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25/05/2023 | FRANCE | N°20/08423

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 4 - chambre 9 - a, 25 mai 2023, 20/08423


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 4 - Chambre 9 - A



ARRÊT DU 25 MAI 2023



(n° , 17 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 20/08423 - N° Portalis 35L7-V-B7E-CB6WU



Décision déférée à la Cour : Jugement du 3 juin 2020 - Juge des contentieux de la protection d'AUBERVILLIERS - RG n° 11-18-000530





APPELANTE



La société SOLFINEA anciennement dénommée BANQUE SOLFEA, société

anonyme au conseil d'administration agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

N° SIRET : 562 059 832 00138

[Adresse 1]

[Localité...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 9 - A

ARRÊT DU 25 MAI 2023

(n° , 17 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 20/08423 - N° Portalis 35L7-V-B7E-CB6WU

Décision déférée à la Cour : Jugement du 3 juin 2020 - Juge des contentieux de la protection d'AUBERVILLIERS - RG n° 11-18-000530

APPELANTE

La société SOLFINEA anciennement dénommée BANQUE SOLFEA, société anonyme au conseil d'administration agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

N° SIRET : 562 059 832 00138

[Adresse 1]

[Localité 5]

représentée par Me Sébastien MENDES GIL de la SELAS CLOIX & MENDES-GIL, avocat au barreau de PARIS, toque : P0173

substitué à l'audience par Me Nathalie FEERTCHAK de la SELAS CLOIX & MENDES-GIL, avocat au barreau de PARIS, toque : P0173

INTIMÉS

Monsieur [G] [I]

né le 19 Septembre 1950 à [Localité 8]

[Adresse 2]

[Localité 3]

représenté par Me Schmouel HABIB de la SELEURL HERACLES, avocat au barreau de PARIS, toque : E1511

Madame [R] [L] épouse [I]

née le 7 septembre 1954 à [Localité 7] (37)

[Adresse 2]

[Localité 3]

représentée par Me Schmouel HABIB de la SELEURL HERACLES, avocat au barreau de PARIS, toque : E1511

La SELARLU [W] MJ en qualité de liquidateur judiciaire de la société NOUVELLE RÉGIE DES JONCTIONS DES ÉNERGIES DE FRANCE (SAS)

[Adresse 4]

[Localité 6]

DÉFAILLANTE

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 22 mars 2023, en audience publique, devant la Cour composée de :

Mme Muriel DURAND, Présidente de chambre

Mme Fabienne TROUILLER, Conseillère chargée du rapport

Mme Laurence ARBELLOT, Conseillère

qui en ont délibéré.

Greffière, lors des débats : Mme Camille LEPAGE

ARRET :

- RÉPUTÉ CONTRADICTOIRE

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Mme Muriel DURAND, Présidente et par Mme Camille LEPAGE, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Le 13 mars 2014, Mme [R] [L] épouse [I] et M. [G] [I] ont souscrit par actes sous seing privés, dans le cadre d'un démarchage à domicile, un contrat de vente et d'installation de panneaux photovoltaïques avec la société Nouvelle Régie des jonctions des énergies de France exerçant sous l'enseigne Groupe solaire de France (la société GSF) au prix de 18 900 euros.

Pour financer cette installation, ils ont conclu le même jour un contrat de crédit affecté avec la société Banque Solfea pour un montant de 18 900 euros remboursable au taux de 5,60 % en 123 échéances de 233,24 euros, assurance comprise, débutant à la suite d'un report de onze mois. Par courrier du 18 mars 2014, la banque a informé les acquéreurs de l'acceptation de l'offre de prêt.

Les panneaux photovoltaïques ont été installés et les fonds débloqués par la banque au profit du vendeur au vu d'une attestation de fin de travaux signée par M. [I] le 28 mars 2014.

Estimant avoir été victime d'un abus de confiance et d'une escroquerie contre la société GSF, M. [I] a déposé plainte le 25 juin 2014 en exposant que ses panneaux n'étaient toujours pas raccordés.

Par jugement en date du 12 novembre 2014 le tribunal de commerce de Bobigny a placé la société GSF en liquidation judiciaire et Maître [K] [W] a été désigné liquidateur, l'ouverture de la procédure collective datant du 18 juin 2014. La Selarlu [W] MJ a été nommée liquidateur par ordonnance du 1er septembre 2016.

Le Consuel a été délivré le 5 janvier 2015 et l'installation a été mise en service le 20 janvier 2015 et est productrice d'électricité.

Un contrat d'achat de l'énergie électrique produite par l'installation a été signé le 5 mars 2015 par M. [I].

Le contrat de crédit a été remboursé par anticipation le 10 avril 2015.

Saisi le 31 mai 2018 par les acquéreurs d'une demande tendant principalement à l'annulation du contrat de vente et du contrat de crédit, le tribunal de proximité d'Aubervilliers, par un jugement réputé contradictoire rendu le 3 juin 2020 auquel il convient de se reporter, a :

- rejeté la demande de M. et Mme [I] de rejet des débats du certificat de mise en service produit par la société Banque Solfea,

- rejeté les irrecevabilités des demandes de M. et Mme [I] soulevées par la société Banque Solfea,

- prononcé l'annulation du contrat de vente,

- prononcé l'annulation du contrat de crédit affecté,

- condamné la société Banque Solfea à payer à M. et Mme [I] les sommes de 20 092,09 euros à titre de restitution des sommes réglées dans le cadre du remboursement du prêt et 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- rejeté la demande et M. et Mme [I] visant à dire que la société Banque Solfea ne pourra se prévaloir des effets de l'annulation à leur égard,

- rejeté l'irrecevabilité soulevée par la société Banque Solfea de la demande de M. et Mme [I] visant à la décharge de l'obligation du capital prêté du fait du remboursement anticipé,

- rejeté les demandes de la société Banque Solfea en restitution du capital prêté formées à l'encontre de M. et Mme [I] et en limitation de la réparation du préjudice de M. et Mme [I],

- rejeté la demande de dommages et intérêts de la société Banque Solfea fondée sur la légèreté blâmable des acquéreurs,

- rejeté les demandes de la société Banque Solfea en compensation des créances,

- ordonné à M. et Mme [I] de restituer l'installation photovoltaïque à la société [W] MJ en qualité de mandataire liquidateur de la société GSF à leurs frais,

- rejeté la demande de M. et Mme [I] de condamnation de la société Banque Solfea au titre des frais de désinstallation de la centrale et de la remise en état de la toiture,

- rejeté la demande de M. et Mme [I] de condamnation de la société Banque Solfea à des dommages et intérêts en réparation de leur préjudice économique et du trouble de jouissance et en réparation de leur préjudice moral,

- rejeté la demande de la société Banque Solfea formée au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- rejeté le surplus des demandes,

- condamné la société Banque Solfea aux dépens.

