La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

01/06/2023 | FRANCE | N°21/17750

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 4 - chambre 9 - a, 01 juin 2023, 21/17750


Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 9 - A



ARRÊT DU 01 JUIN 2023



(n° , 7 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/17750 - N° Portalis 35L7-V-B7F-CEOXR



Décision déférée à la Cour : Jugement du 26 août 2021 - Juge des contentieux de la protection de MONTREUIL SOUS BOIS - RG n° 11-21-000192





APPELANTE



La société SOGEFINANCEMENT,

société par actions simplifiée, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés ès-qualités audit siège

N° SIRET : 394 352 272 00022

[Adresse 5]

[Adre...

Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 9 - A

ARRÊT DU 01 JUIN 2023

(n° , 7 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/17750 - N° Portalis 35L7-V-B7F-CEOXR

Décision déférée à la Cour : Jugement du 26 août 2021 - Juge des contentieux de la protection de MONTREUIL SOUS BOIS - RG n° 11-21-000192

APPELANTE

La société SOGEFINANCEMENT, société par actions simplifiée, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés ès-qualités audit siège

N° SIRET : 394 352 272 00022

[Adresse 5]

[Adresse 5]

[Localité 3]

représentée et assistée de Me Sébastien MENDES GIL de la SELAS CLOIX & MENDES-GIL, avocat au barreau de PARIS, toque : P0173

INTIMÉE

Madame [R] [Y]

née le [Date naissance 1] 1993 à [Localité 4] (93)

[Adresse 2]

[Localité 4]

DÉFAILLANTE

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 11 avril 2023, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Mme Muriel DURAND, Présidente de chambre chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Mme Muriel DURAND, Présidente de chambre

Mme Fabienne TROUILLER, Conseillère

Mme Laurence ARBELLOT, Conseillère

Greffière, lors des débats : Mme Camille LEPAGE

ARRÊT :

- DÉFAUT

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Mme Muriel DURAND, Présidente et par Mme Camille LEPAGE, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Selon offre préalable acceptée le 30 janvier 2015, la société Sogefinancement a consenti à Mme [R] [Y] un crédit personnel d'un montant en capital de 11 845 euros remboursable en 84 mensualités de 181,10 euros hors assurance incluant les intérêts au taux nominal de 7,40 %, le TAEG s'élevant à 7,99 %, soit une mensualité avec assurance de 185,61 euros.

Le 20 novembre 2018, ce crédit a été aménagé pour la somme de 6 933,98 euros devant être remboursée par 55 mensualités de 153,55 euros (assurance comprise) à compter du 15 janvier 2019.

Plusieurs échéances n'ayant pas été honorées, la société Sogefinancement a entendu se prévaloir de la déchéance du terme.

Par acte du 23 mars 2021, la société Sogefinancement a fait assigner Mme [Y] devant le tribunal de proximité de Montreuil-sous-Bois en paiement du solde du prêt, lequel par jugement réputé contradictoire du 26 août 2021, a déclaré la société Sogefinancement recevable en son action mais l'a déchue de son droit aux intérêts contractuels et a condamné Mme [Y] au paiement de la somme de 1 995,17 euros avec intérêts au taux légal non majoré à compter de la signification de la décision, aux dépens et 100 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Après avoir contrôlé la recevabilité de la demande au regard de la forclusion et pour prononcer la déchéance du droit aux intérêts contractuels, le tribunal a retenu que la solvabilité de l'emprunteur n'avait pas été suffisamment vérifiée, la banque ne produisant pas de pièces justificatives de ses revenus et charges et n'ayant pas respecté les dispositions de l'article L. 311-9 du code de la consommation.

Il a déduit les sommes versées soit 9 849,93 euros du capital emprunté et a relevé que pour assurer l'effectivité de la sanction il fallait écarter l'application des dispositions relatives à la majoration de plein droit du taux légal de 5 points.

Par déclaration réalisée par voie électronique le 11 octobre 2021, la société Sogefinancement a interjeté appel de cette décision.

