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09/05/2023 | FRANCE | N°21/19765

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 3 - chambre 5, 09 mai 2023, 21/19765


Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS







COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 3 - Chambre 5



ARRET DU 09 MAI 2023



(n° , 4 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/19765 - N° Portalis 35L7-V-B7F-CEVEL



Décision déférée à la Cour : Jugement du 15 octobre 2021 rendu par le tribunal judiciaire de PARIS - RG n° 19/07390





APPELANT



Monsieur [M] [D] né le 12 avril 1985 à [Localité 4

] (Togo)



CCAS de [Localité 3],

[Adresse 5]

[Adresse 5]

[Localité 3].



représenté par Me Dominique DOSSOU-GBETE-KINDE, avocat au barreau de l'ESSONNE





INTIME



LE MI...

Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 3 - Chambre 5

ARRET DU 09 MAI 2023

(n° , 4 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/19765 - N° Portalis 35L7-V-B7F-CEVEL

Décision déférée à la Cour : Jugement du 15 octobre 2021 rendu par le tribunal judiciaire de PARIS - RG n° 19/07390

APPELANT

Monsieur [M] [D] né le 12 avril 1985 à [Localité 4] (Togo)

CCAS de [Localité 3],

[Adresse 5]

[Adresse 5]

[Localité 3].

représenté par Me Dominique DOSSOU-GBETE-KINDE, avocat au barreau de l'ESSONNE

INTIME

LE MINISTERE PUBLIC pris en la personne de MONSIEUR LE PROCUREUR GENERAL - SERVICE NATIONALITE

[Adresse 1]

[Localité 2]

représenté à l'audience par Mme Anne BOUCHET-GENTON, suibstitut général

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 10 mars 2023, en audience publique, l'avocat de l'appelant et le ministère public ne s'y étant pas opposés, devant M. François MELIN, conseiller, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Mme Hélène FILLIOL, présidente de chambre

M. François MELIN, conseiller

Mme Marie-Catherine GAFFINEL, conseillère

Greffier, lors des débats : Mme Mélanie PATE

ARRET :

- contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Mme Hélène FILLIOL, présidente de chambre et par Mme Mélanie PATE, greffière, présente lors de la mise à disposition.

Vu le jugement rendu le 15 octobre 2021 par le tribunal judiciaire de Paris qui a dit la procédure régulière au regard de l'article 1043 du code de procédure civile, jugé que le certificat de nationalité française délivré le 21 février 2005 par le greffier en chef du tribunal d'instance de Melun, à M. [M] [D], né le 12 avril 1985 à [Localité 4] (Togo) sous le numéro 158/2005, l'a été à tort, jugé que celui-ci n'est pas de nationalité française, ordonné la mention prévue à l'article 28 du code civil en marge des actes concernés, et condamné M. [M] [D] aux dépens dans les conditions propres à l'aide juridictionnelle ;

Vu la déclaration d'appel du 16 novembre 2021 de M. [M] [D] ;

Vu les dernières conclusions notifiées le 11 janvier 2023 par M. [M] [D] qui demande à la cour d'infirmer le jugement, statuant à nouveau, juger qu'il bénéficie d'un état civil certain, juger que sa filiation à l'égard de [L] [D] est légalement établie et incontestable, à titre subsidiaire, juger que son père [L] [D] et lui-même ont joui d'une façon constante de la possession d'état de Français, en conséquence, dire qu'il est français par filiation, à titre très subsidiaire, juger que sa nationalité française doit être tenue pour établie, juger à tout le moins qu'il est fondé à réclamer la nationalité française, et dire que les dépens seront mis à la charge du ministère public ;

Vu les dernières conclusions notifiées le 31 janvier 2023 par le ministère public qui demande à la cour de confirmer le jugement de première instance en tout son dispositif, juger que M. [M] [D], se disant né le 12 avril 1985 à [Localité 4] (Togo), n'est pas Français, rejeter le surplus des demandes, ordonner la mention prévue par l'article 28 du code civil, et condamner M. [M] [D] aux entiers dépens ;

Vu l'ordonnance de clôture rendue le 9 février 2023 ;

MOTIFS

Il est justifié de l'accomplissement de la formalité prévue par l'article 1043 du code de procédure civile dans sa version applicable à la présente procédure, par la production du récépissé délivré le 22 juin 2022 par le ministère de la Justice.

Invoquant l'article 18 du code civil, M. [M] [D] soutient qu'il est français par filiation paternelle pour être né le 12 avril 1985 à [Localité 4] (Togo), de M. [L] [D], né le 17 juillet 1949 à [Localité 6] (Togo), celui-ci ayant acquis la nationalité française par une déclaration de nationalité française souscrite le 5 juin 1974 et enregistrée le 24 octobre 1974.

M. [M] [D] s'est vu délivrer un certificat de nationalité française le 21 février 2005 par le tribunal d'instance de Melun.

Le ministère public qui soutient que ce certificat de nationalité française a été délivré à tort à l'intéressé doit en apporter la preuve en application de l'article 30 du code civil.

La force probante d'un certificat de nationalité française dépend des documents qui ont servi à l'établir et si le ministère public prouve que ce certificat a été délivré à tort à l'intéressé/l'intéressée ou sur la base d'actes erronés, ce certificat perd toute force probante.

Il est constant que M. [M] [D] a produit, lors de sa demande de délivrance du certificat, un acte de naissance n° 691/CA, feuillet n° 89 du registre 7, dressé le 15 avril 1985 par le préfet des lacs (Togo), indiquant notamment qu'il est né le 12 avril 1985 à [Localité 4].

