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08/06/2023 | FRANCE | N°22/19620

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 4 - chambre 9 - a, 08 juin 2023, 22/19620


Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 9 - A



ARRÊT DU 08 JUIN 2023



(n° , 6 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 22/19620 - N° Portalis 35L7-V-B7G-CGXI2



Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 29 novembre 2022 - Conseiller de la mise en état de la Cour d'appel de PARIS - RG n° 22/14647





DEMANDERESSE À LA REQUÊTE



La CAISSE RÃ

‰GIONALE DE CRÉDIT AGRICOLE MUTUEL CENTRE-EST, société coopérative à capital variable, établissement de crédit, société de courtage d'assurances agisssant poursuites et diligences ...

Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 9 - A

ARRÊT DU 08 JUIN 2023

(n° , 6 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 22/19620 - N° Portalis 35L7-V-B7G-CGXI2

Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 29 novembre 2022 - Conseiller de la mise en état de la Cour d'appel de PARIS - RG n° 22/14647

DEMANDERESSE À LA REQUÊTE

La CAISSE RÉGIONALE DE CRÉDIT AGRICOLE MUTUEL CENTRE-EST, société coopérative à capital variable, établissement de crédit, société de courtage d'assurances agisssant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés audit siège

N° SIRET : 399 973 825 00017

[Adresse 1]

[Localité 3]

représentée et assistée de Me Frédérique ETEVENARD, avocat au barreau de PARIS, toque : K0065

ayant pour avocat plaidant Me Bénédicte BURY de la SELEURL B.BURY AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : P0121

DÉFENDEUR AU DÉFÉRÉ

Monsieur [B] [R]

né le 26 décembre 1991 à [Localité 4]

[Adresse 2]

[Localité 4]

représenté par Me Thierry PIERRON de la SELARL CABINET TAIEB - PIERRON, avocat au barreau de PARIS, toque : D0831

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 19 avril 2023, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Mme Fabienne TROUILLER, Conseillère, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Mme Bénédicte PRUVOST, Présidente de chambre pour Mme Muriel DURAND, Présidente de chambre empêchée

Mme Fabienne TROUILLER, Conseillère

Mme Laurence ARBELLOT, Conseillère

Greffière, lors des débats : Mme Camille LEPAGE

ARRÊT :

- CONTRADICTOIRE

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Mme Bénédicte PRUVOST, Présidente de chambre pour Mme Muriel DURAND, Présidente de chambre empêchée et par Mme Camille LEPAGE, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Le 3 juillet 2017, M. [B] [R] a signé un bon de commande auprès de la société France Pac Environnement, correspondant notamment à la fourniture et à l'installation d'un système de production d'électricité d'origine photovoltaïque, ainsi qu'un chauffe-eau thermodynamique, financés à hauteur de 22 500 euros remboursables après un report de six mois en 144 mensualités d'un montant de 240,88 euros, moyennant un taux nominal effectif global de 5,96 %.

Par un contrat de prêt accessoire à une vente accepté par M. [R] le 21 juillet 2017, la société Franfinance a financé l'opération à hauteur de 22 500 euros remboursables après un report de six mois en 12 mensualités d'un montant de 113 euros puis 126 mensualités de 245,72 euros, moyennant un taux débiteur fixe de 5,80 % et un taux nominal annuel effectif global de 5,96 %.

Les panneaux ont été installés et la société Franfinance a versé les fonds le 30 août 2017 à la société France Pac Environnement après production d'une attestation de livraison en date du 23 août 2017 et de l'accord donné par M. [R] par courriel du 29 août 2017.

Suivant offre de contrat en date du 7 décembre 2017, la société Crédit régional Agricole Mutuel Centre-Est (la société CRCAM) a consenti à M. [R] un crédit à la consommation d'un montant de 22 500 euros, remboursable en 143 mensualités de 168,74 euros et une mensualité de 168,75 euros, moyennant un taux d'intérêt annuel nominal de 1,29 % et un taux annuel effectif global de 1,94 %. Les fonds ont été versés sur le compte de M. [R] le 12 janvier 2018.

Le 11 octobre 2018, M. [R] a procédé au remboursement intégral du crédit souscrit avec la société Franfinance.

