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09/05/2023 | FRANCE | N°21/17856

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 3 - chambre 5, 09 mai 2023, 21/17856


Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS







COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 3 - Chambre 5



ARRET DU 09 MAI 2023



(n° , 5 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/17856 - N° Portalis 35L7-V-B7F-CEPBS



Décision déférée à la Cour : Jugement du 27 mai 2021 rendu par le tribunal judiciaire de Paris - RG n° 18/05790



APPELANTE (intervenante volontaire)



Madame [B] [U] née le 23 mars 2002,

à [Localité 8] (Algérie), devenue majeure en cours de procédure



[Adresse 2]

[Localité 6] - ALGÉRIE



élisant domicile au cabinet de son conseil :

Me HACENE

CARLARA IN...

Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 3 - Chambre 5

ARRET DU 09 MAI 2023

(n° , 5 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/17856 - N° Portalis 35L7-V-B7F-CEPBS

Décision déférée à la Cour : Jugement du 27 mai 2021 rendu par le tribunal judiciaire de Paris - RG n° 18/05790

APPELANTE (intervenante volontaire)

Madame [B] [U] née le 23 mars 2002, à [Localité 8] (Algérie), devenue majeure en cours de procédure

[Adresse 2]

[Localité 6] - ALGÉRIE

élisant domicile au cabinet de son conseil :

Me HACENE

CARLARA INTERNATIONAL

Selarl Carbonnier Lamaze Rasle & Associ2s

[Adresse 3]

[Localité 5]

représentée par Me Nadir HACENE, avocat au barreau de PARIS, toque : P0298

INTIME

LE MINISTERE PUBLIC pris en la personne de MONSIEUR LE PROCUREUR GENERAL - SERVICE NATIONALITE

[Adresse 1]

[Localité 4]

représenté à l'audience par Mme Anne BOUCHET-GENTON, suibstitut général

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 10 mars 2023, en audience publique, l'avocat de l'appelante et le ministère public ne s'y étant pas opposés, devant M. François MELIN, conseiller, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Mme Hélène FILLIOL, présidente de chambre

M. François MELIN, conseiller

Mme Marie-Catherine GAFFINEL, conseillère

Greffier, lors des débats : Mme Mélanie PATE

ARRET :

- contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Mme Hélène FILLIOL, présidente de chambre et par Mme Mélanie PATE, greffière, présente lors de la mise à disposition.

Vu le jugement rendu le 27 mai 2021 par le tribunal judiciaire de Paris qui a constaté que les formalités de l'article 1043 du code de procédure civile ont été respectées, déclaré Mme [S] [K], née le 9 septembre 1974 à [Localité 8] (Algérie), recevable à faire la preuve qu'elle a, par filiation, la nationalité française, jugé que Mme [S] [K], née le 9 septembre 1974 à [Localité 8] (Algérie), n'est pas de nationalité française, déclaré Mlle [B] [U], née le 23 mars 2002, à [Localité 8] (Algérie), et [V] [U], né le 5 novembre 2005 à [Localité 8] (Algérie), irrecevables à faire la preuve qu'ils ont, par filiation, la nationalité française, jugé que Mlle [B] [U], née le 23 mars 2002, à [Localité 8] (Algérie), et [V] [U], né le 5 novembre 2005 à [Localité 8] (Algérie), sont réputés avoir perdu la nationalité française le 4 juillet 2012, jugé que Mlle [Y] [U], née le 16 juin 2017 à [Localité 8], [Localité 7] (Algérie), n'est pas de nationalité française, ordonné la mention prévue par l'article 28 du code civil, débouté Mlle [B] [U] et Mme [S] [K], cette dernière agissant en son nom personnel et conjointement avec M. [A] [U] au nom de leurs enfants mineurs, [V] [U] et [Y] [U], de leurs demandes de distraction au profit de Me Nadir HACENE, avocat, condamné Mlle [B] [U] et Mme [S] [K], cette dernière agissant en son nom personnel et conjointement avec M. [A] [U] au nom de leurs enfants mineurs, [V] [U] et [Y] [U], in solidum, aux dépens ;

