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23/05/2023 | FRANCE | N°21/20340

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 3 - chambre 5, 23 mai 2023, 21/20340


Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS







COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 3 - Chambre 5



ARRET DU 23 MAI 2023



(n° , 4 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/20340 - N° Portalis 35L7-V-B7F-CEWTI



Décision déférée à la Cour : Jugement du 22 octobre 2021 rendu par le tribunal judiciaire de PARIS - RG n° 19/01853





APPELANT



Monsieur [K] [M] né le 28 octobre 1975 à [Localité

2] (Algérie),



[Adresse 6]

[Adresse 6] (ALGERIE)



représenté par Me Belgin PELIT-JUMEL de la SELEURL BELGIN PELIT-JUMEL AVOCAT, avocat postulant du barreau de PARIS, toque : ...

Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 3 - Chambre 5

ARRET DU 23 MAI 2023

(n° , 4 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/20340 - N° Portalis 35L7-V-B7F-CEWTI

Décision déférée à la Cour : Jugement du 22 octobre 2021 rendu par le tribunal judiciaire de PARIS - RG n° 19/01853

APPELANT

Monsieur [K] [M] né le 28 octobre 1975 à [Localité 2] (Algérie),

[Adresse 6]

[Adresse 6] (ALGERIE)

représenté par Me Belgin PELIT-JUMEL de la SELEURL BELGIN PELIT-JUMEL AVOCAT, avocat postulant du barreau de PARIS, toque : D1119

assisté de Me Mohamed AZOUAGH, avocat plaidant du barreau de CHAMBERY

INTIME

LE MINISTÈRE PUBLIC pris en la personne de MONSIEUR LE PROCUREUR GÉNÉRAL près la cour d'appel de Paris - Service nationalité

[Adresse 1]

[Adresse 1]

représenté à l'audience par Madame Brigitte RAYNAUD, substitut général

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 24 mars 2023, en audience publique, l' avocat de l'appelant et le ministère public ne s'y étant pas opposés, devant M. François MELIN, conseiller, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Mme Hélène FILLIOL, présidente de chambre

M. François MELIN, conseiller,

Mme Marie-Catherine GAFFINEL, conseillère

Greffier, lors des débats : Mme Christelle MARIE-LUCE

ARRET :

- contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Mme Hélène FILLIOL, présidente de chambre et par Mme Mélanie PATE, greffière présente lors de la mise à disposition.

Vu le jugement rendu le 22 octobre 2021 par le tribunal judiciaire de Paris qui a constaté le respect des formalités de l'article 1043 du code de procédure civile, débouté M. [K] [M] de l'ensemble de ses demandes, jugé que M. [K] [M], né le 28 octobre 1975 à [Localité 2] (Algérie), n'est pas français, ordonné la mention prévue par l'article 28 du code civil et l'a condamné aux dépens ;

Vu la déclaration d'appel de M. [K] [M] en date du 23 novembre 2021 ;

Vu les dernières conclusions notifiées le 22 novembre 2022 par M. [K] [M] qui demande à la cour, à titre principal, d'infirmer le jugement, statuer à nouveau, juger que M. [K] [M], né le 28 octobre 1975 à [Localité 2] (Algérie), est de nationalité française, ordonner la mention prévue par l'article 28 du code civil, statuer ce que le droit sur les dépens, à titre subsidiaire, infirmer le jugement, avant dire droit, ordonner une expertise biologique (un examen comparé de sang ou un test ADN) entre M. [K] [M], né le 28 octobre 1975 à [Localité 2] (Algérie) et sa mère Mme [W] [M], née le 10 mai 1957 à [Localité 5] (Algérie) ainsi qu'une expertise biologique entre cette dernière et sa mère Mme [Y] [H], née le 6 octobre 1938 à [Localité 3], surseoir à statuer dans l'attente du dépôt du rapport, en tout état de cause, débouter le procureur de toutes ses demandes, fins et conclusions et statuer ce que le droit sur les dépens ;

Vu les dernières conclusions notifiées le 23 novembre 2022 par le ministère public qui demande à la cour, à titre principal, de confirmer le jugement de première instance en ce qu'il a jugé que M. [K] [M], se disant né le 28 octobre 1975 à [Localité 2] (Algérie), n'est pas de nationalité française, à titre subsidiaire, juger que M. [K] [M] est réputé avoir perdu la nationalité française le 4 juillet 2012, en tout état de cause, le débouter de l'ensemble de ses demandes, ordonner la mention prévue par l'article 28 du code civil et condamner M. [K] [M] aux entiers dépens ;

Vu l'ordonnance de clôture rendue le 26 janvier 2023 ;

MOTIFS :

Il est justifié de l'accomplissement de la formalité prévue par l'article 1043 du code de procédure civile dans sa version applicable à la présente procédure, par la production du récépissé délivré le 17 décembre 2021 par le ministère de la Justice.

En application de l'article 30 alinéa 1er du code civil, il appartient à celui qui revendique la nationalité française d'en rapporter la preuve, lorsqu'il n'est pas titulaire d'un certificat de nationalité française délivré à son nom, conformément aux dispositions des articles 31 et suivants du code civil. N'étant pas personnellement titulaire d'un certificat de nationalité française, il appartient à M. [K] [M] en application de l'article 30 du code civil de rapporter la preuve qu'il réunit les conditions requises par la loi pour l'établissement de sa nationalité française.