Saisi le 3 mars 2020 par M. [R] d'une demande tendant principalement à l'annulation du contrat de vente, du contrat de crédit affecté et du contrat de prêt, le tribunal de proximité de Villejuif par un jugement réputé contradictoire rendu le 13 juin 2022 auquel il convient de se reporter, a :

- ordonné la jonction des procédures,

- dit la demande de suspension du prêt souscrit avec la CRCAM sans objet,

- rejeté la fin de non-recevoir tirée de l'absence de déclaration de créance,

- prononcé la nullité du contrat de vente,

- prononcé la nullité du contrat de crédit conclu entre M. [R] et la société Franfinance,

- fait injonction à la société S21Y, en qualité de liquidateur judiciaire de la société France Pac Environnement de procéder à la dépose et à la reprise des panneaux photovoltaïques installés au domicile de M. [R] situé [Adresse 2], dans un délai de deux mois après la signification du jugement,

- dit qu'à défaut d'intervention dans ce délai, M. [R] pourra disposer comme bon lui semble de ladite installation,

- débouté M. [R] de sa demande relative à la remise en état du toit,

- constaté que M. [R] a procédé à un remboursement de 23 152,92 euros le 11 octobre 2018 au titre du crédit affecté en date du 21 juillet 2017,

- condamné la société Franfinance à procéder à la restitution de la somme de 652,92 euros,

- débouté M. [R] de sa demande en nullité du contrat de crédit conclu entre lui et la société CRCAM,

- prononcé la déchéance totale du droit aux intérêts de la société CRCAM,

- débouté M. [R] de sa demande de dommages et intérêts,

- débouté M. [R] du surplus de ses demandes,

- débouté la société Franfinance du surplus de ses demandes,

- condamné la société Franfinance à régler à M. [R] une somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- débouté la société CRCAM de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné la société Franfinance aux dépens.

Après avoir ordonné la jonction des procédures, le tribunal a vérifié la recevabilité de l'action eu égard à la liquidation judiciaire de cette dernière.

Faisant application des articles L. 221-9, L. 221-5-1, L. 111-1, L. 242-1 du code de la consommation le tribunal a considéré que le bon de commande produit par M. [R] n'était pas conforme aux exigences du code de la consommation prescrites à peine de nullité notamment en ce qui concerne les caractéristiques du bien ou service, le prix et la date de livraison. Il a estimé ensuite qu'aucun élément ne démontrait que M. [R] ait confirmé la nullité du contrat en signant l'attestation de livraison et en payant les échéances du prêt. Sur le fondement de l'article L. 312-55, il a considéré que la nullité du contrat de vente entraînait la nullité du contrat de crédit affecté.

Il a rejeté la demande de nullité du crédit conclu avec la société CRCAM au motif que M. [R] ne démontrait pas l'existence d'une opération commerciale unique entre ce crédit et le bon de commande. Toutefois, en application des articles L. 341-1 et L. 312-12 du code de la consommation il a prononcé la déchéance du droit aux intérêts au motif que la banque ne justifiait pas de la fiche d'informations précontractuelles, du justificatif des explications fournies à l'emprunteur et du justificatif de vérification de solvabilité.

En dernier lieu, le tribunal a estimé que M. [R] ne démontrait pas de préjudice en lien avec une quelconque faute de la société Franfinance et a rejeté la demande de remise en état de la toiture.

Par une déclaration en date du 2 août 2022, la société CRCAM Centre-Est a interjeté appel du jugement.

Par une ordonnance d'irrecevabilité rendue le 29 novembre 2022, le conseiller de la mise en état a constaté l'irrecevabilité de l'appel à défaut d'acquittement du droit prévu à l'article 1635 bis P du code général des impôts.

Par requête aux fins de déféré de l'ordonnance d'irrecevabilité remise le 30 novembre 2022 à la cour, le conseil de la société CRCAM demande à la cour :

- de déclarer recevable, justifier et bien fondé le déféré,

- de rétracter et d'infirmer l'ordonnance d'irrecevabilité du 29 novembre 2022,

- de dire recevable son appel,

- de dire que le droit d'acquittement a été réglé le 30 novembre 2022,

- de mettre les dépens à la charge du trésor public.

