000 euros au titre du préjudice matériel et la somme de 15.000 euros au titre du préjudice moral.

La sentence est donc confirmée en ce qu'elle l'a débouté de ces demandes.

Sur la demande de remboursement du prix des parts sociales

Moyens des parties

M. [R] demande la condamnation de la société au paiement de la somme de 3.250 euros au titre du remboursement du prix des parts sociales en raison de son exclusion abusive de la société. Il soutient que si la huitième (en réalité la neuvième) résolution adoptée par l'assemblée générale de la société le 24 juin 2019 indique que le remboursement aura lieu dans un délai de cinq ans conformément à l'article 18.6 des statuts, le principe de la prééminence de la personne humaine impose un remboursement immédiat.

Les intimées répondent que les statuts de la société prévoient un remboursement dans un délai de cinq ans.

Réponse de la cour

M. [R] a été exclu de sa qualité d'associé par une décision de l'assemblée générale de la société Graine de Scop du 24 juin 2019.

Il résulte des articles 16.1 et 16.5 de statuts de la société que la qualité d'associé se perd par l'exclusion.

L'article 18.6 ajoute que « les anciens associés (...) ne peuvent exiger, avant un délai de cinq ans, le règlement des sommes qui leur sont dues, sauf décision de remboursement anticipé prise par l'assemblée des associés statuant à la majorité ordinaire » et que « le délai court à compter de la date de la perte de la qualité d'associé ».

Au regard de ces stipulations, la demande de remboursement doit être rejetée, comme l'a retenu à juste titre la sentence.

Sur la demande au titre de frais avancés

Moyens des parties

M. [R] soutient qu'il a avancé au profit de la société la somme de 50 euros au titre de frais divers, celle de 110, 90 euros au titre de frais de consommation, celle de 242, 544 euros (sans autre précision) et celle de 104 euros au titre de divers frais liés la gestion. Il demande en conséquence le remboursement de la somme de 507, 44 euros.

Les intimées font valoir que les trois premières de ces sommes sont exactes et ont déjà été remboursées. Elles ne se prononcent pas sur la quatrième.

Réponse de la cour

Les intimées reconnaissent que les sommes de 50 euros au titre de frais divers, de 110, 90 euros au titre de frais de consommation et de 242, 544 euros (sans autre précision) sont dues à M. [R] mais qu' « elles ont été prises en compte dans les comptes » (conclusions p. 39).

Toutefois, si elle se réfère à leur pièce n° 113 (note de frais), elles n'établissent pas avoir rembourser M. [R] à ce titre, alors qu'il résulte de l'article 1352 du code civil que « celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l'extinction de son obligation ». La société est donc condamnée à payer ces sommes à M. [R]. La sentence est infirmée en ce qu'elle a débouté M. [R] de sa demande de condamnation de la société à lui payer les sommes de 50 euros au titre de frais divers, de 110, 90 euros au titre de frais de consommation et de 242, 544 euros.

M. [R] ne justifie pas en revanche de la réalité de la somme de 104 euros dont il demande le paiement, alors qu'en application de l'article 1353, celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver ». La sentence est confirmée de ce chef.

Sur la demande au titre du cautionnement

Moyens des parties

M. [R] indique qu'il s'est engagé en qualité de caution à hauteur de 48 000 euros au bénéfice du Crédit coopératif. Il demande en conséquence la condamnation de Mme [U] et Mme [P], compte tenu de son exclusion abusive de la société, à le garantir intégralement en cas de mise en jeu du cautionnement.

Les intimées répondent que la banque n'ayant pas agi contre M. [R], sa demande de garantie est sans objet.

Réponse de la cour

S'il est constant que M. [R] s'est porté caution de la société au bénéfice du Crédit coopératif, il n'est pas allégué que ce dernier lui a demandé un quelconque paiement à ce titre.

La sentence est donc confirmée en ce qu'elle a débouté M. [R] de sa demande de garantie.

Sur la demande au titre de la somme de 472, 60 euros

Moyens des parties

Les intimées demandent la condamnation de M. [R] à rembourser la somme de 472,60 euros au titre de courses non payées.

M. [R] soutient que la preuve de cette créance n'est pas rapportée.

Réponse de la cour

Les intimées produisent un relevé d'un compte client concernant une personne prénommée [M] (pièces n° 90 et 91).

Ce relevé ne permet toutefois pas d'établir que M. [R] est débiteur de la somme considérée.

La sentence est donc confirmée en ce qu'elle a débouté les intimées de leur demande à ce titre.

Sur les demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile

La sentence est confirmée en ce qu'elle a retenu qu'il n'y a pas lieu de faire application de l'article 700 du code de procédure civile.

Devant la cour, aucun motif pris de l'équité n'impose qu'il en soit fait application.

Sur les dépens

M. [R], qui succombe, est condamné aux dépens.

PAR CES MOTIFS

Confirme la sentence, sauf en ce qu'elle a débouté M. [R] de sa demande de condamnation de la société Graine de Scop à lui payer les sommes de 50 euros au titre de frais divers, de 110, 90 euros au titre de frais de consommation et de 242, 544 euros ;

Statuant à nouveau de ce chef,

Condamne la société Graine de Scop à payer à M. [R] les sommes de 50 euros au titre de frais divers, de 110, 90 euros au titre de frais de consommation et de 242, 544 euros ;

Y ajoutant,

Rejette les demandes formées par les parties au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne M. [R] aux dépens.

La greffière, P/ le Président empêché,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 5 - chambre 16
Numéro d'arrêt : 21/12096
Date de la décision : 13/06/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-06-13;21.12096 ?
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