Après avoir retenu que le remboursement du prêt par anticipation ne pouvait être considéré comme une reconnaissance de dette et rappelé que la demande qui tendait à voir annuler les contrats n'était pas subordonnée à une déclaration de créance, le tribunal a considéré que le bon de commande ne respectait pas les dispositions du code de la consommation et que la réception sans réserves de l'installation et la demande de procéder au paiement ne pouvaient venir confirmer ces nullités présentes dès l'origine du contrat. Il a constaté l'annulation de plein droit du contrat de crédit affecté en conséquence de l'annulation du contrat de vente et a retenu que la banque avait commis une faute en ne vérifiant pas la régularité de ce dernier et que cette faute la privait de son droit à restitution.

Le tribunal a estimé que la qualité de profanes des acquéreurs empêchait de limiter la réparation de leur préjudice pour légèreté blâmable. Il a considéré que le remboursement des frais de remise en état de la toiture ne pouvait pas être réclamé au prêteur qui n'est pas partie au contrat de vente et que cette demande était sans lien avec la faute reprochée à la banque. Le tribunal a jugé que les acquéreurs ne produisaient aucun élément justifiant de leurs difficultés financières engendrées par le remboursement du crédit ni des désagréments engendrés.

Par une déclaration en date du 2 juillet 2020, la société Solfinea anciennement dénommée Banque Solfea a relevé appel de cette décision.

Aux termes de conclusions n° 2 remises le 15 avril 2021, la société Banque Solfea demande à la cour :

- d'infirmer le jugement rendu,

- à titre principal, de déclarer irrecevable la demande des époux [I] en nullité du contrat de vente, et par voie de conséquence celle portant sur le contrat de crédit, de dire et de juger, à tout le moins, que les demandes de nullité des contrats ne sont pas fondées, et de les en débouter et de débouter les époux [I] de leur demande en restitution des sommes réglées,

- en tout état de cause, de déclarer irrecevable la demande des époux [I] visant à la privation de sa créance, à tout le moins de dire et juger qu'elle n'est pas fondée, et de les en débouter,

- subsidiairement, en cas de nullité des contrats, de condamner in solidum les époux [I] à lui régler la somme de 18 900 euros en restitution du capital prêté,

- en tout état de cause, de déclarer irrecevable la demande des époux [I] en dommages et intérêts, à tout le moins de les en débouter,

- très subsidiairement, de limiter la réparation qui lui serait due eu égard au préjudice effectivement subi par les emprunteurs à charge eux de l'établir et eu égard à la faute des emprunteurs ayant concouru à leur propre préjudice, de limiter en conséquence la décharge à concurrence du préjudice subi à charge pour les emprunteurs d'en justifier, en cas de réparation par voie de dommages et intérêts, de limiter la réparation à hauteur du préjudice et de dire et juger que les époux [I] restent tenus de restituer l'entier capital à hauteur de 18 900 euros,

- à titre infiniment subsidiaire, en cas de décharge de l'obligation de l'emprunteur, de condamner in solidum les époux [I] à lui payer la somme de 18 900 euros correspondant au capital perdu à titre de dommages et intérêts en réparation de leur légèreté blâmable,

- d'enjoindre aux époux [I], de restituer, à leurs frais, le matériel installé chez eux à la société [W], en qualité de liquidateur judiciaire de la société GSF, dans un délai de 15 jours à compter de la signification de l'arrêt, ainsi que les revenus perçus au titre de la revente d'électricité, de dire et de juger qu'à défaut de restitution, ils resteront tenus de la restitution du capital prêté,

- subsidiairement, de priver les époux [I] de leur créance en restitution des mensualités réglées du fait de leur légèreté blâmable,

- de débouter les époux [I] de toutes autres demandes, fins et conclusions,

- d'ordonner le cas échéant la compensation des créances réciproques à due concurrence,

- en tout état de cause, de condamner in solidum les époux [I] au paiement de la somme de 3 000 euros au titre des frais irrépétibles d'appel de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens de l'instance.

À titre liminaire, l'appelante soutient au visa de l'article 2052 du code civil que la demande de nullité des contrats est irrecevable en raison de l'autorité de chose jugée attachée au protocole transactionnel signé entre les parties. Elle fait également valoir aux visas des articles L. 622-21 et L. 622-22 du code de commerce que la demande de nullité des contrats est irrecevable pour défaut de déclaration de créance à la procédure collective du vendeur. Enfin, elle considère que le remboursement anticipé de l'intégralité du crédit par les emprunteurs vaut reconnaissance de dette et fait obstacle à la recevabilité de la demande de nullité des contrats.

Soulignant le caractère exceptionnel de l'annulation d'un contrat, elle conteste les griefs émis à l'encontre du libellé du bon de commande, rappelle le caractère strict de l'interprétation de l'article L. 121-23 du code de la consommation et souligne que le premier juge est allé au-delà des exigences prévues par les textes. Elle soutient que les clauses du contrat sont apparentes et lisibles puis relève que les emprunteurs n'allèguent aucun préjudice pouvant résulter d'une éventuelle irrégularité formelle du bon de commande.

Subsidiairement elle soutient que les acquéreurs ont confirmé l'acte prétendument entaché de nullité - qu'elle précise être relative - en réceptionnant les travaux sans réserve, en versant volontairement le prix de la prestation au vendeur, en utilisant l'installation pendant plus de cinq ans et en revendant l'électricité à EDF. Elle note que les allégations de dol au sens des anciens articles 1109 et 1116 du code civil ne sont aucunement étayées et relève qu'aucun élément n'est fourni sur la réalité d'une promesse d'autofinancement ou sur la rentabilité de l'installation. Elle soutient qu'aucune des tromperies alléguées n'est établie.

Visant notamment l'article L. 311-31 du code de la consommation, elle conteste toute obligation de contrôler la validité du bon de commande, toute faute dans la vérification du bon de commande, de l'exécution de la prestation qui ne lui incombe pas ou dans la délivrance des fonds sur la base d'un mandat de payer donné par le client (en rappelant les obligations du mandataire) et du certificat de réalisation de la prestation. Elle souligne que les emprunteurs ne justifient pas du moindre préjudice ni d'un lien causal entre celui-ci et un fait imputable à la banque. Elle soutient également qu'il est impossible de caractériser le préjudice au regard de la non-obtention par les acquéreurs de la restitution du prix de vente du fait de la procédure collective du vendeur en l'absence de lien de causalité avec une faute de la banque. Elle demande donc la restitution du capital prêté en cas de nullité des contrats.