M. [K] [M], se prévalant des dispositions de l'article 18 du code civil, soutient qu'il est français par filiation maternelle pour être né le 28 octobre 1975 à [Localité 2] (Algérie), de [W] [M], née le 10 mai 1957 à [Localité 5] (Algérie), elle-même française pour être la fille de [Y] [H], née le 6 octobre 1938 à [Localité 3] (France), de nationalité française et pour avoir conservé la nationalité française à l'indépendance de l'Algérie, relevant du statut civil de droit commun.

Le ministère public lui oppose en appel les dispositions de l'article 30-3 du code civil, à titre subsidiaire. Toutefois, dès lors que l'article 30-3 empêche de rapporter la preuve de la transmission de la nationalité française par filiation, la désuétude invoquée doit être examinée en premier lieu.

L'article 30-3 du code civil dispose que :

« Lorsqu'un individu réside ou a résidé habituellement à l'étranger, où les ascendants dont il tient par filiation la nationalité sont demeurés fixés pendant plus d'un demi-siècle, cet individu ne sera plus admis à faire la preuve qu'il a, par filiation, la nationalité française si lui-même et celui de ses père et mère qui a été susceptible de la lui transmettre n'ont pas eu la possession d'état de Français.

Le tribunal doit dans ce cas constater la perte de la nationalité française dans les termes de l'article 23-6 du code civil en déterminant la date à laquelle la nationalité française a été perdue. »

La présomption irréfragable de perte de la nationalité française par désuétude édictée par l'article 30-3 du code civil suppose que les conditions prévues par le texte précité soient réunies de manière cumulative.

L'application de l'article 30-3 du code civil est en conséquence, subordonnée à la réunion des conditions suivantes : l'absence de résidence en France pendant plus de 50 ans du parent français, l'absence de possession d'état de l'intéressé et de son parent, le demandeur devant en outre résider ou avoir résidé habituellement à l'étranger.

L'article 30-3 du code civil interdit, dès lors que les conditions qu'il pose sont réunies, de rapporter la preuve de la transmission de la nationalité française par filiation, en rendant irréfragable la présomption de perte de celle-ci par désuétude. Édictant une règle de preuve, l'obstacle qu'il met à l'administration de celle-ci ne constitue pas une fin de non-recevoir au sens de l'article 122 du code de procédure civile, de sorte qu'aucune régularisation sur le fondement de l'article 126 du même code ne peut intervenir (Civ 1ère, 13 juin 2019, pourvoi n°18-16.838).

Lorsque l'ascendant direct de l'intéressé est né avant le 3 juillet 1962, la condition d'absence de résidence en France pendant plus d'un demi-siècle ne doit être appréciée que dans la personne de l'ascendant direct de l'intéressé.

En l'espèce, la mère de M. [K] [M] est née le 10 mai 1957 et il n'est pas prétendu qu'elle a résidé en France entre le 3 juillet 1962 et le 4 juillet 2012. La condition de résidence à l'étranger pendant plus d'un demi-siècle étant déjà remplie en sa personne, il n'y a pas lieu de prendre en compte la résidence de la grand-mère maternelle de l'intéressé.

Par ailleurs, il n'est pas allégué que M. [K] [M] réside ou a résidé habituellement en France.

En outre, M. [K] [M] ne présente pour lui aucun élément de possession d'état de Français. En effet, les démarches qu'il invoque en vue d'obtenir la délivrance d'un certificat de nationalité française, lesquelles ont donné lieu à une décision de refus du greffier en chef de [Localité 4] du 6 avril 2008 confirmée par le ministère de la Justice par courrier du 3 janvier 2008, ne constituent pas des éléments de possession d'état de français (pièces n°3 et 4 de l'appelant).

S'agissant de sa mère, le seul certificat de nationalité française délivré à cette dernière le 2 février 2012 n'est pas suffisant pour établir la possession d'état de Français de Mme [W] [M]. En outre, les démarches de celle-ci auprès du service central d'état civil et du consulat général de France à Annaba effectuées en 2004 et 2008 pour obtenir un acte d'état civil et une carte nationale d'identité ou un passeport algérien ne caractérisent pas des éléments de possession d'état de français (pièces n°21 de l'appelant).

Dès lors que l'intimé ne justifie, ni pour lui ni pour sa mère, d'une possession d'état de Français pendant le délai d'un demi-siècle, et est demeuré, comme elle, à l'étranger, il n'est pas admis à faire la preuve qu'il a, par filiation, la nationalité française et il est présumé avoir perdu cette nationalité le 4 juillet 2012.

Le jugement est infirmé.

Succombant à l'instance, M. [K] [M] est condamné aux dépens

PAR CES MOTIFS,

Constate que les formalités prévues par l'article 1043 du code de procédure civile ont été respectées,

Infirme le jugement,

Statuant à nouveau,

Dit que M. [K] [M], se disant né le 28 octobre 1975 à [Localité 2] (Algérie), n'est pas admis à faire la preuve de ce qu'il a, par filiation, la nationalité française,

Dit que M. [K] [M], se disant né le 28 octobre 1975 à [Localité 2] (Algérie), est présumé avoir perdu la nationalité française le 4 juillet 2012,

Ordonne la mention prévue par l'article 28 du code civil,

Condamne M. [K] [M] aux dépens.

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 3 - chambre 5
Numéro d'arrêt : 21/20340
Date de la décision : 23/05/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-05-23;21.20340 ?
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