Aux termes de ses conclusions déposées par voie électronique le 11 janvier 2022, la société Sogefinancement demande à la cour :

- d'infirmer le jugement sauf en ce qu'il l'a déclarée recevable en sa demande et a condamné Mme [Y] aux dépens,

- de déclarer irrecevables les moyens visant à faire prononcer la déchéance du droit aux intérêts au regard du délai de prescription quinquennal, et subsidiairement de rejeter le moyen tiré de la déchéance du droit aux intérêts contractuels,

- de constater que la déchéance du terme a été prononcée, subsidiairement de prononcer la résiliation judiciaire du contrat de crédit au vu des manquements de l'emprunteur dans son obligation de rembourser les échéances du crédit et fixer la date des effets de la résiliation au 10 janvier 2017,

- en tout état de cause, de condamner Mme [Y] à lui payer la somme de 6 455,49 euros avec intérêts au taux contractuel de 7,40 % l'an à compter du 11 juillet 2020 sur la somme de 6 450,36 euros et au taux légal pour le surplus,

- subsidiairement en cas de déchéance du droit aux intérêts, de condamner Mme [Y] à lui payer la somme de 2 255,12 euros avec intérêts au taux légal à compter du 20 août 2020,

- en tout état de cause de condamner Mme [Y] à lui payer la somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et les dépens avec distraction au profit de Selas Cloix & Mendes Gil.

S'agissant de la prescription, elle fait valoir que celle-ci s'applique à toutes les demandes qu'elles soient formées par voie d'action ou par voie d'exception, que la demande de déchéance du droit aux intérêts est bien une demande puisqu'elle vise à compenser les intérêts avec la créance et que cette prescription s'applique aussi bien aux parties qu'au juge qui ne peut avoir plus de droits que les parties elles-mêmes. Elle se prévaut de l'article L. 110-4 du code de commerce dans sa version applicable après l'entrée en vigueur de la loi du 17 juin 2008, laquelle a réduit ce délai à 5 ans et soutient que les arguments soulevés au titre d'une déchéance du droit aux intérêts contractuels pour irrégularité du formalisme précontractuel ou du formalisme contractuel ne pouvaient donc être invoqués que jusqu'au 30 janvier 2020.

S'agissant de la vérification de solvabilité, elle indique qu'elle avait produit la fiche de dialogue démontrant qu'elle a bien respecté ses obligations à cet égard et que dès lors que le contrat a été conclu en agence, les dispositions de l'article L. 311-10 ne s'appliquent pas et qu'elles sont les seules à poser l'exigence de pièces justificatives dont la liste est fixée par décret. Elle souligne qu'elle a consulté le FICP.

Aucun avocat ne s'est constitué pour Mme [Y] à qui la déclaration d'appel a été signifiée par acte du 6 décembre 2021 délivré à étude et les conclusions par acte du 10 février 2022 délivré à étude.

Pour un plus ample exposé des faits, moyens et prétentions de l'appelante, il est renvoyé aux écritures de celle-ci conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 28 février 2023 et l'affaire a été appelée à l'audience le 11 avril 2023.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Selon l'article 472 du code de procédure civile, lorsque le défendeur ne comparaît pas, il est néanmoins statué sur le fond, le juge ne fait droit à la demande que s'il l'estime régulière, recevable et bien fondée.

Il résulte de l'article 954 dernier alinéa du code de procédure civile que la partie qui ne conclut pas ou qui, sans énoncer de nouveaux moyens, demande la confirmation du jugement est réputée s'en approprier les motifs.

Sur la demande en paiement

Le présent litige est relatif à un crédit souscrit le 30 janvier 2015 soumis aux dispositions de la loi n° 2010-737 du 1er juillet 2010 de sorte qu'il doit être fait application des articles du code de la consommation dans leur rédaction en vigueur après le 1er mai 2011 et leur numérotation antérieure à l'ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016 et au décret n° 2016-884 du 29 juin 2016.

Sur la forclusion

La recevabilité de l'action de la société Sogefinancement au regard de la forclusion, vérifiée par le premier juge, ne fait pas l'objet de contestation.

Sur la déchéance du droit aux intérêts

Le premier juge a soulevé d'office un ou plusieurs moyens susceptibles d'entraîner la déchéance du droit aux intérêts, ce à quoi cette dernière objecte que ces moyens sont prescrits.