Elle note que l'évaluation d'un éventuel préjudice doit prendre en compte la valeur du bien que les acquéreurs conserveront et souligne que la légèreté blâmable avec laquelle ils ont signé l'attestation de fin de travaux constitue une faute occasionnant un préjudice correspondant au capital prêté dont elle serait privée. Elle ajoute que leurs demandes tendant à l'octroi de dommages et intérêts sont irrecevables comme conduisant à une double indemnisation.

Elle souligne que c'est à l'employeur du personnel de produire l'attestation visée à l'article L. 311-8 du code de la consommation dans sa rédaction applicable. Elle rappelle enfin qu'aucun devoir de mise en garde quant à l'opportunité de l'opération ne lui incombe et soutient avoir respecté l'ensemble de ses obligations pré-contractuelles prévues par l'article L. 311-6 du code de la consommation. Elle soutient que les préjudices allégués par les emprunteurs n'ont aucun rapport avec les griefs formés.

Aux termes de conclusions n° 3 remises le 17 janvier 2023, M. et Mme [I] demandent à la cour':

- de confirmer le jugement sauf en ce qu'il a rejeté leurs demandes,

- de condamner la société Banque Solfea à leur verser la somme de 4 026 euros au titre de leur préjudice financier, 3 000 euros au titre de leur préjudice économique et du trouble de jouissance et 4 000 euros au titre de leur préjudice moral.

À titre liminaire, les intimés indiquent que leur action tend à l'annulation du contrat conclu avec la société GSF et non à la condamnation de celle-ci à quelque somme que ce soit, de sorte qu'elle est recevable. Ils soutiennent également que le remboursement anticipé du prêt ne vaut pas reconnaissance de dette et contestent l'existence d'un protocole d'accord transactionnel.

À titre principal, ils allèguent au visa des articles L. 121-23 à L. 121-25 du code de la consommation des violations de dispositions impératives régissant le bon de commande notamment en ce qui concerne la description du matériel, les conditions et délais d'exécution des prestations et les éléments relatifs au paiement et au coût de l'installation. Ils soutiennent également que le bon de commande est illisible.

Ils dénoncent des abstentions malicieuses, la référence mensongère à un partenariat avec la société EDF, une présentation fallacieuse de la rentabilité prévisible de l'installation et une dénomination trompeuse de l'acte qui ont affecté la validité de son consentement au sens des anciens articles 1109 et 1116 du code civil. Ils indiquent que la nullité du contrat principal emporte de plein droit celle du contrat de crédit. Ils contestent toute confirmation de l'acte entaché de nullité en se prévalant de leur qualité de consommateurs profanes et de la découverte postérieure des vices inhérents au contrat.

Les intimés soutiennent que la banque est tenue de vérifier la régularité du contrat principal et qu'elle a commis une faute en n'y procédant pas et en finançant un contrat nul. Ils ajoutent qu'elle a commis une faute en libérant les fonds sans que les travaux aient été achevés sur la base d'une attestation de fin de travaux incomplète et malgré l'absence d'accord municipal de sorte qu'elle doit être privée de sa créance de restitution. Ils contestent avoir fait preuve de légèreté blâmable.

Les intimés font enfin valoir qu'ils ont nécessairement subi un préjudice par les fautes commises par la banque puisqu'ils doivent rembourser le capital d'un emprunt qu'ils n'ont matériellement pas touché et de leur impossibilité d'obtenir la garantie de ce remboursement par le vendeur, placé en liquidation judiciaire. Ils détaillent les conséquences financières de l'annulation des contrats et des fautes de la banque, en particulier le coût de la dépose de l'installation et de la remise en état de la toiture puis invoquent un trouble de jouissance et un préjudice moral.

Régulièrement assignée par acte d'huissier remis à personne morale le 29 octobre 2020, la société [W], en qualité de liquidateur de la société GSF n'a pas constitué avocat. Les conclusions de l'appelante lui ont été signifiées à personne morale le 29 octobre 2020 puis le 19 avril 2021 et celles des intimés lui ont été signifiées par acte du 20 janvier 2021.

Pour un plus ample exposé des faits, moyens et prétentions des parties, il est renvoyé aux écritures de celles-ci conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 24 janvier 2023 et l'affaire a été appelée à l'audience le 22 mars 2023.

MOTIFS DE LA DÉCISION

A titre liminaire, la cour constate :

- que le contrat de vente conclu le 13 mars 2014 entre la société GSF et M. [I] est soumis aux dispositions des articles L. 121-21 anciens et suivants du code de la consommation, dans leur rédaction en vigueur au jour du contrat issue de la loi n° 93-949 du 26 juillet 1993, dès lors qu'il a été conclu dans le cadre d'un démarchage à domicile,

- que le contrat de crédit affecté conclu le même jour entre M. et Mme [I] et la société Banque Solfea est soumis aux dispositions de la loi n° 2010-737 du 1er juillet 2010, de sorte qu'il sera fait application des articles du code de la consommation dans leur rédaction en vigueur après le 1er mai 2011 et leur numérotation antérieure à l'entrée en vigueur de l'ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016,

- qu'il convient de faire application des dispositions du code civil en leur version antérieure à l'entrée en vigueur au 1er octobre 2016 de l'ordonnance du 10 février 2016 portant réforme du droit des contrats.

Il résulte du dernier alinéa de l'article 954 du code de procédure civile que la partie qui ne conclut pas ou qui, sans énoncer de nouveaux moyens, demande la confirmation du jugement est réputée s'en approprier les motifs.

Sur la fin de non-recevoir tirée de l'absence de déclaration des créances au passif de la société GSF

La société Solfinea soulève l'irrecevabilité des demandes en de nullité des contrats en l'absence de déclaration de la créance au passif de la procédure collective de la société GSF.

Alors que les dispositions de l'article L. 622-21 du code de commerce n'interdisent que les actions qui tendent à la condamnation d'un débiteur sous le coup d'une procédure collective au paiement d'une somme d'argent ou à la résolution d'un contrat pour défaut de paiement d'une somme d'argent, force est de constater que la demande de M. et Mme [I] à l'encontre de la société en liquidation judiciaire n'entre pas dans le champ de ces dispositions dès lors qu'elle tend uniquement à l'annulation du contrat de vente.