Or, comme le soutient le ministère public, seul le maire de la commune d'[Localité 4] était compétent pour dresser l'acte, en application de l'article 2 du décret n° 62-89 du 2 juillet 1962 portant organisation de l'état civil au Togo, dans sa rédaction issue du décret n° 65-159 du 13 octobre 1965, qui dispose que les déclarations relatives à l'état civil « sont reçues dans les communes par les maires et leurs adjoints ».

Par ailleurs, le ministère public fait également valoir à juste titre que l'acte n'est pas probant au sens de l'article 47 du code civil, qui énonce que « Tout acte de l'état civil des Français et des étrangers fait en pays étranger et rédigé dans les formes usitées dans ce pays fait foi, sauf si d'autres actes ou pièces détenus, des données extérieures ou des éléments tirés de l'acte lui-même établissent, le cas échéant après toutes vérifications utiles, que cet acte est irrégulier, falsifié ou que les faits qui y sont déclarés ne correspondent pas à la réalité. Celle-ci est appréciée au regard de la loi française ».

En effet, alors que l'acte de naissance porte le numéro 691/CA et a été dressé le 15 avril 1985, il apparaît que le même centre d'état civil a dressé, concernant d'autres personnes, à cette même date un acte numéro 225/CA puis un acte numéro 297/CA le 20 mai 1985. Or, M. [M] [D] n'explique pas de manière convaincante comment son acte peut porter le numéro 691 alors qu'un acte de naissance du même jour a le numéro 225 et qu'un acte dressé plus d'un mois plus tard a le numéro 297, alors que selon l'article 5 du décret du 2 juillet 1962, les actes « portent un numéro constatant l'ordre de leur inscription ».

En conséquence, le ministère public établit que le certificat de nationalité française a été délivré à tort à M. [M] [D].

Il appartient donc à ce dernier d'établir qu'il dispose néanmoins d'un état civil fiable et probant au sens de l'article 47 du code civil.

A ce sujet, M. [M] [D] produit les pièces suivantes :

- Un jugement du tribunal de première instance de deuxième classe d'Aného du 15 octobre 2019 rendu au visa du jugement de rétractation du 11 octobre 2019 qui rétracte le jugement du 23 décembre 2011 annulant l'acte de naissance n° 691/CA du 15 avril 1985. Ce jugement du 15 octobre 2019 dit que le jugement du 23 décembre 2011 est retiré de l'ordonnancement juridique, annule à nouveau l'acte de naissance n° 691/CA du 15 avril 1985, constate que M. [M] [D] a la possession d'état de son identité actuelle et confirme qu'il est né le 12 avril 19685 à [Localité 4] ;

- Un jugement tenant lieu d'acte de naissance du tribunal de première instance de deuxième classe d'Aného du 22 octobre 2019 qui énonce notamment que M. [M] [D] est né à [Localité 4] le 12 avril 1985. Ce jugement précise que la requête a été déposée après annulation de la déclaration de naissance précédente ;

- Un acte de naissance n° 108/CA, dressé le 28 octobre 2019, qui fait mention jugement du 22 octobre 2019 et qui indique, notamment, que M. [M] [D] est né le 12 avril 1985 à [Localité 4].

Le ministère public produit quant à lui :

- Un jugement du tribunal de première instance de deuxième classe d'Aného du 23 décembre 2011 qui a annulé l'acte de naissance n° 691/CA du 15 avril 1985 ;

- Un jugement du tribunal de première instance de deuxième classe d'Aného du 30 décembre 2011, qui se réfère au jugement du 23 décembre 2011 et qui déclare que M. [M] [D] est né le 12 avril 1985 à [Localité 4] ;

- L'acte de naissance n° 3/CA du 14 février 2012 dressé en exécution du jugement de ce même tribunal du 30 décembre 2011.

Or, il résulte d'une vérification in situ effectuée par le consulat de France à [Localité 6] que ces jugements des 23 et 30 décembre 2011 sont inexistants dans les registres du tribunal d'Aného.

Ainsi que l'a retenu le tribunal judiciaire de Paris par des motifs exacts et pertinents que la cour adopte, les jugements des 15 et 22 octobre 2019 ont donc été obtenus afin de régulariser une situation frauduleuse. Ils heurtent l'ordre public international français. En application de l'article 28, d), de la convention judiciaire franco-togolaise du 23 mars 1976, un jugement rendu au Togo ne peut bénéficier de l'autorité de chose jugée en France s'il est contraire à cet ordre public.

En conséquence, les jugements des 15 et 22 octobre 2019 ne sont pas réguliers, de sorte que l'acte de naissance dressé le 28 octobre 2019, qui mentionne le jugement du 22 octobre 2019, n'a pas lui-même de force probante.

Le jugement du tribunal judiciaire de Paris est dès lors confirmé.

M. [M] [D], qui succombe, est condamné aux dépens.

PAR CES MOTIFS

Constate que le récépissé prévu par l'article 1043 du code de procédure civile a été délivré ;

Confirme le jugement ;

Ordonne la mention prévue par l'article 28 du code civil ;

Condamne M. [M] [D] aux dépens.

LA GREFFIERE LA PRESIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 3 - chambre 5
Numéro d'arrêt : 21/19765
Date de la décision : 09/05/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-05-09;21.19765 ?
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