Par conclusions remises le 22 mars 2023, la société CRCAM soutient ne pas avoir reçu l'avis l'invitant à régler les taxes fiscales, que la jurisprudence de la chambre est de rétracter la décision d'irrecevabilité lors du paiement dudit timbre, que les délais n'étaient pas expirés, que devant les autres chambres de la cour d'appel, il est possible de payer les taxes juste avant les plaidoiries et que la cour de cassation accepte la régularisation du timbre fiscal jusqu'à ce que le juge statue.

L'affaire a été appelée à l'audience du 19 avril 2023.

MOTIFS DE LA DÉCISION

La requête en déféré, introduite dans les 15 jours de l'ordonnance, est recevable.

Selon l'article 1635 bis P du code général des impôts, dans sa rédaction issue de la loi 2014-1654 du 29 décembre 2014, applicable au litige, il est institué un droit d'un montant de 225 euros dû par les parties à l'instance d'appel lorsque la constitution d'avocat est obligatoire devant la cour d'appel qui n'est pas dû par la partie bénéficiaire de l'aide juridictionnelle.

L'auteur de l'appel principal en justifie lors de la remise de sa déclaration d'appel et les autres parties lors de la remise de leur acte de constitution par l'apposition de timbres mobiles ou par la remise d'un justificatif lorsque le droit pour l'indemnisation de la profession d'avoué a été acquitté par voie électronique. En cas de requête conjointe, les appelants justifient de l'acquittement du droit lors de la remise de leur requête.

L'irrecevabilité, que les parties ne peuvent pas soulever elles-mêmes, mais que la cour se doit donc de relever d'office, ne peut être prononcée sans que celles-ci aient été mises en mesure de s'expliquer ou qu'un avis du greffe les ait au préalable invitées à justifier du paiement du droit.

En l'espèce, contrairement à ce que soutient l'appelant, les vérifications effectuées sur le RPVA établissent que le greffe a notifié le 13 octobre 2022 à 16h25 à Maître [Y], constituée le 2 août 2022 pour la société CRCAM, un avis d'avoir à s'acquitter du droit de timbre ou de justifier du dépôt d'une demande d'aide juridictionnelle dans un délai d'un mois à compter du présent avis, lequel précisait exactement ce qui suit :

« AVIS APPELANT

En application des articles 963 et 964 du code de procédure civile, les parties justifient, à peine d'irrecevabilité de l'appel ou des défenses, selon le cas, de l'acquittement du droit prévu à l'article 1635 bis P du code général des impôts; sauf en cas de demande d'aide juridictionnelle, l'auteur de l'appel principal en justifie lors de la remise de sa déclaration d'appel; l'irrecevabilité est constatée d'office, le juge pouvant statuer sans débat.

Vous n'avez pas acquitté cette contribution jusqu'à aujourd'hui ; en conséquence, la présidente avant de prononcer l'irrecevabilité, vous invite à adresser au greffe dans un délai d'un mois à compter du présent avis :

- le timbre fiscal en utilisant l'événement 'Timbre dématérialisé',

- le récépissé du dépôt d'un dossier d'aide juridictionnelle délivré par le service du BAJ en utilisant l'événement ' Décision d'AJ en cours',

- la décision d'aide juridictionnelle en utilisant l'événement 'Décision D'aj'.

À défaut, l'irrecevabilité de vos conclusions sera constatée d'office par une ordonnance qui sera rendue le mardi suivant l'expiration du délai accordé.

MERCI DE NE PAS RÉPONDRE DIRECTEMENT A CE MESSAGE ET D'UTILISER LES ÉVÉNEMENTS INDIQUÉS CI-DESSUS À PEINE DE REJET DE VOTRE MESSAGE

P/ Le magistrat en charge de la mise en état ».

Il ressort du même historique que ce courrier a été reçu par Me [Y] le 13 octobre 2022 à 16h18.

L'article 963 en son alinéa premier prévoit que la sanction en cas de non-justification de l'acquittement du timbre, est l'irrecevabilité de l'appel ou des défenses, de sorte qu'en déclarant l'intimé constitué irrecevable à conclure, le conseiller de la mise en état n'a en rien outrepassé ses pouvoirs mais a fait une exacte application desdites dispositions. Il n'y a donc pas lieu à annulation de la décision déférée.