Sans qu'il y ait lieu de suivre l'appelante dans ses plus amples développements relatifs aux conséquences nécessaires d'une éventuelle annulation ou résolution de ce contrat, en l'absence de toute demande en paiement formée dans le cadre de la présente instance à l'encontre de la société GSF, le jugement est confirmé en ce qu'il a déclaré recevables les demandes de M. et Mme [I].

Sur la fin de non-recevoir tirée du remboursement du prêt

La société Solfinea fait valoir, au visa des articles 1234 et 1271 du code civil dans leur rédaction applicable au litige, le remboursement par anticipation du crédit litigieux par M. et Mme [I] a emporté extinction de la dette initiale de ceux-ci au titre de ce contrat de crédit.

Pour autant, elle n'invoque aucune disposition légale selon laquelle un tel paiement ferait obstacle à l'action en annulation du contrat conclu par les intimés avec la société GSF.

M. et Mme [I] sont donc recevables en leur action de ce chef, à laquelle le remboursement du crédit est indifférent, étant observé que l'annulation du contrat de crédit affecté et désormais remboursé ne constituerait qu'une conséquence de plein droit de l'annulation ou de la résolution du contrat principal.

Par ailleurs, le remboursement du crédit affecté ne fait pas obstacle à une action en responsabilité à l'encontre de la banque sur le fondement des obligations spécifiques qui incombaient à celle-ci.

En conséquence, la fin de non-recevoir tirée de ce chef est rejetée dans cette limite et le jugement confirmé sur ce point.

Sur l'irrecevabilité de la demande de nullité des contrats eu égard à l'accord intervenu entre les parties

L'article 9 du code de procédure civile impose aux parties de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au soutien de leurs prétentions.

La société Solfinea se prévaut d'une autorisation de réalisation des travaux signées par les intimés le 4 décembre 2014.

Aux termes des dispositions de l'article 2044 dans leur version applicable à la date du contrat, la transaction est un contrat par lequel les parties terminent une contestation née ou préviennent une contestation à naître.

Selon les articles 2048 et 2049 du même code, dans leur version applicable à la date du contrat, les transactions se renferment dans leur objet : la renonciation qui y est faite à tous droits et actions et prétentions ne s'entend que de ce qui est relatif au différend qui y a donné lieu. Les transactions ne règlent que les différends qui s'y trouvent compris, soit que les parties aient manifesté leur intention par des expressions spéciales ou générales, soit que l'on reconnaisse cette intention par une suite nécessaire de ce qui est exprimé.

Ainsi, une transaction implique l'existence de concessions réciproques des parties, quelle que soit leur importance relative. L'exigence de concessions réciproques ne signifie pas l'équivalence proportionnelle entre les concessions consenties du moment qu'elles existent réellement et qu'elles sont réciproques. Néanmoins, la contrepartie ne doit pas être dérisoire.

Il appartient donc au juge de déterminer si l'accord invoqué à l'appui d'une fin de non-recevoir tiré de l'autorité de la chose jugée constitue une transaction qui implique des concessions réciproques.

En l'espèce, il résulte des éléments versés aux débats qu'après avoir reçu une attestation de fin de travaux signée par M. [I] le 28 mars 2014 et débloqué les fonds, la banque Solfea saisie par les emprunteurs le 14 novembre 2014 suite aux difficultés de mise en service de l'installation a sollicité la société Sweetcom pour assurer la mise en service de l'installation à ses frais. C'est dans ces circonstances que le 4 décembre 2014, les époux [I] ont signé le document suivant :

« AUTORISATION DE RÉALISATION DES TRAVAUX ' ANNEXE 2

Nous soussignés [suivent les prénoms, noms et dates de naissance de M. et Mme [I]] ainsi que leur adresse [Adresse 2].

1) Autorisons par la présente la société Sweetcom à réaliser les travaux de mise en service de l'installation dont la Banque Solfea a accepté la prise en charge à ses frais.

2) Nous nous engageons, lorsque les travaux seront réalisés et compte tenu des diligences accomplies et prises en charge financièrement par la Banque Solfea, à régulariser un certificat de fin de travaux et à exécuter sans défaut le contrat de crédit souscrit auprès de la Banque Solfea, sans pouvoir élever aucune contestation ni réserve au titre dudit contrat de crédit, dans les conditions des articles 2044 et suivants du Code civil ».

Il est signé par M. et Mme [I] qui ont ajouté manuscritement « Lu et approuvé, bon pour accord dans les conditions ci-dessus ».

Sous les mêmes formes, ils ont signé le même jour un deuxième document intitulé :

«' MODELE DE CERTIFICAT DE FIN DE TRAVAUX- ANNEXE 3'» par lequel ils ont attesté':

«' - de l'achèvement et de la conformité des travaux et démarches réalisées par la société Sweetcom, - du raccordement de notre installation photovoltaïque par la société Sweetcom,

- de la mise en service effective de notre installation photovoltaïque par ERDF

Nous nous engageons par la présente, en contrepartie des diligences accomplies et prises en charge financièrement par la Banque Solfea, à exécuter sans défaut le contrat de crédit souscrit auprès de la Banque Solfea, sans pouvoir élever aucune contestation ni réserve au titre dudit contrat de crédit, dans les conditions des articles 2044 et suivants du Code civil ».

Il apparaît donc clairement que la concession de la banque Solfea consistait à prendre en charge le devis de raccordement et de mise en service.

Ainsi M. et Mme [I] ont signé la transaction qui a été exécutée par la banque Solfea. Ils ne peuvent se prévaloir du fait que la banque ne l'a pas signée.

En l'espèce, l'accord conclu entre les parties entérine bien l'accord de la société Banque Solfea de prendre à sa charge les frais d'intervention d'une société tierce à savoir la société Sweetcom pour finaliser le chantier en lieu et place de la société GSF tandis que les époux [I] ont renoncé à toute contestation judiciaire ni réserve du contrat de crédit qu'ils se sont engagés à exécuter sans défaut.

Cet accord entérine donc des concessions réciproques qui ne sont pas dérisoires.

De surcroît, les frais de raccordement étaient expressément exclus du contrat de vente et auraient dû incomber exclusivement aux acheteurs. Cette concession a donc engendré un bénéfice direct pour eux. Ainsi, la banque, sollicitée par les emprunteurs, a accepté de financer les frais de raccordement en lieu et place des acquéreurs qui n'ont émis aucune contestation sur cet accord.

