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01/06/2023 | FRANCE | N°20/05242

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 4 - chambre 9 - a, 01 juin 2023, 20/05242


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 4 - Chambre 9 - A



ARRÊT DU 01 JUIN 2023



(n° , 10 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 20/05242 - N° Portalis 35L7-V-B7E-CBVJA



Décision déférée à la Cour : Jugement du 31 décembre 2019 - Tribunal d'Instance de LONGJUMEAU - RG n° 11-18-001647





APPELANTE



La société SOLFINEA, anciennement dénommée BANQUE SOLFEA, société anonyme à c

onseil d'administration, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés audit siège en cette qualité

N° SIRET : 562 059 832 00138

[Adresse 2]

[Localité 6]



représ...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 9 - A

ARRÊT DU 01 JUIN 2023

(n° , 10 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 20/05242 - N° Portalis 35L7-V-B7E-CBVJA

Décision déférée à la Cour : Jugement du 31 décembre 2019 - Tribunal d'Instance de LONGJUMEAU - RG n° 11-18-001647

APPELANTE

La société SOLFINEA, anciennement dénommée BANQUE SOLFEA, société anonyme à conseil d'administration, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés audit siège en cette qualité

N° SIRET : 562 059 832 00138

[Adresse 2]

[Localité 6]

représentée par Me Sébastien MENDES GIL de la SELAS CLOIX & MENDES-GIL, avocat au barreau de PARIS, toque : P0173

substitué à l'audience par Me Christine LHUSSIER de la SELAS CLOIX & MENDES-GIL, avocat au barreau de PARIS, toque : P0173

INTIMÉS

Madame [K] [D] veuve [R]

née le 16 janvier 1944 à [Localité 1] (01)

[Adresse 4]

[Localité 1]

Maître [I] [G] en qualité de liquidateur judiciaire de la société FRANCE SOLAIRE ÉNERGIES (SA)

[Adresse 3]

[Adresse 3]

[Localité 5]

DÉFAILLANTE

PARTIE INTERVENANTE

La SELARL [W] [F], en qualité de mandataire ad hoc de FRANCE SOLAIRE ÉNERGIES, représentée par Me [W] [F]

[Adresse 3]

[Adresse 3]

[Localité 5]

DÉFAILLANTE

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 5 avril 2023, en audience publique, devant la Cour composée de :

Mme Muriel DURAND, Présidente de chambre

Mme Fabienne TROUILLER, Conseillère chargée du rapport

Mme Laurence ARBELLOT, Conseillère

qui en ont délibéré

Greffière, lors des débats : Mme Camille LEPAGE

ARRÊT :

- DÉFAUT

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Mme Muriel DURAND, Présidente et par Mme Camille LEPAGE, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Le 15 avril 2013, à la suite d'un démarchage à domicile, Mme [K] [D] veuve [R] a signé auprès de la société France Solaire Énergies un bon de commande portant sur une installation photovoltaïque de production d'électricité pour un montant de 18 000 euros.

Le même jour, Mme [R] a signé un contrat de crédit affecté au titre de ladite installation auprès de la société Solfinéa anciennement dénommée Banque Solfea, pour la somme de 18 000 euros au taux débiteur fixe de 5,60 % remboursable en 132 mensualités de 253,98 euros chacune, assurance inclue, payables avec un différé de 11 mois.

Le 30 avril 2013, Mme [R] a signé une attestation de fin de travaux et les fonds ont été débloqués auprès du vendeur.

L'installation a été raccordée le 1er juillet 2014. Elle est fonctionnelle et productrice d'électricité depuis cette date.

Le 2 janvier 2014, Mme [R] a procédé au remboursement anticipé du prêt.

La société France Solaire Énergies a été placée en redressement judiciaire par jugement du 20 juillet 2015 puis en liquidation judiciaire par jugement du 21 septembre 2015 désignant Me [I] [G] en qualité de liquidateur.