Vu la déclaration d'appel du 12 octobre 2021 de Mme [B] [U], devenue majeure ;

Vu les dernières conclusions notifiées le 17 janvier 2023 par Mme [B] [U] qui demande à la cour de déclarer l'assignation recevable et rejeter la demande adverse de caducité, infirmer le jugement de première instance et déclarer recevable l'action, dire que Mme [B] [U] est de nationalité française, et condamner le Trésor public aux dépens;

Vu les dernières conclusions notifiées le 30 novembre 2022 par le ministère public qui demande à la cour à titre principal de constater la caducité de l'appel, à titre subsidiaire d'écarter des débats les pièces adverses sur le fondement de l'article 16 du code de procédure civile et de confirmer le jugement de première instance en ce qu'il juge que Mme [S] [K] n'est pas française et juger en conséquence que Mme [B] [U] n'est pas française, à titre infiniment subsidiaire dire que Mme [B] [U] n'est pas admise à faire preuve de sa nationalité française par filiation et juger que Mme [B] [U] est réputée avoir perdu la nationalité française le 4 juillet 2012, ordonner la mention prévue par l'article 28 du code civil et condamner Mme [B] [U] aux entiers dépens ;

Vu l'ordonnance de clôture rendue le 7 février 2023 ;

MOTIFS

Sur l'article 1043 du code de procédure civile

Il est justifié de l'accomplissement de la formalité prévue par l'article 1043 du code de procédure civile dans sa version applicable à la présente procédure, par la production du récépissé délivré le 24 janvier 2023 par le ministère de la Justice.

La déclaration d'appel n'est donc pas caduque.

Sur la recevabilité des pièces de Mme [B] [U]

Le ministère public indique que Mme [B] [U] ne lui a pas communiqué ses pièces, qui doivent donc être écartées des débats en application de l'article 16 du code de procédure civile.

Toutefois, il résulte des éléments du dossier que Mme [B] [U] a communiqué ses pièces au ministère public le 30 juin 2022 (pièces n° 1 à 53) puis le 17 janvier 2023 (n° 54 à 59).

Les pièces de Mme [B] [U] sont donc recevables.

Sur le fond

Invoquant l'article 18 du code civil, Mme [B] [U] soutient qu'elle est française par filiation maternelle pour être née le 23 mars 2002, à [Localité 8] (Algérie), de Mme [S] [K], née le 9 septembre 1974 à [Localité 8] (Algérie), celle-ci étant une descendante de Mme [X] [C] née le 22 juin 1898 à [Localité 10] (Algérie), qui était de nationalité française de statut civil de droit commun.

N'étant pas personnellement titulaire d'un certificat de nationalité française, il lui appartient en application de l'article 30 du code civil de rapporter la preuve qu'elle réunit les conditions requises par la loi pour l'établissement de sa nationalité française et notamment d'établir que sa mère revendiquée est française puisqu'elle revendique cette nationalité par filiation maternelle.

Si le ministère public lui oppose les dispositions de l'article 30-3 du code civil à titre subsidiaire, celles-ci doivent être examinées en premier lieu dès lors que l'article 30-3 empêche de rapporter la preuve de la transmission de la nationalité française par filiation.

L'article 30-3 du code civil dispose que :

« Lorsqu'un individu réside ou a résidé habituellement à l'étranger, où les ascendants dont il tient par filiation la nationalité sont demeurés fixés pendant plus d'un demi-siècle, cet individu ne sera plus admis à faire la preuve qu'il a, par filiation, la nationalité française si lui-même et celui de ses père et mère qui a été susceptible de la lui transmettre n'ont pas eu la possession d'état de Français.