Dès lors, le protocole a eu pour objet de remédier au non-raccordement de l'installation suite à la liquidation judiciaire du vendeur et son exécution, qui n'est pas contestée, a bien permis d'y remédier. Aucune pièce ni expertise technique n'établit un dysfonctionnement de l'installation.

L'article 2052, dans sa version applicable au contrat précise que les transactions ont, entre les parties, l'autorité de la chose jugée en dernier ressort.

Aussi, il y a lieu de constater qu'en application du protocole transactionnel signé par les époux [I] ont définitivement renoncé à toute contestation judiciaire ni réserve du contrat de crédit qu'ils se sont engagés à exécuter sans défaut. Leurs demandes à ce titre doivent donc être déclarées irrecevables.

Pour le surplus, elle ne fait pas obstacle à une action des acheteurs visant à l'annulation du contrat principal, une telle annulation emportant alors nullité du contrat de crédit affecté non pas à l'initiative des emprunteurs mais par l'effet même de la loi.

Sur la fin de non-recevoir soulevée sur le fondement de l'article 1134 du code civil

La société Solfinea se fonde également dans ses écritures sur l'article 1134 alinéa 1 du code civil pour invoquer le caractère irrecevable et à tout le moins infondé de la demande de nullité des contrats, faisant état du caractère exceptionnel de la remise en cause d'un contrat par une partie qui ne doit pas agir de mauvaise foi.

Ce faisant, l'appelante n'explique pas en quoi le non-respect des dispositions de l'article 1134 du code civil en leur version applicable en la cause viendraient fonder une irrecevabilité des demandes formulées.

Il s'ensuit qu'aucune irrecevabilité n'est encourue de ce chef et que la fin de non-recevoir formée à ce titre à hauteur d'appel doit être rejetée.

Si l'appelante sollicite que des prétentions des époux [I] soient déclarées 'irrecevables' force est de constater qu'elle ne soulève en réalité aucune fin de non-recevoir ou exception de procédure à l'appui, de sorte qu'il n'y a pas lieu de statuer sur cette prétention au-delà de l'examen de la contestation élevée par la banque sur le fond.

Sur la demande de nullité du bon de commande

Sur le moyen tiré des mentions obligatoires

Plus de quatre ans après la signature des contrats, M. et Mme [I] ont entendu soulever la nullité du contrat de vente signé le 13 mars 2014.

L'article L. 121-23 dispose : « Les opérations visées à l'article L. 121-21 doivent faire l'objet d'un contrat dont un exemplaire doit être remis au client au moment de la conclusion de ce contrat et comporter, à peine de nullité, les mentions suivantes :

1° Noms du fournisseur et du démarcheur ;

2° Adresse du fournisseur ;

3° Adresse du lieu de conclusion du contrat ;

4° Désignation précise de la nature et des caractéristiques des biens offerts ou des services proposés ;

5° Conditions d'exécution du contrat, notamment les modalités et le délai de livraison des biens, ou d'exécution de la prestation de services ;

6° Prix global à payer et modalités de paiement ; en cas de vente à tempérament ou de vente à crédit, les formes exigées par la réglementation sur la vente à crédit, ainsi que le taux nominal de l'intérêt et le taux effectif global de l'intérêt déterminé dans les conditions prévues à l'article L. 313-1 ;

7° Faculté de renonciation prévue à l'article L. 121-25, ainsi que les conditions d'exercice de cette faculté et, de façon apparente, le texte intégral des articles L. 121-23, L. 121-24, L. 121-25 et L. 121-26 ».

En application de l'article 9 du code de procédure civile, il incombe à chaque partie de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de sa prétention.

Pour annuler le contrat, le premier juge a retenu que le bon de commande ne précisait aucun choix de ballon thermodynamique, ni le poids, les dimensions, la performance et l'aspect des panneaux, que le délai de livraison n'était pas précisé et que le coût total du crédit n'était pas renseigné.

Les intimés notent une désignation sommaire des produits, l'absence de fiche technique et de précision concernant la marque, le modèle et les références des panneaux et de l'onduleur empêchant la comparaison des offres, l'absence de condition d'exécution du contrat et des délais de mise en service, le caractère erroné des éléments relatifs au paiement, l'absence de détail du coût de l'installation et des contradictions concernant les garanties du matériel. Ils estiment enfin que les clauses ne sont pas rédigées en caractères apparents et de façon claire et lisible.

Le bon de commande n°33072 produit en original décrit l'objet de la vente comme suit :

« Centrale GSDF CP3KA

Puissance installée : 3000 Wc

12 panneaux 250 Wc

12 Panneaux 250PSI ' 12 Plaques ' Onduleur GSDF ' Kit Abergements (latéraux ' Gauche / Droite ' centraux ' de jonction) ' 10 mètres de WAKAPLEX ' 3 mètres de mousse expansive ' 25 m d'écran sous toiture ' 75 m de câbles 4mm2 ' Kit Connectique (connecteurs mâle/femelle ' Clips de sécurité - Connectique) ' Boîtier AC/DC ' Kit visserie (Crochets doubles ' Crochets simples ' joints ' Vis) »

« Panneaux GSDF 250 PSI

Caractéristiques électriques sous STC :

Type du module : RCS-250P ' Puissance maximale Pmax : 250Wp ' Tension à puissance maximale ' Imp ' 29,8V ' Courant à puissance maximale ' Imp : 8,39 A ' Tension de circuit ouvert ' Voc : 37,6V ' Courant de court circuit Isc : 6,78 A ' rendement du module 'nm : 15,4 % Tolérance puissance de sortie : 0/+3%

Caractéristiques mécaniques :

Type de cellule : polycristallin 156 x 156 mm (6 pouces) ' Nombre de cellules : 60 (6 x 10) Dimensions : 1640 x 992 x 40mm (64,57 x 39,06 x 1,57pouces) ' Poids : 20Kg »

« Raccordement de l'onduleur au compteur de production à la charge de GSF

Obtention du contrat de rachat de l'électricité à la charge de GSF

Démarches auprès du Consuel d'État (Obtention de l'attestation de conformité) à la charge de GSF ».

Il importe de préciser en premier lieu que l'absence de choix d'un ballon thermodynamique par les acheteurs ne saurait faire encourir une nullité du bon de commande.