La société Sogefinancement soutient que le juge du fond ne pouvait soulever d'office le 17 juin 2021 le moyen tiré de la déchéance du droit aux intérêts contractuels au regard du délai de prescription quinquennale ayant commencé à courir à la date d'acceptation de l'offre et devant se terminer au 30 janvier 2020.

La prescription est sans effet sur l'invocation d'un moyen qui tend non pas à l'octroi d'un avantage, mais seulement à mettre en échec une prétention adverse.

C'est ainsi que, défendant à une action en paiement du solde d'un crédit à la consommation, l'emprunteur peut opposer tout moyen tendant à faire rejeter tout ou partie des prétentions du créancier par application d'une disposition du code de la consommation prévoyant la déchéance du droit aux intérêts, sans se voir opposer la prescription, pour autant qu'il n'entende pas en obtenir un autre avantage tel le remboursement d'intérêts indûment acquittés.

Dans le rôle qui lui est conféré tant par l'article L. 141-4 (devenu R. 632-1) du code de la consommation que par le droit européen, le juge peut relever d'office, sans être enfermé dans un quelconque délai, toute irrégularité qui heurte une disposition d'ordre public de ce code.

En l'espèce, le moyen soulevé d'office par le premier juge et susceptible de priver le prêteur de son droit aux intérêts contractuels n'a pas pour effet de conférer à l'emprunteur un avantage autre qu'une minoration de la créance dont la société Sogefinancement poursuit le paiement.

Loin de constituer un remboursement des intérêts acquittés par le jeu d'une compensation qui supposerait une condamnation -qui n'est pas demandée- de l'organisme de crédit à payer une dette réciproque, ces moyens ne peuvent avoir pour seul effet que de modifier l'imputation des paiements faits par l'emprunteur.

En conséquence, il convient d'écarter la fin de non-recevoir soulevée par la société Sogefinancement.

S'agissant de la vérification de solvabilité que le premier juge a considérée comme insuffisante, il convient de rappeler que l'article L. 311-9 (devenu L. 312-16) du code de la consommation impose au prêteur avant de conclure le contrat de crédit, de vérifier la solvabilité de l'emprunteur à partir d'un nombre suffisant d'informations y compris des informations fournies par ce dernier à la demande du prêteur et de consulter le fichier prévu à l'article L. 333-4 (devenu L. 751-1), dans les conditions prévues par l'arrêté mentionné à l'article L. 333-5 (devenu L. 751-6).

Il résulte de l'article L. 311-48 al.2 (devenu L. 341-2) que lorsque le prêteur n'a pas respecté les obligations fixées aux articles L. 311-8 et L. 311-9 (devenus L. 312-14 et L. 312-16), il est déchu du droit aux intérêts, en totalité ou dans la proportion fixée par le juge.

Le contrat a été conclu en agence. Dès lors, les dispositions de l'article L. 311-10 du même code (devenu L. 312-17) qui obligent à une vérification renforcée de la solvabilité lorsque le crédit est supérieur à 3 000 euros ne s'appliquent pas.

La société Sogefinancement produit devant la cour une fiche « charges ressources » qui mentionne les revenus de Mme [Y] à hauteur de 1 100 euros par mois et des crédits pour 288 euros par mois avant le nouveau contrat destiné à regrouper les crédits précédents en sus des éléments relatifs à la vie quotidienne mais aussi l'avis d'imposition 2014 sur les revenus 2013 et les bulletins de salaires des mois de novembre et décembre 2014 et janvier 2015.

Elle démontre en outre avoir consulté le FICP avant la remise des fonds et produit le résultat de cette consultation.

Elle justifie ainsi avoir vérifié la solvabilité de Mme [Y] à partir d'un nombre suffisant d'informations au sens de ce texte et n'encourt pas la déchéance du droit aux intérêts pour ce motif.

La société Sogefinancement produit en outre :

- le contrat de prêt et l'avenant de réaménagement,

- la fiche d'informations précontractuelles européennes normalisées,

- la notice d'assurance, et la fiche de synthèse des garanties.