Saisi le 13 avril 2018 par Mme [R] d'une demande tendant principalement à l'annulation du contrat de vente et du crédit affecté, le tribunal d'instance de Longjumeau par un jugement réputé contradictoire du 31 décembre 2019 auquel il convient de se reporter, a :

- rejeté la fin de non-recevoir soulevée par la société Solfinéa anciennement dénommée Banque Solfea tirée du défaut de déclaration de créance,

- rejeté la fin de non-recevoir tirée du remboursement anticipé total valant reconnaissance de dette,

- prononcé la nullité du contrat de vente du 15 avril 2013,

- prononcé la nullité du contrat de prêt du 30 avril 2013,

- condamné la société Solfinéa anciennement dénommée Banque Solfea à rembourser à Mme [R] la somme de 18 596 euros avec intérêts au taux légal à compter du prononcé du jugement,

- condamné la société Solfinéa anciennement dénommée Banque Solfea aux dépens,

- condamné la société Solfinéa anciennement dénommée Banque Solfea à payer à Mme [R] la somme de 1 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Après avoir contrôlé la recevabilité de l'action eu égard à la liquidation judiciaire de la société France Solaire Énergies, le premier juge a estimé sur les fondements des anciens articles 1234 et 1235 du code civil que le remboursement anticipé de la dette par Mme [R] n'établissait pas que cette dernière avait entendu renoncer à se prévaloir de la faculté de contester la validité du contrat de crédit, de sorte que son action est recevable.

Le tribunal a ensuite considéré que le bon de commande ne comportait pas l'ensemble des mentions exigées par les dispositions de l'article L. 121-23 du code de la consommation puis a constaté l'annulation de plein droit du contrat de vente. Il a estimé que la banque ne rapportait pas la preuve que Mme [R] avait entendu confirmer la nullité du contrat.

Il a ensuite constaté la nullité subséquente du contrat de crédit avant de relever que la banque avait commis une faute en débloquant les fonds sans avoir vérifié que le contrat de vente était affecté de nullité ni vérifié que les travaux avaient été correctement exécutés et qu'elle serait privée en conséquence de son droit à restitution du capital prêté.

Considérant que Mme [R] ne rapportait pas la preuve d'un préjudice différent de ceux déjà indemnisés, il l'a déboutée de sa demande de dommages-intérêts ainsi que celle de la société Solfinéa anciennement dénommée Banque Solfea.

Par déclaration du 13 mars 2020, la société Solfinéa anciennement dénommée Banque Solfea a interjeté appel de cette décision.

Aux termes de conclusions n° 3 remises le 21 février 2023, la société Solfinea anciennement dénommée Banque Solfea demande à la cour :

- de déclarer recevable et bien fondée l'intervention forcée de Me [F], en qualité de mandataire ad hoc de la société France Solaire Énergies,

- d'infirmer le jugement en toutes ses dispositions sauf en ce qu'il a débouté Mme [R] de ses demandes de dommages-intérêts,

- à titre principal, de déclarer irrecevable la demande de Mme [R] en nullité du contrat de vente et par voie de conséquence, irrecevable sa demande en nullité du contrat de crédit, à tout le moins de dire qu'elles ne sont pas fondées et de l'en débouter,

- subsidiairement, en cas de nullité des contrats, de déclarer irrecevables la demande de Mme [R] visant à sa décharge de l'obligation de restituer le capital prêté, à tout le moins l'en débouter ; de condamner, en conséquence, Mme [R] à lui régler la somme de 18 000 euros en restitution du capital prêté,

- en tout état de cause, de déclarer irrecevables les demandes de Mme [R] visant à la privation de la créance de l'appelante et visant à sa condamnation au paiement de dommages et intérêts, à tout le moins, de la débouter de ses demandes,

- très subsidiairement, de limiter la réparation qui serait due eu égard au préjudice effectivement subi par l'emprunteuse à charge pour elle de l'établir et eu égard à la faute de l'emprunteuse ayant concouru à son propre préjudice ; de limiter, en conséquence, la décharge à concurrence du préjudice subi à charge pour Mme [R] d'en justifier ; en cas de réparation par voie de dommages et intérêts, de limiter la réparation à hauteur du préjudice subi, et dire et juger que Mme [R] reste tenue de restituer l'entier capital à hauteur de 18 000 euros,