Il convient de préciser que le bon de commande est particulièrement précis puisque le matériel contenu dans la centrale est entièrement listé dans le bon de commande de même que les caractéristiques électriques des panneaux et de l'onduleur. Il convient de rappeler que l'absence de plans techniques n'est pas une cause de nullité ce d'autant qu'une mention du bon de commande indique que le client « dispose du catalogue des Produits remis par le vendeur ».

Contrairement à ce qu'a jugé le premier juge qui est allé au-delà des textes susvisés, ces mentions satisfont le 4° de l'article précité dans la mesure où elles permettaient aux acheteurs de comparer utilement les produits proposés avec d'autres produits présents sur le marché et leur permettaient de vérifier la complète installation des éléments avant de signer l'attestation de fin de travaux.

L'examen du bon de commande montre également qu'il est parfaitement lisible et rédigé dans une police qui n'est pas inférieure au corps huit, ce qui, au demeurant, n'est pas visé à l'article susvisé ni une cause de nullité prévue par les textes applicables au contrat. Il n'est démontré aucune confusion ni contradiction concernant les garanties précisées dans les conditions particulières figurant au recto. En toute hypothèse, elles ne sont pas concernées par l'article susvisé et ne font que préciser les conditions générales figurant au verso et l'emportent en cas de contradiction.

M. et Mme [I] dénoncent également à tort un défaut d'indication des modalités de financement pourtant mentionnées dans le bon de commande et pleinement précisées dans le contrat de crédit conclu simultanément à la signature du bon de commande litigieux dont il constitue un élément lié et un défaut de mention du prix unitaire de chaque élément de l'équipement qui n'est pas exigé par le texte précité et ne constitue pas une caractéristique déterminante. Il est donc retenu que le 6° du texte précité est satisfait.

Il convient de relever que c'est en ajoutant au texte précité que les intimés soutiennent que le bon de commande aurait dû préciser la marque, le prix unitaire des différents biens, la puissance, la marque et le type d'onduleur sans caractériser in concreto en quoi l'absence de ces éléments était de nature à affecter la compréhension par l'acquéreur de l'objet du contrat.

Néanmoins, le bon de commande ne comporte aucune indication sur le délai de livraison et les modalités d'exécution des travaux, alors que le contrat portait non seulement sur une vente mais aussi sur une prestation de services. L'original du bon de commande produit montre que la rubrique « Livraison estimée le » n'a pas été renseignée même si l'article 3.1 des conditions générales prévoient expressément que la livraison s'effectuera dans un délai de trois mois maximum à compter de la commande ferme et définitive et que pour le client consommateur, une date maximale de livraison lui est indiquée sur le bon de commande. Partant, le bon de commande n'est pas conforme au 5° de l'article L. 121-23 précité et encourt donc l'annulation.

Il est admis que la nullité formelle résultant du texte précité est une nullité relative à laquelle la partie qui en est bénéficiaire peut renoncer par des actes volontaires explicites dès lors qu'elle avait connaissance des causes de nullité.

Selon l'article 1338 du code civil dans sa version applicable au litige, l'acte de confirmation ou ratification d'une obligation contre laquelle la loi admet l'action en nullité n'est valable que lorsqu'on y trouve la substance de cette obligation, la mention du motif de l'action en nullité, et l'intention de réparer le vice sur lequel cette action est fondée.

À défaut d'acte de confirmation ou ratification, il suffit que l'obligation soit exécutée volontairement après l'époque à laquelle l'obligation pouvait être valablement confirmée ou ratifiée.

La confirmation, ratification, ou exécution volontaire dans les formes et à l'époque déterminées par la loi, emporte la renonciation aux moyens et exceptions que l'on pouvait opposer contre cet acte, sans préjudice néanmoins du droit des tiers.

Dans le rôle qu'elle reconnaît au juge national dans l'application d'une réglementation d'ordre public de protection, la Cour de justice de l'union européenne impose un examen in concreto qui implique notamment que le juge apprécie la cohérence entre les griefs émis par une partie et la réalité de ses prétentions et motivations.

En l'espèce, le bon de commande remis à M. et Mme [I] reproduit très clairement le texte des articles L. 121-23 à L. 121-26 du code de la consommation dont la simple lecture suffit à informer une personne normalement avisée des exigences de la réglementation en matière de démarchage à domicile et plus particulièrement des mentions nécessaires à la validité du bon de commande.

Le seul fait que les acquéreurs n'aient pas souhaité, le cas échéant, prendre connaissance des dispositions que la loi impose pour leur protection, ne saurait justifier que la reproduction des articles précités soit sans portée quant à la capacité des acquéreurs à apprécier les irrégularités formelles du bon de commande.

Le contrat de vente est assorti d'un formulaire de rétractation détachable dont M. et Mme [I] n'ont pas souhaité user.

Il est en revanche avéré que le 28 mars 2014, M. [I] a signé sans réserve une attestation de fin de travaux mentionnant que les travaux étaient achevés et conformes au devis à l'exception du raccordement et des éventuelles autorisations administratives, qu'il a demandé à la banque de payer la somme de 18 900 euros représentant le montant du crédit à l'ordre du vendeur. Les intimés ont, le 4 décembre 2014, signé un certificat de fin de travaux attestant de l'achèvement et de la conformité des travaux et démarches, du raccordement et de la mise en service effective de leur installation.

Il n'est par ailleurs pas contesté que les fonds ont été débloqués, que l'installation a été raccordée et mise en service et qu'elle est productrice d'électricité depuis le 20 janvier 2015 sans émettre aucune critique sur la qualité de l'installation photovoltaïque et sur son fonctionnement. M. et Mme [I] ont également procédé, le 10 avril 2015, au remboursement anticipé du contrat de crédit.

Les intimés n'ont émis aucun grief sur le fonctionnement de l'équipement.

Ces actes positifs non équivoques caractérisent une volonté réitérée de percevoir les avantages attendus des contrats, confirmée même après introduction de l'instance, qui exclut que M. et Mme [I] puissent se prévaloir d'une nullité tirée de l'irrégularité formelle du bon de commande et plus particulièrement d'une irrégularité tenant à l'absence de mention de la date de livraison de l'équipement.

L'action judiciaire, engagée plus de quatre ans après la signature des contrats par M. et Mme [I], résulte d'une déception sur le montant de la vente d'électricité rapporté au coût du crédit et non des défauts d'information inhérents au texte du bon de commande.

Partant, il est retenu que M. et Mme [I], qui ne formulent toujours aucun grief sur le fonctionnement de leur installation, ont renoncé en toute connaissance à se prévaloir des irrégularités formelles affectant le bon de commande et qu'ils ne peuvent se prévaloir, quatre ans après la signature du bon de commande, de la nullité formelle du bon de commande.