Aucune déchéance du droit aux intérêts contractuels n'est donc encourue et le jugement doit donc être infirmé.

Sur le montant des sommes dues

En application de l'article L.311-24 du code de la consommation (devenu L. 312-39) en cas de défaillance de l'emprunteur, le prêteur peut exiger le remboursement immédiat du capital restant dû, majoré des intérêts échus mais non payés. Jusqu'à la date du règlement effectif, les sommes restant dues produisent les intérêts de retard à un taux égal à celui du prêt. En outre, le prêteur peut demander à l'emprunteur défaillant une indemnité qui, dépendant de la durée restant à courir du contrat et sans préjudice de l'application des articles 1152 et 1231 (de l'article 1231-5 du code civil), est fixée suivant un barème déterminé par décret.

L'article D. 311-6 devenu D. 312-16 du même code dispose que le prêteur peut demander une indemnité égale à 8 % du capital restant dû à la date de défaillance. Aucune autre pénalité notamment de retard ne peut être exigée par le prêteur.

La société Sogefinancement produit en sus de l'offre de contrat de crédit qui comporte une clause de déchéance du terme, l'historique de prêt, les tableaux d'amortissement, la mise en demeure avant déchéance du terme du 10 mars 2020 enjoignant à Mme [Y] de régler l'arriéré de 502,35 euros sous 15 jours à peine de déchéance du terme et celle notifiant la déchéance du terme du 20 août 2020 portant mise en demeure de payer le solde du crédit et un décompte de créance.

Il en résulte que la société Sogefinancement se prévaut de manière légitime de la déchéance du terme du contrat et de l'exigibilité des sommes dues et qu'elle est fondée à obtenir paiement des sommes dues à la date de déchéance du terme soit :

- 1 074,85 euros au titre des échéances impayées assurance comprise

- 4 917,26 euros au titre du capital restant dû

- 5,13 euros au titre des intérêts échus

soit un total de 5 997,24 euros majorée des intérêts au taux de 7,40 % à compter du 20 août 2020 sur la seule somme de 5 992,11 euros.

Elle est en outre fondée à obtenir une indemnité de résiliation de 8 % laquelle, sollicitée à hauteur de 458,25 euros, apparaît excessive d'autant que dans le cadre du réaménagement des indemnités de même nature ont déjà été prises en compte et doit être réduite à la somme de 50 euros et produire intérêts au taux légal à compter du 20 août 2020.

La cour condamne donc Mme [Y] à payer ces sommes à la société Sogefinancement.

Sur les autres demandes

Le jugement doit être confirmé en ce qu'il a condamné Mme [Y] aux dépens de première instance et a rejeté la demande de la société Sogefinancement sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile. En revanche rien ne justifie de la condamner aux dépens d'appel, alors que n'ayant jamais été représentée ni en première instance, ni en appel, elle n'a jamais fait valoir aucun moyen ayant pu conduire le premier juge à statuer comme il l'a fait. La société Sogefinancement conservera donc la charge de ses dépens d'appel et de ses frais irrépétibles.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Statuant par arrêt rendu par défaut et en dernier ressort,

Infirme le jugement sauf en ce qu'il a déclaré la demande de la société Sogefinancement recevable, a condamné Mme [R] [Y] aux dépens'et a rejeté la demande sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

Statuant à nouveau et y ajoutant,

Dit n'y avoir lieu à déchéance du droit aux intérêts contractuels ;

Condamne Mme [R] [Y] à payer à la société Sogefinancement les sommes de 5 997,24 euros majorée des intérêts au taux de 7,40 % à compter du 20 août 2020 sur la seule somme de 5 992,11 euros au titre du solde du prêt et de 50 euros majorée des intérêts au taux légal à compter du 20 août 2020 au titre de l'indemnité légale de résiliation ;

Laisse les dépens d'appel à la charge de la société Sogefinancement ;

Rejette toute demande plus ample ou contraire.

La greffière La présidente


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 4 - chambre 9 - a
Numéro d'arrêt : 21/17750
Date de la décision : 01/06/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-06-01;21.17750 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award