- à titre infiniment subsidiaire, en cas de décharge de l'obligation de restitution de l'emprunteuse, de condamner Mme [R] à lui payer la somme de 18 000 euros correspondant au capital perçu à titre de dommages et intérêts en réparation de sa légèreté blâmable ; d'enjoindre à Mme [R], de restituer, à ses frais, le matériel installé chez elle à la société [W] [F], en qualité de mandataire ad hoc de la société France Solaire Énergies, dans un délai de 15 jours à compter de la signification de l'arrêt, ainsi que les revenus perçus au titre de la revente d'électricité, et de dire et juger qu'à défaut de restitution, elle restera tenue au remboursement du capital prêté ; subsidiairement, de priver Mme [R] de sa créance en restitution des sommes réglées du fait de sa légèreté blâmable,

- de débouter Mme [R] de toutes autres demandes, fins et conclusions,

- d'ordonner le cas échéant la compensation des créances réciproques à due concurrence,

- en tout état de cause, de condamner Mme [R] au paiement de la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, au titre des frais irrépétibles d'appel, ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance avec distraction au profit de la société Cloix & Mendès-Gil.

A titre préalable, l'appelante sur les fondements des articles 554 et 555 du code de procédure civile et L. 643-9 et R. 643-18 du code de commerce sollicite l'intervention forcée de la société [W] [F] en qualité de mandataire ad hoc de la société France Solaire Énergies.

A titre principal, elle rappelle au visa de l'ancien article 1234 du code civil que le paiement à un effet d'extinction de l'obligation et que le paiement volontaire de Mme [R] vaut donc reconnaissance de dette et qu'en conséquence, la demande de cette dernière est irrecevable puisqu'elle vise à remettre en cause un contrat de crédit définitivement éteint.

Elle conteste toutes méconnaissances de l'article L. 121-3 du code de la consommation et indique que des simples imprécisions d'une mention sur le bon de commande ne peuvent fonder le prononcer de la nullité du contrat. Elle conteste également les griefs émis à l'encontre de la désignation du matériel sur le bon de commande, du délai de livraison, des modalités de paiement, du nom du démarcheur et rappelle le caractère strict de l'interprétation de l'article L. 121-23 du code de la consommation.

A titre subsidiaire, elle fait valoir que l'acquéreur a confirmé le contrat et renoncé à se prévaloir d'une nullité - qu'elle précise être relative - du bon de commande en attestant de l'exécution conforme des travaux sans aucune réserve, en ordonnant le paiement du prix, en procédant au remboursement anticipé du crédit et en vendant l'électricité produite par l'équipement.

L'appelante rappelle ensuite que le maintien du contrat de principal entraîne le maintien du contrat de crédit.

À titre subsidiaire, l'appelante fait valoir que la nullité du contrat de crédit emporterait obligation pour l'emprunteuse de restituer le capital emprunté.

Visant notamment les articles L. 311-31 et L. 311-51 du code de la consommation, elle conteste toute obligation de contrôler la validité du bon de commande, toute faute dans la vérification du bon de commande, dans la vérification de l'exécution de la prestation qui ne lui incombe pas ou dans la délivrance des fonds sur la base d'un mandat de payer donné par la cliente et d'un certificat de réalisation de la prestation ; elle souligne que toutes les demandes de l'emprunteuse à son encontre sont vaines dès lors que l'intéressée ne justifie pas du moindre préjudice ni d'un lien causal entre celui-ci et un fait imputable à la banque.

A titre subsidiaire, l'appelante soutient qu'il doit être pris en compte dans l'appréciation de l'exact préjudice et/ou dans le calcul des restitutions, le fait que Mme [R] reste en possession de l'installation.

Elle soutient, pour le cas ou la nullité serait prononcée, que Mme [R] devrait lui restituer la somme de 18 000 euros au titre du capital prêté et sollicite à titre subsidiaire, l'octroi de dommages et intérêts pour procédure abusive.