Il résulte de l'article 964 du code de procédure civile que l'irrecevabilité peut être prononcée sans débat à moins que les parties aient été convoquées ou citées à comparaître à une audience mais que dans ce cas, la décision peut être rapportée en cas d'erreur dans le délai de quinze jours suivant la décision.

L'avis adressé par le greffe électroniquement indique très clairement qu'il a été adressé pour le compte du conseiller de la mise en état désigné régulièrement suivant décision du même jour portée à la connaissance des parties, de sorte qu'il n'encourt aucune irrégularité.

À cet égard, il ne saurait être tenu pour règle que certains greffes de cette même cour acceptent des régularisations tardives, alors que ces greffes n'ont pas été en mesure d'adresser plus tôt l'avis d'avoir à régulariser le paiement du timbre dans le délai d'un mois.

De surcroît, dès lors qu'un avis du greffe a été envoyé, il n'y avait pas lieu d'inviter les parties à fournir des explications lors d'une audience.

La cour constate que la société CRCAM n'a pas non plus sollicité que l'ordonnance soit rapportée pour cause d'erreur mais a déféré l'ordonnance devant la cour. Le moyen tiré d'une violation du principe de la contradiction est donc infondé.

L'avocat de la société CRCAM fait encore valoir qu'il a régularisé le paiement du timbre peu de temps après l'ordonnance, soit le 30 novembre 2022, précisément le jour où l'ordonnance du 29 novembre 2022 a été portée à sa connaissance.

En application de l'article 126 du code de procédure civile, la fin de non-recevoir peut-être régularisée jusqu'au jour où le juge statue.

Ceci doit s'entendre du jour où le juge statue sur la recevabilité du fait du défaut d'acquittement de ce droit.

La régularisation postérieure à la décision d'irrecevabilité n'est pas possible s'agissant d'une fin de non-recevoir et l'absence de préjudice est indifférent.

En l'espèce, la réception de l'avis envoyé par le greffe le 13 octobre 2022 n'a pas été contestée. Le conseiller de la mise en état a rendu une décision d'irrecevabilité le 29 novembre 2022 notifiée le 30 novembre 2022 par le greffe aux conseils des deux parties.

Contrairement à ce que soutient la société CRCAM, l'acquittement du timbre est intervenu postérieurement à l'ordonnance par laquelle le juge a statué.

La société CRCAM soutient encore que cette décision est contraire au principe d'égalité de traitement du justiciable puisque d'autres chambres acceptent des régularisations tardives.

Dans sa décision n° 2012-231/234 QPC du 13 avril 2012, le Conseil Constitutionnel a dit que ce droit fixe d'appel est conforme à la Constitution dès lors qu'il ne porte pas une atteinte disproportionnée au droit d'exercer un recours effectif devant une juridiction ou aux droits de la défense et n'entraîne pas de rupture caractérisée de l'égalité devant les charges publiques.

Tant la Cour européenne des droits de l'homme et libertés fondamentales que la Cour de cassation ont retenu que cette fin de non-recevoir ne portait pas atteinte aux règles du procès équitable, de sorte que le grief est infondé.

En appliquant régulièrement et strictement les dispositions susvisées, il n'est nullement porté atteinte à l'égalité de traitement des justiciables, quand bien même la charge de certains services ne leur a pas permis de procéder, dès le début de la procédure d'appel, à la vérification du respect de ces diligences. Il est rappelé à ce titre que les obligations relatives au paiement du droit du timbre s'appliquent à tous justiciables et s'imposent d'elles-mêmes, sans que les textes n'aient entendu conférer au greffier la charge de réclamer indéfiniment leur exécution aux parties défaillantes.

La décision du conseiller de la mise en état qui a déclaré la société CRCAM irrecevable à conclure doit donc être confirmée.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Statuant par arrêt contradictoire et en dernier ressort,

Confirme l'ordonnance du conseiller de la mise en état du 29 novembre 2022 ;

Condamne la société CRCAM Centre-Est aux dépens du déféré.

La greffière La présidente


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 4 - chambre 9 - a
Numéro d'arrêt : 22/19620
Date de la décision : 08/06/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-06-08;22.19620 ?
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