Sur le moyen tiré du vice du consentement

L'article 1116 devenu 1137 du code civil prévoit que : « Le dol est une cause de nullité de la convention lorsque les man'uvres pratiquées par l'une des parties sont telles, qu'il est évident que, sans ces man'uvres, l'autre partie n'aurait pas contracté. Il ne se présume pas, et doit être prouvé ».

En l'espèce, M. et Mme [I] soutiennent avoir été victimes d'un dol parce qu'ils n'étaient pas suffisamment renseignés sur les caractéristiques essentielles des biens vendus ni sur les modalités d'installation de la centrale solaire. Ils font également grief à la société venderesse d'avoir égaré leur consentement en leur présentant la plaquette publicitaire, en reprenant le slogan de la société EDF : « L'énergie est notre avenir, économisons-la » alors que la société France Solaire Énergies n'a jamais été mandatée par la société EDF, tout en faisant état d'un partenariat avec cette société, figurant sur le bon de commande. Ils ajoutent avoir été victimes d'une présentation fallacieuse sur la rentabilité de l'installation et du caractère définitif de leur engagement, alors qu'ils pensaient présenter uniquement une candidature pour une : « Demande d'adhésion au programme Eco-Habitat » et que la mention « sous réserve d'acceptation du dépôt de candidature » a été ajoutée par le démarcheur.

Le document contractuel est intitulé sans ambiguïté « Bon de commande » ; il mentionne « panneaux photovoltaïques garantie rendement à hauteur de 90 % pendant 25 ans ».

Cette mention contractualise le rendement des panneaux photovoltaïques, lequel n'est pas critiqué, mais aucunement le rendement financier de l'installation photovoltaïque.

De surcroît, il convient de rappeler que la plaquette n'est pas un document contractuel et aucun autofinancement de l'installation photovoltaïque n'a donc été contractualisé.

Par ailleurs, l'information insuffisante sur les caractéristiques de l'équipement vendu mentionnée ci-dessus et sur laquelle M. et Mme [I] ont décidé de passer outre ne saurait constituer une man'uvre dolosive en elle-même.

De même, un simple slogan publicitaire sans valeur aucune pour une personne normalement avisée ne saurait caractériser une man'uvre frauduleuse.

M. et Mme [I] ne démontrent pas, par ailleurs, que l'existence d'un partenariat avec la société EDF était un élément déterminant de son consentement, étant observé qu'aucun partenariat n'est mentionné sur le bon de commande.

Enfin, les intimés ne peuvent faire accroire qu'ils ne comprenaient pas la portée de leur engagement et le réduire à une simple « candidature », alors que concomitamment au contrat de vente, ils ont signé le contrat de crédit affecté pour financer l'installation commandée, étant rappelé que le bon de commande n° 33072, qui s'intitule comme tel sur le document y afférent, précise le mode de règlement du financement par crédit.

M. et Mme [I] ne prouvent pas, par conséquent, un comportement malicieux de la part du représentant de la société GSF, qui aurait égaré leur connaissance de la portée de leur engagement, et partant, leur consentement.

Si M. et Mme [I] imputent à la société GSF une tromperie dans la présentation commerciale de leur offre de contrat et des man'uvres frauduleuses qui auraient vicié leur consentement, force est de constater qu'au-delà de la reproduction des textes, ils ne caractérisent pas de manière circonstanciée les fraudes qu'ils dénoncent relatives notamment à une présentation fallacieuse de la rentabilité de l'opération.

Il résulte de l'ensemble de ce qui précède que M. et Mme [I] sont mal fondés en leur demande d'annulation du contrat de vente.

Par application des dispositions de l'article susmentionné L. 311-32 du code de la consommation, le contrat de crédit n'est donc pas non plus annulé.

En conséquence, le jugement est infirmé en ce qu'il a prononcé l'annulation du contrat de vente et l'annulation du contrat de crédit affecté et la cour déboute M. et Mme [I] de leurs demandes d'annulation du contrat de vente et du crédit affecté.

Au demeurant, il doit être relevé que les intimés ne contestent pas que leur installation est raccordée, fonctionnelle et productrice d'électricité. Ils ne justifient d'aucun préjudice résultant des griefs allégués.

Sur les demandes indemnitaires à l'encontre de la banque

M. et Mme [I] entendent mettre en cause la responsabilité de la société Banque Solfea pour avoir consenti un crédit et débloqué les fonds sur la base d'un bon de commande nul.

Ils soutiennent également que le prêteur a commis une faute en libérant des fonds avant l'achèvement de l'installation alors que le raccordement au réseau électrique n'est intervenu que plusieurs mois après la pose des matériels et sans s'assurer que le vendeur avait exécuté son obligation.

Le moyen tiré du financement d'une opération nulle ou d'une participation au dol commis par la société GSF doit être écarté au regard du rejet de la demande d'annulation du contrat de vente.

En application des dispositions de l'article 9 du code de procédure civile, il incombe à chaque partie de prouver les faits nécessaires au succès de sa prétention, en particulier l'existence d'un fait générateur de responsabilité, du préjudice en découlant et donc d'un lien de causalité entre le préjudice et la faute.

Selon l'article L. 311-31 du code de la consommation dans sa rédaction applicable au litige, les obligations de l'emprunteur ne prennent effet qu'à compter de la livraison du bien ou de la fourniture de la prestation. En cas de contrat de vente ou de prestation de services à exécution successive, elles prennent effet à compter du début de la livraison ou de la fourniture et cessent en cas d'interruption de celle-ci.

Les dispositions de l'article L. 311-51 du même code en leur version applicable au litige prévoient que le prêteur est responsable de plein droit à l'égard de l'emprunteur de la bonne exécution des obligations relatives à la formation du contrat de crédit, que ces obligations soient à exécuter par le prêteur qui a conclu ce contrat ou par des intermédiaires de crédit intervenant dans le processus de formation du contrat de crédit, sans préjudice de son droit de recours contre ceux-ci.

Il incombe donc au prêteur de vérifier que l'attestation de fin de travaux suffit à déterminer que la prestation promise a été entièrement achevée.

En revanche, il n'appartient pas au prêteur de s'assurer par lui-même de l'exécution des prestations et l'appelante fait valoir à juste titre que l'obligation de plein droit à l'égard de l'emprunteur mise à sa charge par l'article L. 311-51 du code de la consommation ne concerne que le contrat de crédit et ne saurait la rendre garante de l'exécution du contrat principal.