Régulièrement assignée par acte d'huissier remis à étude le 19 juin 2020 conformément aux dispositions de l'article 655 du code de procédure civile, l'intimée n'a pas constitué avocat. Les conclusions lui ont été signifiées par le même acte.

La déclaration d'appel et les conclusions ont été signifiées à Maître [G] ès-qualités par acte d'huissier du 17 juin 2020 à tiers présent à domicile. Maître [G] n'a pas constitué avocat. Les conclusions d'appelante lui ont été signifiées le même jour.

Par jugement du tribunal de commerce d'Évry rendu le 19 novembre 2021, la procédure de liquidation judiciaire ouverte le 20 juillet 2015 à l'encontre de la société France solaire énergies a été clôturée pour insuffisance d'actifs et la Selarl [W] [F] prise en la personne de [W] [F] a été désignée mandataire avec pour mission de poursuivre les instances en cours.

Par acte d'huissier du 5 avril 2022, la Selarl [W] [F] prise en la personne de Me [W] [F] en qualité de mandataire ad hoc a été assignée à personne morale en intervention forcée avec significations des pièces de procédure et des conclusions n° 2. La société Selarl [W] [F] ès-qualités n'a pas constitué avocat.

Les conclusions d'intimés n° 3 lui ont été signifiées par acte du 24 février 2023 par acte remis à personne morale.

Pour un plus ample exposé des faits, moyens et prétentions de l'appelante, il est renvoyé aux écritures de celle-ci conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 28 février 2023 et l'affaire a été appelée à l'audience du 5 avril 2023.

MOTIFS DE LA DÉCISION

La cour constate que la recevabilité de l'intervention forcée à la présente procédure de la Selarl [W] [F], en qualité de mandataire ad hoc de la société France Solaire Énergies ne fait l'objet d'aucune contestation.

Il résulte du dernier alinéa de l'article 954 du code de procédure civile que la partie qui ne conclut pas ou qui, sans énoncer de nouveaux moyens, demande la confirmation du jugement est réputée s'en approprier les motifs.

Sur la fin de non-recevoir tirée du paiement volontaire

La société Solfinéa anciennement dénommée Banque Solfea fait valoir qu'en application de l'article 1234 ancien du code civil dans sa rédaction applicable au litige le remboursement par anticipation du crédit litigieux par Mme [R], qui vaut reconnaissance de dette, a emporté extinction de la dette initiale au titre de ce contrat de crédit.

Elle n'invoque cependant aucune disposition légale selon laquelle un tel paiement ferait obstacle à l'action en annulation du contrat de vente conclu par Mme [R] avec la société France solaire énergies.

Mme [R] est donc recevable en son action de ce chef, à laquelle le remboursement du crédit est indifférent, étant observé que l'annulation du contrat de crédit affecté et désormais remboursé ne constituerait qu'une conséquence de plein droit de l'annulation ou de la résolution du contrat principal.

Par ailleurs, le remboursement du crédit affecté ne fait pas obstacle à une action en responsabilité à l'encontre du prêteur de deniers sur le fondement de ses obligations spécifiques et qui tend à l'octroi de dommages-intérêts et non pas à la restitution d'un indu.

En conséquence, la fin de non-recevoir tirée de ce chef est rejetée.

Sur la fin de non-recevoir soulevée sur le fondement de l'article 1134 du code civil

La société Solfinéa anciennement dénommée Banque Solfea se fonde également dans ses écritures sur l'article 1134 alinéa 1 du code civil pour invoquer le caractère irrecevable et à tout le moins infondé de la demande de nullité des contrats, faisant état du caractère exceptionnel de la remise en cause d'un contrat par une partie qui ne doit pas agir de mauvaise foi.

Ce faisant, l'appelante n'explique pas en quoi le non-respect des dispositions de l'article 1134 du code civil en leur version applicable en la cause viendraient fonder une irrecevabilité des demandes formulées.