Le tribunal doit dans ce cas constater la perte de la nationalité française dans les termes de l'article 23-6 du code civil en déterminant la date à laquelle la nationalité française a été perdue. »

La présomption irréfragable de perte de la nationalité française par désuétude édictée par l'article 30-3 du code civil suppose que les conditions prévues par le texte précité soient réunies de manière cumulative.

L'application de l'article 30-3 du code civil est en conséquence, subordonnée à la réunion des conditions suivantes : l'absence de résidence en France pendant plus de 50 ans du parent français ou des ascendants, l'absence de possession d'état de l'intéressé et de son parent, le demandeur devant en outre résider ou avoir résidé habituellement à l'étranger.

L'article 30-3 du code civil interdit, dès lors que les conditions qu'il pose sont réunies, de rapporter la preuve de la transmission de la nationalité française par filiation, en rendant irréfragable la présomption de perte de celle-ci par désuétude. Édictant une règle de preuve, l'obstacle qu'il met à l'administration de celle-ci ne constitue pas une fin de non-recevoir au sens de l'article 122 du code de procédure civile, de sorte qu'aucune régularisation sur le fondement de l'article 126 du même code ne peut intervenir (Civ 1ère, 13 juin 2019, pourvoi n°18-16.838).

Mme [B] [U] soutient que l'article 30-3 du code civil n'est pas applicable aux personnes originaires d'Algérie et qu'en tout état de cause sa mère, Mme [S] [K], étant née le 9 septembre 1974, la condition d'une absence de résidence en France pendant plus de cinquante ans n'est pas remplie, de sorte que l'article 30-3 ne peut pas lui être opposé.

Toutefois, en premier lieu, l'article 30-3 du code civil est applicable, y compris aux personnes originaires d'Algérie.

En second lieu, concernant les conditions prévues par cet article, il n'est pas soutenu que Mme [S] [K] et que son père, M. [V] [K], né le 28 octobre 1946 à [Localité 9] (Algérie), ont eu une résidence en France au cours du délai de cinquante ans prévu par l'article 30-3. Il n'est pas non plus allégué que Mme [B] [U], qui est née en Algérie et y résidait à la date de ses dernières conclusions, a déjà eu une résidence en France. Enfin, Mme [B] [U] ne fournit aucun élément dont il résulterait qu'elle et sa mère disposeraient de la possession d'état de Française.

Les conditions de l'article 30-3 sont donc remplies, ainsi que l'ont constaté à juste titre les premiers juges.

Le jugement sera cependant infirmé en ce qu'il a déclaré Mme [B] [U] irrecevable à faire la preuve, qu'elle a par filiation, la nationalité française, l'article 30-3 du code civil n'édictant pas une fin de non-recevoir.

Il y a lieu de juger que Mme [B] [U] n'est pas admise à faire la preuve qu'elle a, par filiation, la nationalité française, qu'elle est réputée l'avoir perdue à la date du 4 juillet 2012 et de constater son extranéité.

Les dépens seront supportés par Mme [B] [U] qui succombe en ses prétentions. L'équité ne commande pas de faire droit à sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Constate que le récépissé prévu par l'article 1043 du code de procédure civile a été délivré,

Juge recevables les pièces communiquées par Mme [B] [U],

Confirme le jugement en ce qu'il a constaté que les conditions de l'article 30-3 du code civil sont remplies à l'égard de Mme [B] [U],

L'infirme pour le surplus,

Statuant à nouveau :

Dit que Mme [B] [U], née le 22 mars 2022 à [Localité 8] (Algérie), n'est pas admise à faire la preuve qu'elle a, par filiation, la nationalité française,

Dit que Mme [B] [U] est réputée avoir perdu la nationalité française le 4 juillet 2012,

Ordonne la mention prévue par l'article 28 du code civil,

Condamne Mme [B] [U] aux dépens.

LA GREFFIERE LA PRESIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 3 - chambre 5
Numéro d'arrêt : 21/17856
Date de la décision : 09/05/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-05-09;21.17856 ?
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