Il est rappelé que le contrat de crédit souscrit prévoit expressément que les fonds sont mis à disposition à la livraison du bien, par chèque ou virement au bénéficiaire mentionné dans l'attestation de fin de travaux.

M. [I] a signé le 28 mars 2014, une attestation de fin de travaux sans aucune réserve, mentionnant que les travaux étaient achevés et conformes au devis tout en demandant à la banque de procéder au déblocage des fonds.

C'est sur la base de cette attestation que les fonds ont été débloqués entre les mains du vendeur.

Le certificat de livraison permet d'identifier l'opération financée et d'attester de la livraison de l'installation photovoltaïque à la charge de la société venderesse, avec la précision que les travaux objets du financement ne couvrent pas le raccordement au réseau éventuel et les autorisations administratives éventuelles.

Le contrôle opéré par la banque ne saurait porter ni sur des autorisations administratives relevant d'organismes tiers, ni sur la réalisation du raccordement réalisé ultérieurement par ERDF, structure également tierce par rapport à l'ensemble contractuel.

Cette attestation est donc suffisante pour apporter la preuve de l'exécution du contrat principal sans qu'aucune faute ne soit établie à l'encontre de l'organisme financeur.

Il n'est pas non plus expliqué sur quel fondement la banque aurait dû s'informer de la faisabilité du projet.

En l'espèce, l'installation a été raccordée et mise en service le 20 janvier 2015 et un contrat de rachat d'énergie électrique a été signé par M. [I] avec EDF lui permettant, depuis le 20 janvier 2015 de produire de l'électricité, comme en attestent les factures produites.

Dès lors que les emprunteurs disposent d'une installation fonctionnelle qui ne suscite aucune critique de leur part, qui donc a été entièrement livrée et qui leur permet de revendre l'électricité, ils ont reçu l'exacte contrepartie du prix de vente qui correspond au capital emprunté et leur obligation de rembourser a pris effet. À cet égard, dans la mesure où les fonds ont été versés postérieurement à l'expiration du délai de rétractation afférent au contrat principal, les emprunteurs ne sont pas fondés à invoquer un préjudice correspondant à une proportion ou à la totalité du capital emprunté ni au remboursement des échéances du crédit.

De surcroît, les dispositions de l'article 3,1 des conditions générales du bon de commande précisent que « La livraison s'entend de la délivrance et de l'installation terminée des produits à l'adresse indiquée par le client sur le bon de commande. On entend par installation terminée, l'installation des produits et précisément pour les centrales photovoltaïques l'installation hors mise en service ».

Il n'est pas contestable que les autorisations administratives et le raccordement au réseau ne relèvent pas des obligations à la charge du vendeur comme cela ressort d'ailleurs des mandats donnés à la société GSF de s'occuper des démarches auprès de la mairie et de ERDF.

Les intimés ne peuvent pas plus invoquer les diligences entreprises à leurs frais pour faire raccorder l'installation, qui est sans lien de causalité avec le manquement relevé.

Les intimés invoquent également un préjudice du fait qu'ils n'ont pas été informés de la pose et des rendements exacts de l'installation ce qui leur a fait perdre une chance de renoncer au contrat. Ils ne justifient cependant ni d'une obligation légale, ni que ces mentions auraient pu les dissuader de contracter.

La demande indemnitaire subsidiaire de M. et Mme [I] au titre d'une perte d'une chance de ne pas contracter est également mal fondée en ce compris l'indemnisation d'un préjudice de jouissance qui n'est que la conséquence de leur volonté d'équiper le toit de leur maison de panneaux photovoltaïques et l'indemnisation d'un préjudice moral dont la réalité n'est pas avérée. De la même façon, ils ne sauraient réclamer à la banque le paiement des frais de dépose et de remise en état alors qu'elle n'est pas partie au contrat de vente.

Au final, les emprunteurs, qui produisent de nombreux courriers sans lien avec le litige, ne justifient d'aucun préjudice résultant des griefs allégués et imputés à la banque.

Compte tenu de ce que la responsabilité de la société Banque Solféa n'est pas retenue par la cour, le jugement doit être infirmé en toutes ses dispositions et M. et Mme [I] doivent donc être déboutés de leurs demandes indemnitaires et des demandes au titre de la remise en état de la toiture, d'un trouble de jouissance, d'un préjudice financier et d'un préjudice moral.

Sur les dépens et les frais irrépétibles

Les dispositions du jugement relatives aux dépens et frais irrépétibles sont infirmées.

M. et Mme [I] qui succombent doivent être condamnés in solidum aux dépens de première instance et d'appel et il apparaît équitable de leur faire supporter les frais irrépétibles de la société Banque Solfea à hauteur d'une somme de 2 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile

Le surplus des demandes est rejeté.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Statuant en dernier ressort, après débats en audience publique, par arrêt réputé contradictoire, mis à disposition au greffe,

Infirme le jugement en toutes ses dispositions sauf en ce qu'il a rejeté les fins de non-recevoir tirées du défaut de déclaration de créance au passif de la procédure collective du vendeur et du remboursement anticipé du contrat de crédit et en ce qu'il a rejeté les demandes indemnitaires des parties ;

Statuant à nouveau des chefs infirmés,

Déclare recevables les demandes de Mme [R] [L] épouse [I] et M. [G] [I]'à l'encontre de la société Nouvelle Régie des jonctions des énergies de France représentée par son liquidateur ;

Dit que Mme [R] [L] épouse [I] et M. [G] [I] ne sont plus recevables à contester le contrat de crédit ;

Déboute Mme [R] [L] épouse [I] et M. [G] [I] de leurs demandes de nullité des contrats de vente et de crédit affecté ;

Rappelle que Mme [R] [L] épouse [I] et M. [G] [I] sont redevables de plein droit du remboursement des sommes perçues en exécution du jugement qui est infirmé ;

Rejette le surplus des demandes ;

Y ajoutant,

Condamne in solidum Mme [R] [L] épouse [I] et M. [G] [I] aux dépens de première instance et d'appel, ces derniers pouvant être recouvrés directement par la Selas Cloix & Mendès-Gil, avocats conformément à l'article 699 du code de procédure civile ;

Condamne in solidum Mme [R] [L] épouse [I] et M. [G] [I] à payer à la société Solfinea anciennement dénommée Banque Solfea la somme de 2 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

La greffière La présidente


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 4 - chambre 9 - a
Numéro d'arrêt : 20/08423
Date de la décision : 25/05/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-05-25;20.08423 ?
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