Si l'appelante sollicite que des prétentions de Mme [R] soient déclarées 'irrecevables' force est de constater qu'elle ne soulève en réalité aucune fin de non-recevoir ou exception de procédure à l'appui, de sorte qu'il n'y a pas lieu de statuer sur cette prétention au-delà de l'examen de la contestation élevée par la banque sur le fond.

Il s'ensuit qu'aucune irrecevabilité n'est encourue de ce chef.

Le jugement déféré est donc confirmé en ce qu'il a rejeté les fins de non-recevoir.

Sur la demande de nullité du bon de commande

Il est constant que le contrat de vente et de prestation de services litigieux est soumis aux dispositions des articles L. 121-21 ancien et suivants du code de la consommation dans leur rédaction en vigueur au 15 avril 2013, dès lors qu'il a été conclu dans le cadre d'un démarchage à domicile.

L'avant-veille de la prescription quinquennale, Mme [R] a entendu soulever la nullité du contrat de vente signé le 15 avril 2013.

L'article L. 121-23 dispose : « Les opérations visées à l'article L. 121-21 doivent faire l'objet d'un contrat dont un exemplaire doit être remis au client au moment de la conclusion de ce contrat et comporter, à peine de nullité, les mentions suivantes :

1° Noms du fournisseur et du démarcheur ;

2° Adresse du fournisseur ;

3° Adresse du lieu de conclusion du contrat ;

4° Désignation précise de la nature et des caractéristiques des biens offerts ou des services proposés ;

5° Conditions d'exécution du contrat, notamment les modalités et le délai de livraison des biens, ou d'exécution de la prestation de services ;

6° Prix global à payer et modalités de paiement ; en cas de vente à tempérament ou de vente à crédit, les formes exigées par la réglementation sur la vente à crédit, ainsi que le taux nominal de l'intérêt et le taux effectif global de l'intérêt déterminé dans les conditions prévues à l'article L. 313-1 ;

7° Faculté de renonciation prévue à l'article L. 121-25, ainsi que les conditions d'exercice de cette faculté et, de façon apparente, le texte intégral des articles L. 121-23, L. 121-24, L. 121-25 et L. 121-26 ».

En application de l'article 9 du code de procédure civile, il incombe à chaque partie de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de sa prétention.

Pour annuler le bon de commande, le premier juge a considéré que les mentions relatives à la désignation des biens, au prix de vente, aux modalités d'exécution et de livraison et au nom du démarcheur n'étaient pas conformes.

La cour relève que l'intimée ne s'est pas constituée et que l'original du bon de commande n'est pas produit. Ainsi seule une copie partielle et peu lisible est soumise à son examen.

Le bon de commande n° 26816 mentionne que son objet est une installation solaire photovoltaïque d'une puissance globale de 3 KWc comprenant :

panneaux photovoltaïques monocristalins haut rendement certifiés NF EN 61215 Classe II garantis rendement 25 ans, garantis standard pièces main d''uvre,

Système intégré au bâti, onduleur, coffret de protection, disjoncteur, parafoudre,

Démarches administratives (Mairie, EDF, ERDF, Consuel) par FSE,

Observation : Garantit 25 ans production et productivité.

Il convient de relever que c'est en ajoutant au texte précité que le premier juge a retenu que le bon de commande aurait dû préciser la marque, le prix unitaire des différents biens, la puissance, la marque et le type d'onduleur sans caractériser in concreto en quoi l'absence de ces éléments était de nature à affecter la compréhension par l'acquéreur de l'objet du contrat.

Le premier juge a également retenu à tort un défaut d'indication des modalités de paiement qui sont mentionnées dans le bon de commande et pleinement précisées dans le contrat de crédit conclu simultanément à la signature du bon de commande litigieux dont il constitue un élément lié et un défaut de mention du prix unitaire de chaque élément de l'équipement qui n'est pas exigé par le texte précité et ne constitue pas une caractéristique déterminante. Il est donc retenu que le 6° du texte précité est satisfait.

Il est cependant manifeste que le contrat ne précise aucun délai de livraison. Si les conditions générales font état de ce que les modalités de livraison/installation seront fixées avec le vendeur dans une limite de 200 jours en fonction des stocks disponibles, aucune date ne semble avoir été fixée avec le vendeur. Le contrat encourt donc l'annulation sur ce point.

L'examen du bon de commande montre également que le démarcheur n'est identifié que par une lettre et que sa signature ne permet pas de connaître son nom, ce qui n'est pas conforme au 1° du texte susvisé.

En outre, comme le relève à juste titre le premier juge, il apparaît effectivement que le bon de commande mentionne un descriptif particulièrement sommaire des matériels vendus. Si l'absence de plans techniques n'est pas une cause de nullité du contrat, la description de la centrale photovoltaïque promise est incomplète dès lors qu'aucune indication n'est donnée sur le nombre et le type de panneaux. Elles ne satisfont pas le 4° de l'article précité dans la mesure où elles ne permettaient pas à Mme [R] de comparer utilement les produits proposés avec d'autres produits présents sur le marché et ne lui permettaient pas de vérifier la complète installation des éléments avant de signer l'attestation de fin de travaux.

Il est admis que la nullité formelle résultant du texte précité est une nullité relative à laquelle la partie qui en est bénéficiaire peut renoncer par des actes volontaires explicites dès lors qu'elle avait connaissance des causes de nullité.

Selon l'article 1338 du code civil dans sa version applicable au litige, l'acte de confirmation ou ratification d'une obligation contre laquelle la loi admet l'action en nullité n'est valable que lorsqu'on y trouve la substance de cette obligation, la mention du motif de l'action en nullité et l'intention de réparer le vice sur lequel cette action est fondée.

À défaut d'acte de confirmation ou ratification, il suffit que l'obligation soit exécutée volontairement après l'époque à laquelle l'obligation pouvait être valablement confirmée ou ratifiée.

La confirmation, ratification, ou exécution volontaire dans les formes et à l'époque déterminées par la loi, emporte la renonciation aux moyens et exceptions que l'on pouvait opposer contre cet acte, sans préjudice néanmoins du droit des tiers.

Dans le rôle qu'elle reconnaît au juge national dans l'application d'une réglementation d'ordre public de protection, la Cour de justice de l'union européenne impose un examen in concreto qui implique notamment que le juge apprécie la cohérence entre les griefs émis par une partie et la réalité de ses prétentions et motivations.

En l'espèce, le bon de commande remis à Mme [R] reproduit très clairement le texte des articles L. 121-23 à L. 121-26 du code de la consommation dont la simple lecture suffit à informer une personne normalement avisée des exigences de la réglementation en matière de démarchage à domicile et plus particulièrement des mentions nécessaires à la validité du bon de commande.

Le seul fait que Mme [R] n'ait pas souhaité, le cas échéant, prendre connaissance des dispositions que la loi impose pour sa protection, ne saurait justifier que la reproduction des articles précités soit sans portée quant à la capacité des acquéreurs à apprécier les irrégularités formelles du bon de commande.

Le contrat de vente est assorti d'un formulaire de rétractation détachable dont Mme [R] n'a pas souhaité user.

Il est en revanche avéré que le 30 avril 2013, Mme [R] a signé sans réserve une attestation de fin de travaux mentionnant que les travaux étaient achevés et conformes au devis à l'exception du raccordement et des éventuelles autorisations administratives, qu'elle a demandé à la banque de payer la somme de 18 000 euros représentant le montant du crédit à l'ordre du vendeur et qu'elle a demandé la réduction du délai de rétractation.

Il n'est par ailleurs pas contesté que les fonds ont été débloqués, que l'installation a été raccordée et mise en service et qu'elle est productrice d'électricité depuis le 1er juillet 2014 sans émettre aucune critique sur la qualité de l'installation photovoltaïque et sur son fonctionnement. Mme [R] a également procédé à l'exécution effective du contrat de crédit en procédant, le 2 janvier 2014 au remboursement anticipé et complet du crédit.

Mme [R] n'a émis aucun grief sur le fonctionnement de l'équipement.

Ces actes positifs non équivoques caractérisent une volonté de percevoir les avantages attendus des contrats, confirmée même après introduction de l'instance, qui exclut que Mme [R] puisse se prévaloir d'une nullité tirée de l'irrégularité formelle du bon de commande et plus particulièrement d'une irrégularité tenant à l'imprécision de la désignation des biens vendus à l'absence de mention de la date de livraison de l'équipement ou du nom du démarcheur.

L'action judiciaire, engagée la veille du délai quinquennal de prescription par Mme [R], résulte d'une déception sur le montant de la vente d'électricité rapporté au coût du crédit et non des défauts d'information inhérents au texte du bon de commande.

Partant, il est retenu que Mme [R], qui ne formule toujours aucun grief sur le fonctionnement de son installation, a renoncé en toute connaissance à se prévaloir des irrégularités formelles affectant le bon de commande et qu'elle ne peut se prévaloir, cinq ans après la signature du bon de commande, de la nullité formelle du bon de commande.

Le jugement doit donc être infirmé en ce qu'il a retenu des causes d'annulation formelle.

Le contrat principal n'étant pas nul, il n'y a pas lieu à annulation du contrat de crédit de plein droit sur le fondement de l'article L. 311-32 du code de la consommation et Mme [R] doit être déboutée de ses demandes. Il n'y a donc pas lieu à restitutions.

Le jugement doit donc être infirmé en ce qu'il a prononcé l'annulation du contrat de vente aux torts de la société FSE, en ce qu'il a dit que l'annulation du contrat de vente a pour conséquence l'annulation de plein droit du contrat de prêt, que la société Solfinéa anciennement dénommée Banque Solfea a manqué à ses obligations et que ses fautes la privent du droit de demander à Mme [R] le remboursement du capital emprunté et en ce qu'il a condamné la société Solfinéa anciennement dénommée Banque Solfea à rembourser à Mme [R] la somme de 18 596 euros outre les intérêts au taux légal à compter du prononcé du jugement.

La cour constate qu'elle n'est saisie d'aucune autre demande, en l'absence de constitution de Mme [R].

Sur les dépens et les frais irrépétibles

Les dispositions du jugement relatives aux dépens et frais irrépétibles sont infirmées.

Mme [R] qui succombe doit être condamnée aux dépens de première instance et d'appel et il apparaît équitable de lui faire supporter les frais irrépétibles de la société Solfinéa anciennement dénommée Banque Solfea à hauteur d'une somme de 1 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Le surplus des demandes est rejeté.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Statuant en dernier ressort, après débats en audience publique, par arrêt rendu par défaut et mis à disposition au greffe,

Déclare recevable et bien fondée l'intervention forcée de la Selarl [W] [F] en qualité de mandataire ad hoc de la société France Solaire Energies ;

Infirme le jugement en toutes ses dispositions sauf en ce qu'il a rejeté les fins de non-recevoir et en ce qu'il a rejeté les demandes indemnitaires des parties ;

Statuant à nouveau des chefs infirmés, et y ajoutant,

Déboute Mme [K] [D] veuve [R] de ses demandes de nullité des contrats de vente et de crédit affecté ;

Rappelle que Mme [K] [D] veuve [R] reste redevable de plein droit du remboursement des sommes perçues en exécution du jugement qui est infirmé ;

Déboute les parties de toute autre demande ;

Condamne Mme [K] [D] veuve [R] à verser à la société Solfinéa anciennement dénommée Banque Solfea une somme de 1 500 euros par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne Mme [K] [D] veuve [R] aux dépens de première instance et d'appel, ces derniers pouvant être recouvrés directement par la Selas Cloix & Mendès-Gil, avocats conformément à l'article 699 du code de procédure civile.

La greffière La présidente


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 4 - chambre 9 - a
Numéro d'arrêt : 20/05242
Date de la décision : 01/06/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-06-01;20.05242 ?
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